27 septembre 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/00278

Pôle 5 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 5 - Chambre 2







ARRET DU 27 SEPTEMBRE 2019



(n°128, 12 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : n° RG 17/00278 - n° Portalis 35L7-V-B7B-B2KQM



Décision déférée à la Cour : jugement du 28 octobre 2016 - Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 3ème section - RG n°15/04886







APPELANT





M. [O] [C]

Né le [Date naissance 7] 1953 à [Localité 19] ([Localité 19])

De nationalité française

Exerçant la profession de développeur en informatique & intelligence artificielle appliquée aux marchés financiers

Demeurant [Adresse 3]



Représenté par Me Nicolas TOURNIER-BOSQUET, avocat au barreau de PARIS, toque E 155







INTIMES





M. [H] [U]

Né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 22] (Vosges)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]



M. [K] [E]

Né le [Date naissance 9] 1953 à [Localité 18] (54)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 5]



S.A.R.L. PRO-AT.COM, prise en la personne de son liquidateur, M. [G] [V], domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 13]

[Localité 15]

Immatriculée au rcs de Versailles sous le numéro 480 546 704









M. [G] [V]

Né le [Date naissance 10] 1959 à [Localité 16]

De nationalité française

Domicilié [Adresse 13]



Représentés par Me Nathalie SÉNÉSI-ROUSSEAU, avocat au barreau de PARIS, toque E 1175

Assistés de Me Viviane GELLES plaidant pour la SELARL JURISEXPERT et substituant Me Blandine POIDEVIN, avocat au barreau de LILLE





M. [R] [P]

Né le [Date naissance 4] 1971 à [Localité 20]

De nationalité française

Exerçant la profession de directeur d'entreprise

Demeurant [Adresse 8] - GRANDE-BRETAGNE



Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque L 0050

Assisté de Me Marc LADREIT DE LACHARRIERE, avocat au barreau de PARIS, toque D 785





M. [A] [W] dit [A] [X]

Né le [Date naissance 11] 1960 à [Localité 14] ([Localité 14])

Demeurant [Adresse 6]



Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque D 945

Assisté de Me Igall MARCIANO, avocat au barreau de PARIS, toque B 1170





S.A.R.L. MTT [A] [X], prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité au siège social situé

C/O M. [A] [W] dit [A] [X]

[Adresse 17]

[Adresse 6]

SUISSE



Régulièrement assignée et n'ayant pas constitué avocat









COMPOSITION DE LA COUR :





L'affaire a été débattue le 15 mai 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :



Mme Anne-Marie GABER, Présidente de chambre

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Françoise BARUTEL, Conseillère



qui en ont délibéré



Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT







ARRET :



Par défaut

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Anne-Marie GABER, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.







Vu le jugement contradictoire du 28 octobre 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,



Vu l'appel interjeté le 29 décembre 2016 par M. [O] [C],



Vu les dernières conclusions numérotées 8 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 9 avril 2019 de M. [C], appelant,



Vu les dernières conclusions numérotées 4 remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 8 avril 2019 de M. [A] [W] dit [X], intimé,



Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 7 novembre 2018 de M. [H] [U], intimé,



Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 26 septembre 2018 de M. [G] [V], intimé,



Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 26 septembre 2018 de M. [K] [E], intimé,



Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 2 octobre 2018 de M. [R] [P], intimé,



Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 24 mai 2017 de la société Pro-at.com, intimée,



Vu l'ordonnance de clôture du 11 avril 2019,



M. [C] expose qu'il était professeur de sciences physiques et qu'il s'est intéressé dès 1986 à une approche strictement technique des marchés financiers, d'origine américaine, très peu connue en France. Il dit avoir consacré 9 années de disponibilité pour faire de la recherche en utilisant l'outil informatique et des publications spécialisées américaines, puis avec l'avènement d'Internet dès 1992 avoir pu communiquer avec d'autres chercheurs via des Newsgroups spécialisés. Il indique avoir financé ses recherches en devenant le distributeur du principal logiciel d'analyse technique qu'il fut le premier à utiliser en Europe, le logiciel dénommé TradeStation.



Il décrit TradeStation comme un logiciel qui permet de collecter des données boursières en temps réel, de les stocker dans des bases de données et de les afficher sous forme de graphiques ainsi que les résultats des calculs mathématiques qui en dérivent. Il comporte pour cela un langage de programmation (" EasyLanguage "), qui permet de programmer et de tester sur ses historiques des stratégies de trading.

M. [C] précise qu'il a, en collaboration avec Mme [I] [M], développé en 1997, un logiciel d'analyse technique automatisé, à base d'intelligence artificielle, dénommé " Safir-X " d'une utilisation la plus transparente possible pour l'utilisateur final, qui remplace donc le travail de recherche et programmation de systèmes de trading et automatise le travail de mise en place de l'apprentissage et de test : l'utilisateur rentre les données, et le logiciel Safir-X automatise toute la recherche. L'utilisateur n'a plus qu'à attendre le résultat, prêt à l'emploi dans TradeStation si les résultats lui conviennent.



Ce logiciel existerait dès la fin de l'année 2002 en deux versions :

. Safir-Xs (et anciennement Safir-X version 3) vendu au prix de 5 750 euros HT,

. Safir-Xp (version professionnelle) vendu au prix de 29 500 euros HT.



La distribution du logiciel Safir-X est assurée depuis 1997, en France, par M. [C], immatriculé en nom personnel et sous l'enseigne Sirtrade International auprès du tribunal de commerce de Bobigny.



La distribution de TradeStation aurait été accordée de façon exclusive en France à M. [C] dès 1993 et ce pendant dix années par la société créatrice du logiciel, la société Omega Research USA.



M. [C] a créé, en 1997, un site internet www.sirtrade.com pour présenter les produits dont il permettait la vente. Les achats étaient faits par le client auprès d'Omega Research située aux USA, la créatrice du logiciel TradeStation qui lui avait accordé le droit de distribution exclusive pour la France pendant 10 ans en 1993.



Par la suite, la société Omega Research a fusionné avec un 'broker online' américain, pour former TradeStation Technologies.



A compter de cette fusion, il ne fut plus conclu de contrat d'exclusivité pour quiconque. La distribution était organisée par continent.



M. [C] avait, à compter de 2003, le droit, non exclusif, de vendre le logiciel TradeStation en Europe, Moyen Orient et Afrique.



M. [U] a été président, depuis sa création le 27 avril 2002, de l'association APATE, devenue par la suite APATEC, et ce jusqu'à sa dissolution. A ce titre, il était directeur de la publication du forum édité par l'association et accessible à l'adresse www.pro-at.com.



La SARL Pro-at.com a été créée le 25 janvier 2005 par MM. [U], [V] et [E] afin de reprendre la gestion du forum Pro-at à la suite de l'association Apatec, qui sera dissoute le 15 décembre 2005.



M. [P] est présenté par M. [C] comme un distributeur concurrent du logiciel TradeStation établi en Angleterre et intervenant en France, ce que conteste celui-ci.



M. [W], exerçant sous le pseudonyme [A] [X], indique partager son temps entre la gestion de son patrimoine et l'animation de conférences et de séminaires au cours desquels il partage son expérience et dévoile les techniques et les stratégies qui mènent au succès. Il est également auteur de plusieurs ouvrages sur la bourse, dont l'ouvrage « Tout le monde mérite d'être riche ». En outre, il dispose d'un site internet www.[021].com, sur lequel il diffuse de nombreuses vidéos qui fournissent des conseils en négociations et investissements immobiliers et dispense des séminaires au cours desquels il fait part de méthodes et stratégies pour investir intelligemment dans l'immobilier.











Le 28 juillet 2004, M. [C] estimant être victime d'une campagne de diffamation sur internet et notamment sur le site Pro-at.com, a déposé une plainte pénale avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris.



L'instruction s'est achevée par une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel en date du 6 décembre 2006 de deux internautes, Mme [L] [T] et M. [S] [Y] pour propos diffamatoires postés sur le forum de discussion Pro-at.com sous les pseudonymes Tixu, Zappy et JKLM et par un non lieu faute d'identification des auteurs pour ceux postés sous les pseudonymes HerveH, Cancrelas et Asynergy.



Le tribunal correctionnel de Paris, par jugement du 7 avril 2018, a relaxé Mme [T] et condamné M. [Y] à 500 euros d'amende avec sursis et à 1 euro de dommages et intérêts, en retenant à son encontre deux messages diffamatoires en date 1er juin 2004.



La cour d'appel saisie par M. [C] a porté l'indemnisation du préjudice à la somme de 500 euros.



M. [C] soutenant que la procédure pénale n'a pas permis d'appréhender les auteurs de ce qu'il décrit comme une collusion fautive orchestrée sur internet et visant à lui nuire, a fait assigner, par actes d'huissier de justice des 13, 14, 18 juin 2013, MM. [U], [V] et [E], [P] et [X] ainsi que les sociétés MTT [A] [X] et Pro-at.com devant le tribunal de grande instance de Paris afin de solliciter la réparation des préjudices économique et professionnel qu'il estime avoir subis sur le fondement de l'article 1382 du code civil.



Le jugement entrepris, rendu le 23 octobre 2016, a :

- Rejeté l'exception de nullité de l'assignation ;

- Dit n'y avoir lieu d'écarter les pièces n°50 à 63 produites en demande ;

- Ecarté des débats les pièces n°64 à 79 versées par le demandeur ;

- Déclaré recevables les demandes présentées par M. [C] à l'encontre de MM.[X] et [P] ;

- Constaté qu'aucune demande n'est dirigée contre la «société MTT [A] [X]» ;

- Rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action ;

- Rejeté les demandes de M. [C] ;

- Rejeté les demandes reconventionnelles pour procédure abusive ;

- Condamné M. [C] aux dépens ;

- Condamné M. [C] à payer, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à MM. [U], [V], [E] et à la société Pro-at.com, une somme de 1 500 euros chacun, à MM. [P] et [X], une somme de 4 000 euros chacun ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.





Sur les demandes formées à l'encontre des sociétés MTT française ou suisse



L'appel interjeté le 29 décembre 2016 par M. [C] l'a été à l'encontre de toutes les parties défenderesses en première instance.



Cependant à compter de ses conclusions notifiées par RPVA le 30 juillet 2018, M. [C] n'a plus dirigé ses écritures à l'encontre de la société MTT [A] [X], supposée être une société française domiciliée [Adresse 12] mais à l'encontre d'une société suisse «[A] [W] [D]» domiciliée [Adresse 17] (Suisse).









S'agissant de la société française, c'est à juste titre que le jugement a retenu qu'aucune demande n'était formulée par M. [C] dans le dispositif de ses dernières conclusions devant le tribunal à l'encontre de la société française MTT [A] [X], dont l'existence, malgré la délivrance de l'assignation par acte d'huissier de justice du 13 juin 2013 à une personne présente de la société de domiciliation Agence Favart, [Adresse 12] , ne résulte d'aucune pièce. La cour y ajoute qu'il n'est pas plus justifié de l'existence de cette société, ni formulé de demande à son encontre en cause d'appel.



Dès lors le jugement sera confirmé de ce chef.



M. [C] a fait notifier le 25 février 2019 à la société suisse «[A] [W] [D]» ses conclusions numérotées 6 en sollicitant sa condamnation in solidum avec les autres intimés.



Cette société n'a pas constitué avocat devant la cour, dès lors il revient à la cour, par application de l'article 472 du code de procédure civile de vérifier la recevabilité de la demande formée à l'encontre de cette société.



Or, il apparaît qu'aucune demande n'avait été formulée en première instance à l'encontre de cette société, ni en tant que société suisse, ni même en tant que société supposément française et domiciliée à [Localité 14], ni même dans les trois mois de la déclaration d'appel, les premières conclusions d'appel de M. [C] ne sollicitant aucune condamnation à l'encontre d'une société MTT.



Les demandes formées à l'encontre de cette société seront déclarées irrecevables.





Sur les demandes des parties



M. [C] sollicite au dispositif de ses dernières conclusions devant la cour de :

- lui donner acte de ce que son appel ne porte que sur les demandes pour lesquelles il a été débouté ainsi que les condamnations à verser des sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de dommages-intérêts et condamné à verser des sommes au titre de l'article 700 aux défendeurs ;

Et, statuant à nouveau,

Dire et juger :

- que les agissements de MM. [U], [V], [E], [P] et [X] sont constitutifs d'un agissement sous concert frauduleux aggravé par l'utilisation de pseudonymes sur des sites internet dont ils avaient la maîtrise au moment des faits et par leur refus de déférer ou de répondre,

- que M. [W] exerce depuis les faits une activité dissimulée en France sur Internet sous différentes identités, à partir de société intraçables contenant toutes l'acronyme MTT, la dernière étant [W] [A] [D], régulièrement assignée en Suisse,

- que les agissements de MM. [U], [V], [E], [P] et [X] sont constitutifs d'un nouvel agissement sous concert frauduleux en forgeant devant la cour une demande reconventionnelle basée sur des faits soit détournés, soit dont ils connaissaient la fausseté, soit écrits par eux sous un pseudonyme dont ils persistent à maintenir le secret malgré les récentes demandes,

- en conséquence du concert frauduleux que les agissements de MM. [U], [V] et [E], [P] et [W] dit [X] sont constitutifs d'une concurrence déloyale par désorganisation sur Internet de son activité,

- en conséquence que les agissements de MM. [U], [V], [E], [P] et [W] dit [X] sont constitutifs de dénigrement,

- en conséquence que les agissements déloyaux de MM.[U], [V], [E] sur Pro-At sont de plus constitutifs d'actes de négligence ou d'imprudence,





- que les agissements de MM. [U], [V] et [E], sont constitutifs de faits d'extorsion commis publiquement en mai 2004 au moyen du site internet qu'ils contrôlaient, délit prescrit dont il est demandé réparation civile en toutes ses conséquences,

- que les agissements de MM. [U], [V], [E], [P] et [W] dit [X] sont constitutifs d'une concurrence déloyale,

- que les agissements concertés de MM. [P] et [W] dit [X] sont constitutifs de parasitisme,

- que les man'uvres frauduleuses commises par MM. [U], [V] et [E], [P] et [W] dit [X] constituent une faute civile au sens des articles 1240 et 1241 du code civil,

Constater :

- qu'il a subi un préjudice économique et professionnel conséquents du fait de ces agissements,

Condamner

- solidairement MM. [U], [V], [E], [P] et [W] dit [X] et la société unipersonnelle [W] [A] [D] à lui verser la somme de 1 042 050 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil,

- solidairement MM. [U], [V] et [E], [P] et [W] dit [X] et la société unipersonnelle [A] [W] [D] à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'il a subi,

- solidairement MM. [U], [V], [E], [P] et [W] dit [X] à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la société Pro-at.com à lui rembourser la totalité de location du Publi-Forum qui lui a été imposée,

Ordonner la publication judiciaire d'extraits de l'arrêt,

Débouter les intimés de leurs demandes reconventionnelles et de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner solidairement MM. [U], [V], [E], [P] et [W] dit [X] et la société Pro-at.com aux dépens.



M. [P] demande à la cour de :

A titre principal,

- juger M. [C] irrecevable à agir à son encontre,

- juger les demandes formées à son encontre prescrites,

A titre subsidiaire,

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes,

- juger qu'il ne justifie d'aucun préjudice.

En tout état de cause,

- confirmer le jugement rendu le 28 octobre 2016 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a débouté M. [C] de ses demandes et l'a condamné au paiement de la somme de 4 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

- condamner M. [C] à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure et appel abusifs sur le fondement des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile, et 15 000 euros supplémentaires par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



M [W] demande la confirmation du jugement et la condamnation de M. [C] à lui verser une somme de 25 000 euros pour procédure abusive et 35 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



MM [U], [V] et [E] et la société Pro-at.com demandent la confirmation du jugement sauf à ce que M. [C] soit condamné à leur verser à chacun une somme de 25 000 euros sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile et 10 000 euros sur celui de l'article 700 du code de procédure civile.







Sur la recevabilité de l'action à l'encontre de M. [P]



M. [P] soutient que M. [C] n'a pas d'intérêt à agir à son encontre dans la mesure où il lui serait reproché des actes de concurrence déloyale dans le cadre de la commercialisation du logiciel TradeStation entre 2003 et 2004 alors que M. [C] reconnaît par ailleurs que la commercialisation concurrente de ce logiciel serait le fait d'une société MTT immatriculée en Australie sous le nom de «MAROUBRA TECH TRADING » abréviation de MTT, la même société australienne qui aurait selon lui enregistré les sites aaztrading.com et aazsysteme.



Pour autant ces arguments relèvent du bien fondé et non de la recevabilité de l'action formée à l'encontre de M. [P] et seront dès lors appréciés au fond dans le cadre de l'examen des reproches formés par M. [C] sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil à l'encontre de chacun des intimés.



M.[P] invoque également l'irrecevabilité de l'action du fait de la prescription des faits de diffamations qui lui sont reprochés.



Pour autant et comme l'a relevé le jugement, non contredit par l'appel de M. [C] de ce chef, l'action est fondée sur la responsabilité délictuelle. La prescription applicable est la prescription de droit commun de 5 ans en application de la loi du 17 juin 2008 et non la prescription de trois mois prévue pour les faits de diffamation par la loi du 29 juillet 1881.



Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a rejeté les exceptions d'irrecevabilité.





Sur le bien-fondé de l'action de M. [C] en concurrence déloyale ou parasitaire



L'action formée devant le tribunal de grande instance par M. [C] est une action en responsabilité civile, fondée sur la responsabilité délictuelle des article 1240 et 1241 du code civil.



Il invoque avoir subi un préjudice consistant en une baisse de son activité de commercialisation de ses logiciels SAPHIR X, à compter de 2003-2004, et soutient que cette baisse est en lien de connexité avec les propos tenus à son encontre, en particulier sur le forum de discussion 'pro-at', dans le cadre d'une 'campagne concertée de dénigrement'.



Il expose que son activité commerciale s'effectuait grâce à sa présence sur les sites de discussion auxquels il participait, tout en restant en retrait de son activité commerciale dans le cadre des discussions : la publicité était ainsi indirecte, passive, uniquement basée sur l'appréciation du sérieux de ses interventions sur les sujets tenant à la programmation des systèmes de trading, lesquelles pouvaient aboutir à une vente de logiciel si les internautes le contactaient sur son site professionnel en raison de la compétence qu'ils pouvaient percevoir ou non au cours de ces échanges publics et surtout des recommandations spontanées des utilisateurs de ses logiciels dans le cadre de ces discussions.



Il précise que le processus a fonctionné sur internet sans aucun incident majeur de 1993 à mi 2003, date approximative du début des faits qui motivent son assignation. Il énonce que courant mai-juin 2003, il a subi des attaques groupées par des internautes utilisant des pseudonymes, lui faisant perdre sa visibilité, car les discussions devenaient impossibles et les tenanciers des forums n'appréciaient pas ce trouble, sans pour autant réagir contre les fauteurs de trouble.







De ce fait il indique s'être retrouvé privé de son audience et avoir vu ses revenus décroître de façon inexorable, situation dont il ne s'est jamais remis, son modèle économique étant détruit à jamais à la suite d'une exposition pendant un an à ces exactions contre lesquelles il ne pouvait guère se défendre sinon en aggravant son cas.



Il précise que cette campagne correspond à l'apparition d'un nouveau distributeur de TradeStation.



Ces messages seraient d'abord apparus sur les forums internet Boursorama, abcbourse et top finance puis sur le forum Pro-at à compter de la fin de l'année 2003.



M. [C] précise qu'en réponse à ces attaques, il a menacé à plusieurs reprises de déposer plainte au pénal.



Il indique que le 10 mai 2004 à 00h40, il s'est vu priver de son accès sur le site Pro-at, alors que le même jour une manifestation payante pour promouvoir le logiciel TradeStation avec MM. [X] et [P] était annoncée.



Il ajoute avoir alors été contraint de signer un contrat de « Publi Forum » onéreux avec l'association Apatec. Ce contrat produit aux débats a été conclu entre l'association Apatec représentée par M. [Z] et M. [C] à effet au 30 juin 2004.



C'est dans ces circonstances que la plainte avec constitution de partie civile a été déposée le 28 juillet 2004.



Si l'information conduite par un juge d'instruction a permis de mettre en exergue quelques messages postés sous divers pseudonymes sur des forums internet et de renvoyer devant le tribunal correctionnel M. [S] [Y] et Mme [L] [T], elle n'a pas permis de mettre en cause d'autres personnes et notamment pas de trouver qui se cachait sous le pseudonyme HerveH et ce alors même que M. [U] avait été entendu et M. [X] recherché.



M. [C] annonce dans ses écritures vouloir démontrer que les intimés ont agi secrètement de concert pour l'éliminer du paysage Internet dans lequel il évoluait depuis l'origine, chacun ayant un intérêt à ce but, qu'ils ont effectivement atteint, ruinant sa carrière.



Il accuse les intimés d'avoir agi à son encontre, dans l'anonymat et depuis l'étranger, sur des forums qu'ils contrôlaient et modéraient et d'avoir refusé d'aider la justice pénale.



Il reconnaît n'avoir pas de preuve véritable mais soutient avoir recueilli un faisceau d'indices au cours des années, y compris pendant la procédure d'appel, suffisant à démontrer la collusion cachée.



Pour autant, la faute civile prévue par les articles 1240 et 1241 du code civil suppose l'établissement d'une faute individuelle commise par chacun des intimés en lien direct avec le préjudice subi et justifié de M. [C].




Le fait de pouvoir prononcer une condamnation in solidum entre les personnes ayant commis une faute concourant au même préjudice n'exonère pas la recherche et la preuve de chacune des fautes individuelles.



M. [C] affirme que les preuves de l'action concertée sont rapportées car en moins d'une semaine il a été stigmatisé à tort sur le forum, dénigré par HerveH et quelques autres complaisamment autorisés par le site Pro-at et s'est vu brutalement interdit de parole par fermeture de son compte le 2 mai 2004.



S'agissant de M. [W], exerçant sous le pseudonyme [X]



M. [C] reproche à M. [X] d'être l'auteur de plusieurs messages diffamatoires notamment sous le pseudonyme HerveH, d'avoir détourné à son profit sa clientèle pour vendre le logiciel TradeStation, de ne pas s'être rendu à la convocation des policiers dans le cadre de l'information pour diffamation, et de n'avoir pas donné sa véritable identité jusqu'à la procédure d'appel.



Pour autant la cour, après avoir examiné l'ensemble de pièces communiquées aux débats, constate que la preuve n'est toujours pas rapportée que M. [X] ait posté des messages diffamatoires à l'encontre de l'appelant sous des pseudonymes et notamment sous celui de HerveH et qu'il n'est pas non plus démontré que M. [X] ait eu une activité de vente du logiciel Trade Station. M. [C] indique d'ailleurs qu'il s'agirait d'une société MTT australienne, non attraite dans la cause alors même que son existence était connue lors de l'assignation.



Les reproches relatifs à l'identité de [W] ou [X] ne sont pas non plus justifiés en ce qu'il n'ont pas empêché le bon déroulement de l'action et sont sans incidence avec les faits de 2003/2004 et le préjudice allégué par M. [C].



Il en est de même du fait que M. [X] ne s'est pas rendu à la convocation des policiers dès lors que le juge d'instruction n'a pas jugé utile de le convoquer directement ou de délivrer mandat.



S'agissant de M. [P]



M. [C] présente M. [P] comme étant un concurrent direct souhaitant l'éliminer et prendre sa place et sa clientèle sur le logiciel TradeStation.



Cependant aucune des pièces versées au débat ne justifie de ce que M. [P] aurait commercialisé ce logiciel, ni du lien qui existerait entre ce dernier et la société MTT immatriculée en Australie sous le nom de « Marouba Tech Trading », qui serait en charge de la commercialisation dudit logiciel et posséderait les sites aaztrading.com et aazsysteme.



Il est en outre reproché à M. [P] de pratiquer un parasitisme à titre individuel en répondant sur Pro-AT aux questions clairement posées à M. [C] concernant le logiciel TradeStation et d'avoir ouvert sur le site aazsysteme.com une file de discussion sur le logiciel SAFIR-X en posant d'entrée la question de savoir si c'était une arnaque ou pas.



M. [C] prétend également qu'il serait à l'origine d'un fil de discussion hostile au logiciel SAFIR-X et à sa personne.



Pour autant, le seul fait de lancer un débat sur un site internet ne saurait suffire à caractériser un abus sauf à mettre en avant des propos diffamatoires ce qui n'est pas le cas et au surplus seraient prescrits.



De plus, M. [C] n'indique pas en quoi M. [P], qui ne commercialise pas le logiciel, aurait indûment bénéficié des investissements, du travail intellectuel ou des investissements de M. [C].



Il ne justifie pas non plus qu'il existerait un lien entre M. [P] et ces forums de discussion ni avec leurs modérateurs et notamment avec MM. [U], [V] et [E].







S'agissant de M. [U]



M. [C] soutient qu'en tant que gérant du forum communautaire Pro-At, à l'époque des faits, M. [U] avait la mainmise sur l'information qui circulait sur ce forum et avait également la possibilité de connaître l'identité de tous ses participants. Il lui reproche de l'avoir exclu du forum pour de faux motifs afin de l'éloigner de la sphère d'influence de Pro-at et de l'empêcher de diffuser le logiciel TradeStation.



Il aurait permis, voire co-organisé, la campagne de dénigrement qui aurait été lancée le 25 février 2004 par M. [E] sous le pseudonyme « alambic ».



M. [C] lui reproche encore d'avoir conditionné son retour sur le site Pro-At au paiement d'une location d'un forum spécial, ce qui serait constitutif d'une extorsion de fonds matérialisée par la signature du contrat imposé.



Pour autant il n'est nullement démontré que M. [U] ait sous son nom, ou sous des pseudonymes posté des messages susceptibles de constituer un acte de dénigrement ou de diffamation. Il a d'ailleurs été entendu dans le cadre de l'enquête pénale sans être mis en examen.



M. [U], concernant l'exclusion du forum de M. [C], justifie de ce que le forum Pro-At disposait d'une charte, qu'il communique, que chaque internaute devait respecter. Si des reproches devaient être formulés, ils relèvent non de la concurrence déloyale telle qu'opposée par l'appelant mais de la responsabilité contractuelle qui n'a pas été invoquée à la procédure.



M. [U] précise par ailleurs les motifs de l'exclusion de M. [C] qui utilisait les divers forums de discussion pour faire la promotion des logiciels dont il proposait la licence, comportements non conformes à l'esprit du forum et à la charte.



S'agissant du contrat de «Publi Forum» onéreux signé entre l'association Apatec représentée par M. [Z] et M. [C] à effet au 30 juin 2004, aucun élément ne justifie d'un vice de consentement.



S'agissant de MM. [E] et [V]



M. [C] reproche à MM. [E] et [V] qui étaient à l'époque des faits modérateurs, de n'avoir pas pris de mesure tangible pour faire cesser le trouble dont il allait tirer parti, en tant que modérateurs et futurs actionnaires de la future société Pro-At.com.



Toutefois, il ne justifie pas en quoi leurs actions auraient dû consister, ni en quoi ils auraient été fautifs dans leurs rôle de modérateurs.



En outre, il reproche à M. [E] d'être également l'auteur sous pseudonyme de messages diffamatoires, ce qu'il ne prouve pas, étant rappelé au surplus que la diffamation en tant que telle est prescrite.



Ainsi, M. [C] échoue à justifier d'agissement fautifs commis par MM. [U], [V], [E], [P] ou [X] qui seraient à l'origine d'une concurrence déloyale ou parasitaire à son encontre.



Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il l'a débouté de ces chefs.













Sur le bien-fondé de l'action de M. [C] à l'encontre de la société Pro-at.com



M. [C] sollicite la condamnation de la société Pro-at.com à lui rembourser la totalité de la location du Publi-Forum qu'il a signée avec l'association Apatec représentée par M. [Z] à effet au 30 juin 2004.



Pour autant non seulement la société Pro-at.com est une personne morale différente de l'association Apatec signataire du contrat mais M. [C] ne justifie pas que son consentement ait été vicié. Il a certes conclu ce contrat à la suite de la fermeture de son compte sur Pro-At le 2 mai 2004 dont il conteste le bien-fondé mais ni les circonstances décrites dans ses conclusions, ni les pièces communiquées ne caractérisent un vice du consentement.



Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande à l'encontre de la société Pro-At.





Sur les demandes incidentes formées par les intimés au titre de l'abus de procédure



L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur équipollente au dol.



Les intimés seront déboutés de leur demandes à ce titre faute pour eux de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de M. [C] qui a pu se méprendre sur l'étendue de ses droits, et d'établir l'existence d'un préjudice autre que celui subi du fait des frais exposés pour leur défense.



Les demandes incidentes seront dès lors rejetées.





PAR CES MOTIFS





Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,



Y ajoutant,



Déclare irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société de droit suisse MTT [A] [X],



Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation,



Condamne M. [C] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et, vu l'article 700 dudit code, le condamne à payer à ce titre à la société Pro-at.com, M. [H] [U], M. [G] [V] et M. [K] [E] une somme supplémentaire de 2 000 euros à chacun et à MM. [P] et [X] une somme supplémentaire de 4 000 euros chacun, soit une somme totale de 16 000 euros pour les frais irrépétibles d'appel.



La Greffière La Présidente

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.