26 janvier 2021
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 19/19948

Chambre 1-11 OP

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP



ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 26 JANVIER 2021



N°2021 / 057















Rôle N° RG 19/19948





N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLWM





[Z] [N] NEE [G]

[U] [N]





C/



[A] [I]

SCP [A] [I]-[R]





































Copie exécutoire délivrée





le :





à :



- Me Mireille RODET



Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:



Décision fixant les honoraires de Me [V] PIOMBO rendue le

29 Novembre 2019 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats d'AIX-EN-PROVENCE.





DEMANDEURS



Maître [Z] [N] NEE [G], demeurant [Adresse 3]



et



Maître [U] [N], demeurant [Adresse 3]



représentés par Me Mireille RODET de la SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE





DEFENDERESSES



Madame [A] [I], demeurant [Adresse 2]



et



SCP [A] [I]-[R], demeurant [Adresse 1]



représentées par Me Michèle GRUGNARDI, avocat au barreau de MARSEILLE

















*-*-*-*-*















DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ







L'affaire a été débattue le 25 novembre 2020 en audience publique devant



Madame Catherine LEROI, Conseiller,



délégué par ordonnance du Premier Président .



Greffier lors des débats : Mme Christiane GAYE.



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2021.







ORDONNANCE



Contradictoire,



Prononcée par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2021



Signée par Madame Catherine LEROI, Conseiller et Mme Christiane GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






***

EXPOSE DU LITIGE



Par décision n° 25366 en date du 29 novembre 2019, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Aix-en-Provence a fixé les honoraires dus par la SCP [A] [I] [R] et Me [A] [I] à Me [Z] [N] à la somme de 7833.69 € TTC.



Par courrier recommandé expédié le 20 décembre 2019 et réceptionné au greffe le 23 décembre 2019, Me [Z] [N] et M. [U] [N] ont relevé appel de cette décision.



A l'audience du 25 novembre 2020, Me [Z] [N] et M. [U] [N], se référant à leurs écritures déposées au greffe le 13 novembre 2020, sollicitent l'infirmation de la décision querellée. Ils demandent à la juridiction :



- de juger que la convention du 5 septembre 2014 fixant les modalités de calcul des honoraires, y compris en cas de dessaisissement est une convention claire, précise ne prêtant pas à interprétation ou dénaturation,

- de valider les factures n° 29 et 30 émises à l'égard de la SCP et de Me [A] [I] en considérant que la clause qui, dans une convention d'honoraires, prévoit les modalités de calcul des honoraires en cas de dessaisissement est une obligation pour l'avocat comme rappelé par la cour de cassation dans un arrêt en date du 23 septembre 2020,

- de rejeter la mise en cause des factures n° 28, 31 et 113 et la décision du bâtonnier à ce sujet,

- de condamner la SCP [I]-[R] et Mme [A] [I] à lui payer chacune la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



La SCP [A] [I]-[R] et Me [A] [I] sollicitent l'allocation de leurs écritures déposées à l'audience tendant à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle a reconnu applicable la convention d'honoraires en date du 5 septembre 2014,sa confirmation en ce qu'elle a rejeté la demande des appelants en paiement d'un honoraire de fin de mission et son infirmation en ce qu'elle a fixé le montant des honoraires de diligences aux sommes de 426.64 € pour la première instance et 7407.04 € pour l'appel.

Elles demandent qu'il soit jugé que les honoraires courants ne peuvent calculés à partir des éléments de tarification prévus par la convention et qu'ils ont été intégralement réglés par le versement de la somme de 14407.80 € TTC.



A titre subsidiaire et dans la mesure où la cour estimerait que la convention d'honoraires est applicable, elles demandent que les honoraires courants soient ramenés à la somme de 1800 € TTC pour la procédure d'appel en l'état du travail effectif accompli ayant consisté en la reprise intégrale des arguments de première instance, de rejeter la demande en paiement d'honoraires de fin de mission en l'absence de résultat obtenu en première instance et en l'absence de diligences nouvelles en appel. Elles sollicitent enfin la condamnation des appelants à leur payer la somme de 3000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.



Il sera référé aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Le présent recours sera déclaré recevable comme satisfaisant aux conditions prévues par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 tout comme l'appel incident formé par la SCP [V] [I]-[R] et Me [V] PIOMBO, conformément aux dispositions de l'article 550 du code de procédure civile.



Une lettre de mission datée du 5 septembre 2014 valant convention de mission et d'honoraires proposée par Me [U] [N] et Mme [Z] [N] a été signée le 5 septembre 2014 par Me [I]-[R], agissant tant pour son compte personnel que pour celui de la SCP notariale, précédée de la mention « bon pour accord . Si les intimées mettent en cause les conditions de signature de cette convention, elles n'en sollicitent toutefois pas l'annulation en se prévalant d'un vice du consentement.



Le cabinet d'avocats recevait, aux termes de cette convention, mission d'assister la SCP de notaires ou Me [I]-[R] à titre personnel, dans les actions tant en demande qu'en défense, portées devant les tribunaux et faisant suite à la mise en examen d'un des associés de la SCP ou résultant du risque qu'entraînerait pour elles une destitution ou une autre sanction susceptible d'être prononcée à l'encontre de ce dernier. Cette convention mentionnait par ailleurs qu'un dépôt de bilan de la SCP était envisagé du fait du blocage du fonctionnement de la société par l'associé co-gérant, et que Mes [U] et [Z] [N] étaient missionnés dans tous dossiers pouvant leur être confiés afin de régler la problématique exposée.



Elle prévoyait à titre de rémunération, outre un honoraire forfaitaire de 150 € HT pour ouverture du dossier, et la tarification de frais divers dont les frais de déplacement et de copies, que les honoraires de l'avocat seraient facturés à hauteur de 200 € HT l'heure travaillée ou immobilisée (transport, attente à l'audience) et qu'un honoraire de fin de mission ou de résultat de 15 % des sommes gagnées ou économisées, serait dû.



Courant 2015, Mme [A] [I] épouse [R] et la SCP notariale ont assigné M. [L] pour obtenir le paiement de dommages intérêts, à hauteur de la somme de 324891 € pour la SCP et de 329472 € pour Mme [I]. De son coté, M. [L] sollicitait reconventionnellement la condamnation de la SCP et de Mme [I] au paiement de diverses sommes. Par jugement en date du 21 septembre 2017, la quasi-totalité de ces demandes ont été rejetées, hormis la somme de 1771,62 € allouée à la SCP. Il a été relevé appel de cette décision. Cette procédure se trouvait encore en cours devant la cour d'appel , un avis de fixation à l'audience de plaidoirie ayant été délivré le 29 janvier 2019 pour le 4 juin 2019 lorsque le cabinet [N] a été dessaisi le 18 mars 2019. Par décision en date du 22 octobre 2019, le retrait du rôle a été ordonné par la cour d'appel à la demande conjointe des parties.



Le 20 mars 2019, le cabinet d'avocat [N] a émis:



- une note d'honoraires n° 28 d'un montant de 6172.53 € HT incluant les frais de 181.70 € soit 7407.04€ TTC, au titre des honoraires de diligences en appel

- une note d'honoraires n° 29 d'un montant de 31138.69 € HT soit 37366,43 € TTC correspondant à l'honoraire de fin de mission dû par la SCP,

- une note d'honoraires n° 31 en date du 20 mars 2019 d'un montant de 355.54 € HT soit 426.65 € TTC, au titre des honoraires complémentaires de diligence en première instance,

- une note d'honoraires n° 30 d'un montant de 25685.40 € HT soit 30822.48 € TTC correspondant à l'honoraire de fin de mission dû par Mme [I].







Me [Z] [N] reconnaît avoir été réglée de la somme de 11725.67 € HT selon facture n° 113 en date du 16 juin 2017 couvrant la période du 19 mai 2015 au 16 juin 2017.



Il n'est pas contestable que la lettre de mission signée et donc acceptée par la SCP [A] [I]-[R] et Me [V] [I]-[R] le 5 septembre 2014 porte sur les éventuelles actions tant en demande qu'en défense faisant suite à la mise en examen de Me [L], notaire associé de Me [I].



L'assignation de M. [L] en responsabilité et paiement de dommages intérêts devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence s'inscrivant dans ce cadre, il convient de faire application de la convention que la SCP [A] [I]-[R] et Me [I] ont signée et qui les engage en application des dispositions de l'article 1134 devenues l'article 1103 du code civil.



Il est constant que Me [Z] [N] a été dessaisie de ce dossier alors qu'il était pendant devant la cour d'appel d'Aix en Provence. Dès lors, en vertu de la jurisprudence de la cour de cassation, seules les clauses prévoyant la rémunération due à l'avocat en cas de dessaisissement en cours de mission sont applicables.



Me [Z] [N] sollicite le règlement de l'honoraire de fin de mission prévu en page 2 de la lettre de mission en se prévalant de la clause suivante : ' l'honoraire de fin de mission est déclenché dès la dénonciation de la présente convention avant résultat obtenu par l'une ou l'autre des parties ou le dessaisissement de l'avocat quelle qu'en soit la raison; dans ce cas, une somme égale au montant de la moitié de l'honoraire de résultat sera immédiatement exigible dès lors que les conclusions ou la transaction auront été acceptées par les clients, ...., les parties convenant expressément que cette somme compensera alors l'impossibilité, par rupture du mandat émanant du client, à ce que l'avocat parvienne au résultat final, irrévocable alors que ses conclusions ou textes ont été acceptés et qu'une partie du résultat a été obtenu'.



Il ressort de cette disposition que l'honoraire de fin de mission est calculé à partir du montant de l'honoraire de résultat; le fait que le droit de l'avocat à la perception d'un tel honoraire soit déclenché dès son dessaisissement, n'empêche pas que seul'obtention d'un résultat irrévocable permet son calcul. En l'espèce, il est établi que l'affaire pendante devant la cour d'appel a seulement fait l'objet d'un retrait du rôle, que l'instance peut donc être reprise par les parties et qu'aucune décision définitive ou transaction n'est à ce jour intervenue comme l'indique Me ROMIEU nouvel avocat de Mme [I] et de la SCP dans une attestation en date du 3 novembre 2020, ce qui ne permet pas de calculer l'honoraire de fin de mission susceptible d'être dû.



Il y a donc lieu de constater que la demande en paiement d'un honoraire de fin de mission par Me [Z] [N] est prématurée, l'honoraire de fin de mission ne pouvant à ce jour être évalué.



Au titre de ses diligences en appel, Me [Z] [N] a émis une note d'honoraires n° 28 d'un montant de 6172.53 € HT incluant les frais de 181.70 € soit 7407.04 € TTC ainsi qu'une note d'honoraires n° 31 en date du 20 mars 2019 d'un montant de 355.54 € HT soit 426.65 € TTC, au titre des honoraires complémentaires de diligence en première instance.



Du fait de la cessation de la mission de Me [Z] [N] avant son achèvement, les honoraires dus doivent être fixés en application des dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et conformément aux critères mentionnés par cet article, soit selon les usages et en fonction des diligences accomplies, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat de sa notoriété et des diligences de celui-ci.



Il ne revient pas au premier président de statuer sur d'éventuelles fautes de l'avocat susceptibles d'engager sa responsabilité, mais seulement de fixer le montant de ses honoraires au regard des critères légaux rappelés. Dès lors, les critiques de la qualité du travail de Me [N] selon lesquelles il aurait omis de faire procéder à une demande d'expertise devront être rejetées.



Les temps de travail et les frais décomptés par Me [N] dans ses facturations apparaissent conformes aux diligences réalisées; en particulier, il ne peut être soutenu que les conclusions prises devant la cour d'appel, qui répondent précisément aux motifs de la décision de première instance ayant rejeté la demande, ne font que reprendre intégralement les écritures initiales.











Les honoraires dus par la SCP [A] [I]-[R] et Mme [A] [I] à Me [Z] [N] seront en conséquence fixés conformément aux factures n° 28 d'un montant de 6172.53 € HT incluant les frais de 181.70 € soit 7407.04 € TTC au titre des honoraires de diligence en appel et n° 31 en date du 20 mars 2019 d'un montant de 355.54 € HT soit 426.65 € TTC, au titre des honoraires complémentaires de diligence en première instance.



La décision déférée sera donc confirmée sur ce point.



L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS, statuant publiquement, contradictoirement en matière de contestation d'honoraires d'avocat,



DECLARONS recevables le recours formé par Me [Z] [N] et Me Jean Louis [N] à l'encontre de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Aix-en-Provence en date du 29 novembre 2019 ainsi que l'appel incident formé par la SCP [V] [I]-[R] et Mme [A] [I] ;



CONFIRMONS cette décision sauf en ce qui concerne l'honoraire de fin de mission dont il convient de constater qu'il ne peut à ce jour être évalué ;



DISONS n' y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;



DISONS que chaque partie conservera la charge des dépens par elle avancés.





LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.