18 juillet 2019
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 17/03692

Chambre 1-9

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9



ARRÊT AU FOND

DU 18 JUILLET 2019



N° 2019/ 600













Rôle N° RG 17/03692 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAC4N







SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT





C/



[W] [T] [U]

[Y] [U] [A] épouse [U]





















Copie exécutoire délivrée

le :



à :

Me Jean christophe STRATIGEAS

Me Frédéric LEVI













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 14 Février 2017 enregistré au répertoire général sous les n° 16/5176 et 16/5682.





APPELANTE



SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT Venant aux droits de la S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE MEDITERRANEE (anciennement dénommée CIF SUD) ayant son siège social [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, (CIF SUD à l'origine ) : Etant précisé que la S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE MEDITERRANEE (anciennement dénommée CIF SUD), venait elle-même aux droits du CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE MEDITERRANEE,, demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Jean christophe STRATIGEAS de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant





INTIMES



Monsieur [W] [U]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Frédéric LEVI, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant



Madame [Y] [A] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 2] (06600), demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Frédéric LEVI, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant













*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 15 Mai 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :





Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller







qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : M. Grégoire ALESINA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2019, puis prorogé au 18 Juillet 2019.







ARRÊT



contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2019,



Signé par Madame Pascale POCHIC, Conseiller et Madame Ingrid LAVIGNAC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***













































EXPOSE DU LITIGE





Par acte reçu le 31 mars 2008 par Maître [M] [D] notaire associé à [Localité 3] (06) contenant vente immobilière, la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée aux droits de laquelle vient la SA Crédit Immobilier de France Développement par suite d'une fusion absorption à effet au 1er décembre 2015, a consenti à Monsieur [W] [U] et à son épouse Madame [Y] [A] pour financer l'acquisition, un prêt d'un montant en capital de 384.500 euros remboursable en 300 mois, garanti par le privilège de prêteur de deniers et l'affectation hypothécaire des biens immobiliers objets de la vente.



Des échéances étant impayées, la déchéance du terme a été prononcée le 3 juin 2014 et la banque a fait délivrer aux époux [U] le 5 août 2014 un commandement de payer valant saisie immobilière pour le recouvrement de la somme de 465.521,03 euros puis les a fait assigner devant le juge de l'exécution qui par jugement du 6 novembre 2015 confirmé par arrêt de cette cour rendu le 12 février 2016, a déclaré irrecevable l'action de la banque exercée au mépris de la clause de conciliation- médiation stipulée à l'acte notarié prévoyant qu'en cas de litige les parties conviennent préalablement à toute instance judiciaire de soumettre leur différend à un conciliateur désigné qui sera missionné par le Président de la chambre des Notaires. La radiation du commandement publié le 30 septembre 2014 au 1er bureau du service de la publicité foncière de [Localité 4] volume 2014 S n° 118, a été ordonnée.





Par acte du 4 décembre 2015 la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée a fait signifier aux débiteurs un commandement de payer valant saisie vente en vertu de l'acte notarié de prêt pour paiement de la somme de 498.569,91 euros. Puis a saisi le 10 juin 2016 le Président de la chambre des notaires des Alpes Maritimes aux fins d'une conciliation-médiation qui n'a pas aboutie ainsi que constaté par procès verbal du 21 novembre 2016.



Par procès verbaux du 6 juin 2016 et 24 juin 2016 délivrés à la requête de la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée deux saisies attribution des comptes bancaires des époux [U] ont été pratiquées en vertu du même acte authentique pour le recouvrement de la somme de 508.205,21 euros.



Saisi d'une demande de nullité de ces deux saisies et du commandement de payer valant saisie vente ainsi que d'une demande de constat de la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 août 2014, et de la fin de non recevoir tirée de la prescription de la créance de la banque, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Draguignan par décision du 14 février 2017, après jonction des procédures, a :

' prononcé la nullité du commandement de payer aux fins de saisie vente et des deux procès verbaux de saisie attribution,

' ordonné en conséquence la main levée des saisies attribution,

' constaté la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 août 2014 et publié le 30 septembre 2014,

' constaté que la créance de la banque est éteinte depuis le 26 octobre 2016,

' condamné la société Crédit Immobilier de France Développement au paiement de la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

' rejeté le surplus des demandes.



Pour statuer ainsi le premier juge retient essentiellement:

- la nullité de fond affectant les mesures d'exécution contestées qui ont été diligentées en décembre 2015 et juin 2016 par la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée radiée du registre du commerce et des sociétés le 26 janvier 2010 à la suite de la fusion absorption par la SA Crédit Immobilier de France Développement le 15 décembre 2009,

- la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 août 2014 , publié le 30 septembre 2014, dont la radiation a été ordonnée par jugement du 6 novembre 2014,

- la prescription de la créance de la banque qui n'a pas été interrompue par les mesures d'exécution qui sont annulées, ni par la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière qui a fait l'objet d'une radiation , ni par la seconde phase de conciliation médiation initiée par la banque le 10 juin 2016, qui n'avait aucun caractère obligatoire aux termes de l'acte notarié du 31 mars 2008 et était vouée à l'échec au regard du parcours procédural du litige opposant les parties, ni par les écritures des époux [U] développés lors des instances judiciaires ayant opposé les parties dans la mesure ou la reconnaissance des droits du créancier ne peut résulter de conclusions annulées comme étant la suite d'un acte de procédure déclaré nul dont les effets sont rétroactivement anéantis,



La société Crédit Immobilier de France Développement a interjeté appel total de cette décision par déclaration du 24 février 2017.






Par dernières conclusions notifiées le 1er décembre 2017 la banque demande à la cour au visa des articles 1103 (1134 alinéa 1er ancien) , 2334 et 2238 du code civil :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté que la créance est éteinte depuis le 26 octobre 2016 et en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- rejeter l'appel incident de M.et Mme [U],

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes,

- les condamner solidairement au paiement de la somme de 3000 euros à titre d'indemnité de procédure et aux entiers dépens de première instance et d'appel.



L'appelante fait valoir pour l'essentiel que le délai de prescription a été suspendu du 10 juin 2016 au 21 novembre 2016 par la mise en oeuvre de la clause de médiation-conciliation prévue dans l'acte notarié du 31 mars 2008 , soutenant que l'article 2238 du code civil ne limite pas l'effet suspensif de la prescription à une seule et unique mise en oeuvre d'une telle clause.





M.et Mme [U] ont notifié leurs dernières écritures le 18 mars 2019 par lesquelles ils demandent à la cour aux termes du dispositif de leurs conclusions contenant l'exposé de leurs moyens :

- à titre liminaire :

' sur la recevabilité des contestations et l'efficacité des assignations introductives d'instance :

Vu, notamment, les articles 1er et 2 du Code civil, R 211-11 du Code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-892 du 6 mai 2017, portant diverses mesures de modernisation et de simplification de la procédure civile, 640 et suivants du Code de procédure civile, outre les principes généraux du droit transitoire :

- de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré parfaitement recevables, en la forme, les contestations émises par les époux [U] dont les assignations introductives d'instance demeurent, quant à elles, pleinement efficaces,

- à titre principal :

- sur l'extinction de la créance, et partant du droit correspondant :

' sur la nullité, la péremption, la radiation et la mainlevée des actes ayant jusqu'à présent concouru aux mesures d'exécution forcée :

Vu, notamment, les articles 1842 du Code civil, L 123-9, L 210-6, L 236-1 et suivants, L 237-2 alinéa 3, R 123-31 et suivants et R 236-1 et suivants du Code de commerce, L 122-1 et suivants, L 211-1 et suivants, L 221-1, R 122-1 et suivants, R 141-1, R 211-1 et suivants, R 221-1 et suivants et R 321-20 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution, outre 32, 73, 117 et suivants et 649 du Code de procédure civile :



- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a prononcé la nullité des actes suivants :

- le commandement aux fins de saisie-vente signifié le 4 décembre 2015 ;

- le procès-verbal de saisie-attribution dressé le 3 juin 2016 et sa dénonciation subséquente du 6 juin 2016 ;

- le procès-verbal de saisie-attribution dressé le 24 juin 2016 et sa dénonciation subséquente du 30 juin 2016.

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a ordonné la mainlevée des deux saisies-attributions pratiquées les 3 juin 2016 et 24 juin 2016,

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a constaté la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière qui, délivré le 5 août 2014, par l'intermédiaire de Maître [O] [V], huissier de justice à [Localité 4] (Var), et publié, le 30 septembre 2014, auprès du 1er bureau du service de la publicité foncière de [Localité 4] (Var), sous les références volume 2014 S numéro [Cadastre 1], a été totalement radié le 6 décembre 2016,

' sur la prescription biennale extinctive :

Vu, notamment, les articles 4, 6, 1122 ancien, 1134 ancien, 1156 et suivants anciens, 1165 ancien, 1249 et suivants anciens, 1351 ancien, 1356 ancien, 2062 et suivants, 2219, 2221, 2222, 2224, 2228, 2229, 2231, 2233 3°, 2234, 2238, 2240, 2241, 2242, 2243 et 2244 du Code civil, 122 et suivants et 480 du Code de procédure civile, L 111-2 et suivants, L 321-1, R 321-1, R 322-4 et R 322-15 du Code des procédures civiles d'exécution, L 211-1, L 218-1, L 218-2, L 221-29 et R 632-1 du Code de la consommation (anc. art. L 133-2, L 137-1, L 137-2 et L 141-4), ainsi que l'article liminaire dudit code (anc. art. préliminaire), L 236-1 et suivants et R 236-1 et suivants du Code de commerce, 4, 31, 325 et suivants, 480 et 1528 et suivants du Code de procédure civile, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, 4 et 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, outre les principes selon lesquels, tout d'abord, les lois spéciales dérogent aux lois générales, ensuite, il est défendu de distinguer là où la loi ne distingue pas, et, enfin, nul ne peut se contredire au détriment d'autrui (théorie dite de "l'estoppel") :

- dire et juger que les différentes lettres échangées entre les parties n'ont eu aucun effet interruptif de prescription, ni celles, valant mise en demeure, adressées par l'établissement de crédit aux emprunteurs, le 27 mai 2014, ni celles que ces derniers ont envoyées à l'organisme prêteur, entre le 3 février 2013 et le 31 août 2014, aux fins de renégocier, dans le cadre de simples pourparlers, les modalités financières du prêt, sans pour autant impliquer, à l'époque, de manière claire et non équivoque, une quelconque reconnaissance du droit du créancier,

- dire et juger que l'interruption de la prescription résultant de la demande en justice formulée, le 25 novembre 2014, par l'organisme prêteur est non avenue, dès lors que celle-ci a été définitivement rejetée, rejet ayant eu pour effet de retirer également au commandement de payer valant saisie immobilière signifié le 5 août 2014, comme à l'ensemble des actes se rattachant à cette procédure, ainsi les conclusions échangées, durant l'instance, entre les parties et, s'il y a lieu, la lettre que les emprunteurs ont adressée à l'organisme prêteur le 31 août 2014, une fois le commandement délivré, et partant la procédure initiée, tout effet interruptif de prescription, dès lors que le créancier a été judiciairement déclaré irrecevable en ses poursuites engagées précisément par la remise d'un tel commandement dont la radiation a, du reste, été ordonnée,

- dire et juger qu'en raison de leur annulation, le commandement aux fins de saisie-vente signifié le 4 décembre 2015, le procès-verbal de saisie-attribution dressé le 3 juin 2016 et sa dénonciation subséquente du 6 juin 2016 et le procès verbal de saisie-attribution dressé le 24 juin 2016 et sa dénonciation subséquente du 30 juin 2016, n'ont pu produire le moindre effet interruptif de prescription,

- dire et juger que les choix procéduraux des époux [U] qui, à titre principal, ont toujours soutenu, dans le cadre des diverses instances ayant jusqu'à présent opposé les parties, l'extinction pure et simple, pour cause de prescription, de la créance litigieuse, dont ils n'ont réclamé la réduction qu'à titre subsidiaire, ne sauraient constituer un quelconque aveu, ni valoir, d'une manière ou d'une autre, reconnaissance des droits adverses,

- confirmer , en conséquence, le jugement attaqué en ce qu'il a constaté l'extinction définitive de la créance litigieuse, et partant du droit correspondant, s'agissant aussi bien des échéances demeurées impayées avant la déchéance du terme, que du capital restant dû, une fois celle-ci prononcée,

- infirmer, en revanche, le jugement attaqué, s'agissant de la date d'expiration du délai de prescription biennale applicable, en distinguant, à cet égard, comme il se doit, la période antérieure à la déchéance du terme de celle qui lui est postérieure,

- dire et juger que le processus de conciliation-médiation, imposé par le contrat de vente du 31 mars 2008, avant toute instance judiciaire, à peine d'irrecevabilité de l'action engagée prématurément, a eu, sur le cours de la prescription, un effet non pas interruptif, mais simplement suspensif, durant tout le temps de sa mise en oeuvre, entre le 24 novembre 2014 et le 19 janvier 2015, soit pendant 56 jours seulement, le temps recommençant à courir, à l'issue, pour la durée qui restait encore au jour de la suspension,

- dire et juger , en conséquence, que pour les échéances demeurées impayées avant la déchéance du terme, la prescription biennale extinctive est définitivement acquise aux dates suivantes :

· échéance du 5 août 2013 : prescription acquise depuis le 30 septembre 2015, àminuit

.échéance du 5 septembre 2013 : prescription acquise depuis le 31 octobre 2015, à minuit

· échéance du 5 octobre 2013 : prescription acquise depuis 30 novembre 2015, à minuit

· échéance du 5 novembre 2013: prescription acquise depuis le 31 décembre 2015, à minuit ;

· échéance du 5 décembre 2013 : prescription acquise depuis le 30 janvier 2016, à minuit

· échéance du 5 janvier 2014 : prescription acquise depuis le 1er mars 2016, à minuit ;

· échéance du 5 février 2014 : prescription acquise depuis le 1er avril 2016, à minuit ;

· échéance du 5 mars 2014 : prescription acquise depuis le 30 avril 2016, à minuit ;

· échéance du 5 avril 2014 : prescription acquise depuis le 31 mai 2016 à minuit ;

· échéance du 5 mai 2014 : prescription acquise depuis le 30 juin 2016 à minuit.

- dire et juger que pour le capital restant dû, une fois la déchéance du terme prononcée, le 3 juin 2014, la prescription biennale extinctive est définitivement acquise depuis le 29 juillet 2016, à minuit, faute pour le créancier d'avoir entrepris, durant ce laps de temps, le moindre acte valablement interruptif de prescription, l'organisme prêteur ne pouvant davantage se prévaloir utilement, au cours de cette même période, d'une quelconque reconnaissance de son droit par les emprunteurs,

- dire et juger que les moyens et prétentions formulés par la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644), au sujet de la clause de conciliation-médiation, insérée dans l'acte de vente du 31 mars 2008, sont sinon radicalement irrecevables, pour être, en tout point, exactement contraires à ce que l'appelante avait jusque-là soutenu sur ce plan, du moins totalement infondés, tant en raison des effets attachés à la fusion-absorption, qu'au regard du processus contractuel déjà mis en oeuvre et qui, dès lors, n'avait nul besoin d'être renouvelé,

- dire et juger que la proposition de résolution amiable du différend opposant les parties, formulée par l'organisme de crédit, le 10 juin 2016, sans que l'établissement prêteur n'y soit, cette fois, en rien, contraint, et qui, en l'absence d'accord écrit, quant à ses modalités pratiques, tant au regard de ses conditions de mise en oeuvre, que de ses conséquences, n'a pu, tout au plus, suspendre le cours de la prescription qu'à compter du jour de la réunion correspondante, le 21 novembre 2016, est, à cet égard, sans le moindre effet, puisque la prescription était alors déjà irrémédiablement acquise, sans aucune possibilité de prorogation légale, et ce d'autant plus que le procès-verbal de non-conciliation correspondant vise la seule société Crédit Immobilier de France Méditerranée (RCS Marseille n° 391 799 764), dépourvue de toute existence légale depuis le 15 décembre 2009, le créancier, muni d'un titre exécutoire, ayant, de surcroît, disposé, de son côté, d'un temps plus que suffisant pour prendre, dans le strict respect des règles de forme et de fond applicables, et avant l'expiration des délais requis pour agir, toutes initiatives utiles, à l'effet de préserver ses droits, ce qu'il s'est toutefois abstenu de faire,

- dire et juger, en conséquence, que le commandement aux fins de saisie vente délivré, le 19 mai 2017, en cause d'appel, à l'initiative de la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644), est dépourvu du moindre effet, notamment, interruptif ou suspensif de prescription, puisque celle-ci était d'ores et déjà définitivement acquise au moment de la signification de l'acte, sans que ce dernier ne puisse permettre d'opérer le recouvrement d'une

créance irrémédiablement éteinte, sachant qu'il en ira, bien évidemment, de même pour tout autre acte que l'organisme de crédit pourrait être encore amené à délivrer par la suite,

- à titre subsidiaire :



Sur la réduction de la créance :

Vu, notamment, les articles L 313-50, L 313-51, L 313-52 et R 313-26 et suivants du Code

de la consommation (anc. art. L 312-23, L 313-22, L 313-23 et R 312-3), outre 1152 ancien, 1226 et suivants anciens et 2274 du Code civil :

- supprimer purement et simplement, sinon réduire, de manière globale, à 1 euro seulement, toutes les sommes qui, réclamées par l'organisme prêteur, à hauteur de 168.192,15 euros, sauf à parfaire, suivant le décompte adverse, arrêté au 18 mai 2017, sont constitutives d'autant de clauses pénales, manifestement excessives, au regard du contexte de ce dossier, des errements procéduraux de l'établissement de crédit, de la situation économique respective des parties et de la bonne foi des époux [U], qu'il s'agisse de la majoration de 3 points du taux d'intérêt, jusqu'à la déchéance du terme seulement (70.331,86 euros), de l'application, à partir de la demande de remboursement anticipé forcé, d'intérêts de retard au taux conventionnel (67.405,64 euros), et de l'indemnité de 7 % liée à la résolution du contrat de prêt (30.454,65 euros),

- En tout état de cause :

Sur les frais et dépens de l'instance :

Vu, notamment, les articles R 631-4 du Code de la consommation, L 111-8 et R 121-5 du Code des procédures civiles d'exécution, 1153-1 et 1248 anciens du Code civil, 695, 696,699, 700, 749 et 899 du Code de procédure civile, outre L 444-1 et suivants, R 444-1 et suivants et A 444-10 et suivants du Code de commerce :

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644) à payer aux époux [U] la somme de 2.000 euros, au titre des frais par eux exposés, non compris dans les dépens, et à supporter ces derniers,

- condamner la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644) à payer aux époux [U], avec intérêts au taux légal, la somme de 5.000 euros, sauf à parfaire, au titre des frais exposés, en appel, par les intimés, pour faire assurer leur défense,

- condamner la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644) à supporter les entiers dépens lesquels, distraits au profit de Maître Frédérick Lévi, avocat postulant, sur son affirmation de droit, comprendront, notamment, outre les sommes susceptibles d'avoir été bloquées et/ou débitées, au détriment des époux [U], du fait des saisies-attributions litigieuses, ainsi les différents frais bancaires, facturés, à ce jour, 111 euros, sauf à parfaire, également les dépenses, de toute nature, exposées, au titre de la présente instance, pour les actes de recouvrement, comme d'exécution forcée susceptibles d'en découler, et les émoluments dus, s'il y a lieu, à l'huissier de justice poursuivant,

- Sur le surplus :

Vu, notamment, l'ancien article 954 du Code de procédure civile :

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires formulées par la société Crédit Immobilier de France Développement (RCS Paris n° 379 502 644).





L'instruction de l'affaire a été déclarée close par ordonnance du 23 avril 2019.





En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.






MOTIFS DE LA DÉCISION





Bien que la déclaration d'appel, antérieure à l'entrée en application du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, porte l'indication d'un appel total, le jugement déféré n'est pas contesté dans ses dispositions ayant prononcé la nullité du commandement de payer aux fins de saisie vente et des deux procès verbaux de saisie attribution, ordonné la main levée des saisies attribution et constaté la péremption du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 5 août 2014 et publié le 30 septembre 2014.



Dès lors ces dispositions seront confirmées.



Demeure en débat la fin de non recevoir tirée de la prescription de la créance de la banque.



L'application de la prescription biennale de l'article L.137-2 devenu L.218-2 du code de la consommation à l'action en paiement du Crédit Immobilier de France Développement , n'est pas discutée.



Ainsi qu'exactement rappelé par le premier juge à l'égard d'une dette payable par termes successifs la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, emportant son exigibilité, qui en l'espèce a été prononcée le 3 juin 2014.



Contrairement à ce que prétendent les intimés la prescription a été interrompue par la lettre qu'ils ont adressée au prêteur le 31 août 2014 par laquelle, exposant leurs difficultés financières ils ont fait part de leur intention de vendre un bien immobilier pour apurer leur dette, lettre valant reconnaissance de la créance de la banque au sens de l'article 2240 du code civil.



Les parties conviennent que la prescription a été suspendue, par application de l'article 2238 du code civil, pendant 56 jours par l'effet de la mise en oeuvre le 24 novembre 2014 de la clause contractuelle de médiation conciliation s'étant conclue le 19 janvier 2015 par l'établissement d'un procès verbal de non conciliation.



Et la banque ne discute pas l'absence d'effet interruptif de prescription, retenue par le premier juge, du commandement de payer valant saisie immobilière délivré aux époux [U] le 5 août 2015 devenu caduc, et de l'action engagée devant le juge de l'orientation par assignation du 24 novembre 2014 en conséquence du jugement la déclarant irrecevable, confirmé par arrêt de cette cour.



Mais les parties s'opposent sur l'effet suspensif de prescription prévu par l'article 2238 précité, de la nouvelle tentative de conciliation mise en oeuvre le 10 juin 2016 par la SA Crédit Immobilier de France Développement , venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée, en application de la clause prévue à l'acte notarié de prêt, tentative ayant abouti à l'établissement par Maître [B] ,notaire honoraire désigné, d'un procès verbal de non conciliation en date du 21 novembre 2016.



La banque reproche au premier juge d'avoir méconnu les dispositions de l'article 2238 susvisé en déniant tout effet suspensif de prescription à cette tentative de conciliation en considérant que cette seconde phase de conciliation n'était pas obligatoire aux termes de l'acte authentique du 31 mars 2008 et était par ailleurs vouée à l'échec au regard du parcours procédural opposant les parties.



En vertu de l'article 2238 du code civil la prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d'un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d'accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation.

Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l'une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée.



La société Crédit Immobilier de France Développement soutient que ces dispositions ne limitent ni ne cantonnent l'effet suspensif de prescription à une unique mise en oeuvre de la clause contractuelle de conciliation faisant obligation aux parties en cas de litige, préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend à un conciliateur.



Elle souligne que créancier subrogé, elle n'avait elle même été partie à aucune instance judiciaire contre les époux [U], et que n'étant devenue partie qu'à la date du 7 décembre 2015 correspondant à la radiation de la SA Crédit Immobilier de France Méditerranée du registre du commerce et des sociétés, elle était tenue de mettre en oeuvre la clause de conciliation à peine de se voir opposer l'irrecevabilité de toute action ultérieure.



Toutefois comme le relève à juste titre les intimés la SA Crédit Immobilier de France Développement est intervenue volontairement à l'instance d'appel dans le cadre du recours exercé par la société Crédit Immobilier de France Méditerranée contre le jugement d'orientation rendu le 6 novembre 2015, pour soutenir que la clause conventionnelle de conciliation-médiation, avait été respectée et que la procédure de saisie immobilière était en conséquence recevable.



Par ailleurs s'étant substituée à la société Crédit Immobilier de France Méditerranée , par l'effet de la fusion-absorption, la mise en oeuvre par l'absorbée de cette clause contractuelle lui est opposable en sorte que le Crédit Immobilier de France Developpement n'était nullement tenu de réitérer cette procédure de conciliation préalablement à une nouvelle instance judiciaire. La banque ne peut donc se prévaloir de l'accord donné par les époux [U] à la signature de l'acte authentique à la mise en oeuvre de la clause contractuelle de médiation-conciliation qui ne prévoit pas que cette procédure soit renouvelée, pour prétendre que l'effet suspensif de prescription prévu par l'article 2238 précité a couru à compter du 10 juin 2016 date de la saisine à son initiative, du Président de la chambre des notaires.



Etant relevé que les époux [U] par l'intermédiaire de leur conseil ont par courriel en réponse du 30 septembre 2016 fait connaître sans ambiguïté au notaire désigné qu'ils n'exprimaient aucun accord à la mise en oeuvre de cette médiation, se contentant de prendre acte de la volonté du Crédit Immobilier de France Developpement de procéder à une nouvelle réunion de médiation conciliation suite à celle ayant déjà eu lieu le 19 janvier 2015 qui n'avait pas abouti.



En sorte qu'à défaut d'accord écrit, la suspension de la prescription, conformément aux dispositions de l'article 2238 ne pouvait intervenir qu'à la date de la première réunion de conciliation soit le 21 novembre 2016, date à laquelle la prescription de la créance de la banque était acquise et ce depuis le 26 octobre précédent, sans qu'il soit besoin dans ces conditions de distinguer comme le demandent les intimés, la créance de mensualités impayées et celle du capital restant dû.



Il s'en suit la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions.



Le Crédit Immobilier de France Developpement succombant en son recours supportera les dépens d'appel, rappel fait que les frais bloqués ou débités au détriment des intimés du fait des saisies attribution annulée et les frais bancaires qui en seraient résultés ne relèvent pas des dépens au sens de l'article 695 du code de procédure civile.



La banque sera tenue de verser aux intimés une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions précisées au dispositif ci-après, et sera déboutée de sa demande à ce titre.





PAR CES MOTIFS





La cour, statuant après débats en audience publique et après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,



Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,



Ajoutant,



Condamne la SA Crédit Immobilier de France Developpement à payer à Monsieur [W] [U] et à Madame [Y] [A] épouse [U] la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Rejette le surplus des demandes,



Condamne la SA Crédit Immobilier de France Developpement aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





LE GREFFIERP/LE PRESIDENT

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