26 janvier 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-84.472

Chambre criminelle - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:CR00233

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Instruction - Irrecevabilité de constitution de partie civile - Défaut d'accès de la partie concernée au dossier et aux réquisitions du procureur de la République transmises au juge d'instruction - Défaut d'accès de la partie concernée au dossier et aux réquisitions du procureur général devant la Cour d'appel - Non-transmission au Conseil constitutionnel

Texte de la décision

N° F 20-84.472 FS-P+I

N° 00233




26 JANVIER 2021

ECF





NON LIEU À RENVOI







M. SOULARD président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 JANVIER 2021



M. B... N... et les cabinets PriceWaterhouseCoopers audit et PriceWaterhouseCoopers entreprises ont présenté, par mémoires spéciaux reçus le 16 novembre 2020, deux questions prioritaires de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par eux contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2ème section, en date du 22 juin 2020, qui, dans l'information suivie contre le premier du chef de diffusion d'informations mensongères sur la situation d'une personne morale par commissaire aux comptes et contre personne non dénommée des chefs notamment de non révélation au parquet de faits délictueux par commissaire aux comptes, abus de biens sociaux, banqueroute, escroquerie, faux et usage, entrave à l'exercice des fonctions de commissaire aux comptes, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction déclarant irrecevable leur constitution de partie civile.

Des observations complémentaires ont été produites.

Sur le rapport de Mme de Lamarzelle, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. B... N..., des cabinets PriceWaterhouseCoopers audit et PriceWaterhouseCoopers entreprises, et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme de Lamarzelle, conseiller rapporteur, MM. Bonnal, Maziau, Mme Labrousse, MM. Seys, Dary, Mme Thomas, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Violeau, conseillers référendaires, M. Quintard, avocat général, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


1. La première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 87 du code de procédure pénale, dont il résulte que le juge d'instruction peut, d'office ou sur contestation du procureur de la République ou d'une partie, déclarer irrecevable une constitution de partie civile après communication du dossier au ministère public dès lors qu'il a, au préalable, mis en mesure l'intéressé de présenter ses observations (Crim. 13 mars 2014, n°14-90.014), portent-elles atteinte au droit à une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties, au principe du contradictoire et aux droits de la défense, tels qu'ils sont garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en ce qu'elles ne prévoient pas, d'une part, que la partie civile concernée puisse prendre connaissance des réquisitions du procureur de la République et, le cas échéant, des écritures déposées par d'autres parties en vue d'influencer la décision du magistrat instructeur sur la recevabilité de sa constitution, d'autre part, qu'elle doive être préalablement informée par le magistrat instructeur, dans le cas où l'irrecevabilité serait relevée d'office, du motif d'irrecevabilité envisagé et, enfin, qu'elle puisse préalablement consulter, à l'instar du ministère public, le dossier de la procédure, en ce compris les pièces sur lesquelles se fondent les réquisitions et, le cas échéant, les écritures déposées par les autres parties ? »

2. La seconde question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 197, alinéa 3, du code de procédure pénale méconnaissent-elles le droit à une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties, le principe du contradictoire, les droits de la défense, et le droit à un recours juridictionnel effectif, tels qu'ils sont garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en ce qu'elles ne permettent ni à la partie civile appelante d'une ordonnance d'irrecevabilité de sa constitution, ni à son avocat pourtant tenu au secret de l'instruction, de prendre connaissance, avant l'audience, du dossier de la procédure auquel sont jointes les réquisitions du procureur général, y compris les pièces sur lesquelles le magistrat instructeur s'est fondé pour rendre l'ordonnance d'irrecevabilité attaquée et celles sur lesquelles le procureur général, qui, pour sa part, a accès au dossier, s'est fondé pour requérir la confirmation de cette décision ? »

3. Les dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure.

4. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

5. Les questions, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, ne sont pas nouvelles.

6. Les questions posées ne présentent pas un caractère sérieux.

7. D'une part, les dispositions contestées tendent à éviter qu'une personne qui n'a aucun titre à se constituer partie civile puisse obtenir la communication d'une procédure couverte par le secret de l'instruction et accéder au dossier à l'occasion de la contestation de sa constitution.

8. D'autre part, il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que le juge d'instruction ne peut déclarer irrecevable une constitution de partie civile qu'après avoir au préalable mis en mesure l'intéressé de présenter ses observations (Crim. 3 juin 2014 n°14-90.014, Bull. Crim. n°144).

9. Enfin, les dispositions des articles préliminaire et 197, alinéa 3, du code de procédure pénale commandent la communication préalable à la partie civile des réquisitions du procureur de la République et, sur appel de la décision d'irrecevabilité, des réquisitions du procureur général.

10. En conséquence, les dispositions critiquées procèdent d'une conciliation équilibrée entre, d'une part, l'objectif à valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public, d'autre part, les droits de la défense, l'équilibre des droits des parties, le principe du contradictoire et le droit au recours garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du vingt-six janvier deux mille vingt et un.

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