30 mars 2017
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/10823

Pôle 6 - Chambre 12

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 30 Mars 2017

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/10823



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Mai 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 11/01803



Renvoi après Cassation





APPELANTE

SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Jean-Jacques BROUDER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0134





INTIMEE

CAISSE NATIONALE DU REGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS RSI PARTICIPATIONS EXTERIEURES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Lionel ASSOUS-LEGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque

G0759



Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Adresse 3]

avisé - non comparant



COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 26 Janvier 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :



Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseiller

Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseiller



qui en ont délibéré



Greffier : Mme Anne-Charlotte COS, lors des débats



ARRÊT :



- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Mme Claire CHAUX, président et par Mme Anne-Charlotte COS, greffier présent lors du prononcé, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.







La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par le GIE KESA ELECTRICALS aux droits duquel vient aujourd'hui la SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS à l'encontre d'un jugement rendu le 24 mai 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de PARIS dans un litige l'opposant à la caisse nationale du régime social des indépendants RSI Participations extérieures ( le RSI ).




FAITS , PROCEDURE , PRETENTIONS DES PARTIES



Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.



Il suffit de rappeler que par une lettre d'observations du 9 novembre 2009 , le RSI a notifié au GIE KESA ELECTRICALS ( le GIE ) aux droits duquel vient aujourd'hui la SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS , un redressement d'un montant de 174 463 € au titre de la contribution sociale de solidarité et de la contribution additionnelle dues en 2008, sur la base du chiffre d'affaires hors taxe réalisé du 1er janvier au 31 décembre 2007.



Par une lettre d'observations du 25 mars 2010 , le RSI a notifié au GIE KESA ELECTRICALS un second redressement d'un montant de 531 284 € au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés et de la contribution additionnelle dues en 2007 et en 2009 sur la base des chiffres d'affaires hors taxe réalisés du 1er janvier au 31 décembre 2006 et du 1er janvier au 31 décembre 2008 .



Une mise en demeure de régler la somme totale de 766 602 € représentant 618 559 € en principal et 148 043 € au titre des majorations de retard était adressée par le RSI au GIE le 24 février 2011.



Le GIE a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris aux fins de contester ce redressement.



Par jugement du 24 mai 2012 , le tribunal a condamné le GIE KESA ELECTRICALS - à payer à la caisse nationale du RSI la somme de 618 559 € au titre du solde de la contribution sociale de solidarité des sociétés et de la contribution additionnelle exigibles pour 2007, 2008 et 2009 ainsi que celle de 148 043 € au titre de la majoration pour retard de paiement,

- à payer la somme de 2000 € à la caisse nationale du RSI au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté le GIEde l'ensemble de ses demandes.



Par arrêt du 28 novembre 2013 , la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 24 mai 2012.



Par arrêt du 2 avril 2015 , la Cour de cassation , statuant sur le pourvoir formé par GIE KESA ELECTRICALS, a cassé l'arrêt rendu le 28 novembre 2013 par la cour d'appel de Paris en toutes ses dispositions, au motif

- que pour rejeter ce recours , l'arrêt ( de la cour d'appel ) retient qu'aucun bilan d'exercice , aucune certification émanant d'un expert comptable agréé, n'est en l'espèce produit pour justifier de l'activité d'achat de fournitures visée par le mandat , celui - ci étant insuffisant à faire la preuve de la réalité de l'activité de gestion d'approvisionnement définie entre les parties,

-qu'en statuant ainsi , alors que dans ses conclusions , la caisse avait expressément admis que le GIE exerçait une activité d'entremise , telle celle de commissionnaire et une activité distincte de prestataire de services et qu'il convenait de lui en donner acte , la cour d'appel a méconnu les termes du litige.





La Cour de cassation a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée.



La SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS, venant aux droits et obligations du GIE KESA ELECTRICALS , fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions invitant la cour à infirmer le jugement déféré et à titre principal :

- constater que les redressements et la mise en demeure de la caisse nationale du RSI sont dépourvus de tout fondement , irréguliers et doivent donc être annulés,

- condamner au titre de l'article 700 du code de procédure civile la caisse nationale du RSI à lui verser la somme de 4000 €,

- condamner la caisse nationale du RSI aux entiers dépens de première instance , d'appel et de renvoi.



Elle fait valoir que les dispositions de l'article 273 octies du code général des impôts sont abrogées, que le GIE KESA ELECTRICALS exerce une activité de commissionnaire, que la rémunération de cette activité correspond à une commission.



La caisse nationale du RSI fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris , et de condamner le GIE KESA ELECTRICALS à lui payer la somme de 3000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Elle fait valoir :

- que les dispositions de l'article 273 octies du code général des impôts sont applicables au présent litige,

- qu'il n'est pas contesté que le GIE exerce une activité d'entremise telle celle de commissionnaire et une activité distincte de prestataire de service,

- que la Cour constatera que la rémunération du GIE n'est pas conforme aux conditions posées par l'article 273 octies du code général des impôts , le groupement percevant une commission basée sur des frais et non sur un taux,

- que le GIE ne démontre pas que ses opérations d'entremise feraient l'objet d'une véritable rémunération distincte de la rémunération de ses autres prestations de services . Il est fait référence aux écritures ainsi déposées pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;






SUR CE , LA COUR ,



Le GIE KESA ELECTRICALS, aux droits duquel vient aujourd'hui la SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS, est assujetti à la contribution sociale de solidarité des sociétés ( C3S ) instituée par la loi du 3 janvier 1970 ( articles L 651 - 1 à L 651 - 9 du code de la sécurité sociale ) et à la contribution additionnelle , instituée par la loi du 13 août 2004 ( article L 245 - 13 du même code ) dont le recouvrement est confié au RSI.



Ces contributions sont , en vertu des dispositions de l'article L 651 - 1 du code de la sécurité sociale, mises à la charge notamment des groupements d'intérêt économique , en considération de leur seule forme juridique.



L'assiette de la C3S est constituée par le chiffre d'affaires entrant dans le champ d'application des taxes sur le chiffre d'affaires, par l'addition des sommes déclarées en vue de la liquidation et du reversement de la TVA au Trésor Public , qu'elles soient imposables ou exonérées.









L'article L 651 - 5 alinéa 2 du code de la sécurité sociale , dans sa version applicable au litige , prévoit :

' Le chiffre d'affaires des intermédiaires mentionnés au V de l'article 256 et III de l'article 256 bis du code général des impôts et qui bénéficient des dispositions de l'article 273 octies du même code est diminué de la valeur des biens et des services qu'ils sont réputés acquérir ou recevoir . Dans le cas d'entremise à la vente , les commettants des intermédiaires auxquels cette disposition s'applique majorent leur chiffre d'affaires du montant des commissions versées . '



Le GIE KESA ELECTRICALS, aux droits duquel vient aujourd'hui la SASU ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS fait valoir que le renvoi effectué par l'article

L 651 - 5 du code de la sécurité sociale à l'article 273 octies du CGI doit être tenu pour caduc et par là implicitement abrogé,



Le RSI rétorque que l'appelant ne peut valablement soutenir que les dispositions de l'article L 651 - 5 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent au présent litige.



Il est constant que si l'article 273 octies ancien du code général des impôts

( CGI ) est devenu sans objet aux termes de l'article 1er du décret N° 2007 - 484 du 13 mars 2007 , cette disparition d'objet ne concerne que la matière fiscale de sorte que l'article 273 octies du CGI conserve sa valeur législative et demeure applicable en droit de la sécurité sociale .



En conséquence, l'appelant est mal fondé à soutenir que les dispositions de l'article L 651 - 5 du code de la sécurité sociale , dans sa version applicable au litige , renvoyant à l'article 273 octies du CGI , ne sont pas applicables au litige.



Aux termes de l'article L 651 - 5 du code de la sécurité sociale , sont bénéficiaires de l'assiette réduite , les commissionnaires mentionnés au CGI qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :



- ceux qui, agissant en leur nom propre, mais pour le compte d'autrui, s'entremettent dans une livraison de biens ou une prestation de services ou dans une acquisition intracommunautaire ,



- Et qui remplissent les conditions énumérées par l'article 273 octies du code général des impôts :



1 ) l'opération d'entremise est rémunérée exclusivement par une commission dont le taux est fixé au préalable d'après le prix , la quantité ou la nature des biens ou des services ,

2) Il est rendu compte au commettant du prix auquel l'intermédiaire a traité l'opération avec l'autre contractant ,

3) l'intermédiaire qui réalise ces opérations d'entremise doit agir en vertu d'un mandat préalable et ne jamais devenir propriétaire des biens .



Il n'est pas contesté que le GIE exerce une activité d'entremise telle celle de commissionnaire et une activité distincte de prestataire de services , ce qui est confirmé par l'article 3 du contrat constitutif du groupement d'intérêt économique KESA ELECTRICALS.





Parmi ces trois conditions susvisées , seule est discutée celle de la rémunération du GIE qui doit consister en une commission dont le taux doit être fixé au préalable d'après le prix , la quantité ou la nature des biens ou des services.









La SASU DARTY fait valoir qu'un taux est fixé au préalable contractuellement entre le GIE et ses membres pour chaque gamme de produits , que ces taux préalables sont variables selon les exercices et que la détermination de l'assiette du taux est légale et non contestable et qu'il est sans fondement de considérer que le prix est d'interprétation stricte et qu'il ne vise que le prix d'achat du bien alors qu'il comprend outre le prix d'achat du produit , tous les frais connexes et accessoires à cette opération d'achat ainsi notamment les coûts de transport , d'assurance, d'entrepôt pour arriver ainsi à un prix de revient , que la rémunération du GIE pour son activité de commissionnaire n'est pas un remboursement de frais mais correspond dans toutes ses composantes ( assiette et taux ) à une véritable commission conforme aux dispositions de l'article 273 octies ancien du CGI .



La caisse du RSI rétorque que la rémunération du GIE n'est pas conforme aux conditions posées par l'article 273 octies du CGI en ce que ce groupement perçoit une commission qui est basée non pas sur un taux tel qu'exigé par l'article 273 octies mais sur des frais .



Le GIE produit deux séries de contrats de mandats :



- d'une part , deux contrats en date du 21 décembre 2005 à effet du 1er janvier 2006 conclus l'un , entre la SNC DACEM et la société DARTY et FILS SAS et ses six filiales et la société CAPROFEM , filiale des établissements Darty ,

- d'autre part , 18 contrats identiques , à effet du 1er août 2007 conclus entre le GIE et ses membres, c'est à dire la SAS DARTY et FILS, ses filiales françaises et des sociétés étrangères de distribution faisant partie du groupe KESA ELECTRICALS PLC.



Il convient de préciser que par décisions de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 1er août 2007 , les associés de la société DACEM SNC ont décidé à l'unanimité la transformation de ladite société en un groupement d'intérêt économique français et ont adopté le contrat constitutif ainsi que son règlement intérieur .



Par les conventions en date du 21 décembre 2005 à effet du 1er janvier 2006 , les sociétés du groupe DARTY donnent mandat au GIE d'acheter pour leur compte des petits produits périphériques informatiques ( rayon INFAC ), des logiciels et des jeux ( rayon LOGDM), des livres et des articles de cuisine ( rayon CACUI ) et des pièces détachées des produits électrodomestiques, en agissant à cette fin en qualité de commissionnaire opaque .



Ces conventions prévoient une commission égale à un pourcentage du prix de revient d'achat des produits selon la famille de produits considérés . Il est expressément prévu que la commission du mandataire couvrira ses coûts , ce qui est , comme il a été à juste titre retenu par les premiers juges , incompatible avec la notion de rémunération qui doit viser l'obtention d'une rétribution en contrepartie de l'exécution de la prestation de service rendue et non aux seuls remboursements de frais engagés .



Par les 18 autres contrats , à effet du 1er août 2007 intitulés contrats de mandat , la société française des établissements DARTY et Fils et ses filiales donnent mandat au GIE KESA ELECTRICALS d'acheter pour son compte tous produits électrodomestiques, produits électriques, meubles meublants et objets d'ameublement et leurs accessoires, consommables et pièces détachées , en agissant à cette fin en qualité de commissionnaire opaque .

Il est mentionné ( paragraphe F) que les facturations des coûts indirects constituent la commission du GIE et rémunèrent son activité de commissionnaire.



Les coûts indirects ( paragraphe C ) sont constitués des frais administratifs , commerciaux et financiers qui seront refacturés à la société DARTY et ses filiales dans la proportion de ses achats au groupement lorsqu'ils se rapportent à l'achat de produits et d'accessoires , sauf prestation particulière aux société Darty et à ses filiales.

Il est précisé que les frais du groupement se rapportant aux prestations de services rendus à la société Darty ou à ses filiales seront répartis en proportion des flux financiers concernés.



C'est à juste titre , qu'au regard de ces dispositions contractuelles , les premiers juges ont retenu que la commission du GIE était constituée par le remboursement de ses frais lesquels sont répartis entre les ses membres au prorata des achats et services dont il bénéficie , ce qui ne peut constituer la rémunération prévue par l'article 273 octies ancien du CGI.



Le fait que le pourcentage de commission soit fixé entre le groupement et chacune des sociétés des établissements DARTY , préalablement au début de chaque exercice , ainsi qu'il ressort des notes de services des 1er août 2007 , 14 avril 2008 et 16 avril 2009 , en fonction des volumes prévisionnels d'activités de chaque catégorie de produits , ainsi que l'établit en cause d'appel la société DARTY, tend à établir que les pourcentages retenus doivent correspondre aux coûts prévisionnels de fonctionnement du GIE en vue de les couvrir.



Par ailleurs, l'absence de rémunération du GIE KESA ELECTRICALS pour son activité d'achats de produits pour le compte de ses membres est corroborée par les dispositions de l'article 12 des statuts prévoyant que 'Toute insuffisance de recettes ou tout excédent de recettes au cours d'un exercice seront facturés ou restitués aux membres en proportion de leur volume d'affaires avec le groupement . Cette opération d'équilibrage des recettes et des coûts aura lieu à la clôture de l'exercice sous la responsabilité de l'administrateur pour être intégrée dans les comptes de cet exercice . '



Ainsi la rémunération du GIE n'est pas conforme aux conditions posées par l'article 273 octies du CGI en ce que ce groupement perçoit une commission qui est basée non pas sur un taux tel qu'exigé par l'article 273 octies mais sur des frais.



Le jugement entrepris doit donc être confirmé.



Il convient de rappeler qu'en application de l'article R144 - 10 du code de la

sécurité sociale, la procédure devant une juridiction de sécurité sociale est gratuite et sans frais avec néanmoins condamnation au paiement par l'appelant qui succombe d'un droit d'appel.



La société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS venant aux droits du GIE KESA ELECTRICALS qui succombe en appel , ne peut voir prospérer sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



L'équité ne commande pas de faire droit à la demande présentée par la caisse du RSI au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS ,



LA COUR ,



CONFIRME le jugement entrepris ,



DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ,



Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;







Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144 - 10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au 10ème du montant mensuel du plafond prévu par l'article L 241 - 3 et condamne la société ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS venant aux droits du GIE KESA ELECTRICALS au paiement de ce droit s'élevant à 326,90 €.







Le Greffier Le Président

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