23 mai 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 18/06502

Pôle 6 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 23 MAI 2019



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/06502 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5L66



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/11843





APPELANTS



SYNDICAT CGT DASSAULT AVIATION SAINT-CLOUD

pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]



FEDERATION CGT DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentés par Me Pascale BETTINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0140, avocat postulant

Représentés par Me Hervé TOURNIQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1883, avocat plaidant







INTIMEES



SA DASSAULT AVIATION prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Sandrine LOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020, avocat postulant et plaidant





UNION DES INDUSTRIES ET METIERS DE LA METALLURGIE - UIMM

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Marc BORTEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R271, avocat postulant et plaidant















COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 mars 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Monsieur François LEPLAT, Président

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

Madame Monique CHAULET, Conseiller



GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats





ARRET :



- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François LEPLAT, Président et par Madame FOULON, Greffier.




**********



EXPOSÉ DU LITIGE



La société anonyme Dassault Aviation est un constructeur aéronautique qui emploie 8.061 salariés répartis sur neuf sites, dont le contrat de travail relève des conventions collectives du secteur de la Métallurgie.



Les salariés de l'entreprise appartenant à la catégorie des ingénieurs et cadres sont ainsi soumis à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, étendue par arrêté du 27 avril 1973.



Par exploit d'huissier du 28 juillet 2014, le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud a fait assigner la société Dassault Aviation devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d'obtenir l'application des stipulations de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie.



Le 11 octobre 2014, la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie a déposé des conclusions d'intervention volontaire principale.



Par ordonnance du 27 janvier 2015, le juge de la mise en état a, notamment, déclaré nulle l'assignation délivrée le 28 juillet 2014 à la société Dassault Aviation à la requête du syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud, a rejeté le moyen d'irrecevabilité tiré du défaut de pouvoir et de capacité à ester en justice de la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et s'est déclaré incompétent pour examiner les fins de non-recevoir.



Suivant conclusions notifiées le 18 mai 2015, le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud a entendu intervenir volontairement à la procédure.



Saisi d'une demande tendant à voir déclarer irrecevable le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud en son intervention volontaire pour défaut de droit d'agir, le juge de la mise en état, par ordonnance du 29 septembre 2015, s'est déclaré incompétent pour statuer.



Dans ses conclusions notifiées le 17 mai 2017, la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud demandaient, au visa de l'article 1134 du code civil, des articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie, de l'accord d'entreprise du 10 mai 1999 relatif à l'application de la loi du 13 juin 1998 sur la réduction du temps de travail, de l'accord d'entreprise du 19 décembre 2000 sur la mise en oeuvre d'un forfait annuel défini en jours pour les cadres, de l'article L.2132-3 du code du travail, des ordonnances du juge de la mise en état des 27 janvier et 29 septembre 2015, de :

- dire et juger recevable la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie en son action;

- dire et juger recevable l'intervention volontaire du syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud ;

- dire et juger qu'en excluant les salariés dits "cadres transposés" au sens de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie et des accords d'entreprise des 10 mai 1999 et 19 décembre 2000, à savoir les cadres "coefficientés" et les cadres "positionnés" relevant des positions 14, 15 et 16 de la grille de transposition du bénéfice des dispositions des articles 21B et 22 de la convention collective nationale de la métallurgie, en particulier de la progression automatique triennale d'indice prévue par ces articles, la société Dassault Aviation méconnaît, ensemble, cet accord et cette convention ainsi que les accords d'entreprise du 10 mai 1999 et du 19 décembre 2000 dans l'ensemble de ses établissements ;

- enjoindre, sous astreinte de 1.000 euros par jour et par salarié concerné, à la société Dassault Aviation de faire bénéficier les salariés concernés de l'ensemble de ses établissements du dispositif prévu par les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;

- ordonner, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, l'affichage du jugement dans chacun des établissements de la société défenderesse, en un lieu visible et accessible par l'ensemble du personnel ;

- se réserver la liquidation des astreintes ;

- condamner la société Dassault Aviation à verser à la fédération demanderesse et au syndicat intervenant la somme de 10.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte ainsi causée à l'intérêt collectif de la profession ;

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

- condamner la société Dassault Aviation et l'UIMM à verser chacune la somme de 5.000 euros à la fédération demanderesse et au syndicat intervenant au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Dassault Aviation aux entiers dépens, dont distraction au bénéfice de Maître Hervé Tourniquet, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

- débouter l'UIMM de son intervention volontaire ;

- débouter la société Dassault Aviation et l'UIMM de leurs demandes reconventionnelles.



Dans ses dernières écritures, la société Dassault Aviation concluait au débouté des demandes, après avoir demandé, in limine litis, de :

- déclarer irrecevable l'intervention volontaire du syndicat CGT Dassault Aviation pour défaut du droit d'agir, de surcroît au-delà du périmètre de l'établissement de [Localité 4];

- déclarer irrecevable la demande de la CGT tendant à la régularisation de la situation de tous les cadres transposés sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction.



Par jugement entrepris du 7 novembre 2017 le tribunal de grande instance de Paris a :



Déclaré la Fédération CGT des Travailleurs de la Métallurgie, l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie recevables en leurs interventions volontaires et en leurs demandes ;

Déclaré le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud irrecevable en son intervention volontaire ;

Débouté la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie de l'ensemble de ses demandes ;

Condamné la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud aux dépens de l'instance ;

Condamné la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud à payer à la société anonyme Dassault Aviation la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.




PRÉTENTIONS DES PARTIES



Vu l'appel interjeté le 21 mars 2018 par le syndicat CGT et la fédération CGT ;



Vu les dernières écritures signifiées le 24 septembre 2018 par lesquelles le syndicat CGT et la fédération CGT demandent à la cour de :



Vu l'article 1134 du code civil

Vu les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie

Vu l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie

Vu l'accord d'entreprise du 10 mai 1999 relatif à l'application de la loi du 13 juin 1998 sur la réduction du temps de travail

Vu l'accord d'entreprise du 19 décembre 2000 sur la mise en oeuvre d'un forfait annuel défini en jours pour les cadres

Vu l'article L.2262-11 du code du travail

Vu l'article L.2132-3 du code du travail

Vu les ordonnances du juge de la mise en état des 27 janvier et 29 septembre 2015

Vu l'article 31 du code de procédure civile

Vu les articles 122 et 775 du code de procédure civile



Dire et juger la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et le syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud recevables et bien fondés en leur appel

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé recevable l'action de la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie.

L'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :

Dire et juger recevable l'intervention volontaire du syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud.

Dire et juger qu'en excluant les salariés dits "cadres transposés" au sens de l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie et des accords d'entreprise des 10 mai 1999 et 19 décembre 2000, à savoir les cadres "coefficientés" et les cadres "positionnés" relevant des positions 14, 15 et 16 de la grille de transposition du bénéfice des dispositions des articles 21B et 22 de la convention collective nationale de la métallurgie, en particulier de la progression automatique triennale d'indice prévue par ces articles, la société Dassault Aviation méconnaît, ensemble, cet accord et cette convention ainsi que les accords d'entreprise du 10 mai 1999 et du 19 décembre 2000 dans l'ensemble de ses établissements.

Enjoindre, sous astreinte de 1.000 euros par jour et par salarié concerné, à la société Dassault Aviation de faire bénéficier les salariés concernés de l'ensemble de ses établissements du dispositif prévu par les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie à l'expiration d'un délai deux mois courant de la signification de l'arrêt.

Ordonner, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, l'affichage du jugement dans chacun des établissements de la société Dassault Aviation, en un lieu visible et accessible par l'ensemble du personnel.

Dire et juger que la Cour se réservera le pouvoir de liquider lesdites astreintes à l'expiration du délai fixé.

Condamner la société Dassault Aviation à verser à la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et au syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud appelants la somme de 10.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte ainsi causée à l'intérêt collectif de la profession.

Débouter les sociétés intimées de leurs fins et demandes reconventionnelles.

Condamner la société Dassault Aviation et l'UIMM à verser chacune la somme de 5.000 euros à la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et au Syndicat CGT Dassault Aviation Saint Cloud appelants au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner solidairement ou en tout cas in solidum la société Dassault Aviation et l'UIMM aux entiers dépens, dont le recouvrement pourra être poursuivi par Me Pascale Bettinger, avocat postulant au Barreau de Paris, pour ce qui la concerne, en application de l'article 699 du code de procédure civile.



Vu les dernières écritures signifiées le 23 juillet 2018 au terme desquelles la société Dassault Aviation demande à la cour de :



Vu l'article 1er, 21 et 22 de la CCN des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie du 13 mars 1972,

Vu l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie,

Vu l'accord Dassault Aviation des 10 mai 1999 et 19 décembre 2000,

Vu les arrêts de la Cour de Cassation des 6 juillet 2016, 26 janvier 2017 et 6 octobre 2017,



Déclarer la société Dassault Aviation recevable et bien fondée en ses présentes écritures;

Y faisant droit,

Confirmer le jugement du 7 novembre 2017 en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamner la Fédération CGT et le syndicat CGT à verser chacun à la Société Dassault Aviation la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la Fédération CGT et le syndicat CGT aux entiers dépens.



Vu les dernières écritures signifiées le 25 juillet 2018 par lesquelles l'UIMM demande à la cour de :



Vu notamment les articles 328 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article 1188 du code civil (1156 selon l'ancienne codification),

Vu la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie du 13 mars 1972,

Vu l'accord national du 29 janvier 2000 portant révision provisoire des classifications dans la Métallurgie,

Vu l'accord national du 21 juillet 1975 sur la classification,

Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile



Dire et juger la Fédération CGT des travailleurs de la Métallurgie et le Syndicat CGT Dassault Aviation irrecevables et en tout cas mal fondés en leur appel et les en débouter dans leur intégralité,

En conséquence,

Confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamner la Fédération CGT des travailleurs de la Métallurgie et le Syndicat CGT Dassault Aviation à payer, chacun, à l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM) la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner solidairement la Fédération CGT des travailleurs de la Métallurgie et le Syndicat CGT Dassault Aviation aux entiers dépens dont distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit, pour ceux concernant l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM), de Maître [V] [U] de l'Association Leandri & Associés.



Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont déposées et au jugement déféré.




MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur l'intervention volontaire du syndicat CGT :



Après avoir été l'auteur de la saisine du tribunal de grande instance de Paris et avoir vu son assignation annulée par ordonnance du juge de la mise en état du 27 janvier 2015, alors que la fédération CGT était, entre-temps, intervenue volontairement à l'instance, le syndicat CGT a entendu, à son tour, y intervenir volontairement par acte du 18 mai 2015.



Selon l'article 66 du code de procédure civile : "Constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires. (...)"



Contrairement à ce qu'affirme le syndicat CGT, l'annulation de son assignation en justice ne lui a pas fait perdre sa qualité de partie originaire à l'instance, qui ne peut se cumuler avec celle de tiers pouvant y intervenir volontairement.



Le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ce qu'il a déclaré son intervention volontaire irrecevable.



Sur l'intervention volontaire de la fédération CGT :



Seule l'UIMM conclut à l'irrecevabilité de la fédération CGT en son appel, sans toutefois articuler de moyens au soutien de cette demande, qui est d'ailleurs contradictoire avec celle de "confirmer la décision attaquée en toutes ses dispositions", puisque le jugement entrepris a déclaré la fédération CGT recevable en son intervention volontaire.



La cour confirmera donc la recevabilité de l'action de la fédération CGT.



Sur le bénéfice des stipulations relatives à la classification des ingénieurs et cadres de la métallurgie :



Les articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 modifiée concernent leurs classification et indices hiérarchiques. Ils définissent trois positions de classement (I : "années de début", II et III : "ingénieurs et cadres confirmés") et instituent des règles d'avancement automatique sur la grille de classification en fonction de l'âge et de l'ancienneté des salariés.



Il est ainsi prévu à l'article 21 de la convention qu'accèdent à la Position II les ingénieurs et cadres de la Position I qui ont accompli une période de 3 ans dans cette Position, dont une année au moins de travail dans l'entreprise, et atteint l'âge de 27 ans. L'article 22 pose, quant à lui, le principe d'une progression automatique de l'indice hiérarchique par périodes de trois ans.



La fédération CGT soutient en substance que ces articles, et en particulier les dispositifs de progression automatique d'indices et de positions qu'ils définissent, doivent s'appliquer aux "cadres transposés", catégorie de salariés qui bénéficie du statut de cadre en application des stipulations de l'accord national de branche du 29 janvier 2000 "portant révision provisoire des classifications dans la métallurgie", ce que contestent la société Dassault Aviation et l'UIMM.



L'article 3 de l'accord national du 29 janvier 2000 ajoute "parallèlement à la position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté, les six coefficients de classement suivants : 60, 68, 76, 80, 86, 92" à destination de personnels jusqu'alors non cadres, relevant de l'accord national du 21 juillet 1975, et réunissant plusieurs critères que sont : un classement au coefficient 255 minimum de cet accord, une certaine autonomie dans la réalisation des missions et la volonté de conclure une convention de forfait.



L'article 4 de l'accord précise que "Il est institué à partir de l'an 2000 et à titre transitoire, une grille de transposition permettant, pour les salariés qui remplissent les conditions définies à l'article 2, de bénéficier de la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche de la métallurgie, et de déterminer le coefficient de classement résultant de cette convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, correspondant au coefficient de même niveau résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié sur la classification."



Comme l'a justement relevé le tribunal, l'accord du 29 janvier 2000 indique que c'est "parallèlement à la Position I et sans condition d'âge ou d'ancienneté", que les six coefficients applicables aux cadres transposés sont ajoutés, créant une catégorie particulière de cadres, classés, sans les conditions précitées, dans les coefficients 60, 68, 76, 80, 86 ou 92 en fonction de l'emploi occupé par le salarié et de sa classification tandis que les ingénieurs et cadres de la Position I, correspondant aux "années de début", sont des salariés titulaires de l'un des diplômes d'ingénieur ou équivalent, listés à l'article 1er de la convention collective nationale du 13 mars 1972, qui remplissent dans l'immédiat ou au bout d'un certain temps des fonctions de cadre ou d'ingénieur ; que ces derniers sont précisément classés aux coefficients 60, 68, 76, 84 et 92 en fonction de leur âge et de leur ancienneté et peuvent accéder automatiquement à la Position II lorsqu'ils ont atteint l'âge de 27 ans et accompli une période de trois ans en Position I, dont une année au moins de travail effectif dans l'entreprise.



Il en a exactement déduit que les cadres transposés, ne pouvaient prétendre bénéficier du même dispositif de progression automatique dépendant de critères d'âge et d'ancienneté, en faisant observer, d'une part, que l'accord national du 29 janvier 2000 avait été conclu en réaction à la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, dans le but de laisser la possibilité à certains salariés non cadres relevant de l'accord national du 21 juillet 1975 et répondant aux conditions définies en son article 2, de maintenir une rémunération au forfait, qui, au terme de cette loi, en auraient été exclus, celle-ci en réservant le bénéfice au seuls salariés ayant la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche et que, d'autre part, le préambule de cet accord national précise qu'il s'agit d'un dispositif transitoire, dans l'attente de l'aboutissement des négociations engagées en vue de la construction d'une classification unique pour l'ensemble des salariés de la branche, ce qui confirme qu'il ne s'agit pas encore d'un système de classification unique.



Par ailleurs, le tribunal a tout aussi exactement jugé que le fait que l'article 1 alinéa 4 de l'accord du 19 décembre 2000, interne à la société Dassault Aviation, "sur la mise en oeuvre d'un forfait annuel défini en jours pour les cadres" stipule que : "Un cadre coefficienté qui opterait pour un forfait annuel défini en jours en raison de la nature des fonctions qu'il occupe, relèvera de l'article 4 de l'accord national du 29 janvier 2000 établissant une grille de transposition des classifications leur permettant de bénéficier de la qualité de cadre au sens des Conventions collectives, et donc de l'intégralité de la Convention Collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie et de l'ensemble des dispositions statutaires applicables dans la société pour les bénéficiaires de ladite convention", ne permettait cependant pas d'en déduire que les dispositions des articles 21 et 22 de la dite convention bénéficiaient de droit aux salariés concernés puisque cet accord ne fait que tirer les conséquences de l'accord national du 29 janvier 2000 et de la loi du 19 janvier 2000, dans le cadre de laquelle il a été conclu.



Ceci étant, la question soumise à la cour comme au tribunal par la fédération CGT ne concerne pas tant l'application d'une progression automatique, sous conditions d'ancienneté et d'âge, de la Position I "années de début" (article 21 A de la convention collective nationale) à la Position II "ingénieurs et cadres confirmés" (article 21 B de cette convention collective nationale), que la progression triennale automatique prévue à l'article 22 de cette même convention. Or, s'il est constant que l'accord national du 29 janvier 2000 a créé parallèlement à la Position I une nouvelle grille de classification pour les cadres transposés, en revanche, cet accord n'a en rien modifié les Positions II et III de la convention collective nationale du 13 mars 1972, laquelle prévoit en son article 22 B une progression indiciaire "indépendamment de la possession d'un diplôme" accessible "par promotion pour les non-diplômés" sans faire de distinction quant au parcours effectué par chaque salarié au sein de la Position I, de sorte que la cour, infirmant le jugement entrepris sur ce point, dira qu'il n'existe aucun obstacle à ce que des cadres transposés, promus en Position II puissent bénéficier d'une progression triennale automatique au sein de cette Position.



La cour infirmera donc partiellement le jugement entrepris, tout en écartant le prononcé d'une astreinte ou les mesures de publicité de la décision sollicitées.



Sur les dommages et intérêts sollicités par la fédération CGT :



La fédération CGT sollicite de la société Dassault Aviation le paiement de 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte qu'une application erronée des stipulations conventionnelles aurait causée à l'intérêt collectif de la profession.



Ce préjudice n'est toutefois nullement étayé.



La cour rejettera donc cette demande.



Sur l'article 700 du code de procédure civile :



Il est équitable d'allouer à la fédération CGT une indemnité de procédure de 2.500 euros au versement de laquelle seule la société Dassault Aviation sera condamnée.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant par arrêt contradictoire,



Confirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie relatives à l'automaticité de la progression indiciaire au sein de la Position II, telle que définie aux articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres du 13 mars 1972 modifiée,



Et statuant à nouveau,



Dit que les cadres transposés ne bénéficient pas de la progression indiciaire automatique au sein de la Position I et pour le passage en Position II, telles que définies aux articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres du 13 mars 1972 modifiée,



Enjoint la société anonyme Dassault Aviation de faire bénéficier les cadres transposés de la progression indiciaire automatique au sein de la Position II, telle que définie aux articles 21 et 22 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres du 13 mars 1972 modifiée,



Rejette toutes demandes plus amples,



Et y ajoutant,



Rejette toutes autres demandes,



Condamne la société anonyme Dassault Aviation à payer à la fédération CGT des travailleurs de la métallurgie la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne in solidum la société anonyme Dassault Aviation et l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (l'UIMM) aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du code de procédure civile.







LE GREFFIER LE PRESIDENT

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