18 septembre 2017
Cour d'appel de Paris
RG n° 15/00984

Pôle 5 - Chambre 10

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2017



(n°265, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/00984



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Décembre 2014 -Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2013007674



APPELANTE



SNC HOTELIERE DE TORCY

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 428 281 299

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Ayant pour avocat plaidant Maître Katia MOREIRA, avocate au barreau de PARIS, toque : P0347,





INTIMÉES



SASU LES OPALINES TORCY

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 1]

N° SIRET : 422 431 924

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Nicolas DUVAL de la SCP NOUAL DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0493

Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Claude DESSEIGNE de la SCP DESSEIGNE ZOTTA, avocat au barreau de LYON,





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 29 Mai 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

qui en ont délibéré.



Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,



Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN





ARRÊT :



- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Edouard LOOS, président et par Mme Clémentine GLEMET, greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






FAITS ET PROCÉDURE



Au cours de l'année 1992 a été construit un bâtiment sis [Adresse 3]) intégrant les locaux de deux entités juridiques distinctes ayant le même gérant, à savoir :

- un hôtel [Établissement 1]

- une maison de retraite Résidence Présence.



En 1995, la maison de retraite a été vendue à la SNC RepTorcy exerçant sous l'enseigne

Résidence Présence.



Le 15 mai 1995, compte-tenu du fait que les murs n'appartenaient plus au même propriétaire, une convention de chauffage a été établie entre l'Hôtel [Établissement 1] et la Résidence RepTorcy-Présence, prévoyant la répartition de la charge de chauffage au prorata des volumes chauffés.

Puis le 4 avril 1996, a été conclue une police d'abonnement entre la Compagnie Générale de Chauffe et la Résidence Présence, prévoyant que les fournitures de chaleur et d'eau chaude sanitaire (ECS) seraient prises en charge par la Résidence à hauteur de 60 % du compteur général de chaleur.

Après avoir donné le fonds de commerce en location-gérance à la société I.F.C à partir du 1er février 1999, le 29 mars 2001, la SNC RepTorcy lui a établi un bail commercial à effet du 1er avril 2001.



Constatant des problèmes relatifs au coût exorbitant des fractures d'eau, d'électricité et de chauffage par rapport à sa consommation, la société I.F.C a demandé au Bureau Veritas un audit sur l'alimentation en eau chaude de la Résidence Présence.

Dans un rapport du 26 février 2003, après avoir entendu la société Dalkia, venant aux droits de la Compagnie Générale de Chauffe, ainsi que le syndicat d'agglomération Nouvelle du Val de Marne (SAN), le Bureau Veritas a considéré que :

- «eau froide :

L'eau froide servant à la préparation de l'eau chaude sanitaire est située en sous-station, la charge de la consommation totale (hôtel + résidence) est actuellement supportée par la Résidence (1 comptage pour l'ensemble).

- électricité :

L'électricité nécessaire au fonctionnement de la station [Établissement 2] est actuellement à l'entière charge de la Résidence car il n'existe pas de sous-compteur électrique pour cette station»



Au vu de ce document, par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2003, la société I.F.C a demandé à la société Hôtelière de Torcy, exerçant sous l'enseigne Hôtel-Restaurant [Établissement 3],de lui faire connaître sa position, étant précisé que la société Dalkia a chiffré le coût des travaux de séparation des installations à la somme de 23 192 € HT.

Le 27 juin 2003, la société Hôtelière de Torcy a refusé toute modification du système en place au motif que la Résidence ne supportait que les frais de production d'eau chaude lui incombant, le règlement de 40 % des factures correspondant à la réelle consommation.



Par une ordonnance de référé du tribunal de commerce de Meaux du 2 septembre 2005 la société I.F.C a obtenu l'organisation d'une mesure d'instruction et la désignation d'un expert, Monsieur [I], qui a déposé son rapport le 15 juin 2006.

Le 28 avril 2008, et dans le cadre d'un protocole d'accord, les parties se sont entendues sur les dispositions ci-après :

'Article 1

La société I.F.C et la société Entreprise Indépendante Hôtelière de Torcy acceptent les conclusions de Monsieur [I], et notamment en ce qui concerne la clef de répartition des dépenses communes.

Il est précisé que la société Entreprise Indépendante Hôtelière de Torcy a réglé la somme retenue par l'expert au titre des comptes entre les parties, ainsi que 40 % des frais d'expertise avancés par la société I.F.C., pour respectivement 1 297,96 € TTC et 1 366,62 € TTC, soit un total de 2 664,58 €TTC.

Article 2

Afin de donner une suite favorable aux conclusions du rapport d'expertise et compte tenu de leur accord, les parties conviennent de saisir Monsieur [I] amiablement d'une nouvelle mission.

Celle-ci comprendra avec possibilité de s'adjoindre tout professionnel ou technicien compétent de son choix, la mission de procéder à l'évaluation, ou à tout le moins la détermination des dépenses communes d'eau froide vers les réseaux d'eau chaude, et d'électricité motrice ; des coûts indirects et des assurances (pages 17 du rapport).

La mission de Monsieur [I] doit ainsi tendre à permettre aux deux parties une répartition chiffrée, certaine et équitable des dépenses, selon la proportion 60 %/40 %.

En outre Monsieur [I] aura également pour mission de déterminer et d'arrêter les sommes que l'une des parties pourrait devoir à l'autre depuis le dépôt de son rapport, qu'elles résultent des conclusions de celui-ci, ou de leur mise en 'uvre, afin d'arrêter entre elles les comptes à une date déterminée.

Article 3

La société I.F.C. et la société Entreprise Indépendante Hôtelière de Torcy s'engagent à prendre en charge les honoraires et frais de Monsieur [I] et de tout sapiteur qu'il sollicitera, à concurrence de 60 % pour la société I.F.C et de 40 % pour la société Entreprise Indépendante Hôtelière de Torcy ».

Monsieur [I] ayant cessé ses activités d'expert, les parties ont sollicité l'intervention de Monsieur [F] ([Adresse 4].'



Devant l'inertie de M. [F], les parties ont sollicité la désignation d'un expert judiciaire.



Par ordonnance du 2 avril 2010, le juge des référés du tribunal de commerce de Meaux a désigné Madame [A] en qualité d'expert avec pour mission de procéder à l'évaluation ou à tout le moins la détermination des dépenses communes d'eau froide vers les réseaux d'eau chaude et d'électricité motrice, des coûts indirects et des assurances et de fournir tous les éléments aux parties leur permettant une répartition chiffrée, certaine et équitable des dépenses, selon la proportion 60 %/40 % et de déterminer et arrêter les sommes que l'une des parties pourrait devoir à l'autre depuis le dépôt du rapport de Monsieur [I] jusqu'à la date de ses conclusions afin d'arrêter un compte entre elles.

Mme [A] a déposé son rapport le 27 juillet 2012.

Aux termes du rapport, il est précisé que :

Par application de la méthode de calcul et des données chiffrées, soumises aux parties et non contestées :

- 21 5827,16 euros TTC sont à mettre à la charge de l'hôtel [Établissement 3] au titre de sa contribution aux frais de consommation d'eau froide destinés à la production d'eau chaude sanitaire sur la période de 1999 à 2010 inclus ;

- 96 578,64 euros TTC sont à mettre à la charge de l'hôtel [Établissement 3] au titre de sa contribution aux frais électriques de production d'eau chaude sanitaire sur la période de 1999 à 2010 inclus.

18°) Les éventuels autres postes de dépenses non évalués par la Résidence-Présence ne sont pas incorporés dans les présents travaux clôturés sur l'exercice 2010.

Par exploit d'huissier du 13 septembre 2013, la société IFC a assigné la société Hôtelière de Torcy aux fins de condamnation à lui verser la somme de 312 405,80 € TTC, outre intérêts au taux légal à compter de la présente assignation et aux fins de désignation de Mme [A] aux fins de procéder à l'évaluation ou à tout le moins la détermination des dépenses communes d'eau froide vers les réseaux d'eau chaude et d'électricité motrice, des coûts indirects et des assurances engendrés depuis le 1er janvier 2011, fournir tous les éléments aux parties leur permettant une répartition chiffrée, des dépenses, selon la proportion 60 % / 40 % et déterminer et arrêter les sommes que l'une des parties pourrait devoir à l'autre depuis le 1er janvier 2011 ; et jusqu'à la date de ses conclusions afin d'arrêter un compte entre elles et autoriser la société I.F.C. à faire réaliser les travaux permettant d'établir l'indépendance des réseaux et des consommations avec la société Hôtelière de Torcy, ceux-ci étant supportés à concurrence de 60 % par la société I.F.C. et 40 % par la société Hôtelière de Torcy.



La société I.F.C. a changé de nom et est devenue la société Les Opalines Torcy.



Par jugement du 2 décembre 2014, le tribunal de commerce de Meaux a :



- constaté que la nouvelle dénomination de la société I.F.C. Résidence Présence est [Adresse 5],

- homologué le rapport de Madame [A],

- débouté la société Hôtelière de Torcy de sa demande d'application des préconisations développées par la société Sedri dans son rapport d'audit,

- condamné la société Hôtelière de Torcy à payer à la société Les Opalines Torcy la somme de 312 405,80 euros TTC en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2013, date de l'assignation,

- dit que les intérêts se capitaliseront dans les termes de l'article 1154 du code civil,

- désigné Madame [A] en qualité d'expert, celle-ci ayant la possibilité de s'adjoindre tout professionnel ou technicien compétent de son choix, avec mission de :

*entendre les parties, tous sachants, se faire communiquer tous les éléments de la cause,

procéder à l'évaluation ou à tout le moins la détermination des dépenses communes d'eau froide vers les réseaux d'eau chaude, et d'électricité motrice ; des coûts indirects et des assurances engendrés depuis le 1er janvier 2011,

*fournir tous les éléments aux parties leur permettant une répartition chiffrée, des dépenses, selon la proportion 60% / 40%,

*déterminer et arrêter les sommes que l'une des parties pourrait devoir à l'autre depuis le 1 er janvier 2011, et jusqu'à la date de ses conclusions afin d'arrêter un compte entre elles,

- dit que la société Les Opalines Torcy devra consigner au greffe du tribunal de commerce de Meaux, dans le mois suivant la présente ordonnance, la somme de 2 000 euros TTC à valoir sur les frais et honoraires de l'expert,

- dit que l'expert accomplira sa mission conformément aux articles 273 et suivants du code de procédure civile et qu'il devra déposer son rapport au plus tard quatre mois à compter de la consignation auprès du greffe du tribunal de commerce de Meaux,

- dit qu'un complément sera, le cas échéant fixé par le juge chargé du contrôle des mesures d'instruction, à la requête de l'expert, en application de l'article 269 du code de procédure civile,

- dit qu'à défaut de consignation dans les délais prescrits, il sera fait application de l'article 271 du code de procédure civile,

- dit que le magistrat chargé du contrôle des mesures d'instruction suivra l'exécution de la présente mesure d'instruction,

- autorisé la société Les Opalines de Torcy à faire réaliser les travaux permettant d'établir l'indépendance des réseaux et des consommations avec la société Hôtelière de Torcy, ceux-ci étant supportés à concurrence de 60% par la société Les Opalines de Torcy et 40% par la société Hôtelière de Torcy,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, nonobstant appel et sans caution,

- condamné la société Hôtelière de Torcy à payer à la société Les Opalines Torcy la somme de 3 000 euros TTC au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixé la date à laquelle l'affaire sera appelée pour un nouvel examen à l'audience du 16 juin 2015 à 14 heures,

- condamné la société Hôtelière Torcy en tous les dépens qui comprendront le coût de l'assignation qui s'élève à 63,63 euros TTC, ainsi que les frais de greffe liquidés à 104,25 euros TTC et la contribution juridique de 35 euros TTC, en ce non compris le coût des actes qui seront la suite du jugement auquel elle demeure également condamnée.



La société Hôtelière de Trocy a relevé appel de ce jugement.


Par conclusions signifiées le 7 avril 2015, la société Hôtelière de Torcy demande à la cour de la déclarer recevable en son appel, d'infirmer le jugement entrepris, d'écarter les conclusions du rapport d'expertise de Madame [A], de juger que les préconisations développées par la société Sedri dans son rapport d'audit et d'assistance technique seront mises en 'uvre et que le coût des travaux sera supporté par la société Hôtelière de Torcy et la société IFC selon la répartition 40 % / 60 % que les travaux nécessaires ainsi que l'évaluation des consommations entre les parties pourront être réalisés sous le contrôle d'un expert judiciaire désigné par la cour de céans et que les frais d'expertise seront supportés par la société Hôtelière de Torcy et la société les Opalines Torcy selon la répartition 40 % / 60 %.


Elle prie la cour de juger, qu'en tout état de cause, chacune des parties conservera à sa charge les frais engagés dans le cadre de la présente instance ainsi que celle qui s'est tenue devant le tribunal de commerce de Meaux.



Elle expose que l'expert judiciaire a procédé à des simulations de répartition des dépenses entre les parties et non à une évaluation en réel des dites dépenses et ne s'est jamais rendue sur place afin de prendre connaissance des installations ; qu'elle a comparé les consommations d'eau et d'électricité entre deux résidences de personnes âgées, en l'espèce la maison de retraite exploitée par la société les Opalines de Torcy d'une part et un autre établissement du groupe de cette dernière, Les Soleïades situé à [Localité 1] d'autre part et dégagé un écart de façon soustractive censé représenter le surcoût de consommation d'eau et d'électricité engendré par le rattachement de l'hôtel [Établissement 3] au dispositif d'eau chaude sanitaire.


Elle indique qu'elle a mandaté la société Sedri, spécialisée dans les audits techniques afin d'obtenir son avis sur les installations existantes et la méthodologie de calcul retenue par l'expert ; que cette société a indiqué que la méthode d'évaluation qui consiste à comparer deux établissements et à faire un prorata des consommations ne lui semblait pas être la bonne méthode pour rétablir l'équité entre les parties. Elle ajoute que la méthode utilisée par l'expert est approximative ; qu'elle n'a pu, en cours d'expertise judiciaire, critiqué cette méthode faute d'avoir les compétences techniques pour le faire ; qu'en outre, le rapport d'expertise ne règle pas les problèmes techniques et financiers pour l'avenir.

Elle préconise que le rapport de la société Sedri soit utilisé afin de procéder aux travaux nécessaires pour rendre les deux établissements indépendants en termes de consommation et ainsi de dégager des valeurs réelles permettant par la suite de procéder à des calculs justifies et non à de simples simulations.



Par conclusions signifiées le 1er juin 2015, la société Les Opalines de Torcy demande à la cour de recevoir l'appel de la société Hôtelière de Torcy comme régulier en la forme, de le dire non fondé, de débouter l'appelante de toutes ses demandes et de confirmer le jugement entrepris.



Elle prie la cour de condamner la société Hôtelière de Torcy à lui payer une indemnité de procédure de 5 000,00 € ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés par Maître Nicolas Duval de la SCP Noual Duval, dans les formes de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle précise que de 1999 à 2010, période couverte par le rapport de Madame [A] et le jugement, puis de 2011 à ce jour, période qui est l'objet de la nouvelle expertise, la société Les Opalines Torcy assume des dépenses de l'hôtel [Établissement 3], sans la moindre contribution volontaire de la société Hôtelière de Torcy ; qu'en cas de transfert injustifié de valeur d'un patrimoine à un autre, une action en restitution de l'enrichissement fondée sur l'équité est offerte à l'appauvri contre l'enrichi : l'action de in rem verso que le rapport d'expertise de Madame [A] indique, concernant le pourcentage de consommation d'eau à affecter à l'hôtel [Établissement 3], que :

' « L'évaluation de cubages d'eau froide consommés par l'Hôtel [Établissement 3] dans le cadre de la production d'eau chaude sanitaire peut s'obtenir comme suit :

consommation annuelle moyenne de la Résidence ' Présence : 8 638 m3

consommation annuelle moyenne de la Résidence [Établissement 4]: 4 112 m3

consommation annuelle moyenne de l'Hôtel [Établissement 3] : 4 516 m3

' cette consommation d'eau résiduelle moyenne de l'Hôtel [Établissement 3] correspond à 52,28 % soit 52 % de la consommation d'eau de la Résidence ' Présence.

' rapportée au coût des factures acquittées par la Résidence ' Présence de 1999 à 2010 cette consommation d'eau résiduelle peut enfin se liquider comme suit :

415 052,24 euros TTC x 52 % = 15 827,16 euros TTC, à mettre à la charge de l'hôtel [Établissement 3] au titre de sa contribution aux frais de consommations d'eau froide destinés à la production d'eau chaude sanitaire sur la période de référence » [soit de 1999 à 2010].



S'agissant du pourcentage d'électricité à affecter à l'Hôtel [Établissement 3], le rapport d'expertise précise que :

' « L'évaluation de l'électricité consommée par l'hôtel [Établissement 3] dans le cadre de la production d'eau chaude sanitaire peut s'obtenir comme suit :

consommation 2009/2010 de la Résidence ' Présence :

353 122 + 359 847 = 712 796 kwh

consommation 2009/2010 de la Résidence [Établissement 4] :

249.494 + 228.075 = 477 569 kwh

consommation annuelle moyenne de l'hôtel [Établissement 3] : 235 400 kwW

' cette consommation d'électricité résiduelle moyenne de l'hôtel [Établissement 3] correspond à 33,02 % soit 33 % de la consommation d'électricité de la Résidence ' Présence.

' rapportée au coût des factures acquittées par la Résidence ' Présence de 1999 à 2010, cette consommation d'électricité résiduelle peut enfin se liquider comme suit :

292 662,56 euros TTC x 33 % = 96 578,64 euros TTC à mettre à la charge de l'hôtel [Établissement 3] au titre de sa contribution aux frais électriques de production d'eau chaude sanitaire sur la période de référence » [soit de 1999 à 2010].

Elle indique que son appauvrissement peut être évalué à la somme de 312 405,80 € TTC au titre de la période allant de 1999 à 2010.



Elle expose que le rapport d'expertise précise que le prestataire Dalkia en 2002, le bureau de contrôle Veritas en 2004 et 2004 et l'expert [I] en 2006 ont, tour à tour établi des devis et des descriptifs des interventions techniques nécessaires en sous-station et sur les réseaux d'approvisionnement destinés globalement à calculer les volumes de production du chauffage et deux de l'eau chaude sanitaire, déterminer les différents postes de dépenses à prendre en considération pour asseoir les coûts de production respectifs de ces deux prestations et sectoriser et individualiser les volumes d'eau chaude sanitaire consommés respectivement par chacune des entités m ais qu'aucune mesure n'a été mise en 'uvre.


Elle soutient que la société Hôtelière de Torcy ne peut prétendre substituer au rapport de Mme [A] un document établi à sa seule discrétion et pour les besoins de la cause et alors qu'elle n'a, à aucun moment, contesté ou remis en cause le travail de l'expert et en s'est pas opposée à ce qu'elle soit à nouveau désignée.



SUR CE,



Sur la demande de rabat de l'ordonnance de clôture



Par conclusions signifiées le 22 mai 2017, postérieurement à l'ordonnance de clôture, la société Hôtelière de Torcy demande à la cour, au visa des articles 246 et 784 du code de procédure civile, de la recevoir en ses conclusions et de la dire bien fondée, d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 24 avril 2017 et en conséquence de déclarer recevables les conclusions et pièces communiquées le 22 mai 2017 par la concluante et d'infirmer le jugement entrepris.


Elle prie la cour de constater que les travaux de séparation des installations techniques mis en 'uvre par les parties en mars 2016 ont permis de connaître les consommations réelles d'eau froide et d'électricité des sociétés Hôtelières de Torcy et les Opalines de Torcy, lesquelles diffèrent fortement des chiffrages retenus par l'expert judiciaire dans son rapport et appliqués par le jugement entrepris, et en conséquence, d'écarter les conclusions du rapport d'expertise de Mme [A] lesquelles ne peuvent servir de base incontestable afin d'établir les comptes entre les parties pour la période de 1999 à 2010 inclus et de désigner de nouveau Mme [A] en qualité d'expert judiciaire avec pour mission d'établir les comptes entre les parties quant à leur contribution aux frais de consommation d'eau froide destiné à la production d'eau chaude sanitaire ainsi que leur contribution aux frais électriques de production d'eau chaude sanitaire sur la période 1999 à 2010 inclus, au regard des chiffrages ressortant des consommations réelles sur une année (d'avril 2016 à avril 2017) et, en tout état de cause, réserver les dépens.



En application de l'article 784 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.



En l'espèce, la réalisation des travaux de séparation des installations techniques mis en 'uvre en mars 2016 étaient nécessairement connues antérieurement à l'ordonnance de clôture et ne saurait justifier la rabat de l'ordonnance de clôture. En outre, aucune pièce justifiant les nouveaux éléments relatifs à la consommation alléguée n'étant produite, la demande sera rejetée et les conclusions signifiées le 22 mai 2017 et les pièces communiquées postérieurement à l'ordonnance de clôture seront déclarées irrecevables.



Sur le fond



Le rapport de Mme [A] a été établi de manière contradictoire. Il résulte de ce rapport qu'il a été décidé lors de la réunion du 15 juin 2011, que la Résidence-Présence fournirait des ratios de consommations de fluides en volumes permettant d'évaluer les consommations d'établissements similaires, présentant des capacités d'accueil comparables aux siennes . Le mode opératoire ainsi retenu, consistant d'une part à comparer ces consommations d'eau et d'électricité entre les deux résidences pour personnes âgées, puis d'autre part de dégager un écart de façon soustractive.

Cet écart, à défaut de moyens de comptages existants et/ou relevés, étant censé représenter le surcoût de consommation d'eau et d'électricité engendré par le rattachement de l'hôtel [Établissement 3] au dispositif de production d'eau chaude sanitaire, globalement financé par la Résidence-Présence.

Les constats précités et les solutions préconisées ont été confirmés par courrier du 12 septembre 2011. La Résidence-Présence a produit ses pièces les 12 juillet et 25 octobre 2011 et 20 mars 2012. Invités à produire les documents d'évaluation relatifs à leurs consommations ou celles d'établissements similaires, les représentants de l'hôtel [Établissement 3] ne se sont pas manifestés sur cette question.

La société Hôtelière de Torcy n'a ni contesté ni remis en cause les opérations d'expertise ni le choix de l'établissement de comparaison retenu par la Résidence-Présence qui paraît être une méthode appropriée en l'absence justement de moyens de comptages existants et/ou relevés représentant le surcoût de consommation d'eau et d'électricité engendré par le rattachement de l'hôtel [Établissement 3] au dispositif de production d'eau chaude sanitaire globalement financé par la résidence Présence. En outre, la société Hôtelière de Torcy ne s'est pas opposée à ce qu'elle soit de nouveau désignée. Enfin, l'absence de compétence technique alléguée ne saurait constituer un obstacle dès lors qu'elle a su faire appel à la société Sedri dont elle sollicite l'adoption du rapport.



La société Hôtelière de Torcy ne peut prétendre écarter les conclusions du rapport d'expertise judiciaire et y substituer un document établi à sa demande de manière non contradictoire.



Ainsi le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Hôtelière de Torcy à payer à la société Les Opalines Torcy la somme de 312 405,80 euros se décomposant comme suit : 215 827,16 euros au titre de sa contribution aux frais de consommation d'eau froide destinés à la production d'eau chaude sanitaire sur la période de 1999 à 2010 et 96 578,64 euros au titre de sa contribution aux frais électriques de production d'eau chaude sanitaire sur cette même période.



Il le sera également en ce qui concerne la nouvelle mesure d'expertise non contestée, les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.



La décision sera néanmoins infirmée du seul chef de l'homologation du rapport d'expertise. L'expertise judiciaire ayant pour but, en application de l'article 232 du code de procédure civile, d'éclairer le juge par des constatations sur une question de fait qui requiert les lumières d'un technicien. Le juge qui fait siennes les dites constatations n'a pas homologuer ledit rapport.





PAR CES MOTIFS,



La cour,



DEBOUTE la société Hôtelière de Torcy de sa demande de rabat de l'ordonnance de clôture,



DECLARE irrecevables les conclusions de la société Hôtelière de Torcy signifiées le 22 mai 2017 et les pièces communiquées postérieurement à l'ordonnance de clôture ;



INFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce de Meaux le 2 décembre 2014 en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise ;


Statuant à nouveau sur ce point,


DIT n'y avoir lieu à homologation du rapport d'expertise judiciaire ;



CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions ;



Y ajoutant,



CONDAMNE la société Hôtelière de Torcy aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Maître Nicolas Duval de la SCP Noual Duval, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;


CONDAMNE la société Hôtelière de Torcy à payer à la société Les Opalines Torcy la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.











LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT



C. GLEMET E. LOOS

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