26 avril 2017
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/07604

Pôle 2 - Chambre 7

Texte de la décision

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 7



ARRET DU 26 AVRIL 2017



(n° 16 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/07604



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2015 -Tribunal de Commerce de PARIS 01 - RG n° 2015006830





APPELANTE



SAS SANTE PORT ROYAL Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : B43 4 7 28 9522



Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

Assistée de Me Jean-Marc SOUCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : A0330, avocat plaidant





INTIMEE



SA LABORATOIRES CRINEX agissant en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090, avocat postulant

Assistée de Me Marion NGO de l'AARPI NGO JUNG & PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, toque : R013, avocat plaidant









COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 22 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie PORTIER, Présidente de chambre

M. Pierre DILLANGE, Conseiller

Mme Sophie- Hélène CHATEAU, Conseillère

qui en ont délibéré sur le rapport de Sophie-Hélène CHATEAU





Greffier, lors des débats : Mme Maria IBNOU TOUZI TAZI







ARRET :



- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Mme Sophie PORTIER, président et par Mme Maria IBNOU TOUZI TAZI, greffier présent lors du prononcé.





*

* *



Après y avoir été autorisé par ordonnance du 28 Janvier 2015, Le LABORATOIRE CRINEX a assigné la société SANTE PORT ROYAL à bref délai devant le tribunal de commerce de Paris par acte extrajudiciaire du 30 janvier 2015, demandant au tribunal de :



' Faire injonction à la société SANTE PORT ROYAL, sous astreinte de 1.000 € par jour

de retard, de :

o Supprimer entièrement l'article publié sur le site Internet Alternative Santé «Uvestérol : un complément inquiétant pour vos enfants » ainsi que tous les commentaires relatifs à cet article et qui sont publiés sur le site ;

o Cesser la diffusion du bulletin d'information intitulé « Uvesterol, un poison pour les enfants », adressé par courriel, à tous ses abonnés en date du 8 novembre 2014.

Et ce dans les 48 heures suivants la décision à intervenir ;

' Faire injonction à la société SANTE PORT ROYAL de cesser à l'avenir tout acte constitutif de dénigrement à rencontre de l'Uvestérol et de la société CRINEX ;

' Condamner la société SANTE PORT ROYAL à payer à CRINEX une somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêt pour le préjudice de réputation subi ;

Condamner la société SANTE PORT RÔYAL à payer à CRINEX une somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de Procédure Civile ;

' Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

' La condamner aux entiers dépens.





Le LABORATOIRE CRINEX, ci-près "CRINEX", expose qu'il est un laboratoire pharmaceutique qui fabrique et commercialise des médicaments à destination des êtres humains, notamment pour les enfants en bas âge, qu'il commercialise un médicament nommé "uvesterol", qui consiste en un supplément en vitamine D destiné aux nourrissons, déclinée en uvesterol D ou uvesterol ADEC.

La société SANTE PORT ROYAL est une société commerciale qui édite des revues et périodiques, sous la direction de Monsieur [R], et notamment un magazine intitulé ALTERNATIVE SANTE, consacré aux méthodes alternatives de traitement des maladies.



CRINEX reproche à SANTE PORT ROYAL d'avoir publié, le 25 février 2014 sur le site

ALTERNATIVE SANTE un article intitulé "UVESTEROL : un complément empoisonné pour vos enfants!" dont l'auteur est Monsieur [M] [E]. Cet article reprend un à un les excipients contenus dans l'uvestérol arguant de leur nocivité.

Le 19 août 2014, Monsieur [R] acceptait, après mise en demeure de CRINEX, de

modifier le texte de l'article incriminé, notamment après que CRINEX lui eut adressé les

commentaires du Docteur [X] [Q], expert toxicologue près de la cour d'appel de BOURGES.

L'adresse URL de l'article n'était pas modifiée.



Le 8 novembre 2014, un bulletin d'information électronique était adressé par ALTERNATIVE SANTE à l'ensemble de ses membres, reprenant le titre "UVESTEROL un poison pour vos enfants".

C'est dans ces conditions que CRINEX a saisi le juge des référés afin qu'il soit fait injonction à SANTE PORT ROYAL de cesser immédiatement la diffusion de l'article de monsieur [M] [E].

Le juge des référés ayant considéré qu'il n'était pas compétent pour faire cesser le trouble

allégué, CRINEX a saisi le tribunal de commerce de Paris.



A l'audience en première instance, la SAS SANTE PORT ROYAL a conclu et a demandé au tribunal de débouter CRINEX de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.



Par jugement contradictoire en date du 30 mars 2015 la 15e chambre du tribunal de commerce de Paris a :

- ordonné à la SAS SANTE PORT ROYAL, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard

à compter du 2ème jour après la signification du présent jugement, dans la limite de 45 jours, durée au delà de laquelle il sera à nouveau fait droit, de :

o supprimer l'article "Uvestérol : un complément inquiétant pour vos enfants", publié sur le site internet "Alternative santé" www.alternativesante.fr ainsi que tous les commentaires publiés sur le site, relatifs à cet article,

o cesser la diffusion du bulletin d'information intitulé "UVESTEROL, un poison pour vos enfants" adressé à tous les abonnés en date du 8 novembre 2014,


- fait injonction à la SAS SANTE PORT ROYAL de cesser tout acte de dénigrement à l'encontre de l'UVESTEROL et de la société la SA LABORATOIRE CRINEX,

- Condamné la SAS SANTE PORT ROYAL à payer à la SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts,

- Condamné la SAS SANTE PORT ROYAL à payer à la SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement, en toutes ses dispositions,

- Condamné la SAS SANTE PORT ROYAL aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 € de TVA.



La SAS SANTE PORT ROYAL a interjeté appel le 13 avril 2015,




Par conclusions récapitulatives, signifiées par RPVA le 22 janvier 2016, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :

- Débouter la SA Laboratoires CRINEX de toutes ses demandes,

- Condamner la SA Laboratoires CRINEX à payer à la SAS SANTE PORT ROYAL la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,



Par conclusions, signifiées par RPVA le 23 janvier 2017, la SA Laboratoires CRINEX demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 30 mars 2015 ;

- Constater que la société SANTE PORT ROYAL n'a pas correctement exécuté le jugement de première instance ;

- Constater que le préjudice de CRINEX s'est dès lors poursuivi ;

- En conséquence, augmenter le montant des dommages et intérêts dus à CRINEX à une

somme de 300.000 € pour le préjudice subi du fait de la publication de l'article

- Condamner la société SANTE PORT ROYAL à payer à CRINEX une somme de

10.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- La condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Pascale FLAURAUD, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 février 2017 avant l'ouverture des débats le même jour.



En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.






SUR CE,

LA COUR,



Considérant que les premiers juges ont rappelé, à juste titre qu'en l'espèce l'article de Monsieur [M] [E] rédigé le 25 février 2014 a pour titre "Uvesterol : un complément empoisonné pour vos enfants ", et qu' en première page, sous le titre de l'article, une photo d'un nourrisson absorbant le médicament attire particulièrement l'attention sur l'article ; qu'en gros caractère, dans le texte placé sous la photo, on peut lire au sujet de l'Uvestérol "qu'il est bourré de produits nocifs" et "d'autres produits existent en pharmacie,comme le Zima D, mais l'Uvestérol continue d'être prescrit...Ne vous laissez pas faire !" ; que cet article contient d'autres affirmations sur le caractère nocif des additifs ; qu'il est écrit :"Alors par quoi remplacer ce criminel "produit de santé"" ; que Monsieur [E], qui n'est ni médecin, ni pharmacien, fonde son analyse sur un ouvrage de Madame [C] [O], "danger additifs alimentaires" ; qu'il n'apparaît pas aux débats que cet auteur soit médecin ou pharmacien ; que CRINEX a adressé à SANTE PORT ROYAL une note écrite par le Docteur [X] [Q], expert toxicologue près de la cour d'appel de BOURG ES, réfutant les allégations de l'article de Monsieur [E], en ces termes :" le contenu de cette "newsletter" et des commentaires associés m'ont quelque peu interpellé :

' Par la non-connaissance des sujets abordés par l'auteur de et relayés par [Y] [R] qui cependant se rattrape en mentionnant la vitamine D comme un complément essentiel,

' Et par le mélange des genres, intentionnel ou non tout au cours de ce papier,

A la lumière de la littérature existante, et en particulier des analyses et évaluations internationales effectuées sur le sujet entre entre autres l'Organisation Mondiale de ia Santé, l'Union Européenne, la "Food and Drug Administration", le Sclentific Commitee of Food", le 'Cosmetic Ingrédient Review" et l'Institut National de Recherche scientifique, j'ai résumé les données existantes sur les excipients présents dans la formule de l'Uvestérol et apporté une réponse circonstanciée à chacun des arguments portés par [M] [E] et relayés par [Y] [R]" ;

qu'à la suite de cette note, l'article de Monsieur [E] a été modifié ; que le nouveau titre de l'article est : "Uvesterol: un complément inquiétant pour vos enfants" ; que les mots "bourré de produits nocifs " et "criminel produit de santé" ont été remplacés par "bourré d'excipients douteux" et "soi-disant produit de santé" ;



Considérant que le dénigrement consiste à porter atteinte à l'image de marque d'une entreprise ou d'un produit désigné ou identifiable afin de détourner la clientèle, en usant de propos ou d'argument répréhensibles ayant ou non une base exacte, diffusés ou émis en tout cas de manière à toucher les clients de l'entreprise visée, concurrente ou non de celle qui en est l'auteur ;



Considérant que c'est à juste titre que CRINEX estime que le produit dénigré doit être identifié ou identifiable, qu'en l'espèce, il ne fait nul doute que l'article, publié sur le site d'Alternative Santé, vise précisément le produit UVESTEROL comme en atteste notamment le titre de l'article litigieux « UVESTEROL : un complément inquiétant pour vos enfants » ; que le terme UVESTEROL est ensuite repris à plusieurs occasions dans le corps du texte de l'article litigieux ainsi que dans le communiqué adressé aux abonnés du site internet ; que l'ensemble des termes utilisés associés au produit visent à jeter le discrédit sur celui-ci et en dissuader de l'utilisation ;



Considérant que l'appelant reproche au tribunal d'avoir conclu qu'en relayant l'article de Monsieur [E] sur un support internet qui a pu être consulté par un nombre important de lecteurs tel qu'en témoignent les nombreux commentaires qui apparaissent sur la pièce 11 du demandeur, les appels enregistrés par le service qualité de CRINEX dans le cadre de la pharmacovigilance, SANTE PORT ROYAL s'est livrée à un dénigrement fautif au préjudice de CRINEX alors que le litige s'inscrit dans le cadre du principe de la liberté d'expression reconnue et garantie par les textes supérieurs de l'ordre juridique applicable en France tels que l'Art 7 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1789 de valeur constitutionnelle ou l'Art 10 de la Convention Européenne des Droit de l'Homme ; que l'état de concurrence entre les parties évoqué par CRINEX est en réalité inexistant puisqu'ainsi que le souligne le VIDAL « Il n'y a pas de produit équivalent identifié » pour l'UVESTEROL ; qu'en tout état de cause, la CEDH a jugé que, dès lors que les propos litigieux s'inscrivent dans le cadre d'un débat d'intérêt général, comme c'est le cas en l'espèce, il importe peu que celui qui s'exprime ait un intérêt personnel à défendre dans ce débat ; qu'en l'espèce, l'article litigieux n'a pour but que d'informer le public sur la présence de nombres excipients dans le médicament en cause et sur les dangers de ces excipients dans le cadre de la politique générale de défense des produits naturels qui constitue la ligne philosophique de l'organe de presse sans faire usage de ce droit à d'autres fins que celui d'informer ; que SPR n'a donc commis aucun détournement ou abus du droit à la liberté d'expression, que les demandes de CRINEX ne poursuivent pas un but légitime et qu'il n'a aucune qualité pour défendre la compétence ou l'honneur des médecins ;



Considérant qu'il est certain qu'un débat portant sur la santé publique constitue un débat d'intérêt général limitant les restrictions à la liberté d'expression ; que c'est à juste titre que l'appelant fait valoir que la critique d'un médicament et/ou de ses composants n'est pas réservée aux médecins et pharmaciens et est ouverte notamment à la presse dont c'est le rôle social premier de communiquer des faits et des opinions sur tous les sujets ; que cependant, s'il est exact que les dangers de ce médicament avaient déjà été évoqués par la presse depuis 1996, que l'Afssaps avait pris des décisions de suspension puis émis une note d'information de pharmacovigilance suite à l'intervention de malaises de nourrissons, le laboratoire CRINEX maintient à juste titre que ces décisions, documents et articles n'ont jamais remis en cause la composition même du médicament mais seulement son mode d'administration et en particulier le respect des consignes d'administration de celui-ci ;



Considérant qu'en tout état de cause, en matière de dénigrement, l'exceptio veritatis n'est pas recevable, que ni la notoriété des faits, ni la bonne foi, ne sont des faits justificatifs, peu important que l'appelante ait tenu des propos exacts ou ait disposé d'une base factuelle suffisante pour s'exprimer ;



Considérant qu'en outre, l'appelante considère que les circonstances l'autorisaient à user de termes traduisant une certaine dose d'exagération ou de provocation comme le permet la jurisprudence de la CEDH, que le site « alternativesanté.fr » revendique une activité militante dans la défense des pratiques naturelles de santé qui justifie l'utilisation d'un ton véhément, que les propos litigieux ont été publiés dans une rubrique intitulée « coup de gueule » qui constitue un billet d'humeur autorisant un ton provocateur ; que ces caractères militants et provocateurs apparaissent clairement aux lecteurs qui relativisent dès lors le sens des propos et qui sont eux-mêmes pour la plupart convaincus des idées défendues par le site, que le ton employé par CRINEX est lui-même particulièrement vif puisqu'elle qualifie MM. [R] et [E] de « personnes dangereuses pour la santé publique », que par ailleurs, à la suite de l'intervention de CRINEX, plusieurs phrases et même le titre ont été édulcorés de sorte que le texte qui subsiste, qu'il s'agisse de l'article ou du bulletin, a perdu de sa virulence et ne dépasse pas les limites de la critique admissible ;



Considérant cependant que c'est à juste titre que le laboratoire CRINEX considère que, bien que le titre de l'article ait été légèrement modifié par SANTE PORT ROYAL, il n'en reste pas moins que le ton et les termes utilisés restent extrêmement négatifs et violents à l'encontre de l'UVESTEROL ; qu'en outre, le titre « UVESTEROL : un complément empoisonné pour vos enfants » apparaît toujours sur le site internet Alternative Santé ; qu'en effet la publication de critique sévère est admissible sous réserve que les propos tenus ne soient pas outranciers et que le traitement des informations soit fait avec la prudence nécessaire ; que si la critique du produit incriminé peut se justifier par le souci d'informer et de mettre en garde en vertu d'un devoir de conseil, toutefois celle-ci doit être exprimée dans des termes mesurés, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque les termes de l'article litigieux sont extrêmement virulents notamment par l'utilisation de formules telles que : empoisonnement collectif organisé, médecins prescripteurs dangereux zombis irresponsables des grands labos ,carrément incompétents ; que, quand bien même les termes de complément empoisonné , produits nocifs et criminel produit de santé ont été modifiés, l'affirmation de la dangerosité du produit reste péremptoire et sans nuance, excédant ainsi le droit d'exercice normal d'une critique ; qu'en conséquence, la cour confirmera les premiers juges en ce qu'ils ont estimé que les propos poursuivis s'analysaient en un dénigrement fautif ;



Sur le préjudice,



Considérant que l'appelant estime que la suppression totale de la diffusion de l'article et de ses commentaires et du bulletin est totalement disproportionnée, les textes en cause étant diffusés depuis plus d'un an pour le premier et plusieurs mois pour le deuxième ; que cependant c'est par des motifs pertinents que les premiers juges ont estimé qu'en publiant l'article incriminé et en relayant son contenu par son bulletin d'information adressée à ses abonnés le 8 novembre 2014, la SAS SANTE PORT ROYAL a créé un trouble manifestement illicite par son dénigrement ; qu'il convient de faire cesser ce trouble en ordonnant la suppression sous astreinte de l'article ainsi que la cessation de la diffusion du bulletin d'information ; que la cour confirmera donc la décision du tribunal de commerce sur ce point ;



Considérant en revanche que l'injonction à la SAS SANTE PORT ROYAL de cesser tout acte de dénigrement à l'encontre de l'UVESTEROL et de la société CRINEX n'est pas opportune, tout auteur prenant ses responsabilités au moment de sa publication, qu'il convient d'infirmer le jugement sur ce point ;



Considérant que le laboratoire CRINEX affirme que la publication de l'article de M. [E] sur le site Alternative Santé a une influence notable sur les consommateurs et les prescripteurs de l'UVESTEROL ; que les ventes de l'UVESTEROL ADEC et de l'UVESTEROL D ont chuté suite à la publication d'abord en 2013 puis en février 2014 ; que, malgré le caractère exécutoire du jugement du tribunal de commerce, l'appelante a refusé de l'exécuter pleinement et que ce n'est qu'après plusieurs lettres de mise en demeure qu'elle a finalement supprimé le corps de l'article litigieux puis les commentaires y afférents ; qu'elle a continué de maintenir le titre de l'article, qui fait pourtant partie intégrante de l'article litigieux : « Uvestérol : un complément empoisonné pour nos enfants » et le lien Url de l'article sous son ancien titre : « Vitamine D : l'Uvestérol est un poison » , que l'article litigieux est aujourd'hui toujours référencé sur Google sous cet ancien titre ; qu'elle a publié récemment un autre article dont le titre est particulièrement dénigrant et évocateur : « Combien de morts a-t-il fallu avant d'interdire l'Uvestérol ' », que le préjudice subi par CRINEX ne fait qu'augmenter de jour en jour, se reflétant par une nette baisse de son chiffre d'affaires, et peut être aujourd'hui évalué à un montant de 300.000 € ;



Considérant qu'il ressort des éléments du dossiers que depuis plusieurs années l'UVESTEROL a suscité de nombreux débats, articles, discussions et décisions de l'Afssaps ; qu'ainsi, il n'est pas démontré que la baisse importante du chiffre d'affaires subie par le laboratoire CRINEX soit due au seul l'article publié par la SAS SANTE PORT ROYAL ; que le chiffre invoqué n'est pas justifié ; qu'en outre, la cour n'est pas saisie de la nouvelle publication  ; que, toutefois, le dénigrement constaté lui a porté un préjudice que la cour évaluera à la somme de 5000 € , infirmant le tribunal quant au quantum fixé ;







Sur les frais et dépens



Considérant que l'équité justifie que l'appelant qui succombe à l'instance supporte les frais irrépétibles exposés par la partie adverse ; qu'une somme de 6000 € sera allouée à ce titre pour la procédure devant le tribunal ainsi que devant la cour ; Qu'au surplus, l'appelant sera condamné qui aux dépens de la procédure d'appel ;





PAR CES MOTIFS



LA COUR,



Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,



Confirme le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a ordonné à la SAS SANTE PORT ROYAL, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du 2ème jour après la signification du présent jugement, dans la limite de 45 jours, durée au delà de laquelle il sera à nouveau fait droit, de :

o supprimer l'article "Uvestérol : un complément inquiétant pour vos enfants", publié sur le site internet "Alternative santé" www.alternativesante.fr ainsi que tous les commentaires publiés sur le site, relatifs à cet article,

o cesser la diffusion du bulletin d'information intitulé "UVESTEROL, un poison pour vos enfants" adressé à tous les abonnés en date du 8 novembre 2014,



Infirme le jugement en ce qu'il a fait injonction à la SAS SANTE PORT ROYAL de cesser tout acte de dénigrement à l'encontre de l'UVESTEROL et de la société la SA LABORATOIRE CRINEX,



Infime le jugement quant au quantum des dommages et intérêts,



Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL à payer a la SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 5000 €à titre de dommages et intérêts,



Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL à payer à la SA LABORATOIRE CRINEX la somme de 6000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le tribunal et la cour,



Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,



Condamne la SAS SANTE PORT ROYAL aux dépens de l'instance, au profit de Maître Pascale FLAURAUD, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





LE PRÉSIDENTLE GREFFIER

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.