11 février 2021
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 17/15774

Chambre 3-4

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4



ARRÊT AU FOND

DU 11 FEVRIER 2021



N° 2021/53













Rôle N° RG 17/15774 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBCT5







[A] [L]

SAS TRAVERE INDUSTRIES

SELARL RIOUX





C/



SA LYONNAISE DE BANQUE





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me DURANCEAU

Me LOPEZ















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 26 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2015F00452.





APPELANTS



Maître [D] [L]

Ès qualités de Mandataire liquidateur de la SAS TRAVERE INDUSTRIE

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Delphine DURANCEAU de la SELARL DURANCEAU PARTENAIRES & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE



SAS TRAVERE INDUSTRIES

Prise en la personne de Maître [D] [L],

Ès qualités de Mandataire liquidateur

Dont le siège social est sis [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Delphine DURANCEAU de la SELARL DURANCEAU PARTENAIRES & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE



SELARL RIOUX

Ès qualités de Mandataire liquidateur de la SAS TRAVERE INDUSTRIES,

Dont le siège est sis [Adresse 5]

représentée par Me Delphine DURANCEAU de la SELARL DURANCEAU PARTENAIRES & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE





INTIMEE



SA LYONNAISE DE BANQUE,

Dont le siège est sis [Adresse 3]

représentée par Me Pierre LOPEZ, avocat au barreau de TOULON













*-*-*-*-*



COMPOSITION DE LA COUR



L'affaire a été débattue le 15 Décembre 2020 en audience publique devant la cour composée de :



Madame Laure BOURREL, Président

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller

Madame Florence ALQUIE-VUILLOZ, Conseiller



qui en ont délibéré.







Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Février 2021.



ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Février 2021,



Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




******





FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES



Selon acte sous-seing privé du 10 novembre 2006, la SA Lyonnaise de banque a consenti à la SAS Travere Industries un prêt professionnel de 100'000 € avec la caution de la société Oseo Anvar à hauteur de 60'000 € et de Monsieur [U] [Z], président de l'emprunteuse, à hauteur de 60'000 €.



Le 12 septembre 2007, la société Lyonnaise de banque a consenti une autorisation de découvert de 50'000 € à la SAS Travere Industries avec la caution sous forme d'une créance d'état de 66'766 € et de Monsieur [U] [Z] de 60'000 € .



Par jugement du 3 novembre 2008, le tribunal de commerce de Toulon a placé la société Travere Industries en redressement judiciaire.



Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 novembre 2008, la société Lyonnaise de banque a déclaré une créance au titre du prêt de 69'860,89 euros que la société Travere Industrie a contestée.



Par jugement du 26 mars 2009, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire. Par arrêt du 10 juin 2010, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a infirmé cette décision. Mais selon jugement du tribunal de commerce de Toulon du 13 janvier 2011, la liquidation judiciaire de la société Travere Industries a été à nouveau prononcée. Ont été nommés en qualité de co-liquidateur judiciaire Maître [A] [L] et la Selarl Rioux.



Par LR avec AR datée du 18 janvier 2011 mais signée le 19 janvier 2011, la société Lyonnaise de banque a déclaré une créance de montant de 55'830,52 euros au titre du découvert bancaire et une créance de 69'860,89 euros au titre du prêt bancaire.



La créance au titre du prêt a été contestée à nouveau.

Par ordonnance du 15 octobre 2012 le juge commissaire à la liquidation judiciaire de la société Travere Industrie a accepté cette créance.







Par arrêt du 11 juin 2015, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé cette ordonnance en précisant que le juge commissaire est dépourvu de pouvoir juridictionnel pour trancher la contestation qui oppose les deux parties, a sursis à statuer sur l'ensemble des demandes jusqu'à la décision définitive de la juridiction compétente et a ordonné la radiation de l'affaire.



Par exploit du 28 juillet 2015, la société Lyonnaise de banque a assigné la SAS Travere Industries et les deux mandataires liquidateurs afin que soit fixée sa créance.



La société Travere Industries et les deux mandataires liquidateurs ont contesté la régularité de la déclaration de créance, et celle du calcul du TEG pour absence de prise en compte de certains frais et chiffrage sur 360 jours. La banque a conclu au débouté de la débitrice soutenant la régularité de sa déclaration de créance et la prescription des demandes relatives à l'irrégularité du TEG.



Par jugement du 26 juin 2017, le tribunal de commerce de Toulon a :

- fixé à titre chirographaire la créance détenue par la SA Lyonnaise de banque au passif de la procédure collective de liquidation judiciaire de la SAS Travere Industries à la somme de 69'860,89 euros au titre du prêt consenti le 10 novembre 2006,

- débouté la SAS Travere Industries de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- passé les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.



La société Travere Industries, Me [A] [L] ès qualitès et la Selarl Rioux ès qualitès ont relevé appel de cette décision par déclaration du 14 août 2017.



Par conclusions du 1er mars 2018, qui sont tenues pour entièrement reprises, les appelants demandent à la Cour de :

« Vu les articles L. 622-26 et R. 622-24 du code de commerce,

vu les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation,

vu l'article 1315 et 1907 du Code civil,

vu les explications développées et les pièces versées au débat,

vu la jurisprudence,

Recevoir les appelants en leur appel et le dire bien fondé.

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Toulon du 26 juin 2017 en toutes ses dispositions.

Et par voie de conséquence,

Statuant de nouveau :

À titre principal,

Rejeter la créance telle que déclarée par la SLB pour irrégularité de la déclaration des créances.

À titre subsidiaire,

Constater que la débitrice en procédure collective est protégée par la procédure collective et que la prescription ne joue pas contre elle.

Constater l'irrégularité du mode de calcul du TEG.

Constater la nullité de la clause de stipulation des intérêts.

Dire et juger que la SLB ne peut percevoir aucun intérêt au titre des prêts dont elle sollicite le remboursement.

Rejeter la créance telle que déclarée par la SLB.

En toute hypothèse,

Condamner la SLB à payer la somme de 5000 € par application de l'article 700 du CPC, outre (les) entiers dépens de l'instance.

Débouter la SLB de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires. »



Par conclusions du 2 janvier 2018, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SA Lyonnaise de banque demande à la cour de :

« Vu les articles 1134, 1147, 1153 du Code civil,

vu les pièces produites aux débats,

vu l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 11 juin 2015,



Débouter la SAS Travere Industries des fins de son appel comme irrecevable et mal fondé.

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon le 26 juin 2017.







Fixer la créance de la Lyonnaise de banque au titre du prêt professionnel consenti le 10 novembre 2006 au passif de la SAS Travere Industries à titre chirographaire pour la somme de 69'860,89 euros.

Subsidiairement,

Fixer la créance de la Lyonnaise de banque au titre du prêt professionnel consenti le 10 novembre 2006 au passif de la SAS Travere Industries à titre chirographaire pour la somme de 68'616,18 euros.

En toutes hypothèses,

Condamner la SAS Travere Industries représentée par ses deux liquidateurs judiciaires à payer à la Lyonnaise de banque la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel. »



L'affaire avait été fixée initialement à l'audience du 12 mai 2020. Du fait de la période de crise d'urgence sanitaire, elle a été déplacée au 20 octobre 2020 puis au 15 décembre 2020.



L'instruction de l'affaire a été close le 17 novembre 2020.




MOTIFS



Sur les déclaration de créance



L'alinéa 2 de l'article L. 622-24 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à l'espèce, énonce que la déclaration de créance peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou tout mandataire de son choix.



La déclaration de créance équivalant à une demande en justice, lorsqu'elle est effectuée par un préposé du créancier, il doit justifé du mandat, sans qu'il soit spécial, qu'il a reçu pour effectuer cette formalité au nom de son employeur. Il peut y avoir une cascade de délégations de pouvoir qui doivent être chacune justifiée. Enfin, il doit être fourni tout document permettant de vérifier que le signataire de la déclaration de créance est bien la personne qui a reçu délégation de pouvoir.

Ces justificatifs peuvent être fournis par le créancier jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance.



La déclaration de créance du 18 novembre 2008 est signée par M. [F] [E].



À cette déclaration de créance, est jointe l'attestation notariée du 23 janvier 2006 de Me [C], notaire associé en résidence à [Localité 6], qui atteste que la Lyonnaise de banque, représentée par M. [Y] [W], directeur général adjoint, a donné à M. [F] [E] qui exerce les fonctions de chargé de procuration - contentieux [Localité 7], les pouvoirs imprimés au verso. Il est indiqué dans cette attestation que M. [Y] [W] a reçu pouvoirs de M. [M] [N], président directeur général nommé à cette fonction par décision du conseil d'administration le 17 Juillet 2002.

Le verso de la pièce produite est vierge, mais est jointe une feuille qui liste les pouvoirs délégués à M. [E] dont celuid'ester en justice.

S'agissant d'une attestation notariée, cette deuxième feuille n'est signée que par le notaire.



D'une part, cette attestation notariée ne permet pas à la cour de vérifier que M. [W] avait bien reçu délégation de pouvoir d'ester en justice de la part de M. [N], président directeur général, qui est le représentant légal de la SA Lyonnaise de banque, et qu'il pouvait subdéléguer cette prérogative à M. [E].

D'autre part, l'absence de signature des intéressés et notamment de celle de M. [E], et de tout autre document, ne permet pas de vérifier qu'il est bien le signataire de cette déclaration de créance.



Il n'est donc pas prouvé que cette première déclaration de créance soit régulière comme ayant été faite par un préposé de la Lyonnaise de banque ayant reçu mandat d'y procéder.



La déclaration de créance datée du 18 janvier 2011 mais signée le 19 janvier 2011, l'est par M. [F] [E].





Elle est accompagnée d'une attestation notariée du 1er février 2010 de Me [X] [G], notaire associé en résidence à [Localité 6], qui atteste que la Lyonnaise de banque, représentée par Mme [B] [S], directeur général adjoint, a donné à M. [F] [E] qui exerce depuis le 01/01/2010 les fonctions de fondé de pouvoir - contentieux [Localité 7], les pouvoirs imprimés au verso. Il est indiqué dans cette attestation que Mme [B] [S] a reçu pouvoirs de M. [M] [N], président directeur général nommé à cette fonction par décision du conseil d'administration le 17 Juillet 2002.

La première page est datée du 2 janvier 2010 et porte une signature sous laquelle est écrit [B] [S] Directeur Général Adjoint.

Le verso de cette page est vierge, mais sur une seconde page, sont listés les pouvoirs délégués à M. [E], dont celui d'ester en justice.

Cette seconde page n'est signé que par le notaire.



Nonobstant la signature de Mme [S], il est formulé les mêmes critiques que ci-dessus :

D'une part, cette attestation notariée ne permet pas à la cour de vérifier que Mme [S] avait bien reçu délégation de pouvoir d'ester en justice de la part de M. [N], président directeur général, qui est le représentant légal de la SA Lyonnaise de banque, et qu'elle pouvait subdéléguer cette prérogative à M. [E].

D'autre part, l'absence de signature de M. [E], et de tout autre document, ne permet pas de vérifier qu'il est bien le signataire de cette déclaration de créance.



N'étant pas démontré que cette seconde déclaration de créance a été effectuée par un employé de la Lyonnaise de banque ayant reçu délégation de pouvoir d'y procéder, l'intimée est déboutée de toutes ses demandes et le jugement est infirmé.



Sur les autres demandes



L'équité commande de faire bénéficier la SAS Travere Industries, la Selarl Rioux et Me [A] [L], tous deux mandataire liquidateur de la SAS Travere Industries des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



La SA Lyonnaise de banque aux entiers dépens est condamnés aux entiers dépens et est déboutée de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS



La Cour,



Statuant publiquement par arrêt contradictoire,



Infirme le jugement entrepris,



Statuant à nouveau,



Dit que les déclarations de créances de la SA Lyonnaise de banque sont irrégulières,



Déboute la SA Lyonnaise de banque de toutes ses demandes,



Condamne la SA Lyonnaise de banque à payer à SAS Travere Industries représentée par la Selarl Rioux et par Me [A] [L], tous deux mandataire liquidateur de la SAS Travere Industries la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la SA Lyonnaise de banque aux entiers dépens.





LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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