16 février 2021
Cour d'appel de Versailles
RG n° 19/04855

20e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE VERSAILLES





Code nac : 93 a









N° RG 19/04855 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TJ2J



(loi n° 2008-776 du 04 août 2008 de modernisation de l'économie)









































Copies délivrées le :

à :

SARL CARNOT DISTRIBUTION

Me Eric PLANCHAT

DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

Me Jean DI FRANCESCO  





ORDONNANCE



LE SEIZE FEVRIER DEUX MILLE VING ET UN



prononcé par mise à disposition au greffe,



Nous, Christian FAUQUE, Président de chambre à la cour d'appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière de procédures fiscales (article L.16 B), assisté d'Alicia BARLOY, greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :





ENTRE :



SARL CARNOT DISTRIBUTION

Siège social [Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par Me Eric PLANCHAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0406



APPELANTE





ET :



DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

[Adresse 4]

[Localité 8]



représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ET ASSOCIES  avocats au barreau de Paris, P 0137



INTIMEE





A l'audience publique du 20 octobre 2020 où nous étions Christian FAUQUE, Président de chambre, assisté d'Alicia BARLOY, greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour ;
























La société CARNOT DISTRIBUTION exploite une supérette vendant des produits principalement alimentaires sous l'enseigne G20 Franprix. Elle a son siège [Adresse 2] et est gérée par M. [W] [D].



Le 21 mai 2019 le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nanterre a autorisé des opérations de visite et de saisie chez [W] [D] [Adresse 7] et dans les locaux de la Sarl HB BOLD [Adresse 3] pour rechercher des éléments se rapportant à des fraudes fiscales qui auraient été commises par la société CARNOT DISTRIBUTION ainsi que par les sociétés JUNOT DISTRIBUTION et CHAIL DISTRIBUTION, qui ont le même dirigeant.



Le 31 mai 2019 la société CARNOT DISTRIBUTION a formé un recours contre cette ordonnance.



En concluant à son annulation elle fait valoir :



- que les pièces produites par l'administration à l'appui de sa demande d'autorisation doivent avoir une origine licite ; que le contribuable, pour pouvoir choisir en toute connaissance de cause entre les trois options offertes par l'article L 47 A II du Livre des procédures fiscales, doit être informé préalablement par écrit de la nature des traitements informatiques envisagés ; qu'il doit en effet connaître le coût de l'intervention d'un prestataire extérieur s'il n'entend pas procéder lui-même à ces traitements et évaluer la gêne occasionnée par l'intervention de l'administration dans son fonctionnement ;



- qu'en l'espèce les pièces 4 et 5 ont été extraites lors des vérifications des comptabilités des sociétés AUTEUIL MARKET, [Adresse 6] et M. [Z], [Adresse 1] ; que dans ses courriers du 5 juillet et du 9 octobre 2018 adressés à ces deux sociétés l'administration a précisé uniquement la finalité des traitements informatiques envisagés et non leur nature ; que dès lors les pièces précitées doivent être considérées comme d'origine illicite ; que leur production par l'administration doit entrainer l'annulation de l'ordonnance ;



- qu'aux termes de deux décisions du 24 juin 2016 du Conseil Constitutionnel, la répression pénale, en complément de la répression fiscale, ne peut intervenir que dans l'hypothèse des cas de fraude les plus graves ; qu'en l'espèce le juge des libertés et de la détention a omis de vérifier si la fraude évoquée était d'une gravité suffisante ; que son ordonnance, à ce titre, doit également être annulée ;



Considérant qu'il y a lieu cependant de confirmer cette ordonnance ; qu'il apparaît en effet :



- que la société CARNOT DISTRIBUTION, comme les sociétés JUNOT DISTRIBUTION et CHAIL DISTRIBUTION, est présumée utiliser un logiciel XMPS qui dispose de fonctionnalités permettant de minorer les recettes imposables et de ne pas passer régulièrement les écritures comptables ;



- qu'il appartient au juge de l'impôt, et non au juge des libertés et de la détention, de se prononcer sur la régularité des procédures de vérification de sociétés non concernées par la présente procédure de visite domiciliaire ;



- qu'en tout état de cause les courriers adressés le 5 juillet et le 9 octobre 2018 aux sociétés AUTEUIL MARKET et M.[Z] identifiaient les données sur lesquelles devaient porter les traitements informatiques ; qu'ils concernaient le bon enregistrement comptable dans le système de caisse des ventes et des règlements, la séquentialité des enregistrements au niveau des numéros de tickets, les taux de TVA appliqués aux articles vendus, le suivi des flux matières par le rapprochement des stocks, des entrées et des sorties des produits, le contrôle des procédures de correction et d'annulation utilisées sur le système de caisse ;



- que l'article 1741 du code général des impôts, qui réprime pénalement la fraude fiscale, ne s'applique qu'après que le juge pénal ait caractérisé le délit et apprécié sa gravité suffisante ;

que le prévenu qui revendique un non cumul des sanctions doit également établir qu'il a fait l'objet de sanctions fiscales ;



- que l'administration, lorsqu'elle sollicite une visite domiciliaire, n'a pas par définition les éléments lui permettant d'établir les agissements de fraude et donc d'apprécier leur gravité ;



***



Considérant que la Direction générale des Finances publiques sollicite une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



Que l'équité commande de faire droit à cette demande à hauteur de 1 000 euros ;





PAR CES MOTIFS



Statuant contradictoirement,



Confirmons l'ordonnance du 22 mai 2019 du Juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nanterre autorisant la Direction générale des Finances publiques à procéder à des opérations de visite et de saisies au domicile de [W] [D] [Adresse 7] et dans les locaux de la Sarl HB BOLD [Adresse 3] ;



Condamnons la société CARNOT DISTRIBUTION à payer à la Direction générale des Finances publiques une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



La condamnons aux dépens.



Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



ET ONT SIGNÉ LA PRÉSENTE ORDONNANCE



Christian FAUQUE, président

Alicia BARLOY, greffier



LE GREFFIERLE PRESIDENT

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