19 janvier 2017
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/13161

Pôle 5 - Chambre 9

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 19 JANVIER 2017



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/13161



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS en date du 21 Janvier 2014 - RG n° 13/02794





APPELANTS



1) Monsieur [M] [X]

né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 1] (13)

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



2) Madame [O] [X]

née le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 3] (24)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



3) Monsieur [K] [X]

né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 4] (60)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



4) Monsieur [N] [X]

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 3] (24)

demeurant chez Madame [H] [Y] - [Adresse 2]

[Adresse 3]



Représenté par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



5) GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DU CHÂTEAU GARREAU

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



6) SCEA DU CHÂTEAU GARREAU

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



INTIMÉS



1) Monsieur [W] [R]

né le [Date naissance 5] 1951 à [Localité 5]

de nationalité française

demeurant [Adresse 4]

[Localité 6]



Représenté par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

ayant pour avocat plaidant Me Jacques LE LEDAN DETHIEUX, cabinet groupe THEMIS-MONCEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : G744



2) Monsieur [P] [V], ès-qualités de curateur de [N] [X]

demeurant [Adresse 5]

[Localité 7]



N'ayant pas constitué avocat



3) SARL OCCAD

immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° B 447 567 140

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

ayant pour avocat plaidant Me Jacques LE LEDAN DETHIEUX, cabinet groupe THEMIS-MONCEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : G744



4) SARL CHÂTEAU DE CACHOU

immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° B 514 491 794

ayant son siège social[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

ayant pour avocat plaidant Me Jacques LE LEDAN DETHIEUX, cabinet groupe THEMIS-MONCEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : G744



COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 24 Novembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Madame Christine ROSSI, Conseillère

qui en ont délibéré



Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.



Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT



Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.









ARRÊT :



- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Mme Pauline ROBERT, greffier présent lors du prononcé.




*



Le Groupement Foncier Agricole du Château Garreau (ci-après dénommé "le Gfa du Château Garreau") a été constitué suivant statuts du 20 juillet 1995 entre monsieur [N] [X] (220 parts), son père monsieur [M] [X] et sa mère, madame [O] [X] (1980 parts) pour administrer une propriété viticole située à [Localité 8] dont l'exploitation a été confiée à la société civile d'exploitation agricole du Château Garreau (ci-après dénommée "la Scea du Château Garreau") aux termes d'un bail agricole à long terme.



Le capital de la Scea du Château Garreau était réparti entre monsieur [N] [X] (2065 parts), monsieur [M] [X] (1 part), madame [O] [X] (1 part) et une société familiale "Le Bourguignon" (1677 parts), dont alternativement monsieur [M] [X] et monsieur [N] [X] ont été gérants.



Aux termes d'une promesse de vente de parts sociales du 12 novembre 2002, monsieur [N] [X] s'est engagé à vendre les 2065 parts qu'il détenait dans la société Scea du Château Garreau à monsieur [W] [R] lequel a levé l'option mais s'est heurté à un refus du promettant.



Suivant transaction conclue le 28 février 2003 entre monsieur [N] [X] et monsieur [W] [R] complétée par avenants des 22 juillet et 1er août 2003, monsieur [N] [X] s'est engagé à restituer à monsieur [W] [R] le montant de l'indemnité d'immobilisation que celui-ci avait versé, à hauteur de 609.800 euros et à lui verser 130.000 euros de dommages et intérêts, soit la somme totale de 739.800 euros outre les intérêts au taux contractuel. Le remboursement des sommes dues devait intervenir au plus tard le 28 février 2004. A cette date, monsieur [N] [X] n'avait pas honoré sa dette.



Le 30 juin 2004, un protocole d'accord a été régularisé entre monsieur [W] [R], et messieurs [N] et [M] [X].



Ce protocole a, d'une part, constaté que monsieur [N] [X] restait débiteur de la somme de 739.800 euros en principal outre les intérêts et a, d'autre part, convenu que messieurs [N] et [M] [X] s'obligeaient à titre de garantie de paiement, à céder à monsieur [W] [R], qui a accepté, la totalité des parts composant le capital social du Gfa du Château Garreau (le prix de cession étant égal au montant de la dette résiduelle de monsieur [N] [X]) en se portant fort de l'agrément de monsieur [W] [R] par l'ensemble des associés du Gfa du Château Garreau.



L'accord prévoyait que la promesse pouvait être exercée par monsieur [W] [R], à défaut de remboursement de la totalité des sommes dues en capital et intérêts au 30 novembre 2004 et ce, tant qu'il ne serait pas intégralement remboursé et qu'en outre, en cas d'acquisition des parts du Gfa du Château Garreau par monsieur [W] [R], le bail agricole de la Scea du Château Garreau serait résilié sans indemnité ou que la totalité des parts de la Scea du Château Garreau serait transférée à monsieur [W] [R] au prix de un euro.







Par avenant du 1er juillet 2004, il a été adjoint une clause d'inaliénabilité, messieurs [N] et [M] [X] s'interdisant, en se portant fort du Gfa du Château Garreau, d'aliéner de quelque manière les biens et droits immobiliers propriété du Gfa du Château Garreau.



Aucun règlement n'est intervenu à la suite de la signature de ce protocole d'accord, à l'exception de deux versements de 6.125 euros chacun.



La date ultime de remboursement du 30 novembre 2004 étant échue, monsieur [W] [R] a, par sommation du 27 janvier 2005, dénoncée à madame [O] [X] le 1er mars 2005, exercé la levé de l'option de la promesse de vente portant sur la totalité des parts sociales du Gfa du Château Garreau et a, en conséquence, enjoint à messieurs [N] et [M] [X] de lui remettre l'acte de cession de la totalité des part du Gfa du Château Garreau.



Par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 2 février 2006, la transaction du 28 février 2003 et son avenant des 22 juillet et 1er août 2003 ont été homologués.



Monsieur [W] [R] a alors fait procéder à la saisie des parts détenues par monsieur [N] [X] dans le capital social du Gfa du Château Garreau et de la Scea du Château Garreau, suivant deux procès-verbaux du 15 mai 2006.



Par délibération du 29 novembre 2006, l'assemblée générale extraordinaire de la Scea du Château Garreau a approuvé la cession des actions détenues par la société Bourguignon au profit de monsieur François [X], frère de monsieur [N] [X], moyennant le prix d'un euro, en l'agréant en tant que nouvel associé.



Aux termes d'une assemblée générale du Gfa du Château Garreau qui s'est tenue le 27 juin 2007, les époux [X] et monsieur [N] [X] ont procédé à une augmentation de capital par l'émission de 2.200 nouvelles parts qui ont été souscrites par monsieur François [X].



La vente des 220 parts en pleine propriété et des 1 980 parts en nue-propriété, détenues par monsieur [N] [X] dans le Gfa du Château Garreau en suite de la donation consentie par ses parents et qui avaient été saisies, est intervenue le 21 septembre 2009 et les parts ont été adjugées à la société Occad, dont monsieur [W] [R] est le gérant, moyennant le prix de 233.147,81 euros.



La vente des 2065 parts saisies le 15 mai 2006, détenues par monsieur [N] [X], dans la Scea du Château Garreau, est intervenue le 8 octobre 2009 et les parts ont été adjugées à la société château de Cachou dont monsieur [W] [R] est le gérant moyennant le prix de 289. 727,16 euros.



Monsieur [W] [R] a également fait procéder à diverses saisies des parts détenues par monsieur [N] [X] dans diverses sociétés dont il était associé : la société à responsabilité limitée Le Bourguignon , la société civile immobilière Pougue ; le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau.



Faisant valoir que les différentes mesures d'exécution forcée n'avaient pas permis de le désintéresser, sa créance résiduelle à l'encontre de monsieur [N] [X], s'élevant à 1.040.742 euros et que les conditions de la cession de l'intégralité des parts du Gfa du Château Garreau étaient donc remplies, monsieur [W] [R] a fait sommation à messieurs [M] et [N] [X], le 17 février 2009, de lui communiquer la décision collective des associés, prise en assemblée, l'agréant comme nouvel associé.







Par exploit en date des 16, 17 et 18 novembre 2009, monsieur [W] [R], la société Occad et la société Château de Cachou ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris, monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau.



Par exploit daté du 2 mars 2010, monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, ont engagé une action en annulation des adjudications des parts sociales appartenant à monsieur [N] [X] au sein du Gfa du Château Garreau et de la Scea du Château Garreau, intervenues respectivement les 21 septembre et 8 octobre 2009 au profit, d'une part, de la société Occad et, d'autre part, de la société Château de Cachou devant le tribunal de grande instance de Bobigny.



Par ordonnance datée du 1er mars 2011, le juge de la mise en état constatant qu'une partie des demandes dont le tribunal était saisi, précédait de la qualité d'associées au sein du Gfa du Château Garreau et de la Scea du Château Garreau, de la société Occad et de la société Château de Cachou, a sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance pendante devant le tribunal de grande instance de Bobigny et ordonné le retrait du rôle de la procédure.



Par jugement daté du 30 juin 2011, confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 24 septembre 2012, monsieur [M] [X], monsieur [N] [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, ont été déboutés de l'ensemble de leurs demandes.



Par jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 21 janvier 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :



- prononcé la vente au profit de monsieur [W] [R] de l'ensemble des parts sociales du capital du Gfa du Château Garreau autres que les parts adjugées à la société Occad le 21 septembre 2009,

- prononcé la résiliation du bail agricole consenti à la Scea du Château Garreau,

- déclaré irrecevables les demandes en annulation de la décision de l'assemblée générale du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 et de celles de la Scea du Château Garreau des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009,

- déclaré inopposables à monsieur [W] [R] la décision de l'assemblée générale du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 et celles de la Scea du Château Garreau, des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009,

- condamné in solidum monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X] et monsieur François [X] à verser à monsieur [W] [R] la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et condamné in solidum monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau aux dépens augmentés de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de monsieur [W] [R], la société Occad et la société Château de Cachou.



Monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur [K] [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, ont interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe de la cour d'appel de Paris enregistrée le 26 février 2014.



La cour d'appel de Paris, par ordonnance en date du 2 octobre 2014, a ordonné la radiation de l'affaire, enregistrée sous le numéro RG n°14/04180, dans l'attente de la régularisation de la procédure (intervention du curateur de monsieur [N] [X]).



La procédure a été régularisée à l'égard de monsieur [N] [X] par la délivrance d'une assignation à monsieur [P] [V], curateur.



L'assignation en reprise d'instance a été enregistrée au greffe le 23 juin 2015.



Suite à la seconde déclaration de saisine, en date du 17 juin 2015, l'affaire a été réenrôlée sous le numéro RG n°15/13161.



Monsieur [P] [V] ès qualités a régulièrement été avisé de l' assignation par acte d'huissier de justice en date du 23 juin 2015. Malgré ce procès verbal de remise à personne physique, monsieur [P] [V], ès qualités, n'a pas constitué avocat.




***



Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 23 septembre 2014, monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, demandent à la cour d'appel :

- d'infirmer le jugement déféré,

- vu les dispositions des articles 815 alinéa 7 et 815-4 du code civil, de juger inexistante la promesse de vente en date du 30 juin 2004 à défaut d'accord du co-indivisaire, madame [O] [X],



En conséquence :



- de débouter la société Occad, la société Château de Cachou et monsieur [W] [R] de leur appel incident,

- de débouter monsieur [W] [R] de sa demande en résiliation du bail commercial consenti à la Scea du Château Garreau,

- de confirmer la décision du jugement déféré ayant déclaré irrecevables les demandes en annulation de la décision de l'assemblée générale du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 et celle la Scea du Château Garreau du 29 novembre 2006 et du 25 avril 2009,

- de débouter monsieur [W] [R] de sa demande en inopposabilité, sur le fondement de l'action paulienne des assemblées précitées,

- de débouter monsieur [W] [R] de sa demande en dommages-intérêts,

- de condamner monsieur [W] [R] au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner monsieur [W] [R] aux entiers dépens.



***



Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2016, monsieur [W] [R], la société Occad et la société Château de Cachou demandent à la cour d'appel, au visa des articles 122 et 564 du code de procédure civile ; des articles 815-16 et 1304 du code civil ; des articles 1120, 1134, 1147, 1167, 1382, 1589 du code civil :

- de déclarer monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau irrecevables en leur demande de voir dire et juger « inexistante » la promesse de vente en date du 30 juin 2004, comme constituant une demande nouvelle en cause d'appel et comme se heurtant à la fin de non-recevoir tirée de la prescription,

- en tant que de besoin, à cette fin, de requalifier cette demande en action en nullité de ladite promesse, selon sa véritable nature,

- de déclarer les appelants mal fondés et irrecevables en toutes leurs prétentions,



Confirmant le jugement entrepris :



- de constater la vente et prononcer la cession forcée au profit de monsieur [W] [R] de l'ensemble des parts sociales du capital du Gfa du Château Garreau, autres que les parts déjà adjugées à la société Occad, le 21 septembre 2009,

- de prononcer la résiliation du bail agricole consenti à la Scea du Château Garreau,





- de déclarer inopposables à monsieur [W] [R] les décisions de l'assemblée générale du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 et celles de la Scea du Château Garreau des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009, ayant modifié leur capital social et agréé les cessions opérées au bénéfice monsieur François [X], au préjudice du gage de monsieur [W] [R],

- de condamner « in solidum » messieurs [N] [X], [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, à payer à monsieur [W] [R] la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts,



Y ajoutant :



- recevant les intimés en leur appel incident, de déclarer inopposables à la société Occad, les décisions de l'assemblée générale du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 et à la société Château de Cachou, celles de la Scea du Château Garreau des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009, en application de l'adage « Fraus omnia corrumpit »,

- de condamner « in solidum » messieurs [N] [X], [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau à payer respectivement les sommes de 30.000 euros à monsieur [W] [R] et de 10.000 euros à chacune des sociétés Occad et Château de Cachou, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au entiers dépens.



***



L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 octobre 2016.



L'audience de plaidoirie a eu lieu le 24 novembre 2016.




*



SUR CE



Sur la cession forcée des parts du Gfa du Château Garreau



Monsieur [W] [R] demande à la cour de confirmer la vente son profit des parts sociales du capital du Gfa du Château Garreau autres que les 220 parts en pleine propriété et les 1980 parts en nue propriété détenues par monsieur [N] [X] et adjugées à la société Occad le 21 septembre 2009 en exécution du protocole d'accord du 30 juin 2004 et de son avenant du 1er juillet 2004. passés avec [N] et [M] [X] constatant sa créance envers [N] [X] et portant promesse de vente de l'intégralité des parts sociales du Gfa en garantie des sommes dues.Au soutien de cette demande, ils font valoir que la promesse du 30 juin / 1er juillet 2004, de céder à monsieur [W] [R] la totalité des parts du Gfa du Château Garreau, vaut vente, conformément aux dispositions de l'article 1589 du code civil, dès lors que, par acte d'huissier en date du 27 janvier 2009, monsieur [W] [R] a expressément levé l'option et a exercé la promesse sur la totalité des parts sociales du Gfa du Château Garreau. Sur la demande en nullité ou inexistence de la promesse, les appelants soutiennent en premier lieu qu'il s'agit d'une demande nouvelle qui n'est donc pas recevable et en second lieu qu'elle est prescrite.



Monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, soutiennent qu'il ressort de la composition du capital social du Gfa du Château Garreau que monsieur [M] [X] et son épouse Marie Paule [X] détenaient 1980 parts sociales, que ces parts étaient indivises et que leur cession requérait le consentement de tous les indivisaires. Or madame Marie Paule [X] n'a pas donné son consentement. La promesse est donc inexistante et à tout le moins entachée de nullité. Quant à la promesse de porte fort elle n'engage que son auteur, monsieur [M] [X]. La prescription quinquennale ne peut être opposée du fait de l'inexistence de l'acte et il ne s'agit pas d'une nouvelle demande mais d'un moyen nouveau.



La cour relève que devant les premiers juges les appelants avaient soulevé le défaut d'agrément préalable de [W] [R] par les associés, l'absence d'assemblée générale ou la renonciation implicite de [W] [R] au bénéfice de la promesse.



La cour rappelle que les prétentions nouvelles sont irrecevables en appel et qu'une prétention est nouvelle lorsque son objet est de substituer en appel un droit différent de celui on s'est prévalu en première instance.



En l'espèce les appelants avaient soulevé en première instance des moyens tirés du droit des sociétés et ils soulèvent en appel l'inexistence ou la nullité de la promesse de cession. La demande est donc irrecevable.



Il ressort des pièces versées aux débats et qui ne sont pas contestées que les conditions de la promesse sont réunies puisque monsieur [N] [X] n'a pas remboursé les sommes dues à monsieur [R] au 30 novembre 2004 en application du protocole du 30 juin 2004 et son avenant du 1er juillet 2004. Cette promesse vaut donc vente des parts sociales du Gfa du Château Garreau et la décision du tribunal de grande instance sera en conséquence confirmée.





Sur la résiliation du bail de la Scea du Château Garreau



Monsieur [W] [R], la société Occad et la société Château de Cachou demandent à la cour d'appel, confirmant le jugement déféré, de prononcer la résiliation du bail agricole consenti à la Scea du Château Garreau. Ils font valoir qu'aux termes du protocole d'accord des 30 juin /1er juillet 2004, messieurs [N] et [M] [X] se sont irrévocablement engagés à faire le nécessaire pour que, en cas d'exercice de la promesse, alternativement, d'une part, le bail agricole profitant à la Scea du Château Garreau soit purement et simplement résilié sans indemnité à la date de la vente et, d'autre part, pour que la totalité des parts de la Scea du Château Garreau soit transférée à monsieur [W] [R].



Monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau, soutiennent que la promesse étant inexistante et à tout le moins, entachée de nullité, dès lors qu'elle est intervenue au mépris des droits des co-indivisaires, monsieur [W] [R] est mal fondé à solliciter que soit prononcée la résiliation du bail agricole.



La cour n'ayant pas annulé la promesse ou ne l'ayant pas déclarée inexistante, il sera fait droit à cette demande qui n'est pas par ailleurs contestée. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.





Sur l'inopposabilité des décisions du Gfa du Château Garreau et de la Scea du Château Garreau



Monsieur [W] [R], la société Occad et la société Château de Cachou sur le fondement de l'action paulienne sollicitent la confirmation de la décision en ce qu'elle a déclaré inopposables les décisions votées le 20 mars 2007 et celles des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009. Ils font valoir que monsieur [N] [X], avec la complicité de sa famille a pris des décisions qui n'avaient pour unique objectif que de dissiper son patrimoine. Ainsi, il a usé de sa qualité d'associé majoritaire titulaire des droits de vote attachés aux parts saisies et s'est employé, avec la complicité de sa famille, à réduire la valeur de celles-ci.









Pour ce qui concerne l'assemblée du Gfa du Château Garreau du 20 mars 2007 les associés ont agréé un nouvel associé et décidé une augmentation de capital alors que monsieur [R] avait exercé le 27 janvier 2005 la promesse de cession de l'intégralité des parts du Gfa et qu'il avait saisi le 15 mai 2006 les parts sociales de monsieur [N] [X]. [N] [X] était alors associé majoritaire disposant de 220 parts en toute propriété et de 1980 parts en usufruit sur les 2220 parts sociales. A la suite de l'augmentation du capital monsieur François [X] disposait de 2220 parts en toute propriété, le nombre de parts sociales détenues par [N] [X] étant demeuré le même. Sa part dans la société a donc été substantiellement diminuée, il est devenu minoritaire ou égalitaire dans la société et il est constant que monsieur François [X] n'a jamais justifié du paiement des parts sociales. Cette manoeuvre n'a été utilisé que dans le seul but de nuire à monsieur [R].



Il en est de même pour ce qui concerne les décisions des assemblées de la Scea du Château Garreau des 29 novembre 2006 et 25 avril 2009. Préalablement à l'assemblée du 29 novembre 2006 la Sarl Le Bourguignon détenait 1677 parts du Scea et monsieur [N] [X] 2065 parts, les époux [X] ayant quant à eux chacun une part. A la suite d'une cession de parts en date du 1er décembre 2006 par laquelle la société Le Bourguignon a cédé ses parts pour un euro à François [X] et ce dernier détenait alors 44, 80 % du capital de la Scea sans les avoir payées au détriment des associés du Scea et notamment de [N] [X] qui s'était engagé alternativement à céder ses parts du Scea à monsieur [R] ou à résilier le bail agricole au choix de ce dernier. Enfin l'assemblée générale de la Scea du 25 avril 2009 a notamment décidé de libérer le capital restant dû soit 227.250 euros diminuer la valeur des parts sociales de 150 euros à 1 euro, et d'augmenter le capital social. Elle a de ce fait modifié les statuts sur la répartition du capital. A la suite de cette assemblée monsieur François [X] détenait 661.677 parts sociales, monsieur [N] [X] 82.065 parts sociales et les époux [X] chacun une part. Cette diminution des droits de monsieur [N] [X] réduisait son patrimoine au profit de son frère. Ces décisions ont été prises grâce au vote majoritaire de monsieur [N] [X] après que monsieur [R] ait engagé des mesures d'exécution, soit la saisie des parts de la société Le Bourguignon, de la Sci Pougue, de la Scea et du Gfa du Château Garreau.



Enfin les sociétés Occad et Château de Cachou demandent que l'inopposabilité soit également prononcée à leur égard, ces décisions ayant directement affecté la valeur de leurs parts sociales et leurs droits de vote.



Monsieur [N] [X], monsieur [M] [X], madame [O] [X], monsieur François [X], le Gfa du Château Garreau et la Scea du Château Garreau font valoir que les conditions de mise en 'uvre de l'action paulienne ne sont pas réunies. En effet, les décisions prises, telles qu'elles résultent des assemblées générales contestées n'ont pas été faites en fraude des droits du créancier de monsieur [N] [X], mais pour répondre aux difficultés financières de la Scea du Château Garreau, étant précisé que le patrimoine détenu par monsieur [N] [X] garantissait la créance de monsieur [W] [R].



Aux termes de l'article 1167 du code civil les créanciers 'peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.'



La cour considère que c'est par de justes motifs qu'elle adopte que les premiers juges ont retenu que les conditions de l'action paulienne étaient réunies et que les décisions prises lors de ces assemblées ont été déclarées inopposables à monsieur [W] [R].



Les premiers juges n'ont pas été saisis d'une demande d'inopposabilité de ces décisions à l'égard des sociétés Occad et Château Cachou, seule une demande en nullité ayant été formulée.



La cour rappelle que l'existence d'une fraude paulienne s'apprécie au jour de l'acte litigieux. En l'espèce les sociétés Occad et Château Cachou ne sont devenue associés du Gfa et de la Scea que le 21 septembre 2009 pour Occad et le 8 octobre 2009 pour Château Cachou. Elles n'étaient pas auparavant créancières de monsieur [N] [X].



Elles ne peuvent en conséquence exercer l'action paulienne et seront déclarées irrecevables.





Sur les dommages et intérêts



Monsieur [W] [R] sollicite la condamnation solidaire et in solidum des consorts [X] à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, ces derniers ayant tous contribué par leurs manoeuvres à l'empêcher de recouvrer sa créance.



La cour relève que monsieur [M] [X] et monsieur [N] [X] s'étaient engagés à plusieurs reprises à rembourser monsieur [R], ont signé avec lui plusieurs transactions, avenants et protocoles d'accord et qu'ils n'ont respecté aucun de ces engagement tentant au contraire de se soustraire, avec la complicité de madame Marie Paule [X] et de monsieur François [X], par tous moyens dont des moyens frauduleux au paiement de la dette ;



Ainsi que l'ont observé les premiers juges ils ont contraint monsieur [R] à initier nombre de procédures à leur encontre depuis bientôt quinze ans.



C'est donc à juste titre que le tribunal a condamné les consorts [X] au paiement in solidum de l'indemnité de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par monsieur [R].





Sur l'article 700 du Code de procédure civile



Monsieur [R] sollicite le paiement de la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.



Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il lui sera allouée la somme de 20.000 euros à ce titre.





Les sociétés Occad et Château de Cachou sollicitent le paiement chacune de la somme de 10.000 euros sur ce fondement.



La cour les ayant débouté de leurs prétentions il ne sera pas fait droit à cette demande





PAR CES MOTIFS,



Confirme le jugement rendu le 21 janvier 2014 par le tribunal de grande instance de Paris,



Y ajoutant,



Déclare les sociétés Occad et Château de Cachou irrecevables en leur demande d'inopposabilité des décisions des assemblées générales de la Scea du Chateau Garreau et du Gfa du Château Garreau,



Condamne in solidum [N] [X], [M] [X], Marie Paule [X], François [X], le Gfa du Château Garreau, et la Scea du Château Garreau à payer à monsieur [W] [R] la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,



Déboute les parties de leurs demandes plus amples,



Condamne in solidum [N] [X], [M] [X], Marie Paule [X], François [X], le Gfa du Château Garreau, et la Scea du Château Garreau aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT









Pauline ROBERT François FRANCHI

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