6 juin 2019
Cour d'appel de Grenoble
RG n° 18/05286

Chambre Commerciale

Texte de la décision

N° RG 18/05286 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JZ6V





MFCT



Minute N°





























































Copie exécutoire

délivrée le :







la SELARL EYDOUX MODELSKI



la SELARL RIONDET



la SCP FOLCO TOURRETTE NERI



la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC,



la SELARL LOUVIER AVOCATS





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE COMMERCIALE



ARRÊT DU JEUDI 06 JUIN 2019





Appel d'un jugement (N° RG 2018F1979)

rendu par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE

en date du 18 décembre 2018

suivant déclaration d'appel du 27 Décembre 2018





APPELANTE :



Société ALDINI AG

société de droit suisse (UID CHE - 114.348.088), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 2]



Représentée par Me Pascale MODELSKI de la SELARL EYDOUX MODELSKI, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Cataldo CAMMARATA, avocat au barreau de PARIS, Me ROUTIER, avocat au barreau de PARIS, et Me Pierre-Michel [D], avocat au barreau de NICE, plaidants





INTIMÉS :



Monsieur [B] [F]

Es-qualités de mandataire judiciaire de la SA DOLPHIN INTÉGRATION, suivant jugement du Tribunal de Commerce de GRENOBLE

du 24 juillet 2018

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 4]



SA DOLPHIN INTEGRATION

société anonyme, en redressement judiciaire aux termes d'un jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 24 juillet 2018, représentée par ses représentant légaux

[Adresse 5]

[Adresse 6]



SELARL ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES PARTENAIRES prise en la personne de Maître [G] [G], Es-qualités d'administrateur judiciaire de la SA DOLPHIN INTEGRATION, suivant jugement du Tribunal de Commerce de GRENOBLE du 24 juillet 2018.

[Adresse 7]

[Adresse 4]



Représentés par Me [N] DE GAUDEMARIS de la SELARL RIONDET, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Céline GASSER, avocat au barreau de LYON, plaidant















Monsieur [Y] [Q]

en qualité de représentant des salariés de la SA DOLPHIN INTEGRATION domicilié en cette qualité au siège de la SA DOLPHIN INTEGRATION

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 6]



Comparant en personne le 10 avril 2019





Monsieur LE PROCUREUR GENERAL

[Adresse 8]

[Adresse 4]



Représenté par Madame Gilsèle AUGUSTE, Avocat Général





Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 1]

[Adresse 9]

[Adresse 10]



Représentée par Me Florence NERI de la SCP FOLCO TOURRETTE NERI, avocat au barreau de GRENOBLE





SAS MBDA FRANCE

société par actions simplifiée immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n°378 168 470 prise en la personne de son dirigeant social

[Adresse 11]

[Adresse 12]



Représentée par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Kyum LEE, avocat au barreau de PARIS, plaidant





SA SOITEC

[Adresse 13]

[Adresse 14]



Représentée par Me Josquin LOUVIER de la SELARL LOUVIER AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE postulant, et par Me Anthony MARTINEZ, avocat au barreau de PARIS, plaidant







COMPOSITION DE LA COUR :



LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Président de chambre,

Madame Fabienne PAGES, Conseiller,

Madame Marie Pascale BLANCHARD, Conseiller,



Assistées lors des débats de Monsieur Frédéric STICKER, Greffier, et Madame Denise GIRARD, Greffière.













DÉBATS :



A l'audience publique du 10 Avril 2019



Madame CLOZEL-TRUCHE, Président, a été entendue en son rapport,



Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,



Monsieur le Procureur Général en ses conclusions,



Puis l'affaire a été mise en délibéré pour que l'arrêt soit rendu ce jour,



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FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



La SA DOLPHIN INTEGRATION, dont le siège social est fixé à MEYLAN, a pour activité la conception en micro informatique. Elle a été créée le 28 février 1985 et est immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de GRENOBLE. Elle a, par la suite , fait son entrée en bourse. Elle est reconnue comme un spécialiste français des circuits intégrés et des composants dits virtuels analogiques et numériques pour la fabrication en grand volume.



Le capital social de la SA DOLPHIN INTEGRATION s'élève à 1.344.520 euros .

Il est composé de 1.344.520 actions.



486.473 actions de la SA DOLPHIN INTEGRATION, soit 39,90 % du capital, sont détenues par une holding familiale, la SARL FONCLAIRE, dont le président fondateur, [N] [M], qui est aussi le fondateur de DOLPHIN INTEGRATION, a transmis l'essentiel de ses parts à ses enfants.

[N] [M] contrôlait ainsi, à travers sa détention propre et de celle de la holding FONCLAIRE 41,20 % des parts et 51,60 % des droits de vote de la société DOLPHIN INTEGRATION dont 10% des actions étaient aussi détenues par les salariés.



Entre juin et décembre 2017 la société GROUPE [M] [T] et la SARL CLEG MOBILITES ont fait respectivement l'acquisition dans le cadre du marché régulé ALTERNEXT devenu EURONEXT GROWTH PARIS de 94.556 actions et de 20.000 actions représentant au total 11 % du capital de la SA DOLPHIN INTEGRATION.



La société de droit suisse ALDINI AG a acquis :

- le 10 juillet 2017, 675 actions de la SA DOLPHIN INTEGRATION

- le 26 juillet 2018, 27.791 actions de la SA DOLPHIN INTEGRATION.

Depuis le 26 juillet 2018 la société ALDINI détient ainsi 2,12 % du capital social de la société DOLPHIN INTEGRATION.



Sont devenus administrateurs la société DOLPHIN INTEGRATION

- le 5 mai 2017 [A] [C] , qui était alors Vice-Président Opérations Spéciales de la société SOITEC

- le 20 juin 2017 la société MBDA FRANCE ; celle-ci a démissionné de ses fonctions le 5 juin 2018, cette démission étant publiée au BODACC le 19 août 2018.



La société DOLPHIN INTEGRATION a connu des difficultés financières.

Une première procédure de conciliation a été ouverte pour quatre mois le 17 avril 2017, renouvelée pour un mois le 22 septembre 2017 et qui s'est terminée le 14 septembre 2017.

Une procédure d'alerte a été mise en oeuvre en décembre 2017.

Le 11 décembre 2017, la SA DOLPHIN INTEGRATION , qui déjà en 2013 avait bénéficié d'un première moratoire de la Commission des Chefs de Services Financiers (CCSF), a obtenu de cette commission un second accord permettant l'échelonnement de ses dettes sociales et fiscales qui s'élevaient alors à 1.800.000 euros; mais cet accord a été dénoncé par la CCSF par décision du 7 mai 2018, notifiée le 28 mai 2018.



Saisi par une requête de la SA DOLPHIN INTEGRATION en date du 4 juin 2018, le Président du Tribunal de Commerce de GRENOBLE, par ordonnance en date du 5 juin 2018, a ouvert une nouvelle procédure de conciliation au profit de cette société et désigné la SELARL AJ PARTENAIRES, prise en la personne de Maître [G], comme conciliateur; le conciliateur a reçu mission notamment d'organiser la cession partielle ou totale des activités de l'entreprise dans le cadre d'un dispositif dit de prépack cession.



Sur déclaration de cessation des paiements en date du 16 juillet 2018 ,qui mentionnait un passif échu de 6.782.506 euros et à échoir de 4.262.398 euros, le Tribunal de Commerce de GRENOBLE, après débats à l'audience du 18 juillet 2018, a pour principales dispositions, par jugement en date du 24 juillet 2018:

- constaté l'état de cessation des paiements de la SA DOLPHIN INTEGRATION , qu'il a provisoirement fixé au 5 juillet 2018

- ouvert la procédure de redressement judiciaire de la SA DOLPHIN INTEGRATION

- désigné Maître [F] comme mandataire judiciaire et la SELARL AJ PARTENAIRES, prise en la personne de Maître [G], comme administrateur judiciaire

- autorisé la poursuite de la période d'observation jusqu'au 15 janvier 2019

- dit que par application de l'article L 631-15 du Code de commerce le Tribunal procédera à l'examen de l'affaire à l'audience du 16 août 2018.



Le 6 juillet 2018 les sociétés SA SOITEC et SAS MBDA FRANCE, clients historiques de la SA DOLPHIN INTEGRATION, ont présenté une offre conjointe de reprise en plan de cession prépackée, pour le compte d'une société en cours de constitution.

Cette offre telle qu'annulée et remplacée par une seconde du 13 juillet 2018, a été déposée au greffe du Tribunal de Commerce le 6 août 2018, avec une durée jusqu'au 31 août 2018, par l'administrateur judiciaire.

Cette offre a été complétée le 10 août 2018 par une lettre d'amélioration.



Le 16 août 2018 la cotation du titre DOLPHIN INTEGRATION qui s'élevait à 3,66 euros (contre 16, 85 euros le 3 janvier 2018) a été définitivement suspendue.



Le 16 août 2018 le Tribunal de Commerce de GRENOBLE a entendu

- en début d'audience, en application des dispositions de l'article L 662-3 du Code de commerce, Maître SYLVESTRE, avocat, représentant les actionnaires familiaux regroupés dans la SARL FONCLAIRE et Maître TETAZ-MONTHOUX, avocat, représentant Monsieur [T],

puis au cours de l'audience qui s'est tenue en chambre du conseil

- [N] DUPEYROT, président du conseil d'administration, et [J] [S], directeur général de la SA DOLPHIN INTEGRATION ; ceux-ci ont émis un avis favorable à la cession

- [Y] [Q], le représentant des salariés qui a émis un avis favorable à la cession

- L'AGS, contrôleur, qui a émis un avis favorable à la cession , observant que la situation de la société DOLPHIN INTEGRATION était catastrophique et que si l'offre soumise au Tribunal ne permettait pas de rembourser le passif, il convenait de retenir de l'économie de coût des licenciements évités par le plan de reprise

- Monsieur le Procureur de la République, qui a émis un avis favorable après avoir relevé que la situation de l'entreprise était catastrophique depuis deux exercices, que la trésorerie était exsangue , que la cession prépak avait été bien préparée, et que l'intervention de Monsieur [T] ne proposait aucun financement immédiat permettant de répondre à la situation financière de la société DOLPHIN INTEGRATION.



Après avoir exposé que lors de l'audience du 18 juillet 2018 il avait décidé après avoir recueilli l'avis du Ministère Public qu'il n'y avait pas lieu d'entreprendre de nouvelles démarches aux fins de susciter de nouvelles offres, au regard de la spécificité de la procédure (conciliation suivie d'une cession appelée à intervenir dans un contexte d'urgence), compte tenu des diligences accomplies antérieurement à l'ouverture de la procédure qui avaient abouti à la formulation d'une offre de reprise, et au regard de la situation de la société DOLPHIN INTEGRATION qui exigeait que soit mise en oeuvre une solution rapide, le Tribunal de Commerce de GRENOBLE, par jugement en date du 21 août 2018, a arrêté avec effet au 21 août 2018 le plan de cession au prix de 200.004 euros du fonds de commerce et des actifs de la société DOLPHIN INTEGRATION au profit des sociétés SA SOITEC et SAS MBDA FRANCE (avec faculté de substitution).

Les cessionnaires ont ainsi repris les contrats de travail des 146 salariés.



Le jugement du 21 août 2018 a été publié au BODACC le 24 août 2018.



Le 8 août 2018 a été immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de GRENOBLE la SAS DOLPHIN DESIGN ; cette société a été constituée entre les sociétés SOITEC (60%) et MBDA FRANCE (40 %) ; son capital a été porté le 24 août 2018 à la somme de 5.000.000 euros qui a été entièrement libérée.

Cette société, qui a pour Président [J] [S], exploite en location gérance le fonds DOLPHIN INTEGRATION depuis le 22 août 2018 et jusqu'à la signature des actes de cession.



Par déclaration reçue le 30 août 2018 au greffe du Tribunal de Commerce de GRENOBLE, les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES ont formé tierce opposition-nullité au jugement rendu le 21 août 2018

A l'issue des débats qui se sont tenus le 13 septembre 2018, le Tribunal , par jugement en date du 16 octobre 2018, a :

- dit que les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES ont formé leur tierce opposition-nullité dans le délai prescrit par l'article

R 661-2 alinéa 2 du Code de commerce, soit dans les 10 jours à compter de la publication de l'insertion au BODACC

- dit irrecevable la tierce opposition -nullité formée par les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES

- condamné solidairement les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES à une amende civile de 5.000 euros au profit du Trésor Public et à payer à chacune des sociétés défenderesses la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamné solidairement les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES aux dépens.

Sur l'appel interjeté le 23 octobre 2018 par les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES, la cour , par arrêt en date du 17 janvier 2019, a confirmé en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 octobre 2018.



Par déclaration au greffe du Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 19 octobre 2018 la société de droit suisse ALDINI AG a formé tierce opposition-nullité contre le jugement rendu le 21 août 2018.


Par conclusions déposées le 2 novembre 2018 [K] [A], les sociétés de droit des Emirats Arabes Unis NEWSUN LIMITED et PEKERM

INVESMENT LTD, et encore la société de droit mauricien DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, sont intervenus volontairement, comme actionnaires étrangers de la société DOLPHIN INTEGRATION, à l'instance en tierce opposition-nullité engagée par la société ALDINI AG.



Après débats qui se sont tenus le 15 novembre 2018, en présence du représentant des salariés et du contrôleur, et encore des sociétés DOLPHIN INTEGRATION, SOITEC et MBDA, le Tribunal de Commerce de GRENOBLE qui avait recueilli le 14 novembre 2018 l'avis écrit du Procureur de la République, par jugement en date du 18 décembre 2018, a :

- dit irrecevable la note en délibéré de la société ALDINI AG du 19 novembre 2018

- écarté en conséquence cette note en délibéré des débats

- rejeté la fin de non recevoir pour défaut de qualité et d'intérêt à agir des sociétés DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et de [K] [A]

- rejeté la demande de la société ALDINI AG et des intervenants volontaires de communication du bilan économique, social et environnemental de l'administrateur judiciaire du 6 août 2018, l'offre de reprise de SOITEC/MBDA du 13 juillet 2018 et la première ordonnance du Président du Tribunal de Commerce de GRENOBLE ordonnant la conciliation

- dit la tierce opposition nullité formée par la société ALDINI AG irrecevable tant pour inobservation des délais qu'en raison de sa représentation à l'audience du 16 août 2018 ayant statué sur le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION

- dit que la fraude des sociétés MBDA et SOITEC n'est pas démontrée et que le tribunal n'avait, au terme du droit des procédures collectives, aucune obligation quant à la vérification du respect de la réglementation relative au droit boursier et aux règles impératives du Code monétaire et financier applicables aux sociétés cotées

- dit en conséquence que le Tribunal n'a commis aucun excès de pouvoir en adoptant le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION

- déclaré irrecevables les interventions à titre accessoire des sociétés DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et de [K] [A]

- condamné la société ALDINI AG ainsi que les sociétés DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et [K] [A] à payer une amende civile de 5.000 euros chacun au profit du Trésor Public

- condamné la société ALDINI AG qui succombe à payer au redressement judiciaire de la société DOLPHIN INTEGRATION, à la société MBDA FRANCE et à la société SOITEC la somme arbitrée à hauteur de 5.000 euros chacun, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamné solidairement les sociétés DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et [K] [A] qui succombent à payer au redressement judiciaire de la société DOLPHIN INTEGRATION, à la société MBDA FRANCE et à la société SOITEC la somme arbitrée à hauteur de 5.000 euros chacun, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamné solidairement les sociétés ALDINI AG, DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et [K] [A] aux dépens.



Par déclaration reçue au greffe le 27 décembre 2018 la société ALDINI AG a interjeté appel du jugement rendu le 18 décembre 2018 en ce qu'il a

- rejeté la demande de la société ALDINI AG et des intervenants volontaires de communication du bilan économique, social et environnemental de l'administrateur judiciaire du 6 août 2018, de l'offre de reprise de

SOITEC/MBDA du 13 juillet 2018 et de la première ordonnance du Président du Tribunal de Commerce de GRENOBLE ordonnant la conciliation

- dit la tierce opposition nullité formée par la société ALDINI AG irrecevable tant pour inobservation des délais qu'en raison de sa représentation à l'audience du 16 août 2018 ayant statué sur le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION

- dit que la fraude des sociétés MBDA et SOITEC n'est pas démontrée et que le tribunal n'avait, au terme du droit des procédures collectives, aucune obligation quant à la vérification du respect de la réglementation relative au droit boursier et aux règles impératives du Code monétaire et financier applicables aux sociétés cotées

- dit en conséquence que le Tribunal n'a commis aucun excès de pouvoir en adoptant le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION

- condamné la société ALDINI AG à payer une amende civile de 5.000 euros au profit du Trésor Public

- condamné la société ALDINI AG qui succombe à payer au redressement judiciaire de la société DOLPHIN INTEGRATION, à la société MBDA FRANCE et à la société SOITEC la somme arbitrée à hauteur de 5.000 euros chacun, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamné solidairement les sociétés ALDINI AG, DISCOVERY CAPITAL MANAGERS LTD, NEWSUN LIMITED et PEKERM INVESMENT LTD, et [K] [A] aux dépens.



La société ALDINI AG a intimé:

- la SA DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES ès qualités d'administrateur judiciaire et Maître [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SA DOLPHIN INTEGRATION

- la SAS MBDA FRANCE

- la SA SOITEC

- L'AGS-CGEA , en sa qualité de contrôleur

- [Y] [Q], en sa qualité de représentant des salariés de la SA DOLPHIN INTEGRATION

- Monsieur le Procureur de la République de GRENOBLE.



Par ailleurs, par exploit du 27 décembre 2018, la société ALDINI AG a donné assignation à la société DOLPHIN INTEGRATION son administrateur et son mandataire judiciaires, à la société SOITEC et à la société MBDA FRANCE à comparaître le 1er février 2019 devant le Tribunal de Commerce de GRENOBLE aux fins de voir interdire ou annuler la cession du fonds de commerce et des actifs de la société DOLPHIN INTEGRATION.



Sur la requête qu'elle a déposée le 27 décembre 2018 la société ALDINI AG a été autorisée par ordonnance en date du 16 janvier 2019 du délégataire du Premier Président de cette cour, à assigner à jour fixe pour l'audience du 6 mars 2019 à 14 heures, la SA DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES et Maître [F], les sociétés MBDA FRANCE et SOITEC et encore [B] [Q], L'AGS-CGEA et Monsieur le Procureur Général.



La société ALDINI AG a fait délivrer assignations à jour fixe avec ses conclusions d'appelante:

- par exploits en date du 23 janvier 2019 à la société DOLPHIN INTEGRATION, à la SELARL AJ PARTENAIRES, à Maître [F], à la société SOITEC, à [B] [Q] et à Monsieur le Procureur de la République de GRENOBLE

- par exploit en date du 24 janvier 2019 à la société MBDA FRANCE

- par exploit en date du 25 janvier 2019 à l'AGS-CGEA

Ces assignations ont été déposées par l'appelante au greffe de la cour le 30 janvier 2019.



La société ALDINI AG a aussi notifié par voie électronique ses conclusions d'appelante aux conseils des intimés au fur et à mesure de leurs constitutions les 9, 18, 30 janvier et 11 février 2019.



Le 12 février 2019 la société ALDINI AG a notifié par voie électronique une Question Prioritaire de Constitutionnalité à la société DOLPHIN INTEGRATION, à la SELARL AJ PARTENAIRES, à Maître [F], à la société SOITEC, à la société MBDA FRANCE et à L'AGS-CGEA.

Elle a aussi fait signifier ces conclusions de QPC par exploits qui ont été délivrés le 18 février 2019 à [B] [Q] et à Monsieur le Procureur de la République de GRENOBLE.



L'AGS a conclu le 18 février 2019.

La société DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES et Maître [F], la société SOITEC et la société MBDA FRANCE ont conclu le 5 mars 2019, à compter de 10 h43.



A l'audience publique du 6 mars 2019 à 14 heures qui s'est tenue en présence du Procureur Général et d'[Y] [Q], représentant des salariés, l'examen de l'affaire a fait l'objet d'un renvoi contradictoire à l'audience du 10 avril 2019 à 14 heures à laquelle la Question Prioritaire de Constitutionnalité a aussi été fixée.

La cour a informé les conseils des parties qu'elle siégerait le 10 avril 2019 dans la même composition que celle qui avait rendu l'arrêt du 17 janvier 2019 .



Par assignation du 11 mars 2019 l'appelante a fait dénoncer les actes de la procédure à Monsieur le Procureur Général.



Aux termes de ses conclusions d'appel nullité notifiées et signifiées les 4 et 11 mars 2019 la société ALDINI AG demande à la cour

- en l'état de la question prioritaire de constitutionnalité signifiée le '11"février 2019 de surseoir à statuer par l'application de l'article 23-3 de la loi organique N°2009-1523 du 10 décembre 2009

de RÉFORMER LE JUGEMENT ENTREPRIS AYANT DÉCIDÉ

- l'irrecevabilité de la tierce opposition nullité qu'elle a formée tant pour inobservation des délais qu'en raison de sa représentation à l'audience du 16 août 2018 ayant statué sur le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION

- le rejet de sa demande de communication du bilan économique, social et environnemental de l'administrateur judiciaire du 6 août 2018 , de l'offre de reprise de SOITEC/MBDA du 13 juillet 2018 et de la première ordonnance du Président du Tribunal de Commerce de GRENOBLE du 14 avril 2017

- la fraude des sociétés MBDA et SOITEC dans la reprise des actifs de DOLPHIN INTEGRATION et l'excès de pouvoir du Tribunal de Commerce de GRENOBLE dans son jugement du 18 décembre 2018 arrêtant le plan de cession non démontrés

- la condamnation de la société ALDINI AG à une amende civile de 5.000 euros au profit du Trésor Public

- la condamnation de la société ALDINI AG à payer au redressement judiciaire de la société DOLPHIN INTEGRATION et aux sociétés MBDA FRANCE et SOITEC la somme de 5.000 euros chacune au titre des frais irrépétibles,

- la condamnation de la société ALDINI AG aux dépens

STATUANT À NOUVEAU, de

- dire et juger recevable la tierce opposition qu'elle a déposée au greffe le 19 octobre 2018 soit moins de dix jours et deux mois de la date de publication du jugement du 21 août 2018 au BODACC du 24 août 2018, par application des articles R661-2, R662-1 du Code de commerce et 643 du Code de procédure civile

- le cas échéant saisir la Cour de cassation d'une demande d'avis sur l'application des délais de distance au cas d'espèce visé aux articles R661-2 et R662-1 du Code de commerce et 643 du Code de procédure civile, en application des articles L441-1 du Code de l'organisation judiciaire et 1031 et suivants du Code de procédure civile



- ordonner la communication par DOLPHIN INTEGRATION et Maître [G] [G] de la première ordonnance du Tribunal de Commerce de GRENOBLE du 14 avril 2017 ordonnant la conciliation - dont l'inexécution du plan permet de fixer plus justement la cessation des paiements- et le bilan économique, social et environnemental de l'administrateur judiciaire du 6 août 2018 , le rapport du conciliateur au président du tribunal à la suite de la première conciliation ordonnée le 14 avril 2017 et la décision du président du tribunal, le rapport des commissaires aux comptes quant à la procédure d'alerte lancée le 21 décembre 2017, le moratoire conclu avec la CCSF le 11 décembre 2017, le rapport du conciliateur au président du tribunal à la suite de la seconde conciliation ordonnée le 5 juin 2018 et la décision du président du tribunal, ALDINI disposant d'un droit fondé sur les exigences supérieures du droit de la preuve, du droit à l'information pertinente, du droit de la défense et de l'égalité des armes , par application des articles 9 , 11, 16, 138 , 139 et 149 du Code de procédure civile ensemble l'article 6 §2 de la CEDH

- dire et juger recevable et bien fondée la tierce opposition nullité d'ALDINI AG, en l'état de la fraude de MBDA, [A] [C]/SOITEC et [J] [S], tous dirigeants de la débitrice au moment de leur offre de reprise et n'ayant pas la qualité de tiers et de l'excès de pouvoir commis par les premiers juges refusant d'appliquer l'article L 642-3 du Code de commerce et le droit des sociétés cotées, ensemble le principe de la neutralité des procédures collectives

- dire et juger que les premiers juges ont également excédé leurs pouvoirs en ouvrant une seconde conciliation au mépris de la cessation des paiements consommée depuis plus de 45 jours en violation de l'article L611-4 du Code de commerce

- dire et juger que le plan arrêté caractérise une fraude au droit des procédures collectives, la cession des actifs de la société DOLPHIN INTEGRATION au profit des sociétés MBDA FRANCE et [A] [C]/SOITEC n'ayant pas été faite à des tiers au sens de l'article L642-3 du Code de commerce

- dire et juger que le plan arrêté caractérise une fraude au droit des sociétés cotées, la cession des actifs de la société DOLPHIN INTEGRATION au profit des sociétés MBDA FRANCE et SOITEC n'ayant été possible qu'au prix d'une grave atteinte à la transparence des marchés et aux règles protectrices des actionnaires minoritaires édictées en la matière

EN CONSÉQUENCE de

- rétracter le jugement du Tribunal de Commerce de GRENOBLE du 21 août 2018 en prononçant sa nullité

- dire et juger conséquemment que le plan arrêté le 21 août 2018 est nul et de nul effet

- ordonner le retour au statu quo ante et le retour des actifs frauduleusement cédés dans le patrimoine de la société DOLPHIN INTEGRATION

- ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de DOLPHIN INTEGRATION en fixant la date de cessation des paiements à la date de l'échec de la première procédure de conciliation le 14 avril 2017

- fixer la période d'observation à quatre mois pour permettre de susciter dans les meilleurs délais des offres régulières

- ordonner la restitution par DOLPHIN INTEGRATION, MBDA et SOITEC des sommes qu'elle leur a payées au titre de l'article 700 de première instance

- ordonner la restitution par le Trésor Public de la somme de 5.000 euros qu'elle a payée au titre de l'amende civile de première instance

- condamner in solidum DOLPHIN INTEGRATION, MBDA et SOITEC à lui payer la somme de 35.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel par application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.



L'appelante soutient qu'elle est recevable à agir en tierce opposition-nullité du jugement qui a adopté le plan de cession alors que

- comme société de droit suisse dont le siège est fixé à FRIBOURG elle a agi dans le délai de dix jours de l'article 661-2 du Code de commerce qui devait être prolongé du délai de distance d'une durée de deux mois de l'article 643 du Code de procédure civile

- elle n'a pas été partie à l'instance

- elle n'y a pas été représentée par le Directeur Général de la société DOLPHIN INTEGRATION , en l'occurrence [J] [S], en raison de l'existence d'une fraude au droit des procédures collectives et particulièrement aux dispositions d'ordre public de l'article L642-3 du Code de commerce

- elle a intérêt à agir, la cession des actifs ayant eu pour conséquence de faire perdre toute valeur aux actions qu'elle détient en raison de la fraude commise au préjudice des petits porteurs par MBDA et SOITEC qui disposaient d'informations privilégiées en leur qualité d'administrateurs de la société DOLPHIN INTEGRATION

- le Tribunal a dénaturé la loi et commis des excès de pouvoirs négatifs en s'abstenant de faire application des dispositions de l'article L642-3 du Code de commerce et de la réglementation boursière.



Elle fait valoir que si un actionnaire est représenté par le représentant légal de la société , il est recevable à agir en tierce opposition s'il est victime d'une fraude.

Elle fait observer que [J] [S] est devenu le Président de la nouvelle société SAS DOLPHIN DESIGN constituée par les sociétés MBDA et SOITEC, comme celles-ci le mentionnaient dans l'offre de reprise qu'elles ont déposée; que la SAS DOLPHIN DESIGN constituée le 3 août 2018 a usurpé le signe distinctif de DOLPHIN INTEGRATION ;

Elle soutient que les candidats repreneurs et le directeur général de la société DOLPHIN INTEGRATION ont agi de concert dans leurs propres intérêts en vue de l'adoption du plan de cession en fraude aux droits des actionnaires; qu'une véritable fraude à la loi a été commise dans le cadre du dispositif prépack cession afin de reprendre l'actif stratégique ( que l'appelante valorise à 26.000.000 euros) à un prix dérisoire de 200.004 euros pour éviter la concurrence et de se débarrasser du passif de la société DOLPHIN INTEGRATION qui était de 11.000.000 euros.

Elle se prévaut de la consultation rédigée à sa demande par le Professeur [D].



Elle invoque aussi une fraude au droit des sociétés cotées sur le marché EURONEXT GROWHT et reproche aux premiers juges d'avoir commis un excès de pouvoir négatif pour n'avoir pas pris en considération les règles d'ordre public relatives au Code monétaire et financier et le règlement général de l'Autorité des [Localité 2] Financiers qui sont destinés à assurer l'information permanente du public.

Elle dénonce la volonté de cacher des informations susceptibles d'avoir une influence sur le cours des titres de la société DOLPHIN INTEGRATION, mentionnant notamment que

- en janvier 2017 la cotation des titres de la société DOLPHIN INTEGRATION a été suspendue à sa demande

- le 7 juin 2018 la société DOLPHIN INTEGRATION a annoncé une commande retardée et une levée de fonds

- les titres de la société DOLPHIN INTEGRATION n'ont pas été inscrits au compartiment des procédures collectives en raison de l'ouverture d'une

seconde procédure de conciliation 'prohibée en présence d'une cessation des paiements en réalité consommée depuis plus de 45 jours'

- a existé la volonté de contourner la législation sur les franchissements de seuil et les OPA ou OPE en recourant au stratagème d'une seconde conciliation pour parvenir à la mise en oeuvre du dispositif de prepack cession.



Enfin l'appelante conteste tout abus d'agir en justice et reproche au Tribunal d'avoir prononcé une amende civile à son encontre pour des motifs impropres à fonder une telle condamnation.



Par conclusions N°1 notifiées par voie électronique les 5 et 19 mars 2019 la société DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES et Maître [F] ès qualités , demandent à la cour de

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

En tout état de cause de

- déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

- déclarer non fondée la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

- rejeter l'intégralité des demandes de la société ALDINI AG

- condamner la société ALDINI AG à verser la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au redressement judiciaire de la société DOLPHIN INTEGRATION ainsi qu'à Maître [F] et à Maître [G], ès qualités

- condamner la société ALDINI AG aux entiers dépens.



La société DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES et Maître [F] ès qualités, exposent que l'activité du débiteur est pour partie liée au domaine de l'armement ce qui imposait une relative discrétion sur le choix de potentiels repreneurs.

Ils soutiennent que

- les mesures de publicité mises en oeuvre sont suffisantes, car notamment le compte rendu de fin de mission du conciliateur a été adressé au Procureur de la République qui n'a pas fait de remarque et le Tribunal avait déjà vérifié lors de l'audience d'ouverture de la procédure le 18 juillet 2018 que les démarches effectuées par le conciliateur étaient suffisantes et qu'il n'y avait pas lieu de fixer un nouveau délai de dépôt des offres, de nombreux communiqués AMF ayant été effectués

- la société ALDINI AG a été représentée à l'instance du 16 août 2018 qui a donné lieu au jugement du 21 août 2018 prononçant la cession de la société DOLPHIN INTEGRATION suite à l'offre déposée par les sociétés MBDA et SOITEC

- la tierce opposition est dès lors irrecevable, d'autant que la société ALDINI AG ne justifie toujours pas d'un motif propre, condition indispensable à la recevabilité de la tierce opposition

- les sociétés MBDA et SOITEC étaient de parfaits tiers au moment du dépôt de leur offre et l'étaient d'autant plus lors du jugement du 21 août 2018 prononçant cette cession, rendant ainsi leur offre parfaitement valable et recevable selon les règles applicables

- [J] [S] n'a jamais formulé d'offre de reprise

- les sociétés MBDA et SOITEC n'ont jamais bénéficié d'informations privilégiées au détriment des associés ou des tiers qui auraient parfaitement pu déposer dans les délais une offre de reprise, ce dont la société ALDINI AG n'a jamais et l'intention

- il n'y a pas eu de fraude eu dans son jugement du 21 août 2018, le Tribunal n'a commis aucun excès de pouvoirs.



Ils ajoutent que les pièces dont la société ALDINI AG demande la communication ne sont pas indispensables à l'exercice de ses droits et elle ne démontre pas l'intérêt de la communication de ces éléments.



Ils sollicitent aussi la condamnation de la société ALDINI AG au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts procédure abusive.



Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mars 2019 la société MBDA FRANCE demande à la cour

A titre principal de

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et notamment en ce que la société ALDINI AG a été jugée représentée lors de l'audience d'examen des offres du 16 août 2018 et déclarée irrecevable, condamnée à verser une amende civile, des indemnités de procédure et aux dépens

- juger que la société ALDINI AG n'est ni un créancier ni un ayant cause

- juger que la société ALDINI AG n'invoque aucun moyen propre

- juger que la société ALDINI AG n'apporte la preuve d'aucune fraude

A titre subsidiaire de

- juger que la société ALDINI AG ne démontre aucun excès de pouvoir commis par le Tribunal

En conséquence, juger irrecevable l'appel interjeté par la société

ALDINI AG

En tout état de cause de

- débouter la société ALDINI AG de l'intégralité de ses demandes

- condamner la société ALDINI AG à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du Code civil et la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamner la société ALDINI AG aux entiers dépens , avec distraction au profit de la SELARL DAUPHIN MIHAJLOVIC.



La société MBDA soutient que la tierce opposition nullité ne remplit pas les conditions de l'article 583 du Code de procédure civile car

* l'actionnaire ALDINI AG ,qui n'est ni un créancier ni un ayant cause, a été représenté lors de l'audience du 16 août 2018 par [J] [S], le directeur général de la société DOLPHIN INTEGRATION

* ALDINI AG n'invoque aucun moyen propre et ne démontre aucune fraude à ses droits alors que la démission le 5 juin 2018 de MBDA FRANCE comme administrateur est le résultat d'un désaccord avec le Président du Conseil d'Administration de DOLPHIN INTEGRATION , cette démission devant produire tous ses effets sans attendre la publication de celle-ci dès lors qu'elle a été portée à la connaissance de la société et que SOITEC n'a jamais été un dirigeant de cette société .



Subsidiairement elle ajoute qu'aucun excès de pouvoir n'a été commis par le Tribunal par méconnaissance des dispositions de l'article L642-3 du Code de commerce dont il a pris soin de vérifier qu'elles étaient respectées, ou de la réglementation boursière ou des textes du Code monétaire et financier, ou encore par défaut de vérification des règles de publicité prévues par l'article R642-40 du Code de commerce.



Par conclusions avec un bordereau de 17 pièces notifiées par voie électronique les 19 et 27 mars 2019 la société SOITEC demande à la cour

A TITRE PRINCIPAL de

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a

* jugé que la tierce opposition formée par la société ALDINI AG est irrecevable en raison tant de l'inobservation des délais de distance que de sa représentation lors de l'audience du 16 août 2018

* jugé qu'ALDINI AG ne démontre pas l'existence d'une fraude de la part de SOITEC et MBDA

* dit que le Tribunal n'a aucune obligation quant à la vérification du respect de la réglementation relative au droit boursier et aux règles impératives du Code monétaire et financier applicables aux sociétés cotées

* condamné la société ALDINI AG à payer à chacune des sociétés SOITEC, MBDA FRANCE et DOLPHIN INTEGRATION une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

* condamné la société ALDINI AG au paiement d'une amende civile de 5.000 euros sur le fondement de l'article 581 du Code de procédure civile

* condamné la société ALDINI AG aux entiers dépens de l'instance

En conséquence

- déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

A TITRE SUBSIDIAIRE de

- juger que le tribunal n'a commis aucun excès de pouvoir à l'occasion du jugement du 16 octobre 2018 (en réalité 21 août 2018)

En conséquence

- déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE de

- débouter la société ALDINI AG de l'intégralité de ses demandes

- condamner la société ALDINI AG à payer à la société SOITEC

* la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du Code civil

* la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

* la somme de 10.000 euros au titre de l'article 559 du Code de procédure civile

et aux entiers dépens de l'instance.



A titre liminaire la société SOITEC fait observer que la société ALDINI AG a investi au capital de la société DOLPHIN INTEGRATION le 26 juillet 2018, en parfaite connaissance de l'état de cessation des paiements de la société DOLPHIN INTEGRATION qui le 16 juillet 2018 avait communiqué sur ce point sur le marché, et de la demande d'ouverture de redressement judiciaire.

Elle fait valoir que la société ALDINI AG de manière dilatoire et de connivence avec d'autres actionnaires minoritaires a diligenté une tierce opposition distincte de celle de la société [M] [T], afin de pouvoir multiplier les recours contre le jugement arrêtant le plan de cession alors qu'aucune offre de reprise autre que celle des sociétés MBDA et SOITEC n'a été présentée.



La société SOITEC soutient que font défaut en l'espèce les conditions suivantes relatives à la recevabilité d'une tierce opposition :

- observation d'un délai strict de 10 jours de la publication au BODACC du jugement ayant arrêté le plan de cession , les délais de distance de l'article 643 du Code de procédure civile étant inapplicables en la matière

Sur ce point elle développe que l'article R 661-2 du Code de commerce relève d'un régime propre et ne prévoit pas de notification du jugement arrêtant le plan de cession, et que l'article 643 du Code de procédure civile renvoie à 586 alinéa 3 qui lui vise des décisions faisant l'objet de notification. Elle observe aussi que la société ALDINI AG le reconnaît à l'occasion de la QPC qu'elle a soulevée dans le cadre de la procédure en indiquant que la loi ne prévoit pas expressément que l'investisseur étranger bénéficie des délais de distance

- absence de représentation du débiteur dans le cadre de l'instance ayant donné lieu au jugement attaqué .

Sur ce point elle soutient que la société ALDINI AG n'a rapporté la preuve ni d'une fraude à ses droits ni d'une collusion frauduleuse entre DOLPHIN INTEGRATION, SOITEC, MBDA et DOLPHIN DESIGN, et que la référence à la règle nul ne plaide par procureur et à l'action ut singuli ne sont pas pertinentes.



La société SOITEC conteste aussi l'existence d'un excès de pouvoir entachant la décision attaquée .

Sur ce point elle fait valoir

- qu'elle n'a pas 'envoyé [A] [C] en mission au sein de l'organe de direction de DOLPHIN INTEGRATION pour étudier en partenariat avec MBDA la possibilité de reprendre cette entreprise'

- que le Tribunal a pris soin de vérifier l'application de l'article L642-3 du Code de commerce.

- que le tiers qui fait tierce opposition au jugement arrêtant le plan de cession n'est pas recevable à contester les conditions d'ouverture d'une procédure de conciliation, ni la date de cessation des paiements fixée par le jugement d'ouverture de la procédure qui n'est pas l'objet de sa tierce opposition.

Elle ajoute qu'elle n'est pas concernée par prétendue violation de la réglementation du droit boursier entre le 1er janvier et le 7 juin 2018, qui n'est pas une condition de L642-2 du Code de commerce.



Elle souligne la gravité des allégations qui ont été portées à son encontre par la société ALDINI AG pour tenter de jeter le discrédit sur elle.



Par conclusions d'intimée avec un bordereau de 18 pièces notifiées le 9 avril 2019 la société SOITEC demande à la cour

A TITRE PRINCIPAL de

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a

* jugé que la tierce opposition formée par la société ALDINI AG est irrecevable en raison tant de l'inobservation des délais de distance que de sa représentation lors de l'audience du 16 août 2018

* jugé qu'ALDINI AG ne démontre pas l'existence d'une fraude de la part de SOITEC et MBDA

* dit que le Tribunal n'a aucune obligation quant à la vérification du respect de la réglementation relative au droit boursier et aux règles impératives du Code monétaire et financier applicables aux sociétés cotées

* condamné la société ALDINI AG à payer à chacune des sociétés SOITEC, MBDA FRANCE et DOLPHIN INTEGRATION une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

* condamné la société ALDINI AG au paiement d'une amende civile de 5.000 euros sur le fondement de l'article 581 du Code de procédure civile

* condamné la société ALDINI AG aux entiers dépens de l'instance

En conséquence

- déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

A TITRE SUBSIDIAIRE de

- juger que le tribunal n'a commis aucun excès de pouvoir à l'occasion du jugement du 16 octobre 2018 (en réalité 21 août 2018)

En conséquence

- déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE de

- débouter la société ALDINI AG de l'intégralité de ses demandes

- condamner la société ALDINI AG à payer à la société SOITEC

* la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du Code civil

* la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

* la somme de 10.000 euros au titre de l'article 559 du Code de procédure civile

et aux entiers dépens de l'instance.



Par conclusions notifiées le 18 février 2019 l'AGS demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur les demandes formées par la société ALDINI AG et de condamner qui mieux devra aux dépens, distraits au profit de la SCP FOLCO TOURRETTE NERI.

Comme contrôleur à la procédure collective L'AGS considère à l'examen des éléments qui ont été versés aux débats que la recevabilité comme le bien fondé des demandes formées par l'appelante paraissent compromis.

Développant qu'elle ne saurait toutefois cautionner une quelconque fraude à la loi, l'AGS s'en rapporte à la sagesse de la cour, lui demandant d'apprécier avec la plus grande circonspection, compte tenu de l'état d'esprit

qui anime l'appelante et de la finalité individualiste qu'elle poursuit , des

conséquences particulièrement fâcheuses qu'entraînerait l'annulation du jugement rendu le 21 août 2018 , avec des conséquences sociales dramatiques (plus de 180 licenciements économiques).



Par conclusions notifiées le 3 avril 2019 Monsieur le Procureur Général sollicite la confirmation du jugement rendu le 18 décembre 2018.

Il soutient que

- la tierce opposition est irrecevable pour avoir été formée au delà du délai légal de 10 jours après la publication au BODACC du jugement arrêtant le plan critiqué, les dispositions de l'article 643 du Code de procédure civile étant inapplicables

- l'appelante, actionnaire de DOLPHIN INTEGRATION a bien été représentée lors de l'audience du 16 août 2018 par le représentant légal de cette société, et il n'est pas démontré que ce dernier a agi en fraude des droits des associés

- le Tribunal qui a vérifié l'application des dispositions de l'article L642-3 du Code de commerce concernant les repreneurs SOITEC et MBDA n'a pas commis d'excès de pouvoir

- le Tribunal a validé une offre de reprise régulière, satisfaisante en ce qu'elle permettait la poursuite de l'activité et la préservation des emplois.



A l'audience du 10 avril 2019 [Y] [Q], représentant des salariés, qui n'a pas constitué avocat est présent ; il est invité à former ses observations.

Le conseil de la société ALDINI AG demande oralement à la cour d'écarter, comme tardives, les conclusions notifiées le 9 avril 2019 par la société SOITEC.

Le conseil de la société SOITEC est entendu en ses explications sur ce point.




SUR CE



Attendu que selon l'article 15 du Code de procédure civile les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ;

Que peu importe dans le cadre de la procédure avec représentation obligatoire que la demande de rejet de conclusions pour tardiveté n'ait pas été formée par voie de conclusions mais oralement à l'audience en présence de l'avocat adverse , dès lors que la juridiction peut relever d'office, sauf à respecter aussi le principe du contradictoire, le moyen d'ordre public tiré de la violation des droits de la défense et ainsi écarter des débats des conclusions notifiées dans des conditions ne permettant pas à la partie adverse d'y répondre ;

Qu'en l'espèce les conseils des parties ont été mis en mesure de s'expliquer avant la clôture des débats à l'audience du 10 avril 2019 sur la question du rejet des conclusions notifiées le 9 avril 2019 par la société ALDINI AG ;

Que sur l'assignation à jour fixe délivrée le 23 janvier 2019 à la société SOITEC avec ses premières conclusions , et les conclusions récapitulatives que l'appelante a ensuite notifiées les 4 et 11 mars 2019, la société SOITEC a conclu le 6 mars 2019 puis à nouveau le 9 avril 2019, soit la veille de la date fixée au 10 avril 2019 à 14 heures pour l'audience des plaidoiries ;

Que dans ses dernières écritures notifiées le 9 avril 2019 la société SOITEC reprend intégralement ses écritures et demandes antérieures et

- en page 10 mentionne un commentaire légèrement différent sur 5 lignes au paragraphe 3 intitulé l'investissement D'ALDINI AG au capital de la société

- en pages 34 et 35 , dans le paragraphe 5 concernant uniquement sa demande au titre de l'article 1240 du Code civil, ajoute la teneur de l'intégralité du courriel, constituant sa pièce N°18, adressé le 8 avril 2019 à

23 heures 16 par un journaliste du FINANCIAL TIME à SOITEC pour solliciter des explications de sa part sur 'certaines allégations provenant des actionnaires' dans le cadre de la cession de la société DOLPHIN INTEGRATION à MBDA et SOITEC ;

Qu'ainsi la société ALDINI AG était en mesure de répondre , si elle le souhaitait, à ces dernières conclusions de la société SOITEC, seulement modifiées sur des points mineurs ;

Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'écarter les dernières écritures notifiées le 9 avril 2019 par la société SOITEC ;



Attendu que la société MBDA FRANCE n'articule aucun moyen au soutien de l'irrecevabilité, qu'elle a seulement mentionnée dans le dispositif de ses écritures, de l'appel qui a été interjeté le 27 décembre 2018 contre le jugement rendu le 18 décembre 2018 par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE ;

Que la procédure d'appel engagée avant l'entrée en vigueur du décret du N°2018-1219 du 24 décembre 2018 notamment relatif à la communication électronique et au rôle du ministère public en appel est régulière ;



Attendu que par un autre arrêt de ce jour la cour a dit n'y avoir lieu de transmettre la Question Prioritaire de Constitutionnalité adressée par mémoire distinct le 12 février 2019 par l'appelante ;

Qu'ainsi il n'y a pas lieu de surseoir à statuer



Attendu que selon l'article R 662-1 du Code de commerce à moins qu'il n'en soit disposé autrement par le livre 6 du Code de commerce les règles de procédure civile sont applicables dans les matières régies par le livre 6 de la partie législative du Code de commerce; que selon l'article R 661-2 du Code de commerce , sauf dispositions contraires , la tierce opposition est à peine d'irrecevabilité formée contre une décision soumise à publicité rendue en matière de redressement judiciaire dans le délai de dix jours à compter de la publication de celle-ci au BODACC ;

Que l'article 643 du Code de procédure civile qui prévoit au profit des personnes qui demeurent à l'étranger une augmentation de deux mois des délais qui leur sont impartis, mentionne le délai de tierce opposition mais seulement dans l'hypothèse prévue à l'article 586 alinéa 3; que l'article 586 alinéa 3 du Code de procédure civile est ainsi libellé :'En matière contentieuse, elle (la tierce opposition) n'est cependant recevable de la part du tiers auquel le jugement a été notifié que dans les deux mois de cette notification, sous réserve que celle-ci indique de manière très apparente , le délai dont il dispose ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut-être exercé. Il en est de même en matière gracieuse lorsqu'une décision en dernier ressort a été notifiée';

Que le jugement arrêtant un plan de cession n'est pas notifié aux tiers mais publié au BODACC ; qu'ainsi il n'est pas nécessaire de mettre en oeuvre une demande d'avis sur l'application au cas d'espèce des délais de distance;

Que c'est donc à bon droit et sans aucunement méconnaître le principe de neutralité des procédures collectives que les premiers juges ont considéré que l'augmentation de délai de deux mois prévue par l'article 586 alinéa 3 du Code de procédure civile n'a pas vocation à s'appliquer en cas de tierce opposition par une personne demeurant à l'étranger à l'encontre d'un jugement qui arrête un plan de cession et que la société ALDINI AG avait tardivement formé tierce opposition le 19 octobre 2018 alors qu'était expiré le délai de 10 jours après la publication au BODACC le 24 août 2018 du jugement du 21 août 2018 arrêtant le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION ;



Attendu que selon l'article 583 du Code de procédure civile est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt à condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que les

créanciers ou ayant cause d'une partie peuvent toutefois former tierce opposition au jugement rendu en fraude à leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres ;

Que si l'associé ou l'actionnaire, qui ne répond pas personnellement des dettes sociales, est réputé représenté par le mandataire social à l'instance qui a conduit à l'adoption du plan de cession de la société, la tierce opposition lui reste ouverte en cas de fraude ;

Qu'il incombe donc en l'espèce à la société ALDINI AG de rapporter la preuve d'une fraude, en vue de porter atteinte à ses droits, des dirigeants de la société DOLPHIN INTEGRATION et des auteurs de l'offre soumise au Tribunal de Commerce ;



Attendu que [N] [M] qui a fondé en 1985 la société DOLPHIN INTEGRATION contrôlait à travers sa détention propre et de celle de la holding FONCLAIRE 51,60 % des droits de vote de la société DOLPHIN INTEGRATION dont 10 % des actions étaient aussi détenues par les salariés; que [N] [M] a par la suite transmis l'essentiel de ses parts dans la holding FONCLAIRE à ses enfants ;

Que la société DOLPHIN INTEGRATION a connu des difficultés financières dont la société ALDINI AG ne démontre aucunement qu'elles pourraient être imputées à des décisions de ses clients MBDA FRANCE ou SOITEC ;

Qu'ainsi une première procédure de conciliation a été ouverte pour quatre mois le 17 avril 2017, renouvelée pour un mois le 22 septembre 2017 et qui s'est terminée le 14 septembre 2017; qu'une procédure d'alerte a été mise en oeuvre en décembre 2017 ; que le 11 décembre 2017, la SA DOLPHIN INTEGRATION , qui déjà en 2013 avait bénéficié d'un première moratoire de la Commission des Chefs de Services Financiers (CCSF), a obtenu de cette commission un second accord permettant l'échelonnement de ses dettes sociales et fiscales qui s'élevaient alors à 1.800.000 euros; mais cet accord a été dénoncé par la CCSF par décision du 7 mai 2018, notifiée le 28 mai 2018 ; que saisi par une requête de la SA DOLPHIN INTEGRATION en date du 4 juin 2018, le Président du Tribunal de Commerce de GRENOBLE, par ordonnance en date du 5 juin 2018, a ouvert une nouvelle procédure de conciliation au profit de cette société et désigné la SELARL AJ PARTENAIRES, prise en la personne de Maître [G], comme conciliateur, le conciliateur ayant reçu mission notamment d'organiser la cession partielle ou totale des activités de l'entreprise dans le cadre d'un dispositif dit de prépack cession ;

Que le 13 juillet 2018 la négociation des actions de la société DOLPHIN INTEGRATION sur EURONEXT a été suspendue ;

Que le 16 juillet 2018 la société DOLPHIN INTEGRATION a déposé une déclaration de cessation des paiements qui mentionnait un passif échu de 6.782.506 euros et à échoir de 4.262.398 euros; que le même jour elle a diffusé un communiqué de presse ;

Qu'après débats à l'audience du 18 juillet 2018 le Tribunal de Commerce de GRENOBLE, par jugement en date du 24 juillet 2018, a

- constaté l'état de cessation des paiements de la SA DOLPHIN INTEGRATION , qu'il a provisoirement fixé au 5 juillet 2018

- ouvert la procédure de redressement judiciaire de la SA DOLPHIN INTEGRATION

- désigné Maître [F] comme mandataire judiciaire et la SELARL AJ PARTENAIRES, prise en la personne de Maître [G], comme administrateur judiciaire

- autorisé la poursuite de la période d'observation jusqu'au 15 janvier 2019

- dit que par application de l'article L 631-15 du Code de commerce le Tribunal procédera à l'examen de l'affaire à l'audience du 16 août 2018 ;



Attendu que s'il convient de permettre aux parties l'accès aux documents qui leur permettent de faire valoir leurs droits et de leur garantir l'égalité des armes, il appartient au juge d'apprécier les circonstances rendant la communication de pièces sollicitée par une partie utile au regard de la nature du litige qui lui est soumis et proportionnée aux intérêts en présence ;

Qu'en l'espèce les pièces sollicitées par la société ALDINI AG, sauf le Bilan Economique et Social du 6 août 2018, sont essentiellement destinées à permettre de fixer plus justement la date de cessation des paiements ; que toutefois le jugement d'ouverture a fixé la date de cessation des paiements au 5 juillet 2018, la date de survenance de cet état n'ayant pas été reportée; que d'autre part l'excès de pouvoir de nature à permettre l'ouverture de la tierce opposition ne peut concerner que la décision objet de ce recours ;

Que la société ALDINI AG a été en mesure de produire les extraits de conseils d'administration de la société DOLPHIN INTEGRATION des 5 mai , 20 juin et 28 décembre 2017 et des 8 février et 28 mai 2018 ; qu'elle a aussi communiqué en pièce 39 courriels échangés entre T [E] (DOLPHIN INTEGRATION) et P [B] (DG SOITEC) le 27 décembre 2017; que la société SOITEC a produit les courriers échangés en juillet 2017 avec [A] [C] ;

Que la société ALDINI AG qui avait acquis le 10 juillet 2017 675 actions de la SA DOLPHIN INTEGRATION pour un prix de 9.443,25 euros et a décidé le 26 juillet 2018, soit après une première suspension de la cotation des titres le 9 janvier 2018, une seconde suspension de cotation le 13 juillet 2018 et la diffusion de communiqués de presse AMF, et encore l'ouverture le 24 juillet 2018 de la procédure de redressement judiciaire sur déclaration de cessation des paiements, d'acquérir 27.791 autres actions de la SA DOLPHIN INTEGRATION, portant ainsi à sa participation à 28.466 actions soit 2,12 % au capital de la SA DOLPHIN INTEGRATION n'explique pas en quoi le bilan économique, social et environnemental du 6 août 2018 lui serait nécessaire pour caractériser des agissements frauduleux conduisant à la voir brutalement 'spoliée de ses droits' comme 'petit porteur d'une société cotée dont les titres portent sur une coquille vide';

Qu'ainsi il n'est pas nécessaire d'ordonner la production des pièces sollicitées par l'intimée , ce qui conduirait à inutilement différer la solution du litige en une matière où une particulière célérité doit être observée ;



Attendu qu'il résulte des éléments de la procédure que [M] [T], comme dirigeant des sociétés SAS GROUPE [T] et SARL CLEG MOBILITES détenant ensemble plus de 5 % du capital social de la société DOLPHIN INTEGRATION, a demandé le 2 août 2018 la convocation de l'assemblée générale de la société DOLPHIN INTEGRATION appelée à statuer sur

- la révocation des mandats d'administrateurs de Messieurs [M], [Z], [H] et [C]

- la nomination comme nouveaux administrateurs de Messieurs [S] [M], [V] et [U] (Directeur administratif et financier de la société GROUPE [M] [T]);

Que dans ce courrier le dirigeant des sociétés SAS GROUPE [T] et SARL CLEG MOBILITES ne mentionne pas comme administrateur la société MBDA FRANCE, dont il a donc pris acte de la démission ;

Que dans son courrier susvisé du 2 août 2018 [M] [T] relate que la société DOLPHIN INTEGRATION rencontre depuis plus d'une année d'importantes difficultés financières ayant donné lieu à l'ouverture de deux procédures de conciliation et que l'échec de la dernière a conduit à l'ouverture du redressement judiciaire et l'élaboration d'une offre conjointe de cession par les sociétés MDBA FRANCE et SOITEC; qu'il mentionne l'intention d'actionnaires de soutenir le redressement de l'entreprise et de réunir les conditions de sa recapitalisation ;

Qu'il n'est pas justifié de manoeuvres imputables tant à [N] [M] qu'à [J] [S], le directeur général de la société DOLPHIN INTEGRATION ou encore aux sociétés SOITEC ou MBDA FRANCE pour faire obstacle à un changement de gouvernance de la société DOLPHIN INTEGRATION afin d'interdire l'élaboration d'un plan de continuation ;



Attendu que dans un autre courrier en date du 15 août 2018 destiné à Maître [F], pour lui demander de solliciter un report à l'audience du 16 août 2018, [M] [T] mentionne que [N] [M] a été démis de ses fonctions de gérant de l'actionnaire majoritaire la SARL FONCLAIRE et que selon les informations communiquées par l'entreprise sa trésorerie devrait être négative à hauteur de 1 million d'euros au 31 octobre 2018 ; qu'il annonce

- une assemblée générale à venir pour désigner un nouveau conseil d'administration avec des membres désignés par la SARL FONCLAIRE et le GROUPE [M] [T] pour présenter la candidature d'un nouveau président

- l'élaboration d'un plan de continuation susceptible d'apurer un passif estimé à 10.241.855 euros sur 10 ans avec apport en compte courant de 2 millions d'euros par le groupe [M] [T] dès l'acceptation du plan de continuation ;

Qu'en début de l'audience du 16 août 2018, dont la date avait été fixée par le jugement d'ouverture du 24 juillet 2018 , par application de l'article L 631-15 du Code de Commerce, le Tribunal, faisant application des dispositions de l'article L 662-3 a entendu l'avocat des actionnaires familiaux regroupés dans la SARL FONCLAIRE et le conseil de [M] [T], le dirigeant des sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES qui ont sollicité le renvoi de l'examen de l'offre conjointe de reprise déposée par les sociétés SOITEC et MBDA FRANCE ;

Que toutefois ni les actionnaires familiaux ni les sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES n'ont procédé à des apports en compte courant ; qu'ils se sont aussi abstenus de présenter un projet permettant à la société DOLPHIN INTEGRATION de faire face à ses échéances, notamment au titre des salaires dus depuis l'ouverture de la période d'observation le 24 juillet 2018 et d'envisager l'élaboration d'un plan de continuation ; que lors de l'audience du 18 juillet 2018 le Tribunal avait décidé après avoir recueilli l'avis du Ministère Public qu'il n'y avait pas lieu d'entreprendre de nouvelles démarches aux fins de susciter de nouvelles offres, au regard de la spécificité de la procédure (conciliation suivie d'une cession appelée à intervenir dans un contexte d'urgence), compte tenu des diligences accomplies antérieurement à l'ouverture de la procédure qui avaient abouti à la formulation d'une offre de reprise , et au regard de la situation de la société DOLPHIN INTEGRATION qui exigeait que soit mise en oeuvre une solution rapide ;

Qu'ainsi il ne saurait être considéré que la faiblesse de la publicité ayant entouré la reprise de l'entreprise serait de nature à caractériser l'existence d'une fraude ;



Attendu que l'article L642-3 alinéa 1 du Code de commerce est d'interprétation stricte ;

Que suivant délibération en date du 5 juin 2018, qui a été déposée au greffe du Tribunal de Commerce le 16 juillet 2018 sous le numéro 6859, [F] [L] a été désigné comme administrateur de la société DOLPHIN INTEGRATION pour remplacer la société MBDA FRANCE démissionnaire; que la société MBDA FRANCE justifie de ses divergences avec [N] [M] qui l'ont conduite à démissionner de ses fonctions d'administrateur alors qu'à l'issue du conseil d'administration du 28 mai 2018 qui prenait acte de la dénonciation par la CCSF du moratoire accordé le 11 décembre 2017, le Président du Conseil d'Administration a décidé de ne pas procéder à une déclaration de cessation des paiements ; qu'il n'est donc aucunement établi que la société MBDA FRANCE aurait

démissionné de son mandat d'administrateur aux seules fins de se présenter comme tiers auprès du conciliateur désigné le 5 juin 2018 avec une mission de pré-pack cession ;

Que la société SOITEC n'a jamais eu la qualité d'administrateur de la société DOLPHIN INTEGRATON ; que si [A] [C] était le salarié de la société SOITEC force est de constater que celui-ci ne détient aucun mandat au sein de cette société SOITEC dont il n'est aucunement rapporté la preuve qu'elle lui aurait donné des instructions sur son mandat d'administrateur qui lui a été confié à titre personnel et non ès qualités ;

Que l'offre de reprise des actifs de la société DOLPHIN INTEGRATION a été présentée à compter du 6 juillet 2018 par les sociétés SOITEC et MBDA FRANCE qui avait démissionné de ses fonctions d'administrateur, et aucunement par [J] [S] ;

Que cette première offre a été améliorée le 13 juillet 2018 ; qu'elle a finalement été déposée au greffe du Tribunal de Commerce le 6 août 2018 par l'administrateur judiciaire, et encore complétée le 10 août 2018 par une lettre d'amélioration ;



Attendu que l'existence d'une collusion entre les anciens dirigeants et auteurs de l'offre de reprise ne peut résulter du seul fait que [J] [S], le directeur général de la société DOLPHIN INTEGRATION , est devenu, comme l'offre de reprise le mentionnait expressément, le dirigeant de la société DOLPHIN DESIGN qui a été constituée par les cessionnaires pour se substituer à eux dans le cadre de l'offre de reprise ; que même si à l'audience du 16 août 2018 les avis de [J] [S] et de [N] [M] devaient être recueillis, ceux-ci ne liaient aucunement le Tribunal, qui a d'ailleurs d'abord entendu le même jour tant l'avocat des actionnaires familiaux regroupés dans la SARL FONCLAIRE que celui de [M] [T], le dirigeant des sociétés GROUPE [M] [T] et CLEG MOBILITES ;

Que la fraude ne saurait s'induire de la faiblesse du prix offert d'autant lorsque , comme en l'espèce, l'offre comporte la préservation de tous les emplois du débiteur en procédure collective et les sociétés SOITEC et MDBA FRANCE portaient un projet industriel nécessitant la mobilisation immédiate d'une somme de cinq millions d'euros afin de financer les besoins de trésorerie et de garantir la pérennité de l'activité ;



Attendu que la société ALDINI AG invoque notamment les règles de marché EURONEXT GROWTH publiées le 28 mai 2018 ;

Que force est de constater que selon sa pièce 12 qui est le relevé de la cotation EURONEXT GROWTH du titre DOLPHIN INTEGRATION pour la période du 3 janvier au 16 août 2018 le titre était coté le 3 janvier 2018 16,85 euros, est monté à 38 euros le 9 janvier 2018, est descendu à 5,42 euros le 5 juillet 2018, à 4,050 euros le 12 juillet 2018, et à 3,650 euros le 27 juillet 2018 ; que pourtant la société a décidé d'acquérir le 26 juillet 2018 27.791 des 28.466 actions qu'elle détient, soit après une première suspension de la cotation des titres DOLPHIN INTEGRATION le 9 janvier 2018, une seconde suspension de cotation le 13 juillet 2018 et la diffusion de communiqués de presse, et encore l'ouverture le 24 juillet 2018 de la procédure de redressement judiciaire sur déclaration de cessation des paiements ;

Qu'ainsi elle n'établit pas l'existence d'agissements frauduleux, en vue de porter atteinte à ses droits d'acquéreur de titres cotés, des dirigeants de la société DOLPHIN INTEGRATION et des auteurs de l'offre soumise au Tribunal de Commerce ;

Que c'est donc à tort que la société ALDINI AG reproche au Tribunal de la procédure collective, statuant en matière de tierce opposition qui devait d'abord vérifier les conditions d'ouverture de ce recours posées par les articles R 661-2 du Code de commerce et 583 du Code de procédure civile, de s'être abstenu de s'intéresser au respect de la réglementation relative au droit boursier et des règles impératives du Code monétaire et financier applicables aux sociétés cotées ;



Attendu que l'existence de la fraude alléguée par l'appelante n'étant pas établie c'est donc à bon droit que le Tribunal a considéré que la société ALDINI actionnaire de la société DOLPHIN INTEGRATION avait été représentée le 16 août 2018 par les représentants légaux de la société DOLPHIN INTEGRATION ;



Attendu en conséquence que les premiers juges ont donc à juste titre déclaré irrecevable la tierce opposition formée par la société ALDINI AG contre le jugement du 21 août 2018 qui a adopté le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION au profit des sociétés SOITEC et MBDA FRANCE ;



Attendu que même si l'exercice d'une voie de recours est un droit constitutionnellement et conventionnellement garanti, il peut être sanctionné en cas d'abus ;

Que selon l'article 581 du Code de procédure civile, en cas de recours dilatoire ou abusif, son auteur peut être condamné à une amende civile ;

Qu'en l'espèce la société ALDINI AG qui a acquis la majeure partie de ses titres le 26 juillet 2018, soit après l'ouverture le 24 juillet 2018 de la procédure de redressement judiciaire; a engagé le 19 octobre 2018 une procédure de tierce-opposition contre le jugement du 21 août 2018 qui a adopté le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION, avec transfert de 146 salariés,

- alors qu'était expiré, depuis le 3 septembre 2018, le délai de 10 jours imparti par l'article R 662-1 du Code de commerce,

- après le prononcé, le 16 octobre 2018, d'un premier jugement qui a rejeté la tierce opposition formée par le 30 août 2018 contre le même jugement du 21 août 2018, par d'autres actionnaires qui ont interjeté appel le 23 octobre 2018 et produit en cause d'appel la consultation rédigée le 12 octobre 2018 par [E] [N] [D], un des avocats plaidants de la société ALDINI AG ;

Que le Tribunal a donc à juste titre constaté que l'attitude de la société ALDINI AG constituait une tentative de paralyser l'exploitation de l'entreprise, de retarder voire de bloquer le plan de cession de la société DOLPHIN INTEGRATION avec toutes les conséquences dommageables prévisibles sur l'emploi et la pérennité d'une activité stratégique ;

Qu'ainsi c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné la société ALDINI AG à payer une amende civile de 5.000 euros ;

Attendu qu'il convient donc de confirmer en toutes ses dispositions déférées le jugement entrepris ;

Que les sociétés MBDA et SOITEC ne justifient pas d'un préjudice, distinct de leurs frais irrépétibles, susceptible de leur avoir été occasionné par l'abus par la société ALDINI AG de son droit d'agir en justice ; que s'agissant particulièrement de la société SOITEC qui déplore des allégations auprès des média , il sera observé que si elle a été sollicitée pour ses observations par un journaliste du FINANCIAL TIME, il n'est pas établi qu'un article ait été publié ;

Qu'ainsi seront rejetées leurs demandes de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1240 du Code civil et 559 du Code de procédure civile ;

Que la société DOLPHIN INTEGRATION, la SELARL AJ PARTENAIRES et Maître [F] n'ayant pas repris dans le dispositif de leurs écritures une demande en paiement de dommages et intérêts, la cour n'en n'est pas saisie ;



Attendu enfin que les dépens seront mis à la charge de la société ALDINI AG dont toutes les prétentions ont été rejetées ;

Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société DOLPHIN INTEGRATION, de la société MBDA FRANCE et de la société SOITEC, l'intégralité des frais irrépétibles qu'elles ont encore dû exposer ; qu'il

convient donc de condamner la société ALDINI AG à leur payer à chacune la somme complémentaire de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;



PAR CES MOTIFS



La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,



Dit qu'il n'y a pas lieu d'écarter les dernières écritures notifiées le 9 avril 2019 par la société SOITEC ;



Constate que par arrêt distinct de ce jour la cour a dit n'y avoir lieu de transmettre la Question Prioritaire de Constitutionnalité déposée par la société ALDINI AG ;



En conséquence, dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer ;



Confirme en toutes ses dispositions déférées le jugement rendu le 18 décembre 2018 ;



Y ajoutant ,



Condamne la société ALDINI AG à payer à chacune des sociétés DOLPHIN INTEGRATION, MBDA FRANCE et SOITEC la somme complémentaire de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;



Rejette toute autre demande ;



Condamne la société ALDINI AG aux dépens et autorise contre elle et au profit de la SELARL DAUPHIN-MIHAJLOVIC et de la SCP FOLCO TOURRETTE NERI le droit de recouvrement direct prévu par l'article 699 du Code de procédure civile.



SIGNE par Madame CLOZEL-TRUCHE, Président et par Monsieur STICKER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le GreffierLe Président

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