3 juillet 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/17826

Pôle 5 - Chambre 3

Texte de la décision

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 3 JUILLET 2019



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/17826 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4D5Y



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Septembre 2017 -Tribunal de Commerce de Créteil - RG n° 2017F00453





APPELANTE



SARL NELA prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 802 812 123

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Mathieu RETORET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1512







INTIMÉE



SARL GÉNÉRALE D'ALIMENTATION prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège.

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 822 264 974

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, avocat postulant

Assistée de Me Michel HARROCH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0311, avocat plaidant substitué par Me Yaël SAYAG, avocat au barreau de PARIS, toque : C0311, avocat plaidant







PARTIES INTERVENANTES



SAS ST VENGADESWARA MARCHE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 828 580 530

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me [Y] [C], avocat au barreau de PARIS, toque : A0920



Monsieur [D] [F]

[Adresse 2]

[Localité 1]



n'ayant pas constitué avocat



Monsieur [V] [K]

[Adresse 3]

[Localité 2]



n'ayant pas constitué avocat



Monsieur [L] [X]

[Adresse 4]

[Localité 3]



n'ayant pas constitué avocat





AUTRES PARTIES :



Monsieur [D] [F] étant le gérant et associé majoritaire de la SARL NELA, l'appelante, non cité comme intimé.

[Adresse 2]

[Localité 1]



Monsieur [L] [X] ancien gérant de la SARL NELA.

[Adresse 4]

[Localité 3]



SAS ST VENGADESWARA MARCHE représentée par son président

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 828 580 530

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Monsieur [V] [K] président de la SAS ST VENGADESWARAMARCHE.

[Adresse 3]

[Localité 2]







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 12 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Marie-Annick PRIGENT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

qui en ont délibéré,



un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.





Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE







ARRÊT :



- par défaut



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.







- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.






*****



FAITS ET PROCÉDURE :



Par acte sous seing privé en date du 19 juin 2006, enregistré le 20 juin 2006, M. et Mme [Y], représentés par leur administrateur de biens, le cabinet ALTICE, ont donné à bail commercial à la société LAKSMITHA un local commercial sis [Adresse 1] à usage d'alimentation générale.



M. [D] [F] était associé de la société LAKSMITHA à hauteur de 50 % des parts sociales suivant un acte de cession de parts sociales en date du 21 mars 2013 enregistré le 25 mars 2013 et un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire afférent en date du 21 mars 2013.



Par acte sous seing privé en date du 2 mai 2014, enregistré le 6 mai 204, la société LAKSMITHA a cédé à la société NELA, alors en cours de formation et d'immatriculation, le droit au bail du local sis [Adresse 1], moyennant un prix de 15.000 euros.



Le même jour, soit le 6 mai 2014, M. [D] [F], associé à hauteur de 80 % et M. [L] [X], associé à hauteur de 20 % ont signé les

statuts de la société NELA.



La société NELA a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Créteil le 11 juin 2014 et M. [L] [X] a été désigné en qualité de gérant.



Par acte sous seing privé daté du 18 juillet 2016, enregistré le 9 décembre 2016, la société NELA représentée par son gérant et associé minoritaire, M. [L] [X], a cédé le droit au bail à une société GENERALE D'ALIMENTATION alors en cours de formation et d'immatriculation moyennant un prix de 6.000 euros.



Par acte du 15 mars 2017, enregistré le 16 mars 2017 au service des impôts des entreprises de Villejuif, la SARL NELA a vendu à son tour à la société VENGADESWARA MARCHE son fonds de commerce d'alimentation générale, lequel comprenait le droit au bail des locaux sis au [Adresse 1] moyennant le prix de 20 000 euros dont 16 000 euros pour les éléments incorporels d'une part, et 4 000 euros pour les éléments corporels d'autre part, outre les stocks cédés pour la somme 4 000 euros.



Par acte d'huissier de justice en date du 27 avril 2017, la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION a fait assigner devant le tribunal de commerce de Créteil les sociétés NELA et ST VENGADESWARA MARCHE,M. [L] [X], M.[V] [K] et M [D] [F] en nullité de l'acte de cession du fonds de commerce en date du 17 mars 2017 et en indemnisation du préjudice subi.



M. [L] [X] s'est associé à la demande de nullité de l'acte de cession du fonds de commerce en date du 17 mars 2017.



Les sociétés NELA et ST VENGADESWARA MARCHE, MM. [V] [K] et [D] [F] ont conclu au débouté de la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION de ses demandes et à titre reconventionnel ont demandé que soit prononcée la nullité de la cession du droit au bail en date du 18 juillet 2016 enregistrée le 9 décembre 2016.



Par un jugement du 5 septembre 2017, le tribunal de commerce de CRETEIL a :

- Déclaré nulle et de nul effet la cession du droit au bail incluse dans l'acte de vente du fonds de commerce de la société NELA du 15 mars 2017 et ordonné la réintégration de la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATlON dans les lieux loués par bail commercial du 19 juin 2006, [Adresse 1]), lot [Cadastre 1] pour une partie seulement du rez-de-chaussée en façade sur rue, un local commercial d'une superficie d'environ 79 m2 ;

- Débouté la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION du surplus de sa demande de nullité de l'acte de vente du fonds de commerce de la société NELA du 15 mars 2017.

- Nommé la SCP MEUNIER GENDRON DI PERI, Huissiers de justice, [Adresse 5], pour accompagner la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION au moment de sa réintégration, afin d'établir un inventaire des marchandises présentes dans les lieux, aux frais de la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION.

- Débouté la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION de sa demande de dommages et intérêts.

- Débouté MM. [D] [F] et [V] [K], et les sociétés ST VENGADESWARA MARCHE et NELA de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles.

- Débouté M. [L] [X] de sa demande de dommages et intérêts.

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

- Débouté les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamné MM. [D] [F] et [V] [K], et les sociétés ST VENGADESWARA MARCHE et NELA aux dépens.

- liquidé les dépens à recouvrer par le Greffe à la somme de 166,02 euros TTC (dont 20% de TVA).



Par déclaration du 22 septembre 2017, la SARL NELA a interjeté appel de ce jugement.



Par acte d'huissier du 11 janvier 2018, la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION a assigné en appel provoqué et signifié ses conclusions à M. [D] [F], [Adresse 6] ; l'acte a été remis à l'étude.



Par acte d'huissier du 12 janvier 2018, la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION a assigné en appel provoqué et signifié ses conclusions à M. [L] [X], [Adresse 7] ; l'acte a été remis à l'étude.



Par acte d'huissier du 16 janvier 2018, la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION a assigné en appel provoqué et signifié ses conclusions à M. [V] [K], [Adresse 8] ; l'huissier de justice, après avoir effectué les diligences visées à l'article 659 du code de procédure civile, a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses.




Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 8 octobre 2017, la SARL NELA demande à la cour de :

- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 septembre 2017 par le tribunal de commerce de CRETEIL ;

- Déclarer nulle et non avenue la vente du 18 juillet 2016 intervenue entre les sociétés NELA et GÉNÉRALE D'ALIMENTATION ;

- Déclarer régulière, opposable aux parties et aux tiers, la vente entre les sociétés NELA et VENGADESWARA MARCHE passée le 15 mars 2017 par devant Maître [Y] [C], Avocat au Barreau de Paris ;

- Condamner la SARL GÉNÉRALE D'ALIMENTATION à payer à la SARL NELA la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Mathieu RETORET conformément à l'article 699 du même code ;

- Condamner la SARL GÉNÉRALE D'ALIMENTATION aux entiers dépens.



Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 3 janvier 2018, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE D'ALIMENTATION demande à la cour de :

- Déclarer nul et de nul effet l'acte de droit au bail inclus dans la cession de fonds de commerce régularisé entre la société NELA et la société ST VENGADESWARA MARCHE 1e 15 mars 2017.

En conséquence,

- Ordonner la réintégration de la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION dans les lieux loués au [Adresse 1].

- juger que la société GÉNÉRALE D'ALIMENTAT1ON sera accompagnée au moment de faire sa réintégration par un Huissier désigné par la Cour afin d'établir un inventaire précis des marchandises présentes dans les lieux.

Réserver au tribunal de commerce de Créteil la liquidation du préjudice de la perte de marchandise.

- Condamner solidairement M. [X] [U], la société NELA, M. [F], M. [K] [R] et la société ST VENGADESWARA MARCHE à payer à la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts.

- Condamner solidairement M. [X] [U], la société NELA, M. [F], M. [K] [R] et la société ST VENGADESWARA MARCHE à payer à la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION la somme de 10 000€ selon 1'article 700 du code de procédure civile .



Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 18 novembre 2018, la société ST VENGADESWARA MARCHE demande à la cour de :

Vu notamment l'article 549 du code de procédure civile,

Vu les articles 1103 et 1104 (anciennement 1134) et 1231-1 et suivants (anciennement 1147) du code civil, et les articles L. 141-1 et suivants et des articles L. 223-1 et suivants du code de commerce,

Vu la nullité de ladite cession du droit au bail du 18 juillet 2016 pour absence de cause du fait de l'absence du prix dérisoire et de l'absence de paiement du prix,

Vu la cession du fonds de commerce régulièrement intervenue le 15 mars 2017,

- Infirmer le jugement dont appel du 5 septembre 2017 en toutes ses dispositions,

En conséquence et à titre incident,

- Débouter la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Dire et juger nul et de nul effet la cession du droit au bail datée du 18 juillet 2016 enregistrée le 9 décembre 2016,

- Condamner la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION à transférer son siège social hors du siège établissement principal de la société ST VENGADESWARA MARCHE, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- Condamner la société GENERALE D'ALIMENTATION au paiement d'une indemnité de 3.000 euros pour procédure abusive,

- Condamner la société GENERALE D'ALIMENTATION au paiement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens qui comprendront le coût des constats d'huissier en date des 2 octobre 2016 et 18 janvier 2017.



MM. [V] [K], [D] [F] et M. [L] [X] n'ont pas constitué avocat.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 décembre 2018.



La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.






MOTIFS DE LA DÉCISION



La société NELA fait valoir que l'acte de cession de droit au bail du 18 juillet 2016 comporte deux prises d'effet du bail erronées, que les locaux ne font pas l'objet de la moindre désignation, que quant au prix de 6 000 euros, outre qu'il est dérisoire, la preuve de son encaissement n'est même pas rapportée, que le droit de préemption sur les commerces sis dans un périmètre du commerce et de l'artisanat n'a même pas été purgé, que de surcroît, l'acte du 18 jui1let 2016 n'a été enregistré que le 9 décembre 2016, soit quasiment six mois après sa signature en violation du bail, que l'acte du 18 juillet 2016 n'a pas été signifié au bailleur, que le bailleur ne reconnaît pas la société GENERALE D'ALIMENTATION comme preneuse, que celle-ci ne justifie pas du paiement du loyer.



La société GENERALE D'ALIMENTATION réplique que M. [L] [X] n'a pas été convoqué à l'assemblée générale qui a désigné M. [D] [F] en qualité de gérant de la société NELA, que toutes les mesures prises sous la plume du gérant M. [D] [F] sont nulles et de nul effet, puisque l'assemblée générale est irrégulière, que sur le plan économique elle a été mise à la porte de son commerce au mois de mars 2017, qu'elle a perdu toute sa clientèle, qu'elle n'a pu régler un nombre important de fournisseurs qui, jusqu'a ce jour, la poursuit, que la société NELA connaissait la situation, que l'assemblée générale ne peut être valablement présidée par un associé, qu'il n'y a jamais eu de démission du gérant.



La société ST VENGADESWARA MARCHE soutient que la cession du droit au bail en date du 18 juillet 2016 est fictive et inexistante et les stipulations essentielles sont fausses et non exécutées, puisque le prix n'a pas été payé et que le dépôt de garantie n'a pas été remboursé, et que le bailleur n'a pas été avisé, que le prix de 6.000 euros n'a jamais été payé, que le dépôt de garantie n'a jamais été remboursé, que le bailleur n'est pas intervenu à cet acte qui n'a jamais été porté à sa connaissance, que M. [L] [X] n'était qu'associé à hauteur de 20 %, qu' il a prétendu pouvoir céder le droit au bail dans une opération en réalité de cession de fonds de commerce sans aucune autorisation de l'assemblée générale de la société NELA et l'aval de l'associé majoritaire à hauteur de 80 %.



La cession du droit au bail est un acte par lequel le cédant, bénéficiaire du bail, transmet son bail et les droits et obligations s'y rattachant à un tiers.



La cession du droit au bail s'analysant en une cession de créance, l'accord non équivoque du bailleur doit être mentionné à l'acte et la cession doit être signifiée au bailleur dans les termes de l'article 1690 du code civil à moins que celui-ci ne l'accepte par acte authentique.



Le non respect de cette disposition rend la cession inopposable au bailleur et aux tiers.



Dans les rapports entre le cédant et le cessionnaire, la cession de bail est une cession de créance emportant dessaisissement du cédant au profit du cessionnaire, à la condition que le cédant ait la capacité juridique de céder le droit au bail.



Le bail commercial initial a été passé entre M. et Mme [Y] d'une part et la société LAKSMITHA d'autre part par acte du 19 juin 2006. Le bail portait sur les locaux situés [Adresse 1], pour une durée de 9 ans à compter du 1er juin 2006 pour se terminer le 31 mai 2015.



Il est stipulé au bail que la cession est soumise à autorisation expresse et écrite du bailleur sauf à l'acquéreur du fonds de commerce.



Une première cession de bail est intervenue, par acte du 2 mai 2014, entre la société LAKSMITHA et la société NELA qui y exploitait un commerce d'alimentation.



En l'espèce, deux actes sont en concurrence :

- une cession de droit au bail commercial en date du 18 juillet 2016 entre la société NELA représentée par son gérant M. [L] [X] et la société GÉNÉRALE D'ALIMENTATION représentée par son gérant ;

- une cession du fonds de commerce incluant la cession du droit de bail en date du 15 mars 2017 entre la société NELA représentée par M. [D] [F], gérant et la société VENGADESWARA MARCHE.



Il y a lieu d'examiner la cession de droit au bail commercial en date du 18 juillet 2016.



Il est mentionné à l'acte que le bailleur le cabinet ALTICE a consenti au bail commercial qui commence le 1er février 2015 pour se terminer le 30 février 2024. Il est précisé que la vente est consentie au prix de 6000 euros. L'acte a été signifié par acte d'huissier de justice en date du 24 mars 2017 à la société ALTICE.



Par courriel en date du 20 mars 2017, Maître HARROCH, avocat de la société GENERALE ALIMENTATION, a contacté le cabinet ALTICE, gestionnaire du local, sur le fait que des tiers s'étaient installés dans le local commercial alors que sa cliente était titulaire du bail.



Le cabinet ALTICE a répondu le 20 mars 2017 ainsi à Maître HARROCH, avocat de la société GENERALE ALIMENTATION :

'La société GENERALE D'ALIMENTATION que vous citez dans votre e-mail n'est pas locataire de ce local. Nous n'avons jamais été informés d'une quelconque cession qui serait intervenue à son profit.

Le locataire de ce local est la société NELA.

Un changement de gérant est intervenu le 18 janvier 2017, ainsi qu'il résulte des documents ci-joints : PV AG du18/01/2017, publication du changement de gérant aux Affiches Parisiennes sous le numéro S0180726, extrait K-bis au 2 mars 2017.

Une cession de fonds de commerce est intervenue ou interviendra prochainement entre la société NELA et M. [K] agissant pour le compte de la société en formation ST VENGADESWARA. La cession ne nous a pas encore été signifiée.

L'avocat chargé de cette cession est : Maître [Y] [C]'



Ce courriel démontre que pour la cession du droit au bail commercial en date du 18 juillet 2016, s'il est mentionné dans l'acte que l'accord du bailleur a été recueilli, non seulement, aucune preuve d'un engagement de cette nature n'est rapportée mais le courriel susvisé démontre que l'accord du bailleur n'a pas été régulièrement recueilli.



Les deux actes ayant été signés à quelques mois d'intervalles, il y a lieu de vérifier si les cessionnaires étaient habilités à engager la société NELA.



Aux termes des statuts de la société NELA, enregistrés le 6 mai 2014, il est mentionné qu'elle est dirigée par un ou plusieurs gérants. Aux termes de l'extrait Kbis de la société NELA, à la date du 11 juin 2014, M. [L] [X] était désigné comme gérant de la société.



Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 4 janvier 2017, M. [D] [F], associé majoritaire, adressait à M. [L] [X], associé minoritaire et gérant, une convocation à une assemblée générale extraordinaire en date du 18 janvier 2017 avec pour ordre du jour :

- constatation de votre démission par abandon de vos fonctions de gérant de la SARL NELA au profit d'une nouvelle société en l'occurence la société GENERALE ALIMENTATION introduit dans la boutique de la SARL NELA

- nomination d'un nouveau gérant

- questions diverses



M. [L] [X] a répondu par courrier du 11 janvier 2017 qu'il contestait la qualité d'associé majoritaire de M. [D] [F], qu'il lui avait remboursé 80 % des 15 000 euros qu'il lui avait prêtés et qu'il n'avait pas de compte à lui rendre sur sa société.



Une assemblée générale extraordinaire s'est tenue le 18 janvier 2017 en présence de M. [D] [F] et en l'absence de M. [L] [X].



M. [D] [F] s'est désigné gérant de la société NELA. Cette modification a été publiée dans un journal d'annonces légales du 18 au 20 janvier 2017.



M. [D] [F] a convoqué M. [L] [X] par lettre recommandée avec avis de réception en date du 25 janvier 2017 à une assemblée générale extraordinaire le 7 février 2017 avec pour ordre du jour le transfert du siège social et la vente du fonds de commerce.



Aux termes du procès-verbal, lors de l'assemblée générale de la société NELA en date du 7 février 2017 , le transfert de siège social et la cession du fonds de commerce ont été votés .



Par courrier du 13 mars 2017, le cabinet ALTICE a fait part à Me [C], avocat, qu'elle n'était pas opposée à la cession du droit au bail en lui rappelant qu'elle devait lui être signifiée par voie d'huissier, le montant du dépôt de garantie en possession du bailleur, la destination et la désignation exacte des lieux loués, le montant de la dette de loyers et de la provision sur charges en lui précisant qu'elle devrait être apurée au plus tard le jour de la cession.



Par acte d'huissier de justice en date du 24 mars 2017, cet acte de cession de fonds de commerce a été signifié au cabinet ALTICE, administrateur du local commercial.



Par acte d'huissier de justice en date du 24 novembre 2017, la société ST VENGADESWARA MARCHE a sollicité auprès de M.et Mme [Y], bailleurs, représentés par le cabinet ALTICE le renouvellement du bail commercial qui avait pris fin le 31 mai 2015 à effet du 1er juin 2015.



La société ST VENGADESWARA MARCHE qui a acquis le fonds de commerce justifie d'une quittance de loyers en date du 2 septembre 2018 pour l'avis d'échéance du 1er au 30 octobre 2018 à son nom et délivrée par le cabinet ALTICE ce qui signifie qu'elle bénéficie du droit au bail sur le local commercial situé, [Adresse 1].



La société NELA verse aux débats des quittances de loyers pour la période du 25 juillet 2016 au 28 février 2017 au nom de la SARL NELA justifiant qu'à cette dernière date elle s'acquittait des loyers et était considérée comme preneuse alors que la société GENERALE ALIMENTATION se prévaut d'une cession du bail intervenue le 18 juillet 2016.



Pour démontrer qu'elle s'acquitte des loyers, la société GENERALE ALIMENTATION, verse aux débats une copie de chèque en date du 4 décembre 2016 d'un montant de 968 euros avec pour bénéficiaire le cabinet ALTICE. Cette seule copie de chèque, alors que la société NELA justifie d'une quittance de loyer pour cette période, est insuffisante pour démontrer sa qualité de preneuse.



La société NELA exerçait dans les locaux loués une activité d'alimentation générale. Elle a vendu son fonds de commerce comprenant le droit au bail par acte du 15 mars 2017.



Il est stipulé dans les statuts de la société NELA que le siège social de la société pourra être transféré en tout autre lieu par décision des associés représentant au moins la moitié du capital social.



La seule cession du droit au bail en date du 18 juillet 2016 entraînait l'obligation pour la société NELA de transférer son siège social et de renoncer à l'exploitation de son activité dans le local commercial au profit de la société GENERALE D'ALIMENTATION ce qui impliquait une décision préalable de l'assemblée générale dont il n'est pas justifié.



Il est reproché à M. [D] [F] les modalités selon lesquelles il a été désigné en qualité de gérant. Cependant, il résulte de la page 9 des statuts de la société NELA que la révocation du gérant peut être prononcée par décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales et qu'en cas de renonciation à ses fonctions, la collectivité des associés procède au remplacement du gérant après avoir été consultée par un ou plusieurs associés détenant plus de la moitié des parts sociales.



En l'espèce, M. [D] [F] est titulaire de 80% des parts sociales et M. [L] [X] de 20 %. En qualité d'associé majoritaire, et compte tenu de la cession du droit au bail sans qu'il ait été consulté, M. [D] [F] était fondé à provoquer une assemblée générale à laquelle M. [L] [X] a été convoqué. Celui-ci a répondu à son co-associé le 11 janvier 2017 et n'est venu ni à l'assemblée générale statuant sur sa démission de gérant ni à celle

statuant sur la vente du fonds de commerce.



Il est précisé à l'acte de cession du droit au bail en date du 18 juillet 2016 que le bailleur a consenti un bail commercial de 9 années et trois mois entières et consécutives qui commençait à courir le 1er février 2015 pour se terminer le 30 février 2024 et que le loyer est fixé à la somme annuelle en principal hors charges de 11.074,32 € ce qui signifierait qu'un nouveau bail a été consenti à la société GENERALE D'ALIMENTATION mais il n'en est pas justifié.



La société NELA a cédé son droit au bail puis son fonds de commerce comprenant le droit au bail à deux sociétés différentes.



L'associé minoritaire, gérant, a cédé au nom de la société ce droit au bail sans pouvoir justifier du consentement de l'associé majoritaire et sans modification des statuts de la SARL NELA qui avait son siège social dans les locaux loués et qui y exerçait une activité d'alimentation générale et ce au profit d'une société en cours de formation, la société GENERALE D'ALIMENTATION.



Il y a lieu d'annuler l'acte de cession du droit au bail en date du 18 juillet 2016, la société NELA n'ayant pas valablement donné son consentement à cette cession qui de plus portait sur un bail inexistant au vu de la période visée. Le bail portant sur le local situé [Adresse 1], courrait pour une durée de 9 ans à compter du 1er juin 2006 pour se terminer le 31 mai 2015. Il s'est poursuivi en l'absence de résiliation ou de renouvellement ce qui était aisément vérifiable par la société GENERALE D'ALIMENTATION, l'accord du bailleur étant acté à la cession.



Le jugement du tribunal de commerce de Créteil sera infirmé en ce qu'il a déclaré nulle et de nul effet la cession du droit au bail incluse dans l'acte de vente du fonds de commerce de la société NELA du 15 mars 2017, et a ordonné la réintégration dans le local de la société GENERALE D'ALIMENTATION.



La société GENERALE D'ALIMENTATION sera déboutée de sa demande de nullité de la cession de droit au bail incluse dans l'acte de vente du fonds de commerce de la société NELA du 15 mars 2017, et de sa demande de réintégration dans le local situé [Adresse 1].



Il n'y a pas lieu de condamner la société GENERALE D'ALIMENTATION à transférer son siège social alors que la nullité de l'acte en date du 18 juillet 2016 entraîne la disparition de ce siège social ; il n'est pas contesté par les parties que la société GENERALE D'ALIMENTATION n'est plus dans les locaux, objet du bail.



Enfin, la société NELA demande de déclarer régulière la vente intervenue le 15 mars 2017 ; seule a été contestée la cession du droit au bail incluse dans l'acte et la société GENERALE D'ALIMENTATION a été déboutée de sa demande. Il n'y a pas lieu de statuer sur la validité de l'acte de vente du fonds de commerce qui n'est pas par ailleurs contestée au stade de l'appel.



Sur la demande de dommages-intérêts de la société GENERALE D'ALIMENTATION



L'acte de cession de bail en date du 18 juillet 2016, contenant des erreurs manifestes sur les dates du bail qui y sont mentionnés, l'absence d'intervention à l'acte du bailleur, l'existence dans le local loué d'un fonds de commerce exploité non cédé, devaient amener la société GENERALE D'ALIMENTATION à s'interroger sur la régularité de l'acte passé.



La société GENERALE D'ALIMENTATION ne fonde pas juridiquement sa demande et ne caractérise pas l'existence d'un préjudice. Elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts de 50 000 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive



Il résulte des articles 1382 du code civil et 32-1 du code de procédure civile, qu'une partie ne peut engager sa responsabilité pour avoir exercé une action en justice ou s'être défendue que si l'exercice de son droit a dégénéré en abus. L'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'étant pas, en soi, constitutive d'une faute, l'abus ne peut se déduire du seul rejet des prétentions par la juridiction.



En l'espèce, la société ST VENGADESWARA MARCHE ne démontre pas le caractère abusif de l'attitude de la société GENERALE D'ALIMENTATION qui ne fait que se défendre dans le cadre de l'appel interjeté par la SARL NELA. Elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.



Sur les frais accessoires



La société GENERALE D'ALIMENTATION assumera les dépens de première instance et d'appel.



Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS



La cour statuant par décision par défaut,



Infirme le jugement sauf en ce que le tribunal a débouté la société GENERALE D'ALIMENTATION de sa demande de dommages-intérêts, la société ST VENGADESWARA MARCHE, MM. [V] [K], [D] [F] de leurs demandes reconventionnelles et M. [L] [X] de sa demande de dommages-intérêts,



Statuant à nouveau des chefs infirmés,



Déboute la société GENERALE D'ALIMENTATION de sa demande de nullité de la cession de droit au bail incluse dans l'acte de vente du fonds de commerce entre la société NELA et la société ST VENGADESWARA MARCHE en date du 15 mars 2017,



Annule l'acte en date du 18 juillet 2016 emportant cession du droit au bail sur le local situé [Adresse 1], entre la SARL NELA et la société GENERALE D'ALIMENTATION,



Déboute la société GENERALE D'ALIMENTATION de sa demande de réintégration dans le local situé [Adresse 1],



Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Rejette toute autre demande,



Condamne la société GENERALE D'ALIMENTATION aux dépens de première instance et d'appel.







LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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