7 février 2018
Cour d'appel de Paris
RG n° 16/07034

Pôle 5 - Chambre 3

Texte de la décision

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2018



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/07034 ayant absorbé le 16/07958



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/11729





APPELANTE :



SAS MANOIR AÉROSPACE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 403 735 681

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Intimée dans le dossier RG 16/07958 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/07034



Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, avocat postulant

assistée de Me Yann COLIN du cabinet FRANKLIN, avocat au barreau de PARIS, toque: P08, avocat plaidant





INTIMÉES :



SARL KALKALIT BLADE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 500 667 803

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Appelante dans le dossier RG 16/07958 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/07034



Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125, avocat postulant

assistée de Me Karim BOULMELH de la SCP BAKER MCKENZIE, avocat au bareau de PARIS, toque : P445, avocat plaidant



SAS MANOIR SAINT BRIEUC prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 754 015 865

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Intimée dans le dossier RG 16/07958 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/07034



SAS MANOIR BOUZONVILLE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 754 015 923

[Adresse 3]

[Localité 1]

Intimée dans le dossier RG 16/07958 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/07034



SAS MANOIR PITRES prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 754 015 899

[Adresse 3]

[Localité 1]

Intimée dans le dossier RG 16/07958 ayant fait l'objet d'une jonction avec le dossier RG 16/07034



Représentées par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151, avocat postulant

assistées de Me Gérard MALLE de la AARPI MALLE-TIRAN-FRANCOIS, avocat au barreau de LILLE, avocat plaidant



SELAFA MJA, prise en la personne de Me [N], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société MANOIR CUSTINES

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029, avocat postulant

assistée de Me Philippe BERTEAUX du cabinet MARVELL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P346, avocat plaidant, substitué par Stéphanie GOINARD







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 6 décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère

Madame Sandrine GIL, conseillère

qui en ont délibéré



Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du Code de procédure civile.



Greffier, lors des débats : Mme Elodie RUFFIER





ARRÊT :



- contradictoire,



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,



- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle HARDOIN, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.




*****



FAITS ET PROCÉDURE



Par actes notariés des 28 décembre 2007et 19 février 2008, la société MANOIR INDUSTRIE devenue la société MANOIR AÉROSPACE a vendu à la société KALKALIT BLADE des ensembles immobiliers situés sur les communes de [Localité 2] et [Localité 3] (site [Localité 2]), de [Localité 4], de [Localité 5] et le [Localité 6] (site [Localité 5]), de [Localité 7] et [Localité 8] (site [Localité 7]), sous la condition de son maintien dans les lieux en qualité de locataire. Ainsi, la société KALKALIT BLADE a donné concomitamment, à bail à la société MANOIR INDUSTRIE les locaux situés sur les sites de [Localité 2], [Localité 4] et [Localité 5] pour une durée de 12 ans à compter du 28 décembre 2007 et les locaux situés sur le site de [Localité 7] pour également une durée de 12 ans à compter du 19 février 2008.



Par actes des 28 décembre 2012, la société MANOIR INDUSTRIE devenue la société MANOIR AÉROSPACE a procédé à des apports partiels d'actif de ses différentes branches d'activité aux sociétés MANOIR CUSTINES, MANOIR SAINT BRIEUC, MANOIR BOUZONVILLE et MANOIR PITRES, constituées à cet effet.



Par jugement du 18 février 2015, le tribunal de commerce de Paris a placé en redressement judiciaire la Sté MANOIR CUSTINES, procédure convertie en liquidation judiciaire par jugement du 1er juin 2015 désignant Maître V. [N] de la SELAFA MJA en qualité de liquidateur.



Par acte d'huissier du 3 avril 2015, la Sté KALKALIT BLADE a fait délivrer à la Sté MANOIR SAINT-BRIEUC un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail.



Par actes des 7, 9, 8 avril 2015 et du 4 mai 2015, la société KALKALIT BLADE a adressé des sommations de payer aux sociétés MANOIR SAINT BRIEUC, MANOIR BOUZONVILLE, MANOIR PITRES et à la société MANOIR AÉROSPACE au titre de sa garantie de preneur initial aux fins de voir payer le solde des loyers.



Par actes d'huissier du 22 avril et du 22 mai 2015 la société MANOIR AÉROSPACE a délivré à la société KALKALIT BLADE des réponses à sommation de payer refusant de payer les sommes réclamées.



Par actes d'huissier des 30 avril 2015 et 5 mai 2015, les sociétés MANOIR SAINT BRIEUC, MANOIR PITRES et MANOIR BOUZONVILLE ont fait assigner la société KALKALIT BLADE aux fins notamment de voir déclarer non écrite la clause d'indexation du bail, d'obtenir le remboursement des sommes trop perçues et ordonner une expertise quant aux désordres affectant certains sites.



Par acte du 9 juin 2015, la société MANOIR AÉROSPACE a également assigné la société KALKALIT BLADE devant le tribunal de grande instance de Paris afin de s'opposer aux sommations de payer et obtenir réparation de son préjudice.



Dans le courant du mois de juin 2015, la société KALKALIT BLADE a fait procéder à des saisies conservatoires sur les comptes bancaires des sociétés MANOIR PITRES, MANOIR BOUZONVILLE et MANOIR SAINT BRIEUC qui ont été validées par jugement du juge de l'exécution rendu le 3 septembre 2015.



Autorisée par ordonnance du 16 juin 2015, la société KALKALIT BLADE a assigné à jour fixe par actes des 2 et 3 juillet 2015, la société MANOIR AÉROSPACE, Maître [Y] [N], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société MANOIR CUSTINES, la société MANOIR SAINT BRIEUC, la société MANOIR BOUZONVILLE et la société MANOIR PITRES aux fins de voir principalement d'une part, condamner les sociétés locataires aux paiements des loyers et charges dus et d'autre part, condamner solidairement la société MANOIR AÉROSPACE au paiement des sommes dues par les sociétés locataires au titre de sa garantie de cessionnaire.



Par jugement en date du 23 février 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- Dit que la Société MANOIR AÉROSPACE reste garant solidairement avec les sociétés MANOIR CUSTINES, MANOIR SAINT BRIEUC, MANOIR BOUZONVILLE et MANOIR PITRES du paiement des loyers et des charges au titre de leurs baux commerciaux jusqu'à l'expiration de la durée restant à courir de ces baux,

- Déclaré non écrite dans son intégralité la clause d'indexation contenue dans chacun des contrats de bail commercial liant la Société KALKALIT BLADE et les sociétés MANOIR CUSTINES, MANOIR SAINT BRIEUC, MANOIR BOUZONVILLE et MANOIR PITRES,

- Dit que la Société MANOIR AÉROSPACE devra restituer aux locataires les sommes trop payées et application de cette clause,

- Dit que les montants des dépôts de garantie et des frais de gestion calculés en application du loyer indexé indûment doivent être rectifiés et que les sommes trop perçues doivent être restituées,

- Débouté les sociétés locataires de leur demande en restitution des frais de gestion relatifs à l'impôt foncier et la Société MANOIR PITRES de sa demande en restitution de la taxe d'ordures ménagères,

- Dit que ne peuvent être réclamés à Maître [N] ès qualités de liquidateur, de la Société MANOIR CUSTINES que les loyers et charges relatifs à la période du 18 février 2015 au 5 juin 2014,(sic)

- Ordonné une expertise et commis pour y procéder dans le respect du contradictoire Madame [K] [S], expert judiciaire, aux fins notamment de faire les comptes entre les parties au titre de chacun des contrats de bail commercial en cause sur les demandes objet de la présente procédure en tenant compte des dispositions du présent jugement et en particulier de faire le compte des sommes facturées au titre des loyers indexés, faire le compte des loyers réellement dus en appliquant les loyers contractuels non indexés tels qu'ils résultent des derniers avenants fixant le loyer, calculer les sommes trop facturées au titre des loyers, calculer les sommes trop versés au titre des dépôts de garantie indûment réajustés par application de la clause d'indexation, recalculer les frais de gestion en application du loyer contractuel non indexé, faire le compte des frais de gestion facturés en fonction du loyer indûment indexé, calculer la somme trop facturée au titre des frais de gestion, faire le compte de la somme totale trop facturée, faire le compte des loyers et charges impayés après rectification du loyer résultant de la suppression de l'indexation excepté pour la Société MANOIR CUSTINES ; pour la Société MANOIR CUSTINES, faire le compte des loyers et charges impayés pour la période du 18 février 2015 au 5 juin 2014 (sic) en tenant compte des versements effectués par l'administrateur puis le liquidateur judiciaire, donner son avis sur les sommes finalement dues par chacune des parties en opérant une compensation sauf pour ce qui concerne la Société MANOIR CUSTINE dont la créance et la dette doivent être présentées distinctement sans compensation,

- Renvoyé l'affaire en reprise des débats après dépôt du rapport de l'expert, à l'audience de mise en état de la 18 chambre 1ème section de ce tribunal à la date du 9 juin 2016 à 11heures pour vérification du paiement de la consignation,

- Dit qu'un des magistrats de la chambre sera délégué au contrôle de cette expertise ;

- Ordonné l'exécution provisoire,

- Sursis à statuer sur les autres demandes notamment celles relatives à la nullité des sommations, aux dommages et intérêts ainsi que celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.



La SAS MANOIR AÉROSPACE a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 22 mars 2016 (RG : 16/07034).



La SARL KALKALIT BLADE a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 5 avril 2016 (RG : 16/07958).



Par ordonnance en date du 16 novembre 2016, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la jonction des procédures inscrites au rôle sous les numéros 16/07034 et 16/07958 et dit qu'elles se poursuivront sous le numéro 16/07034.




Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 22 novembre 2017, la SAS MANOIR AÉROSPACE demande à la Cour :

Vu les articles L.236-20, L.236-21, L.236-22, L.236-14, R.236-8 et R.236-10 du code de commerce,

Vu l'article 1165 du code civil,

Vu l'article 112-1 alinéa 2 du code monétaire et financier,

- Dire et juger Manoir Aerospace recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions d'appel ;

- Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 23 février 2016 en ce qu'il a dit Manoir Aerospace tenue solidairement avec les sociétés Manoir Custines, Manoir Saint-Brieuc, Manoir Bouzonville et Manoir Pitres au titre des baux souscrits avec Kalkalit ;

- Débouter Kalkalit de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Manoir Aerospace ;

Statuant de nouveau,

- Dire et juger que la garantie solidaire prévue à l'article 7.1 des contrats de bail n'est pas applicable en cas de transmission du bail par la voie d'un apport partiel d'actif ;

A titre subsidiaire,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré non écrites les clauses d'indexation figurant dans ces baux commerciaux ;

A titre infiniment subsidiaire,

Vu l'article L.145-16-2 du code de commerce issu des dispositions de la loi Pinel n° 2014-626 du 18 juin 2014,

- Dire et juger que la garantie éventuellement due par Manoir Aerospace ne saurait excéder une durée de trois ans ;

- Désigner tel Expert qu'il plaira à la cour de nommer avec pour mission de déterminer les sommes éventuellement dues par Manoir Aerospace dans le cadre de la garantie, pour la période allant du 28 décembre 2012 au 28 décembre 2015 uniquement ;

En tout état de cause,

- Condamner Kalkalit à payer à Manoir Aerospace la somme de 150.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner Kalkalit aux entiers dépens.



Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 8 novembre 2017, la société KALKALIT BLADE demande à la Cour de :

Vu les articles 1134 et 1728 du Code civil,

Vu les articles 73 et 74 du Code de procédure civile,

Vu les articles 153 et 172 du Code de procédure civile,

Vu l'article 2224 du Code civil,

Vu l'article L. 145-16 du Code de commerce,

Vu les contrats de vente en date du 28 décembre 2007,

Vu les contrats de bail commercial en date du 28 décembre 2007 et du 19 février 2008,

- DIRE ET JUGER recevable et bien fondé l'appel formé par la société KALKALIT BLADE,

- INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a réputé non écrite la clause d'indexation contenue dans chaque contrat de bail commercial,

Et statuant à nouveau,

A titre préalable :

- DECLARER irrecevables les sociétés MANOIR BOUZONVILLE, MANOIR PITRES et MANOIR SAINT BRIEUC en leurs demandes en remboursement des indexations versées ainsi que leurs demandes en dommages et intérêts pour saisie abusive au motif que ces demandes ont été formulées dans le cadre de la procédure en ouverture de rapport actuellement pendante devant le Tribunal de Grande Instance de Paris,

- DECLARER irrecevables les sociétés MANOIR BOUZONVILLE, MANOIR PITRES et MANOIR SAINT BRIEUC en leur demande de sursis à statuer,

A titre principal :

- DIRE ET JUGER que la clause d'indexation contenue dans chaque contrat de bail commercial est parfaitement valable,

En conséquence,

- ORDONNER la parfaite exécution par les défendeurs des clauses et conditions prévues aux baux commerciaux qui leur ont été consentis respectivement les 28 décembre 2007 et du 19 février 2008 ;

- CONDAMNER solidairement avec la société MANOIR AÉROSPACE :

- la société MANOIR BOUZONVILLE à la somme de 715.095,90€ correspondant aux loyers et charges impayés au titre des quatrième trimestre 2014, premier, deuxième et troisième trimestre 2015, avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2015 (date de délivrance d'une sommation de payer) pour la somme de 393.965,11 €, à compter de la date de délivrance du présent exploit pour la somme de 321.130,79 €, et à compter de la date de l'arrêt à intervenir pour le surplus,

- la société MANOIR SAINT BRIEUC à la somme de 2.588.164,42 € correspondant aux loyers et charges impayés au titre des premier, deuxième et troisième trimestre 2015, avec intérêts au taux légal à compter du 3 avril 2015 (date de délivrance d'une sommation de payer) pour la somme de 382.202,51 €, à compter de la date de délivrance du présent exploit, pour la somme de 2.205.961,91€ et à compter de la date de l'arrêt à intervenir pour le surplus,

- la société MANOIR PITRES à la somme de 1.905.402,86 €, correspondant aux loyers et charges impayés au titre des quatrième trimestre 2014, premier et deuxième trimestre 2015, avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2015 (date de délivrance de la sommation de payer) pour la somme de 1.216.168,28€, à compter de la date de délivrance du présent exploit pour la somme de 689.234,58€, et à compter de la date de l'arrêt à intervenir pour le surplus,

- Maître [Y] [N], prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Manoir Custines, au paiement de la somme de 222.857,19 € correspondant aux loyers et charges dus par la société Manoir Custines, postérieurement au 18 février 2015, date de prononcé du jugement ayant ouvert une procédure collective à son encontre, avec intérêts au taux légal à compter de la date de délivrance du présent exploit.

A titre subsidiaire :

si, par impossible, la clause d'indexation devait être réputée non écrite,

- DIRE ET JUGER que la demande en restitution des indexations versées depuis la conclusion du contrat doit être encadrée dans la limite des 5 années de la prescription à compter de l'assignation délivrée par les sociétés Manoir Bouzonville, Manoir Pitres et Manoir Saint Brieuc le 5 mai 2015,

A titre subsidiaire, sur la clause de garantie solidaire

Si par impossible la condamnation solidaire n'était pas prononcée à l'encontre de la société MANOIR AÉROSPACE :

- CONDAMNER respectivement les sociétés MANOIR SAINT-BRIEUC, MANOIR BOUZONVILLE et MANOIR PITRES et Maître [Y] [N] ès qualités de mandataire liquidateur de la société MANOIR CUSTINES, à mettre en place toutes garanties permettant d'assurer le paiement des loyers et charges au titre des baux dont ils sont titulaires et ce, pendant toute leur période de validité, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard pour chacun d'eux, passé le délai de 8 jours qui suivra la date de signification de l'arrêt à intervenir.

- DIRE que la Cour conservera sa compétence pour liquider et/ou modifier le montant de l'astreinte ainsi prononcée,

- DIRE ET JUGER la société MANOIR AÉROSPACE mal fondée en son appel incident, la DÉBOUTER de tous ses moyens, fins et prétentions,

- DIRE ET JUGER Maître [Y] [N] es qualité de mandataire liquidateur de la société MANOIR CUSTINES mal fondée en son appel incident, la DÉBOUTER de tous ses moyens, fins et prétentions,

En tout état de cause :

- CONFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris pour le surplus,

- CONDAMNER solidairement les intimés à verser à la société KALKALIT BLADE la somme de 200.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER solidairement les intimés aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François Teytaud, Avocats, en application de l'article 699 du Code de procédure civile.



Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 7 novembre 2017, la Société MANOIR BOUZONVILLE, la Société MANOIR PITRES et la Société MANOIR SAINT BRIEUC ont demandé à la Cour de :

Vu les dispositions des articles L.112-1 et L. 112-2 du Code Monétaire et Financier,

Vu les dispositions de l'article 1134, 1147 et 1382 du Code Civil,

Vu les dispositions de l'article L. 145-39 du Code de Commerce

Vu les dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu les dispositions du bail,

- Confirmer en toutes ses dispositions la décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de PARIS en date du 23 février 2016, rectifiée par jugement du 28 juin 2016.

- Surseoir à statuer sur les demandes annexes et comptes à établir entre les parties, jusqu'à l'obtention de la décision du Tribunal, et appel éventuel.

- Rejeter, comme étant une demande nouvelle, la demande d'application de l'article 2224 du Code Civil, la rejeter subsidiairement comme étant infondée.

- Condamner, en conséquence, sur les situations arrêtées au 2ème trimestre 2016, la société KALKALIT BLADE au remboursement en deniers ou quittances des sommes suivantes :

- A la société MANOIR BOUZONVILLE :

o Hypothèse 1 ' application sur l'ensemble de la période :

§ Au titre des loyers : 497.956,52 €

§ Au titre des frais de gestion : 4.979,51 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 24.636,04 €

o Hypothèse 2 ' application de la prescription quinquennale :

§ Au titre des loyers : 455.578,47 €

§ Au titre des frais de gestion : 4.802,14 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 24.636,04 €

- A la société MANOIR PITRES :

o Hypothèse 1 ' application sur l'ensemble de la période :

§ Au titre des loyers : 1.538.251,50 €

§ Au titre des frais de gestion : 20.398,06 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 76.103,86 €

o Hypothèse 2 ' application de la prescription quinquennale :

§ Au titre des loyers : 1.401.371,65 €

§ Au titre des frais de gestion : 14.774,76 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 76.103,86 €

- A la société MANOIR SAINT BRIEUC :

o Hypothèse 1 ' application sur l'ensemble de la période :

§ Au titre des loyers : 896.483,76 €

§ Au titre des frais de gestion : 8.964,84 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 42.006,29 €

o Hypothèse 2 ' application de la prescription quinquennale :

§ Au titre des loyers : 818.281,76 €

§ Au titre des frais de gestion : 8.182,79 €

§ Au titre du complément de dépôt de garantie : 42.006,29 €

- Condamner en outre la société KALKALIT BLADE sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code Civil au paiement de dommages et intérêts à hauteur de :

- En ce qui concerne la société MANOIR BOUZONVILLE :

o 590.344,61 € x 10 % = 59.035,00 €

- En ce qui concerne la société MANOIR PITRES :

o 1.823.649,84 € x 10 % = 182.365,00 €

- En ce qui concerne la société MANOIR SAINT BRIEUC :

o 771.677,43 € x 10 % = 77.167,00 €

- Ordonner la compensation et condamner la société KALKALIT BLADE au paiement du solde éventuel avec intérêts capitalisés.

- Condamner la société KALKALIT BLADE au paiement, au profit de chacune des sociétés, MANOIR BOUZONVILLE, MANOIR PITRES et MANOIR SAINT BRIEUC de la somme de 30.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- La condamner aux entiers frais et dépens dont distraction au profit de Maître Edmond FROMANTIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.



Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 6 novembre 2017, la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [Y] [N] ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société MANOIR CUSTINES, demande à la Cour de :

Vu les articles L.112-1 et L.112-2 du Code Monétaire et Financier,

- DÉCLARER irrecevable la demande en paiement de la somme de 222.857,19€ correspondant aux loyers et charges dus par la société Manoir Custines postérieurement au 18 février 2015, formulée par la société KALKALIT BLADE,

Subsidiairement,

- DÉCLARER mal fondée la société KALKALIT BLADE en sa demande en paiement de la somme de 222.857,19€ correspondant aux loyers et charges dus par la société Manoir Custines postérieurement au 18 février 2015,

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

- INFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris rendu en date du 23 février 2016 en ce qu'il a jugé que « Dit que ne peuvent être réclamés à Maître [N] ès-qualités de liquidateur de la Société MANOIR CUSTINES que les loyers et charges relatifs à la période du 18 février 2015 au 5 juin 2015. »,

- CONFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 23 février 2016 en ce qu'il a déclaré non écrite dans son intégralité la clause d'indexation,

- DÉBOUTER la société KALKALIT BLADE de toutes ses prétentions, fins et conclusions,

- CONDAMNER la société KALKALIT BLADE à verser à Maître [N] ès-qualités de Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société MANOIR CUSTINES la somme de 40.000€ au titre de l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER la société KALKALIT BLADE aux entiers dépens.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 novembre 2017.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur la recevabilité des demandes en remboursement des indexations et en dommage-intérêts pour saisie abusive formée par les sociétés Manoir Bouzonville, Manoir Pitres et Manoir Saint Brieuc :



Le jugement du 23 février 2016, a déclaré non écrite les clauses d'indexation contenues dans chacun des contrat de bail commercial liant la société Kalkanit Blade aux sociétés Manoir Custines, Manoir Saint Brieuc, Manoir Bouzonville et Manoir Pitres et a institué une mesure d'expertise pour faire le compte entre les parties.



Selon l'article 568 du code de procédure civile 'lorsque la cour d'appel est saisie d'un jugement qui a ordonné une mesure d'instruction, ou d'un jugement qui statuant sur une exception de procédure a mis fin à l'instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant une mesure d'instruction.



En l'espèce, les parties s'opposent sur l'évocation par la cour de l'intégralité du litige. Il n'apparaît pas être d'une bonne justice d'évoquer l'intégralité du litige, les premiers juges restant saisi du compte à faire entre les parties y compris s'agissant de la société MANOIR CUSTINES.



Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de sursis à statuer sur le décompte à effectuer entre les parties jusqu'à ce que soit rendue la décision du tribunal de grande instance.



Sur les clauses d'indexation :



Les baux commerciaux conclus le 28 décembre 2007 entre la société Kalkanit Blade et la société MANOIR INDUSTRIE pour le site de [Localité 2], pour le site de [Localité 4], pour le site de [Localité 5] stipulent en clause 4-3 "le loyer stipulé à l'article 4-1 ci-dessus sera ainsi augmenté annuellement en fonction de la variation annuelle de l'indice du coût de la construction et ce, indexé à la date d'anniversaire de la prise d'effet du bail, soit pour la première fois le 28 décembre 2008, puis chaque année au 28 décembre. L'augmentation du loyer ne pourra être supérieure à 6%, étant précisé que le loyer ne pourra pas faire l'objet d'une diminution en cas d'indice du coût de la construction négatif".



Le bail commercial conclu le 19 février 2008 entre la société Kalkanit Blade et la société MANOIR INDUSTRIE pour le site de [Localité 7] stipule en clause 4-3 "le loyer stipulé à l'article 4-1 ci-dessus sera ainsi augmenté annuellement en fonction de la variation annuelle de l'indice du coût de la construction et ce, indexé à la date d'anniversaire de la prise d'effet du bail, soit pour la première fois le 19 février 2009, puis chaque année au 19 février. L'augmentation du loyer ne pourra être supérieure à 6%, étant précisé que le loyer ne pourra pas faire l'objet d'une diminution en cas d'indice du coût de la construction négatif".



Ces clauses limitent les effets de l'indexation à la hausse et l'interdisent à la baisse.



Le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier le loyer à la hausse et à la baisse. Une clause écartant toute réciprocité de variation fausse le jeu normal de l'indexation.



Elle est donc contraire aux dispositions de l'article L112-1 et suivants du code monétaire et financier. Elle contrevient aussi aux dispositions des articles L145-39 du code de commerce qui dispose que la révision peut être demandée chaque fois que par le jeu de la clause d'échelle mobile, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart, puisqu'elle ne permet pas une diminution du montant du loyer. Une telle clause doit être réputée non écrite en application de L145-15 dudit code, dans sa nouvelle rédaction qui est d'application immédiate puisqu'elle ne modifie pas le contrat mais le régime de la sanction réputée non-écrite.



En l'espèce, la clause d'indexation forme un tout et les parties n'auraient pas stipulé la clause d'indexation sans une telle restriction, si bien qu'elle doit être réputée non écrite pour le tout.



Sur la prescription :



La société Kalkanit Blade soulève la prescription de l'action en restitution des indexations perçues dans la limite de cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil à l'encontre des sociétés Manoir Bouzonville, Manoir Pitres et Manoir Saint Brieuc.



Dans le dispositif de leurs conclusions, les sociétés Manoir Bouzonville, Manoir Pitres et Manoir Saint Brieuc demandent le rejet de cette demande nouvelle.



Selon l'article 564 du code ' à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour oppose compensation faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.



La prescription, en ce qu'elle constitue une fin de non recevoir, tend bien à faire écarter les prétentions adverses. Dans ces conditions, elle ne peut être considérée comme étant une demande nouvelle qui serait irrecevable.



La demande en restitution des sommes versées en exécution de l'indexation fondée sur une clause réputée non écrite, est une action en répétition de l'indu. Celle-ci porte sur une partie du loyer perçu par le bailleur. Dès lors, la prescription quinquennale était applicable à la date à laquelle la demande a été formée soit les 30 avril 2015 et le 5 mai 2015.



Sur la clause de garantie solidaire :



L'article 7.1, intitulé 'cession' contenu dans les contrats de bail commercial conclus le 28 décembre 2007 et le 19 février 2008 entre la société Kalkalit Blade et la société Manoir Industrie devenue la société Manoir Aérospace pour les sites de [Localité 2], [Localité 4], [Localité 5] et [Localité 7] prévoit une clause de garantie solidaire ainsi libellée :

'le preneur pourra librement céder son droit au présent bail à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise, ou d'une partie, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'agrément préalable du bailleur sur l'identité de l'acquéreur. Il est ici précisé qu'en cas de cession du droit au bail, les engagements contenus dans le protocole d'information signé ce jour seront repris par les cessionnaires successifs du bail en leur qualité de nouveau preneur-exploitant des locaux loués. Dans ce cas, le preneur restera garant solidairement avec son cessionnaire du paiement des loyers et des charges au titre du présent bail jusqu'à l'expiration de la durée restant à courir du bail à compter de la date de cession mais seulement dans l'hypothèse où le cessionnaire n'a pas une surface financière suffisante (...)'

Cet article précise, par ailleurs, les critères notamment financiers permettant d'établir l'existence d'une 'surface financièrement suffisante.'



Par actes du 28 décembre 2012, la société Manoir Industries devenue Manoir Aérospace a procédé à des apports partiels d'actif de ses branches d'activité à plusieurs sociétés qui ont été constituées en septembre 2012 pour réaliser ces apports. Ainsi, la société Manoir Custines a reçu en apport partiel d'actif le site de [Localité 2], la société Manoir Saint Brieuc a reçu en apport partiel le site de [Localité 7], la société Manoir Bouzonville à reçu en apport partiel d'actif le site de Bonzonville et la société Manoir Pitres a reçu en apport partiel d'actif le site de Pitres. Dans le cadre de ces apports partiels d'actif, les sociétés nouvellement constituées sont 'venue(s) aux droits et obligations de la société Manoir Industrie dans l'exécution et le respect du contrat de bail et ce, conformément aux dispositions des articles L145-16 et suivants du code de commerce comme cela est rappelé dans les avenants conclus le 28 décembre 2007 entre la société Kalkalit Blade, la société Manoir Industries et chacune des nouvelles sociétés.



L'article L145-16 du code de commerce dispose que :

' sont également réputées non écrites quelle qu'en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu'il tient du présent chapitre à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise.

En cas de fusion de sociétés ou d'apport d'une partie de l'actif d'une société réalisé dans les conditions prévues à l'article L236-22, la société issue de la fusion ou la société bénéficiaire de l'apport est, nonobstant toute stipulation contraire, substituée à celle au profit de laquelle le bail était consenti dans tous ses droits et obligations découlant de ce bail.

En cas de cession, de fusion ou d'apport, si l'obligation de garantie ne peut plus être assurée dans les termes de la convention, le tribunal peut y substituer toutes garanties qu'il juge suffisantes.'



La société Manoir Aérospace soutient que l'article 7.1 des baux ne s'applique qu'en cas de cession de baux et non en cas d'apports partiels d'actifs, que ces deux notions sont exclusives l'une de l'autre et que les contrats d'apport partiel excluent toute solidarité entre elle et les sociétés bénéficiaires.



Il n'est pas contestable que l'apport partiel d'actif a entraîné le transfert des contrats de baux au profit des sociétés bénéficiaires.



Certes, il ne s'agit pas d'une cession au stricte sens du terme puisqu'elle n'est pas soumise à l'article 1690 de code civil s'agissant d'une scission. Pour autant, vis à vis du bailleur elle en produit les effets, puisque le bénéficiaire de la scission devient titulaire du bail.



Dans ces conditions, la clause 7.1 des baux doit recevoir application, le preneur demeurant solidairement tenu avec le nouveau titulaire du bail envers le bailleur.



Il importe peu que les contrats d'apport prévoient à l'article 5.7 pour Manoir Custines, 5.8 pour Manoir Saint Brieuc, Manoir Bouzonville et Manoir Pitres que 'Manoir Custines (...) sera subrogée purement et simplement dans le bénéfice et charge de tous les baux (...) de la branche d'activité apportée en cours à la date de réalisation. En conséquence Manoir Custines paiera toutes les redevances, annuités ou loyers afférents à ces conventions pour ceux qui lui incombent à compter de la date de réalisation exécutera toutes les clauses, charges et conditions en résultant, le tout de manière à ce que (Manoir Aérospace) ne puisse être inquiétée, ni recherchée à ce titre'.



Cette clause en raison de l'effet relatif des contrats n'est pas opposable au tiers qu'est la société Kalkanit Blade.



De même il importe peu qu'aux termes de l'article L236-21 du code de commerce ' il peut être stipulé que les sociétés bénéficiaires de la scission ne seront tenues que de la partie du passif de la société scindée mise à la charge respective et sans solidarité entre elles ', puisqu'il s'agit de la transmission des dettes de la société absorbée qui n'est pas en cause en l'espèce.



La société Manoir Aérospace soutient que les baux auraient été modifiés depuis leur transfert et qu'en vertu de l'effet relatif des contrats ces contrats ne lui sont pas opposables.



Il résulte des pièces produites aux débats que le contrat du 28 décembre 2007 liant la société Kalkalit Blade à la société Manoir Pitres a fait l'objet d'un avenant le 2 juillet 2014 modifiant les pénalités de retard et les intérêts de retard.



Par ailleurs, le contrat du 19 février 2008 liant la société Kalkanit Blade à la société Manoir Saint Brieuc a également fait l'objet d'un avenant, non daté, mais avec effet au 1er janvier 2013, modifiant les pénalités de retard et les intérêts de retard.



En application de l'article 1165 du code civil, les stipulations contenues dans ces avenants relatives aux pénalités de retard et aux intérêts de retard, ne sont pas opposables à la société Manoir Aérospace.



A titre subsidiaire, la société Manoir Aérospace demande qu'en application de l'article L145-16-2 du code de commerce, dans sa rédaction résultant de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, sa garantie soit limitée à trois ans à compter des apports partiels d'actifs, soit pour la période allant du 28 décembre 2012 au 28 décembre 2015.



Les parties s'opposent en ce qui concerne l'application de cet article.



Il est constant que cet article n'a pas fait l'objet de disposition transitoire spécifique.



En matière contractuelle, les effets des contrats conclus antérieurement à la loi nouvelle doivent en principe être soumis à la loi ancienne, sauf s'il s'agit de disposition impérieuse d'intérêt général ou en vertu des effets légaux du contrat. L'article L145-16-2 susvisé n'est pas une disposition impérative puisqu'elle ne figure pas à l'article L145-15 du dit code. Il ne s'agit donc pas d'une disposition impérieuse d'intérêt général entraînant son application immédiate.

Par ailleurs, il ne peut davantage être soutenu que ce texte serait d'application immédiate comme relevant des 'effets légaux du contrat'. Le texte ne porte pas sur une prérogative inhérente au statut légal des baux commerciaux, mais sur un mécanisme contractuel qui relève de la volonté des parties. Il en résulte que la loi nouvelle ne peut trouver à s'appliquer immédiatement à cet effet contractuel du bail.



Contrairement à ce que soutient la société Manoir Aerospace, il ne s'agit pas de mettre en oeuvre un délai de prescription plus court que celui prévu par une loi ancienne, mais de faire application à un contrat conclu avant son entrée en vigueur, du plafonnement de la durée de la clause de garantie solidaire.



Dès lors, il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce de cette limitation de garantie.



La société Kalkanit Blade sollicite la condamnation de la société Manoir Custines, représentée par son mandataire liquidateur à lui payer une somme de 222.349,71 € pour la période du 18 février 2015 au 31 août 2015.



La société Manoir Custines soutient que la période d'observation s'est étendue sur la période allant du 18 février 2015 date d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire au 1er juin 2015, date du prononcé du jugement de liquidation. Que son activité s'est poursuivie jusqu'au 5 juin 2015 et que le mandataire liquidateur a réglé l'intégralité des loyers pendant cette période. Elle soutient qu'en application de l'article L641-13 du code civil, les loyers postérieurs au 5 juin 2015, date d'arrêt de son activité ne doivent pas être réglés au bailleur dans la mesure où ces loyers ne sont pas nés durant la période de maintien provisoire de l'activité, et ne sont pas nés d'un contrat dont la poursuite aurait été décidée par le liquidateur.



La cour relève qu'il résulte de la pièce 10, du mandataire liquidateur qu'il a été autorisé le 19 août 2015 à céder ' le fonds de commerce et la clientèle -dont le droit au bail du local situé [Adresse 5] (...) ', ce qui implique que le bail était toujours en cours et n'avait pas à cette date été résilié par le mandataire liquidateur. Dès lors, dans la mesure où les loyers sont bien la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur en 'exécution d'un contrat en cours' décidée par le liquidateur, ils devaient être payés à leur échéance conformément à l'article L641-13 du code de commerce. Par ailleurs, les loyers étant la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, ils n'avaient pas à faire l'objet d'une déclaration de créance pour la période postérieure au 5 juin 2015.



Il convient de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a limité l'engagement de la société Manoir Custines à la période du 18 février 2015 au 5 juin 2015, pour l'étendre du 18 février 2015 au 19 août 2015.



La société Manoir Custines allègue de paiements qu'elle aurait effectués, mais la cour n'ayant pas évoqué ce point, il convient de renvoyer les parties devant les premiers juges afin qu'ils effectuent les comptes entre les parties.







PAR CES MOTIFS



La cour statuant publiquement et contradictoirement,



Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne la période prise en compte pour la société MANOIR CUSTINES, représentée par son mandataire liquidateur,

l'infirme sur ce point,



Statuant à nouveau,



Et y ajoutant,



Dit que les stipulations contenues dans l'avenant du 2 juillet 2014 entre la société Kalkanit Blade et la société Manoir Pitres et dans l'avenant à effet du 1er janvier 2013 entre la société Kalkanit Blade et la société Manoir Saint Brieuc, relatives aux pénalités de retard et aux intérêts de retard, ne sont pas opposables à la société Manoir Aérospace,



Dit que ne peuvent être réclamés à Me [N], ès qualités de liquidateur de la société MANOIR CUSTINES que les loyers et charges relatifs à la période du 18 février 2015 au 19 août 2015,



Modifie en conséquence la mission de l'expert s'agissant de la société MANOIR CUSTINES,



Dit n'y avoir lieu d'évoquer les comptes entre les parties et le montant des condamnations à la charge des parties,



Dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer,



Dit que la demande tendant à opposer la prescription est recevable,



Déclare prescrites les demandes en restitution de sommes pour la période antérieure selon les cas au 30 avril 2010 et au 5 mai 2010 en ce qui concerne les sociétés MANOIR BOUZONVILLE, MANOIR PITRES et MANOIR SAINT BRIEUC,



Déclare inapplicable en l'espèce la limitation de garantie prévue par l'article L145-16-2 du code de commerce,



Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,



Fait masse des dépens de l'appel et dit qu'ils seront supportés par chacune des parties avec distraction au profit de Me François Teytaud, avocat et de Me Edmond Fromantin, en application de l'article 699 du code de procédure civile.



LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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