5 décembre 2019
Cour d'appel de Lyon
RG n° 17/07228

1ère chambre civile A

Texte de la décision

N° RG 17/07228 - N° Portalis DBVX-V-B7B-LJLH









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 22 septembre 2017



RG : 2015J01815









RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 05 Décembre 2019







APPELANTE :



SARL SIGNA DECO

[Adresse 1]

[Localité 2]





Représentée par la SELAS NOW.P.S, avocat au barreau de LYON, toque : 855, avocat postulant

Et ayant pour avocat plaidant Me Lionel HEBERT, avocat au barreau de RENNES







INTIMEE :



SAS COMPAGNIE DE FABRICATION INDUSTRIELLE DE MENUISERIE (COFIM)

[Adresse 4]

[Localité 3]





Représentée par Me Marie-pierre LARONZE, avocat au barreau de LYON, toque : 1680, avocat postulant

Et ayant pour avocat plaidant la SELARL CABINET VERNIAU (FL LAWYERS), avocat au barreau de LYON







******





Date de clôture de l'instruction : 11 Septembre 2018



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Octobre 2019



Date de mise à disposition : 05 Décembre 2019







Audience tenue par Aude RACHOU, président, et Françoise CLEMENT, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,



assistés pendant les débats de Elsa MILLARY, greffier



A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Aude RACHOU, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller





Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



Signé par Aude RACHOU, président, et par Elsa MILLARY, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




****





Suivant contrat du 8 décembre 2011, la société Cofim, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de menuiseries de chantier, a donné mandat à la société Signa déco, représentée par son gérant Monsieur [J] [F], exerçant une activité d'agent commercial, de la représenter et de vendre ses produits sur les secteurs Île-de-France Nord, Paris Île-de-France Sud et Bretagne/Pays-de-Loire.



Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 février 2015, la société Cofim a prononcé la rupture pour faute grave du contrat d'agence commerciale.



Contestant le bien-fondé de cette rupture considérée comme abusive, la société Signa déco a fait citer la société Cofim devant le tribunal de commerce de Lyon, en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.



Par jugement rendu le 22 septembre 2017, le tribunal de commerce de Lyon a :



- jugé que Monsieur [J] [F] a commis des fautes graves dans l'exercice de son mandat d'agent commercial motivant la résiliation du contrat,



- jugé que le contrat d'agence commerciale est résilié le 13 février 2015 aux torts exclusifs de la société Signa déco,



- débouté la société Signa déco de l'intégralité de ses demandes,



- condamné la société Signa déco aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 euros.



Selon déclaration du 12 octobre 2017, la société Signa déco a formé appel à l'encontre de ce jugement.




Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 8 mars 2018 par la société Signa déco qui conclut à l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions et demande à la cour de débouter la société Cofim de l'intégralité de ses demandes, de dire et juger que la rupture du contrat d'agence commerciale ne repose pas sur une faute grave de la société Signa déco et condamner en conséquence la société Cofim à lui payer les sommes de :



- 13'733,46 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 85'743,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de son préjudice (article L. 134-12 du code de commerce),

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 26 janvier 2018 par la société Cofim qui conclut à la confirmation du jugement critiqué en toutes ses dispositions et sollicite le paiement d'une indemnité de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 11 septembre 2018.




MOTIFS ET DÉCISION :





Sur la rupture du contrat d'agence commerciale :





La lettre de rupture du contrat d'agence commerciale du 13 février 2015 reproche à la société Signa déco d'une part, la violation de la clause de l'article 11 alinéa 1 et 2 du contrat d'agence commerciale stipulant que « Tout changement conduisant à la perte par Monsieur [J] [F], soit de la direction effective et permanente de la société, soit du contrôle majoritaire de celle-ci, devra être soumis à l'agrément du mandant aux plus tard quatre mois avant la survenance du changement. Le non-respect de cette obligation sera assimilé à une faute grave de l'agent ouvrant droit à la résiliation légitime du mandat.» et d'autre part, sa complicité dans la fraude au contrat de travail de Monsieur [J] [F].



La société Signa déco considère que ces motifs sont fallacieux et que la rupture du contrat procède en réalité d'une autre cause ; elle soutient que malgré le changement de gérance courant 2012 au profit de sa fille, Monsieur [J] [F] n'a jamais abandonné la direction effective et permanente de la société, ce que ne pouvait ignorer la société Cofim, qui s'adressait d'ailleurs à ce dernier peu de temps avant la rupture, uniquement pour lui reprocher des résultats commerciaux prétendument insuffisants, non visés pour autant dans la lettre de rupture.



Elle ajoute que la société Cofim a par ailleurs toujours su que pendant l'exécution du mandat d'agence commerciale, Monsieur [J] [F] occupait des fonctions de VRP exclusif au sein de la société Batimétal qui commercialise des portes, sollicitant d'ailleurs ce dernier pour passer des commandes auprès du groupe ; elle considère que la qualité de Monsieur [J] [F] ne concernait d'ailleurs nullement la société Cofim, l'intéressé s'étant seulement interdit en qualité de VRP exclusif du groupe Premdor, de commercialiser à titre personnel une autre carte concurrente ; elle soutient enfin que même si l'intéressé avait violé cette clause d'exclusivité le liant au groupe, ce manquement n'aurait pu justifier la rupture du contrat d'agence commerciale.



La société Cofim soutient quant à elle que Monsieur [J] [F] a manqué à son devoir de loyauté à son égard au cours de la négociation du contrat d'agent commercial en s'abstenant d'informer sa partenaire sur l'existence du transfert d'activité de la société Lamy qui se trouvait en cessation de paiement, vers la société Signa déco nouvellement créée ; elle ajoute que ce n'est que lors d'un entretien qui a eu lieu le 23 janvier 2015, qu'elle a pu soupçonner l'existence d'un contrat de travail de Monsieur [J] [F] en dehors de la société Signa déco dont il n'était plus gérant, découvrant alors qu'elle risquait d'être considérée comme tiers complice de la violation d'un contrat de travail dont elle n'avait jamais été informée.



Elle prétend que contrairement à l'article 11 du contrat des parties, Monsieur [J] [F] ne pouvait conserver la direction effective de l'entreprise en perdant ses fonctions de gérant, sauf à devenir un prête-nom et considère en conséquence qu'elle rapporte bien la preuve des fautes graves reprochées à l'intéressé pour manquement à l'intuitu personae et infraction à un contrat de travail préexistant.



Sur ce :



Le premier juge a, par des motifs pertinents que la cour adopte, constaté que la société Signa déco n'établissait pas avoir informé la société Cofim de la démission de son gérant intervenue aux termes de l'assemblée générale du 28 novembre 2012, en contravention avec les dispositions de l'article 11 du contrat d'agence commerciale prévoyant, dans le cadre d'une clause d'intuitu personae, l'agrément du nouveau gérant par le mandant et justement considéré à ce titre, que la démonstration de la faute grave de l'agent commercial était démontrée, la prétendue gérance de fait par Monsieur [J] [F] ne pouvant exonérer l'agent commercial de sa faute contractuelle.



Il n'est dès lors pas besoin de procéder à l'examen des autres griefs invoqués par la société Cofim s'agissant de l'existence d'un contrat de travail liant M. [F] à une société Bâtimétal.



L'existence d'une faute grave qui a justifié la rupture des relations contractuelles aux torts de l'agent commercial dispense le mandant de verser à son agent l'indemnité réparatrice de la rupture des relations contractuelles prévue par l'article L134-12 du code de commerce et la société Signa déco doit donc être déboutée en sa demande de ce chef et au titre de l'indemnité compensatrice de préavis qui n'est pas due en cas de faute grave.





Sur les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile :



L'équité et la situation économique des parties commandent enfin l'octroi d'une indemnité supplémentaire en cause d'appel de 3 000 euros au bénéfice de la société Cofim et à la charge de la société Signa déco, qui succombant, doit être déboutée en sa demande de ce chef.





PAR CES MOTIFS,





La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,





Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 22 septembre 2017 par le tribunal de commerce de Lyon,



Y ajoutant,



Condamne la société Signa déco à payer à la société Cofim une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Rejette la demande de la société Signa déco au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la société Signa déco aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.





LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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