25 septembre 2019
Cour d'appel de Versailles
RG n° 17/04779

15e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES









Code nac : 80A



15e chambre



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 SEPTEMBRE 2019





N° RG 17/04779





AFFAIRE :



[Y] [T]





C/





SAS SOCIETE DE GESTION HOTELIERE DE PARIS BERTHIER









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Juin 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : Encadrement

N° RG : 11/00808





Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





Me Audrey GRANDGONNET



Me Arnaud DOUMENGE





le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT-CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,



La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :





Monsieur [Y] [T]

[Adresse 2]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 3], de nationalité française



représenté par Me Audrey GRANDGONNET, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Eléonore CRUZ, avocat au barreau de GRENOBLE







APPELANT

****************





SAS SOCIETE DE GESTION HOTELIERE DE PARIS BERTHIER

[Adresse 1]

[Localité 2]

N° SIRET : 508 303 104



représentée par Me Arnaud DOUMENGE de la SELARL NERVAL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L131 substituée par Me Claire SEIGNE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0270







INTIMÉE

****************





Composition de la cour :



En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Maryse LESAULT, Présidente,

Madame Isabelle VENDRYES, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,



Greffier, lors des débats : Madame Carine DJELLAL,


















FAITS ET PROCÉDURE,



M. [Y] [T] (ci-après M. [T]) a été embauché par contrat à durée indéterminée par la société de gestion hôtelière de Paris Berthier venue aux droits de la société hôtelière du Louvre exploitant la marque Campanile, le 1er novembre 1986 en qualité d'assistant de direction puis de directeur de différents hôtels franchisés Campanile.



Suite à la fin du contrat de gestion confié à la société Envergure le 20 octobre 2003, il a signé un contrat de travail avec reprise d'ancienneté au 28 août 1995.



L'hôtel a été vendu au groupe Paninvest en août 2008 et un avenant a été régularisé le 25 juillet 2008 s'agissant de l'intéressement et de la part variable de la rémunération.



Depuis le 5 septembre 2010, l'hôtel a pour nouvelle enseigne [1] suite à la dénonciation du contrat de franchise conclu entre la société de gestion hôtelière de Paris Berthier et la société Louvre Hôtel par cette dernière.



La convention collective applicable est celle des hôtels, cafés, restaurants.



Au dernier état de la relation de travail, M. [T] occupait le poste de directeur d'exploitation, cadre, niveau V, échelon 3.



Il percevait une rémunération qui se composait d'une partie fixe (5 903,84 euros) et d'une partie variable, constituée d'un intéressement annuel.



Le 20 avril 2011 M. [T] a été convoqué à un entretien préalable qui a eu lieu le 2 mai 2011, avec mise à pied conservatoire. Il a été licencié pour faute grave par lettre recommandée du 5 mai 2011.



Le 6 mai 2011, M. [T] a répondu aux mentions contenues dans le courrier de licenciement et en a contesté tous les points.



Contestant son licenciement, M. [T] a saisi le Conseil de prud'hommes le 9 mai 2011.



A l'audience de jugement, il a sollicité la condamnation de son employeur, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au paiement des sommes suivantes, avec capitalisation des intérêts :

- la prime contractuelle sur RBE calculée après communication sous astreinte de 500 euros par jour de retard des documents justificatifs de son calcul pour 2003 à 2012, subsidiairement 35 000 euros,

- l'intéressement annuel arrêté fin juin 2011 après communication sous astreinte de 500 euros par jour de retard des documents justificatifs de son calcul, subsidiairement 10 000 euros,

- 3 148,71 euros bruts à titre de rappel de salaires sur mise à pied conservatoire, et 314,87 euros brut au titre de congés payés afférents,

- 2 400 euros au titre de l'indemnité de nourriture,

- 17. 162,30 euros au titre de la perte d'indemnité Pôle Emploi,

- 17 711,52 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 771,15 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 187 305 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 334 179 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 150 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

- 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.



Par jugement du 20 juin 2014, le Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :

- dit que le licenciement dont M. [T] a fait l'objet de la part de la société gestion hôtelière de Paris Berthier est fondé sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave,

- condamné en conséquence la société gestion hôtelière de Paris Berthier à verser à M. [T] les sommes de :

avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2011,

- 3 148,71 euros à titre de rappel de salaires sur mise à pied et 314,87 euros au titre des congés payés afférents,

- 26 413,53 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2 641,35 euros au titre des congés payés afférents,

- 34 238,42 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 2 400 euros au titre de l'indemnité de nourriture due pendant le préavis,

avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

- dit que la société gestion hôtelière de Paris Berthier devra transmettre à M. [T] dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision un certificat de travail, une attestation relative au DIF et une attestation Pôle emploi conformes ainsi qu'un bulletin de salaire récapitulatif sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé ce délai et pendant deux mois et dit que la présente formation se réserve le droit de liquider cette astreinte,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société gestion hôtelière de Paris Berthier à verser à M. [T] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du Code de procédure civile,

- rappelé que la condamnation de l'employeur au paiement des sommes visées par les articles R. 1454-14 et 15 du Code du travail est exécutoire de plein droit dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire dans les conditions prévues par l'article R. 1454-28,

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 8 804,51 euros,

- condamné la société gestion hôtelière de Paris Berthier aux dépens.



Par déclaration du 4 août 2014, enregistrée le 18 août 2014, M. [T] a interjeté appel de la totalité du jugement.



Par ordonnance du 13 janvier 2016, la cour d'appel de Versailles (15ème chambre) a :

- ordonné la radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours,

- dit que les parties ne pourront procéder à la réinscription de l'affaire que sur justification de l'exécution des diligences suivantes :

- dépôt des demandes au soutien de l'appel de la décision critiquée,

- justification de la notification à l'intimé des demandes ainsi présentées.




Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, M. [T], appelant, demande à la cour de :



- confirmer partiellement la décision du Conseil de prud'hommes du 20 juin 2014 en ce qu'il a condamné la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser les sommes suivantes :

- 3 148,71 euros au titre de rappel de salaires sur mise à pied et 314,87 euros au titre des congés payés afférents,

- 26 413,53 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 2.641,87 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 400 euros au titre de l'indemnité de nourriture,



Pour le reste,

- infirmer partiellement la décision du Conseil de prud'hommes du 20 juin 2014,



Par conséquent,

- dire et juger que son ancienneté doit être reprise au 1er novembre 1986,

- dire et juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse,



Par conséquent,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier au versement de :

- 60 161,82 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- 334 179 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dire et juger qu'il ne remplit pas les conditions du cadre dirigeant,

Le cas échéant,

- dire et juger que sa convention de forfait jour doit être considérée comme nulle et non avenue,



Par conséquent,

- dire et juger qu'il a effectué 7 140 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser un rappel de salaires pour accomplissement d'heures supplémentaires à hauteur de 391 349,56 euros auxquels s'ajouteront 39 134,95 euros au titre des congés payés afférents,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser la somme de 35 423,04 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser la somme de 10 979 euros au titre de l'intéressement,



- A titre principal,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier au versement de la somme de 1 euro symbolique au titre de provision de prime RBE,

- ordonner la remise des documents justificatifs du calcul des montants sur RBE pour la période correspondante sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 15ème jour du prononcé de la décision à intervenir,



A titre subsidiaire,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser la somme de 35 000 euros au titre de la prime RBE,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier au versement de la somme de 17 162,30 euros en réparation du préjudice pour perte des indemnités Pôle Emploi,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société gestion hôtelière de Paris Berthier aux entiers dépens,

- Cpndamner la société de gestion hôtelière de Paris Berthier au versement de la somme de 150 000 euros en réparation du préjudice subi pour harcèlement moral.



Par conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience, la société gestion hôtelière de Paris Berthier , intimée, demande à la cour de :



- confirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu que le licenciement de M. [T] reposait sur une cause réelle et sérieuse,

- dit et jugé que l'ancienneté de M. [T] doit être fixée au 28 août 1995,

- débouté M. [T] de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de prime contractuelle sur le revenu brut d'exploitation (RBE), d'intéressement annuel arrêté à fin juin 2011 et de dommages-intérêts pour perte d'indemnité au titre de l'allocation Pôle Emploi,

- de l'infirmer en ce qu'il a estimé que les faits reprochés à M. [T] n'étaient pas constitutif d'une faute grave,

- les éléments fournis par M. [T] laissaient supposer que M. [T] a été victime de harcèlement moral.

Et, en conséquence, a condamné la SGH PARIS-BERTHIER au paiement des sommes suivantes :

- rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire : 3 148,71 euros

- congés payés y afférents : 314,87 euros

- indemnité compensatrice de préavis : 26 413,53 euros

- congés payés y afférents : 2 641,35 euros

- indemnité légale de licenciement : 34 238,42 euros

- indemnité de nourriture : 2 400 euros

- dommages-intérêts pour harcèlement moral : 8 000euros

- article 700 du code de procédure civile : 1 200 euros

- dépens,



Et statuant à nouveau, il est demandé à la Cour sur les chefs de jugements infirmés :

- dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [T] était légitime et bien fondé,

- dire et juger que M. [T] n'a pas été victime d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral,

- le débouter de l'intégralité de ses demandes financières de ce chef,

Sur les demandes nouvelles :

- dire et juger que le forfait sans référence horaire de M. [T] était parfaitement valable et, ce faisant, que l'intéressé ne peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires,

- dire et juger, en tout état de cause, que M. [T] n'apporte aucun élément de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires,

- dire et juger que la SGH PARIS-BERTHIER n'a pas dissimulé l'emploi salarié de M. [T],

- dire et juger, en tout état de cause, que M. [T] ne démontre pas que la SGH PARIS-BERTHIER aurait volontairement dissimulé son emploi salarié.



Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.






MOTIFS,



1- Sur la reprise d'ancienneté de M. [T]



M. [T] présente des demandes indemnitaires liées à la rupture de son contrat de travail en faisant remonter son ancienneté au 1er novembre 1986, motif pris que, depuis cette date, « il aurait été salarié de franchisés CAMPANILE » et que ses contrats de travail successifs étaient conclus sous en-tête « CAMPANILE ».



La cour rappelle que la reprise de l'ancienneté acquise chez un précédent employeur ne peut résulter que de l'accord exprès des parties contractantes.



Il est relevé que M. [T] a été embauché par la société gestion hôtelière de Paris Berthier par contrat de travail à durée indéterminée du 28 août 1995, lequel ne mentionne aucune reprise d'ancienneté chez un ou plusieurs précédents employeurs.



Aucun des contrats de travail conclus successivement avec la SA HÔTEL GRIL CAMPANILE, la SOCIÉTÉ DE GESTION HÔTEL ANDRÉ, ou encore la SOCIÉTÉ DE GESTION PORTE DE PANTIN, pour exercer les fonctions de direction au sein des Hôtels CAMPANILE ne fait état d'une quelconque reprise d'ancienneté dès lors qu'il s'agit de sociétés juridiquement distinctes et indépendantes les unes des autres.



Les certificats de travail successifs produits par M. [T], pour attester des différents postes occupés par ses soins dans différents hôtels font mention de périodes d'emploi entre le 1er novembre 1986 et le 27 août 2005, sans qu'il ne soit encore jamais fait état d'une reprise d'ancienneté.



Le dernier contrat de travail régularisé entre la société gestion hôtelière de Paris Berthier et M. [T] le 20 octobre 2003 mentionne expressément que les « droits de M. [Y] [T], en matière d'ancienneté, sont appréciés au 28 août 1995, date de son entrée au sein de la société gestion hôtelière de Paris Berthier» (article I).



Les sociétés qui ont précédemment employé M. [T] ne sont pas comprises dans le périmètre de l'UES TIME HÔTELS



La cour relève que chaque changement de poste a donné lieu à la remise d'un certificat de travail émanant des différents franchisés, qu'aucun ne mentionne de reprise d'ancienneté, qu'il s'agit de personnes juridiquement distinctes, que le contrat de franchise ne crée pas un groupe entre le franchiseur et les franchisés susceptible de permettre une remise de l'ancienneté acquise auprès d'autres franchisés exploitant d'autres établissements.



M. [T] ne rapporte pas la preuve que ses changements de poste résulte d'une demande du franchiseur, dès lors son ancienneté doit être fixée au 28 août 1995 conformément au contrat de travail en date du 20 octobre 2003 et le jugement déféré confirmé.



2- Sur le licenciement pour faute grave



Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, la société gestion hôtelière de Paris Berthier reproche à son salarié des actes répétés d'insubordination et une attitude agressive et discourtoise envers les clients, les intervenants extérieurs, ses collègues et sa hiérarchie.



En application de l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. La faute grave s'entend d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.



Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave.



A titre liminaire, il convient de rappeler que la datation des faits dans la lettre de licenciement n'est pas nécessaire et qu'il suffit que le grief soit matériellement vérifiable.



Le salarié a été licencié pour faute grave par lettre recommandée du 05 mai 2011 dans les termes suivants :



« Vous avez été embauché par notre société, par contrat de travail à durée indéterminée et à effet du 1er juin 2003 (avec reprise d'ancienneté au 28 août 1995), aux fins d'exercer les fonctions de co-Directeur de l'Hôtel, statut cadre dirigeant, avec notamment pour mission d'assister votre épouse, Madame [S] [T], également co-Directrice.



Or, nous avons dû faire face, au cours de ces derniers mois, à une forte dégradation de votre comportement et de votre implication professionnelle, nous ayant contraints à devoir vous notifier :

- le 5 mai 2010, un premier avertissement écrit, lequel était motivé par des propos déplacés tenus à mon égard (puisque vous avez dit que « je mentais », suite à mon refus de négocier financièrement les conditions de votre départ) ;

- le 5 janvier 2011, un nouvel avertissement lié aux mauvaises performances de l'Hôtel [1] PARIS BERTHIER résultant en grande partie de graves manquements dans le cadre de la réalisation de vos tâches (absence de mise en place de méthodes d'optimisation des revenus ; plan d'actions commerciales incomplet et imprécis ; absence d'informations transmises à la Direction Générale sur les actions entreprises en matière de visite de l'Hôtel par les Agences de voyage ; participation aux Salons faite de façon désordonnée et sans aucune concertation ; manque de transparence et absence de modification des méthodes de travail ; etc.).

Or, loin de prendre en compte nos demandes, vous avez cru bon, sur un ton polémique et non constructif de refuser d'assumer vos responsabilités - en tentant systématiquement de rejeter vos fautes sur les autres, voire en contestant même la stratégie de l'entreprise et du Groupe TIME HOTELS.

Le 9 février 2011, nous avons été contraints de vous interpeller par écrit, afin de vous demander, une nouvelle fois et faute de toute diligence de votre part, la communication des éléments demandés un mois plus tôt, à savoir un plan d'actions commerciales enfin complété et renseigné, un retour concret sur les démarches entreprises par vos soins auprès des Agences et les résultats obtenus, ainsi que des données précises et chiffrées sur les retombées économiques des Salons.

Les quelques éléments que votre épouse a bien voulu nous communiquer par la suite ont clairement mis en évidence que vous n'entendiez plus vous impliquer dans la gestion et le développement de notre Hôtel (absence de toutes propositions constructives ; refus de remettre en cause vos méthodes d'organisation passées ; etc.).

Je vous reproche également d'avoir tenu, tant à mon égard qu'à celui de notre société et du Groupe, des propos inacceptables et des menaces directes lors d'un déjeuner de travail qui a eu le 18 avril 2011 avec notre Directeur des Opérations, Monsieur [T] [G].

A cette occasion, vous avez jugé utile :

- de me traiter de « super menteuse » et de « petite comptable », de « nulle en management », de préciser que vous vous occuperez « personnellement de [mon] cas » et d'indiquer enfin : « je vais me la faire, elle se retrouvera face à moi au tribunal et par ailleurs, avec ce que je sais, elle risque de perdre sa place » (sic) ;

- de tenter de nous intimider, en invoquant pour ce faire les risques de reconnaissance d'une Unité Economique et Sociale au sein du Groupe TIME HOTELS ou encore de désignation d'un délégué syndical CGT au niveau de l'Hôtel si « quelqu'un prenait les choses en mains » (sous-entendu vous-même)... !

Vous n'avez enfin, au cours de ces dernières semaines, eu de cesse de multiplier les occasions de conflits, en tentant par exemple de monnayer votre départ en contrepartie d'un chèque d'un montant de 1.000.000 €, chantage auquel nous n'avons jamais accepté de céder. »



M. [T] conteste la prise en compte de l'avertissement du 05 janvier 2011 qui consiste à sanctionner deux fois les mêmes faits.



La société gestion hôtelière de Paris Berthier réplique qu'il s'agit d'un simple rappel destiné à montrer la persistance d'un comportement inadapté malgré la mise en garde.



M. [T] conteste la réalité et le caractère sérieux des motifs de son licenciement. Il soutient que son ancienneté remonte au 1er novembre 1986, date à laquelle il a commencé à travailler pour le groupe CAMPANILE. Il relève que le motif tiré du défaut de performances économiques n'est pas établi et qu'il résulte du changement de politique commerciale décidé par l'employeur. Il soutient s'être toujours beaucoup impliqué dans son travail. Il indique que c'est Madame [Z] [K] qui souhaitait leur départ. Il conteste avoir tenu les propos désobligeants qu'on lui prête.



En défense, la société de gestion hôtelière de Paris Berthier conclut au débouté des demandes adverses.



- Sur le premier grief d'échanges de courriels intervenus entre les parties au sujet du plan d'action commerciale dont il est déduit par l'employeur "un manque d'implication dans la gestion et le développement de l'hôtel", la société gestion hôtelière de Paris Berthier voit une résistance fautive de son salarié.



La cour retient cependant que la preuve du caractère succinct des réponses n'est pas rapportée. Il est en outre relevé des pièces produites qu'un bon accueil a été réservé aux prestataires intervenant pour la mise en place du logiciel TOP-PILOTE et que des suggestions ont été faites pour l'améliorer, et il ressort en particulier d'un compte rendu de visite du 12 avril 2011 que "l'équipe commerciale est très expérimentée et très dynamique toujours à la recherche du développement des ventes".



La preuve d'un manque d'implication dans la gestion et le développement de l'hôtel reproché au salarié n'est dès lors pas rapportée par la société gestion hôtelière de Paris Berthier.



- Sur le second grief relatif à des propos qui auraient été tenus le 18 avril 2011 par M. [T], la société gestion hôtelière de Paris Berthier verse aux débats un courriel de M. [G], qui indique :



« Pour information, j'ai déjeuné ce midi au [1] Berthier en compagnie de [S] et [Y] [T]. Pendant le repas nous avons abordé un certain nombre de sujets parmi lesquels la restauration, la commercialisation de l'hôtel en 3*, les résultats d'avril et mai, etc.

Je tiens à te faire part des propos tenus par [S] et [Y] qui sont à mon sens inadmissibles et qui viennent compléter ceux qu'ils avaient déjà tenus à ton égard lors d'une visite précédente en te qualifiant de « super menteuse » et de « petite comptable » (que [Y] a de nouveau dit aujourd'hui pour le deuxième point).

En effet, [Y] a évoqué à plusieurs reprises un harcèlement qu'il dit subir de ta part, mais également qu'il s'occupera « personnellement de ton cas et ne te lâchera pas » et ajoute « je vais me la faire, elle se retrouvera face à moi au tribunal et par ailleurs avec ce que je sais, elle risque de perdre sa place ». Plus tard, il évoque de façon très claire qu'il pourrait faire en sorte de faire entrer les syndicats dans l'hôtel, et dit «[E] trouve que ça n'est pas facile de gérer notre délégué du personnel, qu'est-ce que ça va être lorsqu'elle se retrouvera face à un délégué syndical CGT, de toute façon elle est nulle en management »

A plusieurs reprises, il a évoqué sans équivoque l'UES au sein de [1] et le coût que cela pourrait représenter si quelqu'un prenait les choses en main, tout ceci après m'avoir dit « écoute bien ce que je vais te dire». Ces derniers propos ainsi que ceux concernant les syndicats s'apparentent pour moi très clairement à du chantage et de l'intimidation.

[S] quant à elle m'a mis en garde : « J'espère qu'en arrivant chez TIME HOTELS tu as un plan B car lorsque tu ne seras plus en odeur de sainteté tu seras débarqué. Tu es en période d'essai ' C'est 6 mois ' »

Ils ont également répété des propos déjà tenus au sujet de l'acquisition de l'hôtel CAMPANILE BERTHIER : « ils ont fait n'importe quoi, puisqu'ils ont acheté à prix d'or cet hôtel, plus de 10 millions d'Euros plus cher que tous les autres acquéreurs potentiels. Ça ne sert à rien de faire HEC et autres grandes écoles pour faire des choses pareilles (sous entendu nos actionnaires) ».

Ces dérapages verbaux bien qu'étonnant ne font que confirmer l'état d'esprit dans lequel ils sont tous les deux. Ils ne pensent qu'à régler des comptes : et lorsque je l'ai écouté me tenir ce type de propos alors que je représente le siège social de l'établissement pour lequel ils travaillent-, je m'inquiète : quels messages sont-ils capables de passer à leurs équipes ''' ».



M. [T] réfute avoir tenu de tels propos pourtant confirmés par M. [G] aux termes d'une attestation circonstanciée produite aux débats dans laquelle il ajoute, qu'à l'occasion de ce même entretien, les époux [T] ont vivement critiqué les actionnaires du Groupe TIME HOTELS :



« (...) ils ont ensuite dénigré vivement nos actionnaires en certifiant que l'hôtel avait été acheté 10 millions d'euros trop cher et en me disant, en parlant de nos actionnaires, « ça ne sert à rien de faire HEC et autres grandes écoles pour faire des choses pareilles. (...)».



Il indique que cette attestation aurait été établie pour les besoins de la cause, et serait irrecevable car constituant une preuve que la société se serait constituée à elle-même.



La cour retient qu'en matière prud'homale la preuve est libre, et que rien ne s'oppose à ce que le juge examine une attestation établie par un salarié et qu'il lui appartient seulement d'en apprécier souverainement la valeur et la portée.



M. [T] ne produit aucun document susceptible de remettre en cause la véracité des propos rapportés par M. [G], et ne démontre pas à la cour ne jamais avoir tenus les propos qu'on lui prête contrairement à ses affirmations, alors que d'autres témoins étaient présents le 18 avril 2011.



Il est retenu que l'attitude négative de M. [T] à l'égard de ses subordonnés et le dénigrement de son employeur en s'adressant à une salariée comptable en la traitant de « super menteuse » et de « petite comptable », de « nulle en management », tout en lui précisant qu'il s'occuperait « personnellement de son cas » en lui indiquant « je vais me la faire, elle se retrouvera face à moi au tribunal et par ailleurs, avec ce que je sais, elle risque de perdre sa place », le tout après plusieurs avertissements préalables de son supérieur hiérarchique, dont un du 05 janvier 2011, constitue une violation grave et manifeste des obligations contractuelles de M. [T].



Le jugement déféré sera dès lors infirmé en ce qu'il a considéré que ce licenciement ne reposait pas sur une faute grave, mais seulement sur une cause réelle et sérieuse et M. [T] sera dès lors débouté de l'ensemble de ses demandes afférentes.



3- Sur la prime de gestion sur le RBE



L'article XI du contrat de travail prévoit que la prime n'est pas due lorsque la rupture du contrat de travail implique une responsabilité de gestion du salarié.



La société gestion hôtelière de Paris Berthier ne démontre pas à l'appui des pièces versées aux débats l'existence d'une faute de gestion imputable au salarié, lequel peut prétendre dans son principe à la prime prorata temporis.



Cependant, la société gestion hôtelière de Paris Berthier indique à la cour que le seuil de déclenchement de la prime n'est pas atteint dès lors qu'au titre de l'année 2011, et après revalorisation sur la base de l'indice INSEE, le seuil annuel de déclenchement de la prime de gestion sur le RBE est de 3 011 127 euros.



Or sur cette période, le résultat brut d'exploitation du [1] PARIS BERTHIER étant égal à 977 544 euros, de sorte qu'aucune prime de gestion n'est donc due au salarié.



En conséquence, le jugement déféré sera confirmé et M. [T] débouté de sa demande à ce titre.



4- Sur la prime d'intéressement



L'employeur justifie de son versement et des modalités de détermination de son montant. En conséquence, le jugement sera confirmé et M. [T] débouté de sa demande à ce titre.



5- Sur les indemnités de nourriture



Durant le préavis, M. [T] n'a pas pu prendre ses repas sur place comme le prévoit le contrat de travail au titre de l'avantage en nourriture.



Toutefois, la cour ayant retenu la faute grave, M. [T] ne peut se prévaloir de n'avoir pas pu prendre ses repas sur place durant la durée de son préavis, sa mise à pied étant justifiée.



En conséquence le jugement sera infirmé et M. [T] débouté de sa demande à ce titre.





6- Sur les dommages-intérêts pour perte d'allocation Pôle Emploi



L'erreur dans le montant des salaires déclarés n'étant pas établie, le jugement sera confirmé et M. [T] sera débouté de sa demande.



7- Sur le harcèlement moral



M. [T] fait état de faits susceptibles de laisser présumer des agissements répétés constitutifs de harcèlement moral :



- une fréquence accrue des visites des responsables qui sont établies par les attestations produites ; - une surcharge de travail (rapports...) dont atteste leurs collaborateurs ;

-une diminution de son autonomie et une dévalorisation de son travail dont témoignent ses collaborateurs.



Ces éléments laissent supposer que M. [T] a pu être victime de harcèlement moral.



L'employeur fait remarquer que les attestations produites reprennent les propos des époux [T]. Surtout, il expose qu'un changement d'enseigne accompagné d'un passage de deux à trois étoiles entraîne un surcroît de travail, que la multiplication des visites était en outre justifiée par les mauvais résultats obtenus. Il ajoute que les remarques faites s'inscrivent dans le cadre de son pouvoir de direction.



Sur ce,



Aux termes des articles L.1152-1 et suivants du code du travail : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »



L'article L.1154-1 du même Code dispose que : « Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, ii incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »



Il est rappelé que n'est pas constitutif d'un harcèlement moral le seul exercice du pouvoir de direction de l'employeur et les courriers adressés au salarié par l'employeur, visant seulement à lui demander de respecter ses obligations, les observations s'inscrivant dans le cadre d'un exercice normal du pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur, les échanges de courriers entre un salarié et son supérieur hiérarchique dont les propos restent cordiaux et les mesures prises par l'employeur dans le cadre de la mise en place d'une nouvelle organisation de l'entreprise.



Des faits de harcèlement ne peuvent être confondus avec l'exercice, fut-il autoritaire, du pouvoir général d'organisation du chef d'entreprise et l'établissement de faits de harcèlement exige que soient constatés des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail dans les termes de l'article L. 1152-1du Code du Travail.



M. [T] fixe le point de départ du harcèlement moral dont il prétend avoir été la victime depuis janvier 2011 :



Il ne verse aux débats aucune pièce médicale attestant d'une dégradation de sa santé.



S'agissant d'une volonté manifestée par le Groupe Time hôtels de se débarrasser de son salarié, celle-ci est relayée par les attestations de M. [J] qui prétend qu'il lui aurait été demandé « d'accentuer la pression sur les époux [T] et de leur créer un régime spécial pour les pousser à partir » ; or, ce dernier a lui-même été licencié pour faute grave le 29 juillet 2010, plus de 10 mois avant le licenciement de M. [T], en raison de graves dysfonctionnements constatés dans l'exercice de ses fonctions, laissant suspecter l'existence de ranc'urs vis-à-vis de son ancien employeur et un défaut d'objectivité. Cette attestation sera dès lors non retenue par la cour, comme non probante.



M. [D] ancien collaborateur de Cabinet FCA dispensant des conseils en droit social au Groupe TIME HÔTELS, indique avoir pu entendre des conversations faisant état du départ des époux [T].



Or, il est justifié par la société gestion hôtelière de Paris Berthier que M. [D] a quitté la société FCA le 13 décembre 2010 et ne peut ainsi prétendre avoir été témoin d'une quelconque man'uvre d'éviction de M. [T] dont le licenciement a été notifié près de 6 mois plus tard.



En outre, si le coût d'un éventuel licenciement de M. [T] a pu être évoqué par la Direction du Groupe TIME HÔTELS avec ses Conseils extérieurs, cet élément ne saurait en soi constituer un fait de harcèlement moral.



S'agissant des pressions exercées depuis janvier 2011 celles-ci sont contredites par la colère des salariés exprimée à l'encontre de M. [T], dont il est justifié aux débats par la société gestion hôtelière de Paris Berthier.



M. [T] qui prétend enfin avoir subi de multiples pressions, ne produit pas de pièce de nature à caractériser en quoi le comportement de la Direction du Groupe TIME HÔTELS a été la source d'un stress ou d'une souffrance au travail pour elle, ne mettant ainsi pas en mesure son employeur de pouvoir répondre à ses affirmations.



La Cour infirme le jugement déféré en ce qu'il a reconnu l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral à l'encontre de M. [T], et le déboute de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.



8- Sur la demande nouvelle de paiement d'heures supplémentaires



L'article L.3111-2 du code du travail dispose que : « Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III.

Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ».



A ces critères légaux s'ajoutent, des critères conventionnels, notamment la convention collective des Hôtels-Cafés-Restaurants, dont l'article 13-1 de l'Avenant n°l du 13 juillet 2004 dispose :

« Les cadres dirigeants sont ceux auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une large indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps.

De plus, ces cadres sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome. Enfin, ils perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunérations pratiqués dans l'entreprise ou l'établissement. Ainsi, la rémunération moyenne mensuelle sur l'année du cadre dirigeant ne peut être inférieure à 1,5 fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.

Si ces trois critères d'identification ne sont pas réunis, le cadre sera classé dans les autres catégories définies ci-dessous, »



Les heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L.3121-27 du code du travail ou de la durée considérée comme équivalente.



La durée du travail à prendre en compte s'entend des heures de travail effectif, ce qui exclut les temps de pause et de repas, les jours fériés et les congés payés, les absences non assimilées par les dispositions légales et conventionnelles à du temps de travail effectif pour le calcul de la durée du travail, les temps de déplacement entre le domicile et le lieu de travail et le lieu d'exécution du travail.



La cour rappelle que les heures supplémentaires se décomptent par semaine civile et l'employeur n'est tenu d'établir de décomptes individuels du temps de travail que pour les salariés soumis à des horaires individualisés et non, en principe, pour ceux travaillant selon l'horaire collectif.



Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail : « En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »



La preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.



Sur ce,



La cour retient qu'il n'existe pas d'incertitude sur les modalités de gestion du temps de travail de M. [T], l'article X de son contrat de travail régularisé le 20 octobre 2003 formalise expressément la volonté des parties de lui conférer le statut de cadre dirigeant :



« Eu égard à la classification de M. [Y] [T], à l'autonomie décisionnelle dont elle dispose, au niveau de rémunération dont elle bénéficie et à l'importance de ses responsabilités qui impliquent une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, les parties conviennent de faire application des dispositions de l'article L.212-15-1 [devenu depuis lors L.3111-2] du code du travail et de l'article 7 de l'accord collectif du 30 mai 2000.

M. [Y] [T] n'est donc pas soumise aux dispositions légales relatives à la durée du travail. »



Ainsi, la circonstance que ses bulletins de paie fassent état, à partir du 1er janvier 2009, d'un « forfait annuel 218 jours » ne résulte que d'une erreur matérielle liée à un changement de logiciel informatique et seules les dispositions claires et non équivoques du contrat de travail seront retenues.



Il est relevé que l'accession de M. [T] au statut de « cadre dirigeant » en 2003 a été décidée en raison des responsabilités accrues qui lui ont été confiées du fait de la résiliation, à compter du 1er juin 2003, du mandat de gestion confié au Groupe ENVERGURE (cf. article VI du contrat de travail), ce que reconnaît le salarié qui indique « s'être retrouvé à gérer, en plus de ses missions habituelles, celles tenant notamment à la gestion des ressources humaines, au service commercial, et ce, sans aucune assistance complémentaire ».



En sa qualité de Directeur, M. [T] répondait aux critères requis pour bénéficier du statut de cadre dirigeant, puisqu'il disposait de la plus importante classification conventionnelle de l'entreprise, à savoir, niveau V, échelon 2, qui se trouve également être l'un des niveaux les plus élevés prévu par la convention collective des Hôtels-Cafés-Restaurants et percevait la rémunération la plus élevée de l'entreprise.



Les Déclarations Annuelles des Données Sociales confirment le niveau particulièrement élevé de la rémunération de M. [T].



Il disposait d'une large indépendance dans son emploi du temps, notamment s'agissant de la fixation de ses horaires, de ses rendez-vous, de ses congés lesquels n'ont jamais été soumis à la moindre procédure d'autorisation préalable de sa hiérarchie.



Il était habilité à gérer les comptes bancaires de la société gestion hôtelière de Paris Berthier et disposait, pour ce faire, des moyens de paiement pour les faire fonctionner (article VIII du contrat de travail).



M. [T] disposait du pouvoir d'engager des dépenses à hauteur de 60 000 euros (article VIII de son contrat de travail), ce qui lui offrait une très large autonomie et une grande indépendance dans la gestion de son établissement et, notamment, une totale liberté dans le choix des fournisseurs et prestataires de l'hôtel .



Il est justifié aux débats qu'il assurait en outre la gestion des Ressources Humaines de la société gestion hôtelière de Paris Berthier, et demeurait libre de procéder à des embauches et/ou des licenciements sans aucune immixtion du Groupe TIME HÔTELS et a toujours été l'interlocuteur du personnel.



Il organisait et contrôlait le temps de travail des collaborateurs de la société gestion hôtelière de Paris Berthier et assurait la tenue de la comptabilité de rétablissement et le suivi de l'exploitation (article IX du contrat de travail).



Il établissait chaque année le plan d'actions commerciales de son établissement.



Il est enfin relevé que M. [T] a été pleinement associé à la Direction de l'entreprise, aux décisions stratégiques prises à l'occasion du changement d'enseigne démontré par un courriel de sa part du 17 mars 2011 produit aux débats et par l'ensemble des E-mails produits aux débats qui démontrent que la Direction du Groupe lui a laissé toute latitude de prendre des décisions.



Il résulte de ces constats que le forfait sans référence horaire de M. [T] demeurait ainsi valable du fait de son statut de cadre dirigeant et, par conséquent ce dernier doit être débouté de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents.



9- Sur l'indemnité pour travail dissimulé



L'article L.8221-5 du code du travail dispose que : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : [...]

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou ie document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre F de la troisième partie ; [...]. »



La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L.8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.



Le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.



Lorsque l'infraction est caractérisée, l'article L.8223-1 du code du travail prévoit que : « En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égaie à six mois de salaire. »



Sur ce ,



M. [T] soutient que la société gestion hôtelière de Paris Berthier se serait rendue coupable du délit de travail dissimulé, faute pour elle d'avoir «conclu de convention individuelle de forfait» et compte tenu du caractère « fictif » du statut de cadre dirigeant.



Or, il a été retenu que M. [T] demeurait bien cadre dirigeant.



Par conséquent, la cour déboute M. [T] de sa demande d'indemnité forfaitaire pour dissimulation d'emploi salarié.





10- Sur les demandes accessoires



M. [T] succombant en appel, supportera les dépens, et sera débouté de ses demandes en paiement de ses frais irrépétibles, présentées tant en première instance qu'en appel et condamné à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1 000 euros à la société gestion hôtelière de Paris Berthier.









PAR CES MOTIFS,



La Cour,



Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,



CONFIRME le jugement déféré, en ce qu'il a fixé au 28 août 1995 l'ancienneté de M. [Y] [T] et l'a débouté de ses demandes indemnitaires consécutives, a rejeté sa demande d'indemnité pour perte d'allocation Pôle Emploi, de prime de gestion sur le RBE et de prime d'intéressement,



L'INFIRME pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant :



DIT que le licenciement pour faute grave de M. [Y] [T] est bien fondé,



DÉBOUTE M. [Y] [T] de l'ensemble de ses demandes,



CONDAMNE M. [Y] [T] à payer à la société gestion hôtelière de Paris Berthier la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,



CONDAMNE M. [Y] [T] aux dépens de première instance et d'appel.



- Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- Signé par Madame Maryse LESAULT, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,

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