26 octobre 2018
Cour d'appel de Douai
RG n° 16/04767

Sociale D salle 1

Texte de la décision

ARRÊT DU

26 Octobre 2018







N° 1924/18



N° RG 16/04767 - N° Portalis DBVT-V-B7A-QKOX



SC/VCO







RO



































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAMBRAI

en date du

09 Décembre 2016

(RG 16/00063 -section 5)









































GROSSE :



aux avocats



le 26/10/18





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. Thierry X...

[...]

Représenté par Me Pauline Y..., avocat au barreau de LILLE, assisté par Me Elise Z..., substitué par Me A...



INTIMÉS :



SAS WIMETAL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés [...]

Représentée par Me François B..., avocat au barreau de DOUAI , assistée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me C...





DÉBATS :à l'audience publique du 05 Juillet 2018



Tenue par Sylvie D...



magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.



GREFFIER : Annick GATNER



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ







Sylvie D...



: PRÉSIDENT DE CHAMBRE





Leila E...



: CONSEILLER





Caroline F...



: CONSEILLER









ARRÊT :

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2018,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Sylvie D..., Président et par Audrey CERISIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 14 mai 2018, avec effet différé jusqu'au 21 juin 2018


EXPOSE DU LITIGE



La société Wimetal a pour activité la fabrication de composants de systèmes d'échappements pour l'automobile.



Elle fait partie du groupe Tenneco et comptait en 2014 75 salariés répartis sur deux sites sur deux sites de production, l'un à Rennes, l'autre à Iwuy.



M. Thierry X... a été engagé à compter du 25 décembre 1995 et, dans le dernier état de la relation de travail, il était soudeur cellule, statut ouvrier, niveau II position 2, coefficient 180 de la convention collective de la métallurgie.



Il était également salarié protégé.



Le 20 janvier 2014, la société Wimetal a informé la Direccte d'un projet de réorganisation des activités de la société entraînant la fermeture du site d'Iwuy.



Par courrier du 9 avril 2014, la Dirrecte a informé la société Wimetal de la validation de l'accord collectif majoritaire sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), conclu le 26 mars 2014 dans le cadre du projet de licenciement collectif à la suite de la fermeture de l'établissement d'Iwuy.



Par courrier en date du 7 avril 2014, M. X... s'est vu proposer sept postes de reclassement qu'il a refusés.



Par courrier en date du 24 avril 2014, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 5 mai 2014.



Le comité d'établissement d'Iuwy a par ailleurs été réuni le 6 mai 2014 aux fins d'audition des salariés protégés. Il a le même jour émis des avis favorables sur les licenciements de chaque salarié protégé.



Le 2 juin 2014, l'inspectrice du travail a autorisé le licenciement pour motif économique de M. X....



Par courrier en date du 4 juin 2014, M. X... s'est vu notifier son licenciement pour motif économique.



Le 25 août 2014, l'inspection du travail a retiré sa décision du 2 juin 2014 et pris une nouvelle décision aux termes de laquelle le licenciement pour motif économique de M. X... était autorisé.



Par ordonnance du 11 mai 2015, le tribunal administratif de Lille, saisi par M. X... d'une requête en annulation de la décision du 2 juin 2014 a dit qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de cette décision puisque, par une décision devenue définitive du 25 août 2014, l'inspecteur du travail l'avait retirée.



Entre temps, faisant valoir que le licenciement qui se trouvait privé d'effet du fait du retrait de la décision d'autorisation de licenciement du 2 juin 2014, était dépourvu de cause réelle et sérieuse et que la société Wimetal n'avait pas respecté les engagements pris aux termes du plan de sauvegarde de l'emploi, M. X... a saisi en paiement de diverses indemnités le conseil de prud'hommes de Cambrai qui, par jugement en date du 9 décembre 2016, a accueilli l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la Sas Wimetal, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir et a réservé les dépens.



Par déclaration en date du 22 décembre 2016, adressée par la voie électronique, M. X... a interjeté appel de cette décision.



Par ordonnance du président de chambre en date du 2 mars 2017, l'affaire a été fixée selon les dispositions de l'article 905 du code de procédure civile et la clôture a été a prononcée avec effet différé au 4 mai 2018.



Par ordonnance en date du 14 mai 2018, l'ordonnance de clôture a été révoquée et la clôture a été à nouveau prononcée avec effet au 21 juin 2018.




Par voie de conclusions déposées le 19 juin 2018, M. X... demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

à titre principal :

- constater le retrait de la décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspection du travail en date du 2 juin 2014 ;

- dire qu'il est recevable devant les juridictions prud'homales en ses demandes portant sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement outre la réparation du préjudice subi du fait du retrait de l'autorisation de licenciement ;

- dire qu'il est recevable devant les juridictions prud'homales en ses demandes portant sur l'indemnisation du préjudice subi du fait du non respect par l'employeur de ses engagements pris aux termes du PSE ;

- en conséquence, renvoyer l'affaire devant le conseil de prud'hommes compétent ;

à titre subsidiaire :

- constater l'existence d'une question préjudicielle, nécessaire et sérieuse ;

- prononcer le sursis à statuer ;

- dire qu'il lui appartiendra de saisir la juridiction administrative désignée d'un recours en appréciation de validité de la décision rendue par l'inspection du travail le 25 août 2014 ;

à titre infiniment subsidiaire,

- si toutefois la cour entendait évoquer l'affaire sur le fond, mettre en demeure les parties de conclure sur le fond du litige ;

en tout état de cause,

condamner la société Wimetal à lui verser la somme de 3 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de l'instance.



Sur la compétence du conseil de prud'hommes et la recevabilité de ses demandes, il soutient que :

- le retrait d'une autorisation administrative produit le même effet que son annulation;

- une autorisation administrative de licencier, délivrée postérieurement à l'annulation par le juge administratif d'une précédente autorisation ne peut avoir pour effet de régulariser a posteriori le licenciement prononcé sur la base de l'autorisation annulée ;

- s'agissant de ses demandes relatives à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et des demandes indemnitaires subséquentes, la situation est en l'espèce similaire à un cas de retrait puisque par décision du 25 août 2014, l'inspectrice du travail a expressément retiré sa décision du 2 juin 2014 ; cette nouvelle décision n'a aucun effet rétroactif et ne peut valider le licenciement d'ores et déjà prononcé sur le fondement d'une autre décision ; dès lors la compétence du conseil de prud'hommes doit être admise pour apprécier la validité du licenciement prononcé ;

- s'agissant de ses demandes relatives au non-respect par l'employeur de ses obligations relatives découlant du PSE en matière de présentation d'offres valables d'emploi : la société Wimetal n'avait pas soulevé l'incompétence du conseil de prud'hommes concernant ces demandes ; dès lors qu'il s'agit d'une obligation dont le respect ne peut être vérifié par l'inspection du travail, pour intervenir postérieurement à son autorisation, l'appréciation de cette obligation relève nécessairement de la compétence du conseil de prud'hommes ;

- l'affaire doit donc être renvoyée devant le conseil de prud'hommes.



A titre subsidiaire sur le renvoi devant la juridiction administrative dans le cadre d'une question préjudicielle, il fait valoir que :

- si toutefois la cour n'entendait pas renvoyer l'affaire devant le conseil de prud'hommes, il lui est demandé de surseoir à statuer dans le cadre d'une question préjudicielle devant être soumise aux juridictions administratives ;

- le juge saisi d'un litige a le pouvoir de poser directement à une juridiction de l'autre ordre une question préjudicielle si deux conditions sont remplies : d'une part, la solution du litige dont est saisi le juge doit dépendre d'une décision pouvant seulement être rendue par une juridiction de l'autre ordre et d'autre part, la question doit soulever une difficulté sérieuse ; le juge judiciaire ne peut rejeter la demande sollicitant le renvoi préjudiciel au motif que ne présente pas de caractère sérieux la contestation d'une décision administrative individuelle à l'encontre de laquelle l'intéressé a négligé d'exercer les voies de recours qui lui étaient ouvertes ; en effet, l'exception devant le juge judiciaire tirée de l'illégalité d'un acte administratif individuel n'est soumise à aucune condition de délai ;

- en l'espèce, il justifie d'une question dont dépend l'issue du litige pendant devant la cour ; en effet l'appréciation de la validité de l'autorisation de licenciement délivrée le 25 août 2014 en lieu et place de celle délivrée le 2 juin 2014 est nécessaire à la solution du litige en cours ; du constat de son illégalité dépendra le pouvoir de la juridiction prud'homale à statuer sur ses demandes ;

- il justifie du caractère sérieux de la question soulevée ; pour de multiples raisons, l'autorisation de licenciement délivrée le 25 août 2014 apparaît entachée de nullité :

* la procédure de licenciement diligentée à son encontre n'était pas régulière : l'entretien préalable au licenciement du 5 mai 2014 ne s'est pas régulièrement tenu ; la responsable des ressources humaines s'est contentée de lui indiquer que le site d'Iuwy allait fermer ; le délai entre la tenue de l'entretien préalable et la réunion des représentants du personnel est insuffisant ; en effet, l'entretien préalable s'est tenu le 5 mai 2014 et la réunion de la délégation unique du personnel au cours de laquelle devait être évoquée son cas s'est tenue le 6 mai 2014, moins de 24 heures après de sorte qu'il n'a pu suffisamment préparer sa défense ; l'information des représentants du personnel sur le licenciement économique n'a pas été régulière ; aucun document spécifique n'a été établi concernant son licenciement ; seul a été fourni le document d'ores et déjà examiné par le comité d'entreprise sur les raisons économiques du projet et le PSE; or, l'information économique était insuffisante et l'information sur le reclassement externe ou interne était inexistante ; la saisine de l'administration du travail n'était pas suffisamment explicite pour permettre d'autoriser le licenciement ;

* la décision de l'inspectrice du travail du 24 août 2014 n'est pas suffisamment motivée quant à la cause économique et l'appréciation de cette cause au regard du secteur d'activité du groupe ;

* la décision doit être annulée dans la mesure où l'employeur a manqué à son obligation de recherches de reclassement en interne : l'inspection du travail ne pouvait valablement autoriser le licenciement dès lors que la société Wimetal ne rapportait pas la preuve d'avoir identifié au sein du groupe l'ensemble des postes qu'elle pouvait lui proposer, a limité ses recherches en lui faisant remplir un questionnaire de mobilité illégal et lui a adressé un listing de postes non individualisés ;

* la décision doit être annulée car la cause économique est inexistante : la société Wimetal a entendu limiter le motif économique à la seule activité développée au sein de l'établissement d'Iwuy alors même que c'est au regard du secteur d'activité de l'ensemble du groupe Tenneco qu'il convenait de raisonner ; le groupe Tenneco n'est en réalité confronté à aucune menace pesant sur sa compétitivité ; la fermeture du site de production d'Iwuy correspond à une simple mesure d'économie ne présentant aucune pertinence, ce qui ne saurait s'analyser en une cause économique de licenciement dès lors que l'objectif poursuivi par l'employeur n'était pas le redressement de la société Wimetal ;

* l'autorisation doit être annulée car l'employeur a manqué a son obligation de recherche de reclassement en externe : l'employeur a l'obligation de saisir la commission paritaire territoriale de l'emploi ; en l'état, aucune information sur cette question n'a été fournie ni aux représentants du personnel, ni à l'administration du travail, ni à lui-même alors même que cette information aurait dû lui être transmise dans le cadre du processus de licenciement qui le concernait ;

- il a contesté immédiatement l'autorisation de licenciement accordée par l'inspection du travail le 2 juin 2014 mais ne savait pas qu'il devait aussi contester la nouvelle décision ;

- il est donc bien fondé à solliciter de la cour qu'elle prononce le sursis à statuer et le renvoie à saisir d'un recours en appréciation de légalité la juridiction administrative matériellement et territorialement compétente qu'elle désignera.



A titre infiniment subsidiaire si la cour entend évoquer l'affaire sur le fond, elle rappelle que cette faculté, si elle est utilisée, doit se faire dans le respect du contradictoire de sorte que les parties doivent être invitées à conclure au fond.



Par voie de conclusions déposées le 18 juin 2018 la société Wimetal demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Lille pour statuer sur les demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et conséquences du retrait de la décision administrative du 2 juin 2014 ;

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit du tribunal administratif de Lille pour statuer sur les demandes relatives au respect des obligations du PSE en matière d'offres valables d'emploi ;

- constater l'absence de contestation sérieuse justifiant un renvoi préjudiciel devant les juridictions administratives ;

- statuant à nouveau, juger recevable la demande présentée par M. X... au titre du prétendu préjudice subi du fait du non-respect par l'employeur de ses engagements pris aux termes du PSE en matière d'OVE ;

- si par extraordinaire la cour s'estimait compétente, renvoyer les parties devant le conseil de prud'hommes ou à défaut les inviter à présenter leurs arguments sur le fond;

- à titre reconventionnel condamner M. X... à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Sur l'incompétence du conseil de prud'hommes pour interpréter la portée et la régularité d'une décision administrative, elle soutient que :

- en application du principe de séparation des pouvoirs, le juge judiciaire n'est pas compétent pour se prononcer sur la légalité d'un acte administratif ;

- en matière de licenciement des salariés protégés, ce principe a pour conséquence le fait que le conseil de prud'hommes est incompétent pour se prononcer sur la cause réelle et sérieuse d'un licenciement qui a fait l'objet d'une autorisation préalable de licenciement ;

- selon l'article R. 421-1 du code de justice administrative, la contestation d'une décision administrative est enfermée dans un 'délai de deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée' ;

- le recours formé par M. X... devant le tribunal administratif à l'encontre de la seule décision administrative du 2 juin 2014 a été jugé sans objet et il n'a formé aucun recours à l'encontre de la décision du 25 août 2014 venant se substituer à la première, qui est devenue définitive ;

- M. X... n'ayant pas jugé opportun de contester la décision du 25 août 2014, la cour d'appel ne pourra sans violer la répartition de la compétence entre juge judiciaire et juge administratif se prononcer sur la régularité de cette décision.



Sur la compétence du conseil de prud'hommes pour statuer sur les demandes relatives à l'application du PSE en matières d'offres valables d'emploi, elle fait valoir que :

- elle rejoint la position de l'appelant et confirme avoir conclu en première instance sur le respect de ses obligations au titre de l'engagement prévu par le PSE en matière d'offres valables d'emploi ;

- il est dès lors sollicité de la cour sur ce point qu'elle renvoie les parties devant le conseil de prud'hommes ou invite les parties, en application des articles 16 et 76 du code de procédure civile, préalablement à toute décision sur le fond, à présenter ses arguments de fond.



Sur le renvoi préjudiciel sollicité par M. X..., elle fait observer que :

- si le juge judiciaire constate l'existence d'une contestation sérieuse portant sur la légalité de l'autorisation administrative de licenciement litigieuse, il doit soulever la question de la légalité de l'autorisation de licenciement et la porter par voie préjudicielle devant la juridiction administrative ;

- la contestation sérieuse affectant la légalité de l'autorisation administrative doit être apparente, manifeste, évidente, de telle sorte que le juge prud'homal, bien qu'il ne soit pas compétent pour apprécier la légalité des actes administratifs, peut être légitime à avoir un doute grave concernant la légalité de cet acte ;

- la question préjudicielle ne peut donc avoir pour objet une simple remise en cause du pouvoir souverain d'appréciation de l'inspecteur du travail ;

- la tardiveté de la contestation soulevée par un salarié est de nature à faire douter de son sérieux;

- en l'espèce, la contestation soulevée par M. X... ne porte que sur l'appréciation portée par l'inspection du travail sur la cause réelle et sérieuse du licenciement ; il rediscute des points sur lesquels l'inspecteur du travail s'est déjà prononcé ;

- en l'absence de contestation sérieuse, aucune question préjudicielle n'est donc susceptible d'être posée.



A titre subsidiaire, si la cour d'appel devait se considérer compétente pour statuer sur les demandes indemnitaires formulées par M. X... au titre d'un prétendu 'licenciement sans cause réelle et sérieuse' et 'retrait de l'autorisation de licenciement', elle devra renvoyer les parties devant le conseil de prud'hommes ou très subsidiairement, en application des articles 16 et 76 du Code de procédure civile, les inviter préalablement à toute décision sur le fond les parties à présenter leurs arguments de fond.




MOTIFS :



Sur la demande indemnitaire relative au non respect par l'employeur de ses engagements pris aux termes du plan de sauvegarde de l'emploi :



Si le licenciement de M. X... s'inscrit dans un licenciement collectif pour motif économique ayant donné lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi, la contestation de M. X... ne porte que sur la mise en oeuvre du plan en ce qui le concerne de sorte que la juridiction prud'homale est compétente pour en connaître.



D'ailleurs la société Wimetal n'avait pas soulevé l'incompétence du conseil de prud'hommes et elle avait conclu au fond s'agissant de cette demande.



Il convient donc d'infirmer la décision déférée, de déclarer la juridiction prud'homale compétente et de renvoyer l'affaire devant le conseil de prud'hommes de Cambrai afin qu'il statue sur cette demande.



Sur le retrait de la première autorisation de licenciement et ses conséquences:



L'administration qui a compétence liée peut opérer le retrait d'une décision autorisant ou refusant un licenciement dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision si elle est illégale.



En l'espèce, il résulte des pièces produites que l'inspecteur du travail a retiré l'autorisation de licenciement qu'il avait délivrée le 2 juin 2014, après avoir constaté que cette décision était illégale pour absence de vérification d'une part du motif économique invoqué, d'autre part du respect par l'entreprise de ses obligations conventionnelles de reclassement.



Il en résulte que l'inspecteur du travail pouvait valablement retirer sa première décision pour en modifier le sens et énoncer précisément l'ensemble des motifs de la nouvelle décision par laquelle, il a autorisé, le 25 août 2014, le licenciement de M. X..., de sorte que celui-ci n'est pas fondé à soutenir à l'appui de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour retrait de l'autorisation de licenciement que le retrait de l'autorisation délivrée le 2 juin 2014 produit les effets d'une annulation.



Dès lors, les demandes indemnitaires de M. X... sur ce fondement sont sans objet.



Sur la question de la légalité de l'autorisation administrative de licenciement :



Le juge judiciaire ne peut, en principe, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, apprécier le respect des règles de procédure préalables à la saisine de l'autorité administrative ni le caractère réel et sérieux du motif du licenciement au regard de la procédure de licenciement, de la cause économique ou du respect de l'employeur de son obligation de reclassement.



Le juge judiciaire, d'une part, doit sur question préjudicielle, peu important que la décision n'ait pas été attaquée au principal, renvoyer les parties devant la juridiction administrative, lorsque la question de la légalité de l'autorisation de licenciement du salarié protégé donnée par l'inspecteur du travail, dont dépend l'appréciation du bien fondé des demandes du salarié, présente un caractère sérieux, et d'autre part, lorsque l'autorisation de licenciement, sur renvoi préjudiciel, est déclarée illégale par le juge administratif, il lui appartient, dans ce cas, après avoir statué sur la cause réelle et sérieuse du licenciement, de réparer le préjudice subi par le salarié, si l'illégalité de la décision d'autorisation est la conséquence d'une faute de l'employeur.



M. X... fait valoir que la procédure de licenciement le concernant n'a pas été régulière.



Aux termes des dispositions de l'article L. 1232-2 du code du travail, 'L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.'



Selon l'article L. 1233-2 du même code, 'l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié.'



Il résulte de ces dispositions que l'employeur est tenu, lors de l'entretien préalable, d'indiquer au salarié les motifs du licenciement envisagé contre lui.



En l'espèce, il existe un doute réel sur le point de savoir si l'entretien préalable a porté sur le motif économique du licenciement envisagé à l'égard de M. X... alors que la convocation du 24 avril 2014 à l'entretien préalable se bornait à mentionner qu'il était envisagé à l'égard du salarié une mesure de licenciement sans plus de précision.



Dans ces conditions et sans même qu'il soit utile d'examiner les autre moyens développés par le salarié, l'exception préjudicielle a un caractère sérieux, étant ajouté que la question de la légalité de l'autorisation administrative de licenciement est par ailleurs nécessaire au règlement au fond du litige puisque la réponse qui y sera apportée par la juridiction administrative commandera l'appréciation de la légitimité de la rupture du contrat de travail du salarié.



Il convient donc par conséquent d'accueillir l'exception préjudicielle, en application de l'article 49 du code de procédure civile, de transmettre au tribunal administratif de Lille la question de la légalité de la décision en date du 25 août 2014 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé le licenciement de M. X... et de surseoir à statuer.



PAR CES MOTIFS



LA COUR,



Infirme la décision déférée,



Statuant à nouveau,



Déclare la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur la demande indemnitaire de M. X... fondée sur le non respect par l'employeur de ses engagements pris dans le cadre du PSE ;



Renvoie le dossier devant le conseil de prud'hommes de Cambrai afin qu'il statue sur cette demande ;



Dit que le retrait de l'autorisation administrative de licenciement du 2 juin 2014 ne produit pas les effets d'une annulation ;



Déclare sans objet les demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour retrait de l'autorisation administrative sur ce fondement ;



Transmet au tribunal administratif de Lille la question préjudicielle de la légalité de l'autorisation administrative de licenciement de M. X... en date du 25 août 2014 ;



Sursoit à statuer sur la demande indemnitaire de M. X... fondée sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, dans l'attente qu'il soit statué sur cette question;



Réserve le surplus ainsi que les dépens.



Le Greffier,LePrésident,







A. CERISIERS. D...

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