23 octobre 2019
Cour d'appel de Paris
RG n° 17/13691

Pôle 5 - Chambre 6

Texte de la décision

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2019



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/13691 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3WM2



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/01595





APPELANTE



SA BNP PARIBAS

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 662 042 449

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Brigitte GUIZARD, substitué par Me Michel GUIZARD avocats au barreau de PARIS, toque : L0020







INTIMÉ



M. [W] [R]

Demeurant [Adresse 8],

[Localité 1]

TUNISIE



Représenté par Me Jean-Philippe PETIT, avocat au barreau D'ESSONNE





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre, et Monsieur Marc BAILLY, Conseiller, chargé du rapport,



Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:



Mme Françoise CHANDELON, Présidente de chambre,

M. Marc BAILLY, Conseiller,

Madame Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.







Greffier, lors des débats : Jessica GOURDY



ARRÊT :



- contradictoire



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Françoise CHANDELON, Présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière présente lors de la mise à disposition.








*****





FAITS ET PROCÉDURE





Par offre de prêt acceptée le 10 juin 1989, la société Banque nationale de Paris consentait à M. [K] [W] [R], médecin libéral, et Mme [H] [L] épouse [R], institutrice n'exerçant plus, un prêt conventionné d'un montant de 920.000 francs (140.253,10 €) et d'une durée de 240 mois afin de financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'un pavillon constituant le lot n°7 du [Adresse 5].



L'offre de prêt mentionnait deux assurances de groupes souscrites par l'établissement prêteur, l'une auprès de la compagne Gan Vie, l'autre auprès de la compagnie AGF.



Le prêt était réitéré par acte authentique du 3 août 1989.



Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 6 novembre 1998, l 'établissement prêteur mettait en demeure les époux [R] de régler les échéances impayées des mois de septembre, octobre et novembre 1998 et se prévalait de la clause d'exigibilité anticipée du prêt.



Par courrier du 6 octobre 1998, la société BNP indiquait à M. [R] qu'il avait choisi d'adhérer au contrat groupe n°1957 souscrit par la banque auprès des AGF ne couvrant que les risques décès et invalidité absolue et définitive et qu'il ne pouvait prétendre à une prise en charge par la compagnie d'assurance en raison de son arrêt de travail.



Par courrier en date du 12 juin 2001, les époux [R] soutenaient avoir adhéré, au contrat d'assurance de groupe Gan Vie, comme mentionné dans l'acte authentique de prêt, couvrant le risque incapacité totale de travail à partir du 91ème jour et sollicitaient la mise en oeuvre de la garantie compte tenu de l'arrêt de travail de M. [R] du 3 juillet 1998.



Par courrier du 14 mars 2002, la société BNP paribas leur transmettait le refus de prise en charge de la compagnie d'assurance AGF au motif que le contrat 957/1957 ne garantissait pas l'incapacité de travail.



M. [R] réitérait sa demande de prise en charge le 30 juin 2004 et le 26 juillet 2004.



Son arrêt de travail prolongé jusqu'au 19 juillet 2004 l'était à nouveau entre le 30 décembre 2004 et le 20 décembre 2012.



Par acte d'huissier de justice du 1er juin 2004, la société BNP paribas procédait à la saisie attribution des loyers perçus par les époux [R] de la location du bien immobilier situé à [Localité 6].

Le 22 octobre 2004, la société BNP paribas faisait procéder à la saisie immobilière des biens des époux [R] situés à [Adresse 7] cadastré section CK n°[Cadastre 3].

Par acte d'huissier de justice en date du 14 décembre 2004, M. [R] assignait en responsabilité la société BNP paribas devant le tribunal de grande instance de Paris pour manquement à son obligation de conseil et d'information lors de la souscription du contrat d'assurance.



Par jugement en date du 22 mars 2006, ce tribunal a :



- condamné la BNP paribas à se substituer à l'assureur Gan Vie dans la prise en charge du sinistre dont a été victime M. [K] [R],



- avant dire droit, ordonné une mesure d'expertise avec pour mission de prendre connaissance du dossier médical de Monsieur [R] et après avoir examiné Monsieur [R] et entendu toute personne utile, de déterminer si Monsieur [R] s'est trouvé en état d'incapacité totale de travail au sens du contrat d'assurance groupe Gan Vie, dans l'affirmative, préciser sur quelle période en indiquant s'il s'y trouve toujours et s'il pourra reprendre ses activités avant l'échéance du prêt.



L'expert judiciaire a établi son rapport le 19 mai 2007.



Suivant arrêt en date du 16 novembre 2007, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement rendu le 22 mars 2006 et débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes ainsi que la société BNP paribas de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en la condamnant aux dépens de première instance et d'appel.



Par ordonnance en date du 19 février 2008, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a constaté que la procédure susbsistant devant le tribunal de grande instance est désormais sans objet et que le tribunal se trouve dessais.



Par un arrêt en date du 3 septembre 2009, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 16 novembre 2007 et renvoyé les parties devant la même cour d'appel mais autrement composée.



Suivant arrêt en date du 8 décembre 2011, la cour d'appel de Paris, sur renvoi après cassation, a :



- confirmé le jugement du 22 mars 2006 en ce qu'il a dit que la BNP paribas avait engagé sa responsabilité à l'égard de Monsieur [R],



- constaté que Monsieur [R] ne réclamait aucune indemnisation de son préjudice et que sa demande de condamnation de la banque à se substituer à l'assureur dans la prise en charge du sinistre était devenue sans objet,



- condamné la BNP paribas à payer la somme de 5.000 euros à Monsieur [R] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



- rejeté toutes autres demandes des parties,



- condamné la BNP paribas aux depens comprenant ceux de l'arrêt cassé et admis l'avoué concerné au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.



Par arrêt en date du 3 juillet 2013, la Cour de cassation a :



- cassé et annulé l'arrêt rendu le 8 décembre 2011 par la cour d'appel de Paris mais seulement en ce qu'il constate que M. [R] ne réclame aucune indemnisation de son préjudice et que la demande de condamnation de la banque à se substituer à l'assureur est devenue sans objet, et remis en conséquence la cause et les parties, sur ces points, dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt



- renvoyé les parties, pour être fait droit, devant la cour d'appel de Versailles,



- condamné la BNP paribas à payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



L'arrêt a été signifié à personne morale à la BNP paribas le 19 février 2014 par Monsieur [R].



Suivant certificat en date du 11 juillet 2014, le greffier de la cour d'appel de Versailles a indiqué qu'il n'y avait pas eu de déclaration de saisine à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013.



Par acte d'huissier de justice en date du 27 novembre 2014, M. [W] [R] a fait assigner la société BNP paribas devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement en date du 29 juin 2017, considérant notamment, en vertu de l'article 1034 du code de procédure civile, que le jugement du 22 mars 2006 a force de chose jugée, :



- rejeté les fins de non recevoir soulevées par la société BNP paribas tirées de l'autorité de la chose jugée, du dessaisissement du tribunal et de la compétence de la cour d'appel de renvoi ;



- condamné la société Bnp Paribas PARIBAS à payer à M. [W] [R] les sommes suivantes :



- 169.050,26 euros en réparation du solde du prêt payé par l'emprunteur,



- 14.284,86 euros en réparation des loyers saisis par la société BNP paribas entre le 30 août 2004 et le 10 août 2005,



- 34.297,50 euros correspondant aux échéances mensuelles réglées par M. [R] entre le mois d'octobre 1998 et le mois d'octobre 2000,



- dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2014 ;



- ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière dans les conditions prévues par l'article 1154 ancien du code civil ;



- condamné la société BNP paribas à rembourser à M. [W] [R] les sommes suivantes :



- 151.000 au titre du prix de vente du pavillon située à [Localité 6] intervenue le 15 août 2006,



- 65.000 euros au titre d'une partie du prix de la vente intervenue le 10 août 2007 d'un deuxième pavillon situé à [Localité 6].



- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 16 août 2006 pour la première et du 10 août 2007 pour la seconde ;



- rejeté le surplus des demandes ;



-condamné la société BNP paribas aux dépens ;



- autorisé Me Emmanuel De Laage, avocat, à recouvrer directement contre la société BNP paribas ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision ;



- Condamné la société BNP paribas à payer à M. [W] [R] la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



- Ordonné l'exécution provisoire.







La société Bnp Paribas a interjeté appel par déclaration du 7 juillet 2017.




Par ses dernières conclusions en date du 23 mai 2019, la société Bnp Paribas fait valoir :



- que la demande est irrecevable dès lors que seule la cour d'appel de Versailles, cour de renvoi désignée par la Cour de cassation était compétente pour statuer en vertu de l'article L131-4 du code de l'organisation judiciaire, que le tribunal a commis un excès de pouvoir, que si le jugement du 22 mars 2006 avait force de chose jugée c'est y compris en ce qu'il n'a prononcé aucune condamnation à son encontre, que la péremption de l'instance d'appel liée au défaut de saisine de la cour de renvoi n'ouvre pas droit à un nouveau procès,



- qu'il ressort des articles 631 et 1034 alinéa 3 du code de procédure civile que l'on revient à la situation postérieure au jugement et antérieure à l'arrêt d'appel mais que le tribunal a été saisi d'un demande identique à celle jugée dans le cadre du premier procès, que s'il a été fait droit à la demande tendant à retenir le principe de la responsabilité, rien n'avait été décidé sur l'indemnisation puisqu'une expertise avait été ordonnée, que l'ordonnance du juge de la mise en état du 19 février 2008 qui constate le dessaisissement du tribunal conserve toujours ses effets, qu'en l'espèce il s'agissait d'une cassation partielle, des points tranchés subsistants mais que la question de l'indemnisation relève nécessairement d'une cour d'appel, celle de Versailles sur renvoi que M. [R] n'a pas saisie, la réintroduction d'une nouvelle demande n'étant pas possible, le juge désigné par la décision de renvoi, ayant plénitude de juridiction en vertu de l'article 638 du code de procédure civile, étant exclusivement investi du pouvoir de statuer,



- que contrairement à ce qu'a décidé le tribunal, la décision définitive n'est pas le jugement du 22 mars 2006 mais l'arrêt du 8 décembre 2011 qui n'a fait l'objet que d'une cassation partielle, que si le jugement du 22 mars 2006 est définitif, le tribunal ne pouvait en modifier le dispositif alors que le tribunal n'a pas été ressaisi dans les deux années de la date de dépôt du rapport, le tribunal passant outre la péremption d'instance,



- que si M. [R] fait valoir qu'en vertu de l'article 385 du code de procédure civile, rien ne l'empêche de réintroduire une instance dans le cas de péremption de la première, il devait le faire dans les dix années du refus de prise en charge par l'assureur du 19 octobre 2001 soit avant le 19 octobre 2011 alors que son assignation est du 27 novembre 2014, de sorte qu'il est prescrit,, qu'à la suite du dernier arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013, seule l'instance d'appel était interrompue mais qu'il n'a pas saisi la cour de renvoi et non la première instance ayant conduit au jugement du 22 mars 2006 d'autant qu'est intervenue l'ordonnance de dessaisissement du juge de la mise en état du 19 février 2008, qui a autorité de la chose jugée en vertu de l'article 775 du code de procédure civile, la compétente de la juridiction de renvoi à l'exclusion du juge ayant rendu la décision étant d'ordre public,



- que c'est à tort que M. [R] fait valoir que la péremption et la prescription seraient des demandes nouvelles en appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile alors qu'elle visent à faire échec à ses prétentions et que les arguments ont été échangés en première instance et qu'elles tendent aux mêmes fins, que la prescription peut être soulevée en tout état de cause,



- que la demande n'est pas recevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de l'article 1351 du code civil, puisque les faits invoqués et les demandes formulées sont identiques à ce qui a été jugé, cette fin de non recevoir n'étant pas nouvelle,



- à titre infiniment subsidiaire, que le jugement doit être réformé puisque premièrement il a indemnisé deux fois M. [R] en la condamnant à payer, d'une part, le solde du prêt les loyers saisis et les échéances mensuelles réglées entre octobre 1998 et 2000 et, d'autre part, à rembourser le prix de vente amiable du pavillon de 151 000 euros et une partie, à hauteur de 65 000 euros, de la somme issue de la vente d'un second bien, et, secondement, il a statué ultrapetita en la condamnant à payer une indemnité de 48 528,36 euros et à la restitution des sommes de 151 000 et 65 000 euros consignées chez le notaire,



- qu'elle est créancière des sommes dues au titre du prêt dont la validité a été reconnue notamment au cours de la procédure de vente immobilière, la restitution de ces sommes à M. [R] n'étant donc pas fondée quant à elle puisqu'elles sont venues apurer la créance,



- que M. [R] sollicite la restitution de la somme de 14 284,80 euros au titre d'une saisie de loyers mais qu'il ne l'a pas contestée et qu'elle a été payée en exécution des sommes dues au titre du prêt, sa demande d'indemnisation au titre de la responsabilité de la banque étant indépendante de son obligation de régler les causes du prêt,



- qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013 qui s'impose à tous que M. [R] ne peut demander autre chose que l'indemnisation de son incapacité de travail en vertu des garanties du GAN et notamment les conséquences du prononcé de l'exigibilité anticipée du prêt prononcée le 6 novembre 1998, que son indemnisation ne peut correspondre qu'à une perte de chance d'obtenir la garantie incapacité de travail pendant 29 mois de 1 380,44 euros soit 37 944,76 euros au total, qu'à compter du 12 mars 2002, il a été déclaré invalide et a pu bénéficier de la garantie invalidité des AGF et que si tel n'a pas été le cas c'est uniquement de son propre fait défaut de solliciter sa prise en charge, toute demande excédentaire se heurtant à l'autorité de la chose jugée par le jugement du 22 mars 2006 invoqué par M. [R],

que les demandes au titre des intérêts étant prescrites en vertu des articles 2224 du code civil pour la période antérieure au 27 novembre 2009, soit 5 ans avant l'assignation, de sorte qu'elle demande à la cour :



- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,



- principalement,



- de dire que les demandes se heurtent à l'autorité de la chose jugée,



- de déclarer M. [R] irrecevable en toutes ses demandes,



- subsidiairement,



- de déclarer les demandes prescrites,



- de juger que l'instance introduite par assignation du 14 décembre 2004 ayant conduit au jugement du 22 mars 2006 est atteinte de péremption,



- de déclarer M. [R] irrecevable en toutes ses demandes alors que le jugement revêtu de l'autorité de la chose jugée ne l'a pas indemnisé,



- encore plus subsidiairement,



- de juger que M. [R] est irrecevable à solliciter autre chose que le montant que l'assurance incapacité de travail du GAN aurait garanti,



- en conséquence de débouter M. [R] de ses demandes,



- de le condamner à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



Par dernières conclusions en date du 14 mars 2019, M. [W] [R] expose :



- qu'il a été trompé par la banque sur l'étendue des garanties de l'assurance souscrite à l'occasion du prêt,



- que, contrairement à ce que soutient la société Bnp PARIBAS, le jugement du 22 mars 2006 a force de chose jugée en vertu de l'article 1034 du code de procédure civile, le caractère partiel de la cassation de l'arrêt du 8 décembre 2011 n'emportant pas de conséquences compte tenu de la péremption de l'instance d'appel, la cassation ne profitant, en outre, qu'au demandeur,



- que, dès lors que le juge de la mise en état avait constaté son dessaisissement par ordonnance du 19 février 2008, il lui appartenait bien de saisir à nouveau la juridiction pour statuer sur son indemnisation puisque le jugement n'avait statué que sur l'obligation de la société Bnp Paribas de se substituer à l'assureur Gan VIE, de sorte que la présente instance ne viole aucune autorité de la chose jugée alors que ses demandes ne sont pas identiques,



- que son assignation du 27 novembre 2014 ne viole pas l'ordonnance du juge de la mise en état du 19 février 2008 dès lors qu'un événement nouveau est intervenu du fait de la première cassation du 3 septembre 2009, qu'en tout état de cause une nouvelle instance peut être introduite si l'action n'est pas éteinte par ailleurs ce qui est le cas en l'espèce comme l'a jugé le tribunal,



- que les demandes tendant à la constatation de la prescription et de la péremption d'instance sont nouvelles au sens de l'article 564 du code de procédure civile, que la première n'est pas acquise depuis l'assignation du 14 décembre 2004, qu'en vertu de l'article 386 du code de procédure civile la péremption ne court que depuis l'arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013,



- que la société Bnp Paribas fait encore valoir une nouvelle prétention, irrecevable, tirée de l'autorité de la chose jugée du jugement du 22 mars 2006 en ce qu'il a condamné la banque à se substituer à la société GAN VIE mais que ce moyen n'est pas opérant puisque le jugement a sursis à statuer et n'est donc pas définitif,



- qu'il n'y pas double indemnisation lors de la liquidation d'un préjudice, que le tribunal n'a pas statué ultrapetita,



-qu'il résulte du rapport du docteur [Z] qu'il justifie bien d'une incapacité courant jusqu'au terme du contrat de prêt en 2011 sans exclusion de garantie à tel point qu'il a été placé en affection longue durée et invalidité par la sécurité sociale, le rapport de causalité entre les fautes et le préjudice étant avéré, que l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement conduit à ce que la société Bnp Paribas prenne en charge les conséquences sans pouvoir invoquer son invalidité qui a suivi son incapacité, qu'elle n'établit d'ailleurs pas qu'il se trouvait en invalidité absolue et définitive donnant lieu à garantie au sens du contrat AGF,



- que la société Bnp Paribas ne peut faire valoir seulement une perte de chance d'être mieux assuré alors que c'est de son fait qu'il n'a pas disposé de la garantie incapacité et que le contrat de prêt a été résilié, précisément à défaut de prise en charge,



- que le principe de réparation intégrale comporte l'indemnisation des pertes subies et du gain manqué, de sorte que sont dues les sommes acquittées au titre des paiements du prêt selon les saisies immobilières soit 169 050,26 euros, les remboursements intervenus indûment de 34 299,50 euros, les loyers indûment saisis pour 14 284,86 euros sans que le défaut de leur contestation immédiate n'ait d'influence, les intérêts sur ces sommes et leur capitalisation étant dus depuis l'assignation du 27 novembre 2014 en vertu de l'article 1153 du code civil, qu'à la suite d'une vente amiable puis d'une vente judiciaire de deux de ses biens, des sommes de 151 000 euros et de 65 000 euros ont été consignées chez le notaire puis versées à la société Bnp Paribas de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il ordonne la restitution avec intérêts à compter de ces versements, de sorte qu'il demande à la cour :



- de déclarer irrecevables comme nouvelles en vertu de l'article 564 du code de procédure civile les prétentions de la société Bnp Paribas invoquant l'autorité de la chose jugée du jugement du 22 mars 2006 et la prescription de son action,



- de débouter la société Bnp Paribas de toutes ses demandes,



- de confirmer le jugement du 29 juin 2017,



- y ajoutant, de condamner la société Bnp Paribas à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture rendue le 28 mai 2019.








MOTIFS



En vertu des dispositions des articles 623, 625 et 1034 alinéa 2 du code de procédure civile, lorsqu'un arrêt d'appel fait l'objet d'une cassation partielle et que la saisine de la juridiction de renvoi n'est pas intervenue dans le délai de 4 mois, les parties sont replacées dans l'état où elles se trouvaient avant la décision cassée sur les points que la cassation atteint, le jugement rendu en premier ressort se voit conférer l'autorité de la chose jugée de même que l'arrêt en ce qu'il n'a pas été atteint par la cassation et, enfin, les parties peuvent saisir à nouveau la juridiction compétente pour statuer sur leur demande dans la limite de ce qui précède et sous réserve de la prescription de leur action.



En l'espèce, le jugement du 22 mars 2006 a condamné la société Bnp Paribas à se substituer à l'assureur et a ordonné une expertise, l'arrêt en date du 8 décembre 2011 a notamment confirmé ce jugement 'en ce qu'il a dit que la Bnp Paribas avait engagé sa responsabilité à l'égard de M. [R]' et n'a pas été atteint par la cassation de l'arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013 qui n'a porté que sur la constatation par la cour d'appel qu'elle n'était saisie d'aucune demande d'indemnisation du préjudice et que la demande de substitution de la banque à l'assureur était devenue sans objet.



C'est donc à tort que la société Bnp Paribas fait valoir que les conséquences de la cassation sans saisine de la cour de renvoi laisseraient, en l'espèce, les parties en l'état d'une déclaration de sa responsabilité à l'égard de M. [R] sans faculté d'en tirer les conséquences puisque l'arrêt du 8 décembre 2011, confirmatif du jugement revêtu de l'autorité de la chose jugée du 22 mars 2006 et non atteint en cela par la cassation, a l'autorité de la chose jugée entre les parties.



M. [R] ne peut opposer à la société Bnp Paribas, à raison de leur caractère nouveau en appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de ses prétentions tendant, d'une part, à la reconnaissance de la prescription de son action puisqu'elle peut être invoquée en tout état de cause en application de l'article 123 du code de procédure civile et, d'autre part, à l'autorité de la chose jugée puisqu'elle a été soulevée en première instance comme cela ressort du jugement.



C'est toutefois à tort que la société Bnp Paribas fait valoir l'autorité du jugement du 22 mars 2006 en ce qu'il n'aurait pas statué sur le préjudice, ce qui serait définitif, alors que, précisément, un jugement n'est susceptible d'avoir autorité que relativement à ce qu'il juge.



L'ordonnance du juge de la mise en état du 19 février 2008 qui avait constaté le dessaisissement du tribunal ensuite du premier arrêt d'appel infirmatif du 16 novembre 2007  -qui rendait sans objet la poursuite de l'instance en indemnisation - ultérieurement cassé en son entièreté le 3 septembre 2009, est sans aucun effet sur la présente instance qui en est distincte et il en est de même de la prétendue péremption de ladite instance qui ne concerne pas la présente et qui n'empêche par M. [R], en vertu de l'article 385 alinéa 2 du code de procédure civile, d'introduire une nouvelle instance si l'action n'est pas éteinte par ailleurs.



La prescription de l'action de M. [R] n'est pas acquise puisque toutes les actions en justice et actes de procédure accomplis par M. [R] cités plus haut l'ont interrompue en vertu de l'article 2241 du code civil, et ce, sans que le défaut de saisine de la cour de renvoi n'ait de conséquence sur ces interruptions.



Il résulte de ce qui précède que la société Bnp Paribas doit réparation à M. [R] des conséquences du défaut d'assurance garantissant son incapacité de travail puisqu'ainsi que cela résulte de l'arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013, M. [R] était bien fondé à solliciter, sur le fondement de l'article 1147 du code civil, la réparation du préjudice résultant de ce que, contrairement au contrat Gan Vie, le contrat AGF ne permettait pas la prise en charge du remboursement des échéances du prêt à l'expiration d'un délai de 90 jours après le 3 juillet 1998.



C'est pas une juste appréciation des éléments de la cause et par une motivation pertinente, que le tribunal, relevant notamment que la substitution de la société Bnp Paribas aux obligations de la société Gan vie et son obligation de réparer les entiers préjudices rappelées précédemment était revêtue de l'autorité de la chose jugée, a estimé que l'invocation d'une perte de chance ne pouvait plus être débattue, étant observé qu'a été sanctionnée non seulement le défaut d'information et de conseil mais l'illusion dans laquelle M. [R] a été



entretenu d'avoir adhéré au contrat de la société Gan Vie.



Il résulte de l 'expertise du docteur [Z] du 19 mai 2007 que M. [R] a présenté une pathologie psychotique délirante, invalidante, évoluant depuis 1995, qu'au moment de la signature du cautionnement d'assurance du prêt immobilier, il ne présentait pas cette pathologie mentale, que l'incapacité de travail, au sens du contrat groupe Gan Vie, est totale, que M. [R] ne pourra jamais reprendre son activité professionnelle, ni quelque activité que ce soit avant l'échéance du prêt au mois de mai 2011, ni après d'ailleurs.



M. [R] justifie avoir été dans un état d'incapacité couvert par la garantie de la société Gan Vie sous déduction de trois mois de carence et, alors même qu'il était déjà en état d'incapacité au sens du contrat d'assurance depuis le mois de juillet 1998 ainsi que cela ressort de l'expertise du docteur [Z] du 19 mai 2007, il a encore procédé au paiement des échéances pendant deux années entre le mois d'octobre 2008 et octobre 2010, de sorte que la résiliation du contrat intervenue à l'initiative de la banque est due aux impayés non pris en charge par une assurance qui sont donc les conséquences de ses propres manquements à l'égard de M. [R].



Dès lors que la société Bnp Paribas doit à M. [R], en dommages-intérêts l'équivalent de la garantie invalidité qui était prévue par le contrat Gan vie auquel il avait droit ainsi que réparation de tous les dommages issus de ces manquements subis par lui, c'est vainement qu'elle lui reproche de ne pas avoir actionné cette garantie de la société AGF puisqu'elle ne peut ainsi reprocher, en outre, à M. [R] de n'avoir pas diminué le préjudice qui trouve sont origine dans ses propres manquements.



Compte tenu des voies d'exécution employées par la société Bnp Paribas, a posteriori injustifiées comme cela résulte du présent litige puisqu'elle ont été initiées alors que la dette de M. [R] devait faire l'objet d'une prise en charge, non effective par le fait de la banque, sans que n'importe le défaut de contestation de leur régularité lors de leur mise en oeuvre, c'est à juste titre que le tribunal a condamné la société Bnp Paribas à rembourser à M. [R] les sommes ainsi obtenues de ces mesures d'exécution ainsi que celles que M. [R] avait réglées volontairement, postérieurement à la période de prise en charge de son incapacité, soit :



- 34.297,50 euros correspondant aux échéances mensuelles réglées par M. [R] à partir du mois d'octobre 1998,



- 14.284,86 euros au titre des loyers saisis par la société Bnp Paribas entre le 30 août 2004 et le 10 août 2005,



- 151.000 euros au titre du prix de la vente du pavillon situé à [Localité 6] intervenue le 15 août 2006,



- 65.000 euros au titre d'une partie du prix de la vente intervenue le 10 août 2007 d'un deuxième pavillon situé à [Localité 6].



En revanche, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. [R] tendant à obtenir le paiement des causes impayées du prêt après déchéance du terme de 169.050,26 euros (correspondant aux capital restant dû au 5 août 2000 soit 124.544,40 euros, aux intérêts courus entre le 5 août 2000 et le 31 mai 2004 au taux de 9,35% l'an soit 44.505,86 euros tels que réclamés au titre du solde du prêt par le commandement aux fins de saisie immobilière du 29 juillet 2004 ) dès lors qu'il ne l'a sollicité, en première instance, que concurremment avec une demande de compensation des sommes dues à la banque au titre de sa créance du prêt qu'elle ne réclame pas et qui, comme l'a relevé le tribunal, a été éteinte par les paiements faits.





En conséquence, M. [R] n'est plus redevable d'aucune somme envers la société Bnp Paribas qui aurait dû supporter elle-même les conséquences de son incapacité et doit donc restitution à celui-ci des sommes ci-dessus indûment perçues à ce titre.



Enfin il ne saurait être tenu compte de l'assignation introductive de la présente du 27 novembre 2014 pour statuer sur la prescription des intérêts sollicités en vertu de l'article 2224 du code civil alors que le délai a été régulièrement interrompu depuis le 14 décembre 2004.



Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne la condamnation de la société Bnp Paribas à payer à M. [R] la somme de 169 050,26 euros en réparation du solde du prêt payé par l'emprunteur qui est infirmée, de condamner la société Bnp Paribas aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [W] [R] la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS





Rejette les fins de non recevoir opposées par M. [W] [R] à la société Bnp Paribas en ses demandes tendant à la reconnaissance de l'autorité de la chose jugée du jugement du 22 mars 2006 et à l'acquisition de la prescription de l'action de M. [W] [R] ;



Rejette les fins de non recevoir de la société Bnp Paribas fondées sur l'autorité de la chose jugée du jugement du 22 mars 2006, la prescription de l'action de M. [W] [R] et la péremption d'instance ;



Infirme le jugement entrepris du 29 juin 2017 en ce qu'il a condamné la société Bnp Paribas à payer à M. [W] [R] la somme de 169 050,26 euros ;



Et statuant à nouveau,



Déboute M. [W] [R] de cette demande de paiement de la somme de 169 050,26 euros ;



Pour le surplus,



Confirme le jugement entrepris du 29 juin 2017 en toutes ses autres dispositions ;



Y ajoutant,



Condamne la société Bnp Paribas à payer à M. [W] [R] la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la société Bnp Paribas aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme il est dit euros en application de l'article 699 du code de procédure civile.











La greffière,







Liselotte FENOUIL



La Présidente,







Françoise CHANDELON

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