26 février 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 18/00731

Pôle 6 - Chambre 8

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 26 Février 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00731 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B42CB



Statuant sur renvoi après cassation d'un arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES du 26 mai 2016 sur appel d'un jugement du conseil de prud'hommes de BOULOGNE du 21 juin 2012 ;





APPELANT

M. [D] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136





INTIMÉE

SAS MD2I

[Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 392 772 497

représentée par Me Jean-michel TROUVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0354





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 15 Novembre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Pascale MARTIN, Présidente

Nadège BOSSARD, Conseillère

Benoît DEVIGNOT, Conseiller

qui en ont délibéré





Greffier : Anna TCHADJA-ADJE, lors des débats









ARRET :



- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Pascale MARTIN, Présidente et par Madame Anna TCHADJA-ADJE, Greffier présent lors de la mise à disposition.




















FAITS- PROCÉDURE-PRÉTENTIONS DES PARTIES



M [D] [X] a été engagé par la société SAS MD2I, par contrat de travail à durée indéterminée, initialement en qualité d'attaché commercial, à compter du 1er septembre 1995. Il est devenu directeur commercial en 1998.



L'activité de la société MD2I a évolué dans le temps, puisqu'à son activité initiale et continue d'édition d'un catalogue présentant une sélection de références destinées aux professionnels, se sont ajoutées progressivement des activités de production d'un site Internet présentant l'ensemble des référents disponibles en ligne générant des contacts commerciaux avec les fournisseurs et avec le temps, sont venues encore s'ajouter des activités de vente à distance.



Par courriel en date du 6 octobre 2010, le salarié a mis en demeure son employeur d'avoir à lui régler les commissions sur le chiffre d'affaires Internet, conformément, selon lui, aux modalités fixées, réclamant aussi le paiement de sa prime annuelle, en conformité avec la convention collective de la vente à distance applicable.

Le salarié a réitéré ses demandes par lettre du 18 novembre 2010 et en l'absence de réponse à ses demandes, il a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 17 janvier 2011.



Par lettre du 7 juillet 2011, il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 21 juillet 2011.

Le 18 juillet 2011, il a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail et en a informé le conseil de prud'hommes ainsi que la société MD2I, le 19 juillet 2011.



Il a été licencié par lettre du 27 juillet 2011, pour perte de confiance, le préavis ayant été payé et non exécuté par dispense de l'employeur.



Par lettre du 20 octobre 2011, le salarié a demandé la régularisation de ses commissions pour un montant de 1.897.000 €, pour la période allant de 2006 à 2011, puis a saisi le 28 novembre 2011 le juge des référés.

Le 11 janvier 2012, soit quelques jours avant l'audience de référé fixée au 20 janvier 2012, la société a adressé au salarié une somme de 99.626 € en paiement de l'indemnité de licenciement.



Le 10 février 2012, le conseil de prud'hommes, statuant en référé, a condamné la société à verser à M [D] [X] la somme de 8.205 € de complément d'indemnité de licenciement et celle de 100.088 € à titre de provision sur les commissions Internet, et 950 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.



Par un jugement au fond du 21 juin 2012, le conseil de prud'hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT a dit que le licenciement de M. [X] était fondé sur une cause réelle et sérieuse, dit que la demande concernant la résiliation judiciaire du contrat de travail était sans objet, débouté le salarié de ses demandes concernant le paiement des commissions internet, de l'indemnité de licenciement, et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté le salarié de toutes ses autres demandes.

Toutefois, les premiers juges ont condamné l'employeur à payer au salarié les sommes de 4.223 € au titre la prime annuelle pour l'année 2008, 5.058 € au titre de la prime annuelle 2009, 5.202,66 € au titre de la prime annuelle 2010, et 6.602,82 € au titre de la prime annuelle 2011.



Sur appel interjeté par M [D] [X], la cour d'appel de Versailles a, par un arrêt du 25 juillet 2013, confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il avait attribué à M. [X] des rappels de salaires au titre des primes annuelles.

Réformant de ce chef, la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande au titre des primes annuelles et du surplus de ses demandes, y ajoutant, a condamné la société MD2I à payer à la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par suite de la nullité de la clause de non-concurrence.



Par arrêt du 19 novembre 2014 (pourvoi No 13-22.048), la chambre sociale a cassé et annulé cet arrêt sauf en ce qu'il condamne la société MD2I à payer à M. [X] la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence.



Par arrêt du 26 mai 2016 rendu sur renvoi de cassation, la cour d'appel de Versailles a infirmé partiellement le jugement, débouté le salarié de sa demande formée au titre des primes annuelles, et de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société, dit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, condamné l'employeur à verser au salarié diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité complémentaire pour frais irrépétibles de procédure. Y ajoutant, elle a débouté le salarié de ses demandes de nullité du licenciement, de réintégration et d'indemnisation à ce titre, déboutant enfin les parties du surplus de leurs demandes.



Le salarié a formé un pourvoi le 26 juillet 2016 et dans son arrêt du 30 novembre 2017 , la cour de cassation a statué ainsi :



Condamne la société MD21 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société MD21 à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros >>.





En suite de la saisine de la cour le 12 janvier 2018 par M [D] [X] , les parties ont été convoquées à l'audience du 15 novembre 2018.




Selon conclusions reprises oralement, M [D] [X] demande à la cour

- dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Monsieur [X] de sa demande au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- débouté Monsieur [X] de l'ensemble de ses autres demandes,

- laissé les dépens à la charge de chacune des parties .



Statuant à nouveau Monsieur [X] sollicite de la Cour :



- DIRE ET JUGER le licenciement nul et de nul effet comme portant atteinte à une liberté fondamentale de valeur constitutionnelle ;

- ORDONNER la réintégration de Monsieur [X] dans son emploi de Directeur Commercial sous astreinte de 800 € par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir ;

- En conséquence :

Condamner la société MD2I à verser à Monsieur [X] les salaires dus depuis le licenciement nul jusqu'à la réintégration effective soit la somme provisionnelle arrêtée au 28 novembre 2018 de 1.050.770 € outre 105.770 €

Ordonner la remise des bulletins de paie mensuels couvrant la période de nullité sous astreinte de 200 € par jour ;

- CONDAMNER la société MD2I à une somme de 50.000 € à titre de dommages pour abus de droit ;

A titre subsidiaire,

- Condamner la société MD2I à verser à Monsieur [X] une somme nette de cotisations sociales et de CSG CRDS de 900.000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul ;

En tout état de cause

- Condamner la société MD2I au paiement de 8.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction à la SELARL OBP AVOCATS conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC. >>



La société intimée demande à la cour dans ses écritures et oralement de :

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Boulogne Billancourt du 21 juin 2012 en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [X] fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Y ajoutant,

Dire et juger qu'il résulte des éléments objectifs vérifiables énoncés dans la lettre de licenciement du 27 juillet 2011 que le licenciement pour perte de confiance repose effectivement sur ces éléments et que le trouble causé à l'entreprise par les différentes actions entreprises qui sont explicitement et valablement exposés dans la lettre de licenciement du 27 juillet 2011, comportement par immixtion dans la gestion et qu'ainsi, le licenciement de Monsieur [X] repose donc sur des motifs réels et sérieux de licenciement.

Subsidiairement,

Si par impossible la Cour relevait un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, elle statuera au visa de l'article L 1235-3 du code du travail.

Très subsidiairement sur la nullité du licenciement

Dire et juger Monsieur [X] a implicitement mais nécessairement renoncé à sa réintégration et déclarer cette demande irrecevable et l'en débouter.

Débouter Monsieur [X] de sa demande de réintégration.

Débouter Monsieur [X] de sa demande de condamnation sous astreinte.

Dire et juger que la Cour statuera au visa de l'article L 1235-3 du code du travail.

Si la Cour ordonnait la réintégration, dire et juger que le point de départ de l'indemnisation ne

pourra être fixé qu'à compter du 14 mars 2016.

Dire et juger que l'indemnisation correspondante ne sera admise que sous déduction des revenus de remplacement perçus par Monsieur [X] sur la période mars 2016/2018 non communiqués à ce jour.



En tout de cause,

Débouter Monsieur [X] de sa demande au titre du préjudice moral.

Débouter Monsieur [X] de sa demande au titre de l'article 700 du CPC.

déclarer la société MD2I recevable et bien fondée à solliciter devant la Cour d'appel de renvoi une demande au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer.

En conséquence,

Condamner Monsieur [X] à payer à la société MD2I la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC en cause d'appel.



Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , aux conclusions des parties visées par le greffier à l'audience.














MOTIFS DE L'ARRÊT



Sur la demande en nullité du licenciement



Le salarié invoque la violation de sa liberté d'expression protégée par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 11 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ayant valeur constitutionnelle.

Il indique que les termes de la lettre de licenciement confirment que c'est en raison de ses réponses et contestations aux courriers de la direction et de son action en justice que ce dernier s'est vu sanctionné.

Il invoque également la violation du principe d'égalité des armes et du droit d'agir en justice, considérant que l'employeur a utilisé son pouvoir disciplinaire, en le licenciant 6 mois après son action en justice visant au paiement de ses commissions, pour imposer une solution au litige , le privant volontairement de ses droits, caractérisant ainsi une atteinte aux droits et libertés fondamentaux .



La société indique que la cour dispose des éléments objectifs pour constater que le licenciement pour perte de confiance repose effectivement sur ces éléments et que le trouble causé à l'entreprise par les différentes actions entreprises qui sont explicitement et valablement exposées dans la lettre de licenciement du 27 juillet 2011, comportement par immixtion dans la gestion , pour dire que le licenciement de Monsieur [X] repose donc sur des motifs réels et sérieux de licenciement.



La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :

A la suite de l 'entretien préalable qui s 'est déroulé le 21 juillet 2011, au cours duquel vous vous êtes présenté seul, nous avons pris la décision de procéder à votre licenciement pour perte de confiance, et plus précisément pour les motifs suivants :

Vous avez initié il y a quelques mois une réclamation portant sur vos commissions, considérant que vous ne les aviez perçues que partiellement (votre mail du 6 octobre 2010, votre courrier du 18 novembre 2010).

Ceci est bien évidemment votre droit le plus strict ; nous vous avons demandé à ce sujet de nous communiquer le détail chiffré de vos réclamations pour nous permettre de procéder aux vérifications comptables, ce que vous n'avez jamais fait.

Vous avez ensuite saisi le Conseil de Prud 'hommes, ce qui est également votre droit absolu, même s 'il aurait été plus judicieux d 'explorer la voie amiable compte tenu de l'ancienneté de nos relations et des fonctions que vous exercez.

Par contre, à partir de ce moment, votre comportement, tant à l'égard de Monsieur [N] que de la société s 'est largement dégradé :

Ainsi, vous mettez régulièrement en cause la politique commerciale de l'entreprise et les méthodes de prospection de manière infondée; de même, vous émettez des critiques gratuites à l'égard du dirigeant (votre mail du 17 février 2011) ;

Vous immiscez dans la gestion de l'entreprise, outrepassant très largement vos fonctions de directeur commercial (votre courrier du 7 juin 2011) ;

Bien que vous ayez solennellement été mis en garde sur votre comportement récent, notamment à l'égard du dirigeant, vous persistez à refuser toute remise en cause personnelle (votre courrier du 7juin 2011) ;

Votre comportement traduit une défiance caractérisée à l'égard de l'entreprise et une volonté nette de vous inscrire dans un contexte conflictuel que vous alimentez au quotidien.

Une telle attitude nous conduit à considérer que nous ne pouvons plus vous accorder la confiance nécessaire pour mener à bien votre mission dans l'intérêt de l'entreprise.

Nous voyons donc contraints de procéder à la rupture de votre contrat de travail. >>









Dans cette lettre , il est imputé au salarié une attitude critique à travers son mail du 17 février 2011 et son courrier du 7 juin 2011.

Le premier de ces documents est exempt de termes outrageants ou excessifs à l'égard de son interlocuteur, le salarié indiquant simplement qu'il a constaté une intervention dans sa sphère de compétence et de travail, par l'utilisation de son fichier commercial.



La lettre du 7 juin 2011 est une réponse au courrier adressé à M [D] [X] le 20 mai 2011, aux termes duquel la société SAS MDZI interpellait Monsieur [X] sur son changement de comportement dans son travail, se traduisant par le fait qu'il ne communiquait plus ses actions commerciales quotidiennes et permanentes, ainsi que les résultats qui en ressortait, son absence d'initiative concernant le développement commercial de la société engendrant une baisse du chiffre d'affaires .

Dans son courrier en réponse, le salarié évoque une perception de la part de la direction qui semble 'décalée de la réalité', en ce qui concerne la baisse du chiffre d'affaires du site qui lui est imputée et 'livre des pistes de réflexion', soulignant avoir été écarté des processus depuis qu'il a réclamé des commissions; il demande in fine que l'on cesse les manoeuvres qui gênent et perturbent son travail.



Si ce courrier représente à certains égards une critique quant à des décisions prises par les dirigeants, le ton n'est en rien agressif mais au contraire mesuré, le propos est étayé, aucune accusation sans nuance n'est proférée ad hominem et le salarié réitère sa proposition d'en discuter, de sorte qu'il n'a fait qu'exercer sa liberté d'expression - pouvant être légitime du fait de l'historique de la société - sans termes outrageants, injurieux et excessifs, et en conséquence l'abus n'est pas caractérisé.



Le licenciement ayant pour seules justifications la décision du salarié de saisir la justice et l'exercice de sa liberté d'expression, pour lequel il n'a pas été constaté d'abus, doit en conséquence être déclaré nul pour violation de droits fondamentaux.



Sur la demande de réintégration



La société expose que cette demande serait irrecevable aux motifs que Monsieur [X] depuis le 17 juillet 2011, antérieurement à la notification de son licenciement, a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que par cette demande réitérée pendant plusieurs années de procédure, il a nécessairement mais implicitement renoncé à une réintégration, au visa des griefs qu'il formulait à l'encontre de la société MD2I.



L'appelant rappelle notamment qu' en cas de violation flagrante d'une disposition d'ordre public, la cour de cassation impose que le salarié retrouve son emploi.



Dans la mesure où le salarié a demandé sa réintégration et que l'employeur n'expose aucun élément de nature à rendre celle-ci impossible matériellement, il convient de l'ordonner , en prévoyant une astreinte.



Sur les conséquences financières de la réintégration



M [D] [X] sollicite une indemnité correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le 28 octobre 2011, date de la fin de son préavis de licenciement, jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi.

Il indique que sur la période de 2010 à 2011, il bénéficiait d'une rémunération moyenne brute de 12362 € et qu'il peut valablement prétendre, à une somme arrêtée à titre provisoire (jusqu'à sa réintégration effective) au 28 novembre 2018, calculée ainsi : 85 mois x 12.362 € soit la somme globale de 1.050.770 € outre 105.077 € de congés payés.



Il soutient que la liberté d'expression, l'égalité des armes et le droit d'agir en justice constituent tous trois des droits fondamentaux de valeur constitutionnelle de sorte que selon la jurisprudence de la cour de cassation , cette somme n'est pas susceptible de déduction des revenus perçus pendant la période couverte par la nullité ; à titre subsidiaire, il fournit un décompte des revenus perçus dans la période concernée.



La société invoque le fait que Monsieur [X] a attendu 5 années après son licenciement pour en soulever la nullité, demander sa réintégration ainsi qu'une indemnisation courant à compter de son licenciement, sollicitant que le point de départ en soit fixé au 14 mars 2016.

Elle soutient que c'est par pure opportunité et en commettant un abus dans l'exercice de son droit à indemnisation que Monsieur [X], fort de ses certitudes, se limite devant la cour de renvoi à soutenir que « la société MD2I sera tenue à lui verser une indemnité correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le 28 octobre 2011 date de la fin de son préavis de licenciement jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi. »

Elle demande à la cour d'ordonner à Monsieur [X] de produire aux débats ses déclarations de revenus sur la période 2016 au jour où la cour statuera, pour qu'intervienne une déduction des revenus de remplacement et notamment ceux issus de l'activité professionnelle de Monsieur [X] résultant de la constitution par lui et son épouse en décembre 2013 d'une société CLICKCLIK, Sarl dont il est le gérant, ce qui de plus fort confirme que la réintégration n'était manifestement pas son projet .



S'il est exact que M [D] [X] n'a formé une demande en nullité du licenciement et par voie de conséquence de réintégration que par des conclusions communiquées en mars 2016 devant la cour d'appel de Versailles, faute pour la société de soulever une exception de prescription, elle ne peut restreindre la période à prendre en considération.



Dans la mesure où la présente cour a constaté la violation de droits et libertés garantis par la constitution, le salarié a droit à une indemnisation de nature forfaitaire, dans la limite du montant de la rémunération qu'il aurait du percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration , peu important qu'il ait ou non reçu des salaires ou un revenu de remplacement pendant cette période.

En conséquence, il convient de faire droit à la demande de M [D] [X] mais sans appliquer les congés payés afférents, puisque l'indemnisation n'a pas un caractère de salaire.

Pour cette même raison, la demande de remise des bulletins de salaires sous astreinte n'est pas nécessaire.



Sur la demande à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire



Le salarié soutient qu'au regard de l'abus du droit de licencier et du fait des circonstances vexatoires des motifs de la rupture, il est en droit de réclamer la somme de 50.000 € à titre de préjudice moral et matériel, ayant été confronté à des difficultés financières particulièrement importantes depuis son licenciement.



Outre le fait que M [D] [X] ne justifie pas de ces difficultés et donc de son préjudice matériel, il ne ressort pas des éléments soumis à la cour, des circonstances de nature vexatoire, aucune mise à pied n'ayant été prononcée et le préavis ayant été réglé, de sorte que le préjudice moral invoqué n'est pas démontré et la demande doit être rejetée.













Sur les frais et dépens



La société qui succombe devra s'acquitter des dépens - lesquels ne seront pas distraits , la procédure étant sans représentation obligatoire -, sera déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sera condamnée à ce titre à payer à M [D] [X] la somme de 4.000 €.



PAR CES MOTIFS



La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ,



Vu l'arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de cassation du 30 novembre 2017,



*Infirme le jugement déféré en ses seules dispositions relatives au licenciement et ses conséquences,



Statuant à nouveau et y ajoutant,



*Dit le licenciement nul,



*Ordonne la réintégration de M [D] [X] au sein de la société MD2I à son poste de directeur commercial ou à tout poste substitué ou similaire,



*Dit que cette obligation de faire sera assortie d'une astreinte de 500 € par jour de retard, à l'issue d'un délai de 30 jours à compter du prononcé de la présente décision, pendant une durée de 90 jours,



*Condamne la société MD2I à payer à M [D] [X] :



- la somme de 1.050.770 € , au titre de l'indemnité due pour nullité du licenciement, pour la période du 28/10/2011 au 28/11/2018,

- celle de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



*Déboute M [D] [X] de ses autres demandes,



*Condamne la société MD2I aux dépens de la présente instance.









LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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