16 décembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-15.505

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:CO00836

Texte de la décision

COMM.

COUR DE CASSATION



FB


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 16 décembre 2020




NON-LIEU A RENVOI


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 836 F-D

Pourvoi n° S 20-15.505



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

Par mémoire spécial présenté le 12 octobre 2020, Mme M... X..., épouse H..., domiciliée [...] , a formulé une question prioritaire de constitutionnalité (n° 944) à l'occasion du pourvoi n° S 20-15.505 formé contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre), dans une instance l'opposant au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [...] ,

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme H..., de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

1. A l'occasion du pourvoi incident qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble, Mme H... a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« La combinaison des dispositions du 3° du 2 de l'article 793 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable au litige, issue de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, et des dispositions du premier alinéa de l'article 793 bis du même code, dans leur rédaction applicable au litige, issue de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, sont-elles conformes à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, en tant qu'elles instituent, pour le bénéfice de l'exonération partielle prévue par les dispositions précitées de l'article 793 du code général des impôts, une différence de traitement entre les contribuables, selon qu'ils conservent ou non pendant les cinq années suivant la transmission au titre de laquelle l'exonération est demandée, les biens objet de cette transmission ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

2. L'article 793 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, dispose :

« Sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit :

2. 3° Les biens donnés à bail dans les conditions prévues aux articles L. 416-1 à L. 416-6, L. 416-8 et L. 416-9 ainsi qu'aux articles L. 418-1 à L. 418-5 du code rural, à concurrence des trois quarts de leur valeur, sous réserve des dispositions de l'article 793 bis. »

3. L'article 793 bis du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, prévoit, en son alinéa 1er, que « l'exonération partielle prévue au (...) et au 3° du 2 de l'article 793 est subordonnée à la condition que le bien reste la propriété du donataire, héritier et légataire pendant cinq ans à compter de la date de la transmission à titre gratuit. Lorsque cette condition n'est pas respectée, les droits sont rappelés, majorés de l'intérêt de retard visé à l'article 1727. »

4. Les dispositions contestées sont applicables au litige, lequel porte sur la contestation, par Mme H..., du rappel des droits de mutation à titre gratuit mis à sa charge par l'administration fiscale pour n'avoir pas respecté la condition de conservation des biens donnés à bail rural à long terme, dont elle a hérité, pendant les cinq années suivant leur transmission.

5. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

7. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.

8. En effet, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

9. En prévoyant la déchéance du régime d'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit, dus en cas de transmission d'un bien donné à bail rural à long terme, dans l'hypothèse du non-respect d'une condition de durée de conservation du bien transmis, les dispositions critiquées ont pour objet de lutter contre les pratiques abusives consistant à conclure un tel bail dans le seul but de transmettre le bien en quasi-franchise d'impôt.

10. La différence de traitement qui en résulte, selon que les biens transmis sont ou non conservés pendant la durée requise, repose sur un critère objectif et rationnel, en rapport avec l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale poursuivi par le législateur, de sorte que le texte critiqué ne méconnaît pas les exigences du principe d'égalité devant les charges publiques.

11. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

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