8 janvier 2020
Cour d'appel de Paris
RG n° 18/10425

Pôle 6 - Chambre 10

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 08 Janvier 2020

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/10425 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6L76



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 juillet 2013 rendu par le conseil de prud'hommes de PARIS sous le RG n°11/12158, infirmé par l'arrêt du 21 juin 2016 rendu par la chambre 6/4 de la cour d'appel de PARIS sous le RG n°14/04740, lui même partiellement cassé par l'arrêt n° 979 F-D, rendu le 21 juin 2018 par la Cour de cassation ayant renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de PARIS autrement composée.







APPELANTE



SASU CB'A PARIS venant aux droits de la société CB'ASSOCIES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079 substitué par Me Sandra VIZZAVONA, avocat au barreau de PARIS, toque : D2175





INTIMEES



Madame [Y] [F]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 4]



comparante en personne, assistée de Me Isabelle ROY-MAHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0527



SAS SUITCASE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079 substitué par Me Sandra VIZZAVONA, avocat au barreau de PARIS, toque : D2175



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de chambre, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :



Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère

Madame Florence OLLIVIER, Vice Présidente placée faisant fonction de Conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 19 juillet 2019





Greffier, lors des débats : M. Julian LAUNAY



ARRET :



- Contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




EXPOSÉ DU LITIGE



Mme [F] a été engagée par la société CB Associés, aux droits de laquelle se trouve la société CB'A Paris, en qualité de chef de projet junior, à compter du 12 novembre 1990. Elle exerçait en dernier lieu les fonctions de directrice des opérations du département « Suitcase » et celle de « directrice conseil Belgique ».



Le 24 novembre 2010, l'entreprise a informé Mme [F] de son obligation de « réorganiser la société afin de sauvegarder notre compétitivité de supprimer définitivement le département Suitcase qui fermera fin décembre 2010 ». Cette lettre précisait que la réorganisation impliquait la suppression du poste de directrice des opérations au sein du département Suitcase.



Mme [F] produit un bulletin d'acceptation et le récépissé du document de présentation d'une convention de reclassement personnalisé signé le 24 février 2011 et retourné par lettre recommandée avec accusé de réception (pièce 3).



Mme [F] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettres du 30 mai 2011 de la société CB'A Paris et de la société Suitcase, nouvellement créée pour reprendre le département du même nom de la société CB'A Paris.



Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris lequel, par jugement du 30 juillet 2013, a :

'condamné solidairement les sociétés CB associés et Suitcase à lui payer :

14 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

15 045,84 euros à titre de rappel de salaire de mars, avril, mai 2011

14 400 euros à titre de retenue de salaire

5630,75 euros à titre de solde d'indemnité de congés payés

avec intérêts de droit compter de la réception par le défendeur la convocation devant le bureau de conciliation

57 600 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

avec intérêts au taux légal à compter du jugement

500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

'ordonné la remise de documents sociaux conformes à la décision.



Par arrêt du 21 juin 2016, la cour d'appel de Paris a :

'infirmé le jugement ;

'jugé le licenciement par la société CB'A Paris, venant aux droits de la société CB Associés, dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

'condamné la société CB'A Paris à lui payer :

14 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

15 045,84 euros à titre de rappel de salaire de mars, avril, mai 2011

14 400 euros à titre de retenue de salaire

5630,75 euros à titre de solde d'indemnité de congés payés

95 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

avec intérêts de droit pour les créances salariales à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leurs demandes et, pour les sommes à caractère indemnitaire, à compter de la décision qui les a allouées.



Par arrêt du 21 juin 2018, la Cour de cassation a cassé cet arrêt mais seulement ce qu'il avait condamné la société CB'A Paris à payer à la salariée les sommes de ;

14 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

15 045,84 euros à titre de rappel de salaire de mars, avril et mai 2011

14 400 euros à titre de retenue de salaire

5 630,75 euros à titre de solde d'indemnité de congés payés.



Devant la cour d'appel de Paris, autrement composée désignée comme juridiction de renvoi, la société CB'A Paris sollicite de voir :



Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CB'A Paris à payer à titre de rappel de salaire de mars, avril, mai 2011 la somme de 15.045,84 € et en débouter Mme [F]

Condamner Mme [F] à rembourser à la société CB'A Paris la somme de 15.045,84 €

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CB'A Paris à verser une indemnité compensatrice de préavis de14.600,00 €

Juger que l'indemnité compensatrice de préavis ne peut excéder un mois, du fait de l'acceptation de la CRP, soit la somme de 4.800 €,

Juger qu'aucune indemnité de congés payés n'est due sur l'indemnité d'un mois de préavis non exécuté et en conséquence, condamner Mme [F] à rembourser la somme (14.600- 4.800) 9.800 €

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CB'A à verser à la salariée à titre d'indemnité de congés payés la somme de 5.630,75 €

Juger que la somme due à la salariée au titre des congés payés correspond à 16 jours et s'élève à la somme de 3.544 € et en conséquence, condamner Mme [F] à rembourser la somme (5.630,75 ' 3544) 2.086,75

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CB'A à verser à la salariée, au titre des retenues sur salaire, la somme de 14.400,00€

Juger que la somme due par CB'A à la salariée au titre des retenues sur salaire s'élevait à 3.600€,

somme qui a été versée par la société et en conséquence, condamner Mme [F] à rembourser cette somme de 14.400 €

Condamner Mme [F] à rembourser le trop-perçu relatif à l'indemnité de licenciement, soit la somme de238,67 €

Condamner Mme [F] à rembourser au titre des intérêts trop perçus .. 1.259,23 €



En conclusion,

Condamner Mme [F] à rembourser à la société CB'A Paris :

15.045,84 € (rappel de salaire mars, avril, mai 2011)

+ 9.800 € (2 mois de préavis)

+ 2.086,75 € (congés payés)

+ 14.400 € (retenues sur salaires)

+ 238,67 € (trop-perçu indemnité de licenciement)

+ 1.259,23 € (intérêts trop perçus)

Soit la somme totale de = 42.830,49 €



Condamner Mme [F] à verser à la société CB'A Paris la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC et aux dépens.



La société Suitcase sollicite de voir condamner Mme [F] à lui rembourser la somme nette de 2816,72 euros.



Mme [F] sollicite de voir :



condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB Associés à lui

payer :

- 14.400,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 14.400,00 € au titre de retenue de salaires

- 15.045,84 € à titre de rappel de salaires pour les mois de mars, avril

et mai 2011

- 5.630,75 € à titre de solde d'indemnité de congés payés

- bulletins de salaires de mars à juillet inclus



Y ajoutant :

condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés à

payer à Madame [Y] [F] la somme de 14.760 € à titre

de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier lié à

l'absence de prise en charge par la pole emploi au titre de l'ASR

condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés à

payer à Madame [Y] [F] la somme de 15.000 € à titre

de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé par les

conditions de la rupture.

condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés à

payer à Madame [Y] [F] la somme de 10.000 € à titre

de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct au titre d'un

manquement à ses obligations en matière de formation et

d'accompagnement.

condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés à

payer à Madame [Y] [F] 7.500,00 € au titre de l'article

700 du Code de Procédure Civile,

condamner la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés aux

entiers dépens.

debouter la société CB'A Paris venant aux droits de CB'Associés de ses


demandes de remboursement et d'intérêts.



Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions déposées le jour de l'audience, visées par le greffier et développé oralement.




MOTIFS



Par arrêt du 21 juin 2018, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris mais seulement ce qu'il avait condamné la société CB'A Paris à payer à la salariée les sommes de :



-14 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

-15 045,84 euros à titre de rappel de salaire de mars, avril et mai 2011

-14 400 euros à titre de retenue de salaire

-5630,75 euros à titre de solde d'indemnité de congés payés.



Sur le solde de l'indemnité de préavis



Selon l'article L. 1233'67 du code du travail, en sa rédaction applicable en la cause, si le salarié accepte la convention de reclassement personnalisé, le contrat de travail est réputé rompu du commun accord des parties. Cette rupture du contrat de travail, qui ne comporte ni préavis ni indemnité de préavis, ouvre droit à l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234'9 ainsi que, le cas échéant, au solde de ce qu'aurait été l'indemnité de préavis si elle avait correspondu à une durée supérieure à 2 mois.



En vertu de la convention collective applicable, la salariée avait droit à un préavis de 3 mois. Ainsi, l'indemnité à laquelle peut prétendre est d'un mois de salaire.



Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société CB'A Associés à verser une indemnité compensatrice de 3 mois s'élevant à 14 600 euros alors que la salariée ne pouvait prétendre qu'à une indemnité d'un mois d'un montant de 4800 euros.



Sur le rappel de salaire de mars, avril et mai 2011



La salariée ayant accepté une convention de reclassement personnalisé le 24 février 2011, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de rappel de salaire de mars, avril et mai 2011.



Sur la retenue sur salaire de 14 400 euros



En exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Paris en référé du 22 mars 2013 rectifié par arrêt du 27 juin 2013, la société CB'A a payé à Mme [F] la somme de 3600 euros.



Statuant au fond, le conseil de prud'hommes a condamné solidairement les sociétés CB'A et Suitcase à verser à Mme [F] à titre de retenue sur salaire la somme de 14 400 euros.

Par arrêt du 21 juin 2016, la cour d'appel a confirmé cette condamnation et mis la société Suitcase hors de cause.



En exécution de cet arrêt, la société CB'A a payé seule à Mme [F] la somme de 14 400 euros alors qu'elle avait déjà réglé 3600 euros au même titre de sorte que celle-ci a perçu 18 000 euros. En outre, la société n'a pas procédé à une retenue sur salaire de 14 400 euros au titre du préavis non exécuté mais seulement à une retenue de 3600 euros. La somme de 14 400 euros a donc été indûment versée à Mme [F].



La salariée se borne d'ailleurs à soutenir que la société CB'A lui a versé une rémunération de 1200 € en mars et avril 2011 et aucun salaire en mai 2011 alors que son contrat de travail prévoyait une rémunération de 4800 euros, et d'avoir procédé à des retenues pour absences pour maladie non justifiées. Cependant, le contrat de travail ayant été rompu le 24 février 2011, le moyen est inopérant.



Sur le montant de l'indemnité de licenciement



La société CB'A sollicite le remboursement d'un trop-perçu relatif à l'indemnité de licenciement.

Cependant, l'arrêt n'a pas été cassé sur ce point. La demande est irrecevable.



Sur les congés payés



La salariée sollicite la somme de 5630,75 euros représentant :



'25 jours restant au titre de l'année juin 2009/mai 2010 à prendre au cours de l'année juin 2010/ mai 2011.



Cependant, elle avait pris 9 jours en août 2010 de sorte que la société ne lui devait que 16 jours soit la somme de 3544 euros, mais elle a oublié de décompter ces 9 jours sur les feuilles de paye émises à compter de octobre 2010. La société lui devait donc à ce titre la somme de 3544 euros ce qu'elle reconnaît.



'7,5 jours acquis pour 3 mois de préavis.



À la suite de la rupture de contrat de travail, la salariée ayant droit à une indemnité de préavis de 3 mois, il convient de faire droit à la demande de 7,5 jours de congés payés afférents, soit 1 440 euros.



Il est donc dû à la salariée la somme de 3544 euros outre celle de 1440 euros soit au total 4984 euros.



Sur le préjudice moral



L'arrêt de la cour d'appel de Paris du 21 juin 2016 a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts intérêts pour préjudice moral et la Cour de cassation n'a pas cassé cet arrêt sur ce point. La demande est donc irrecevable.





Sur la demande de réparation du préjudice financier lié à l'absence de prise en charge par Pôle emploi au titre de la CRP



La salariée soutient que dès lors que la Cour de cassation a confirmé qu'elle avait vu son contrat rompu du fait de la CRP, cela signifie qu'elle aurait dû bénéficier des avantages induits de ce mécanisme dont elle a été privée par la faute de la société CB'A.



Cependant, elle ne justifie aucunement de sa situation postérieurement à la rupture de la CRP et ne démontre pas l'existence d'un préjudice financier lié à l'absence de prise en charge par pôle emploi au titre de la CRP.



Sur la demande de réparation du préjudice de formation et d'accompagnement



Ce préjudice sera évalué à la somme de 2000 euros.





Sur la demande de remboursement formulée par la société CB'A



Le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution des décisions, les sommes devant être restituées portant intérêts à compter de la notification de la décision ouvrant droit à restitution.





Sur l'article 700 du code de procédure civile



Compte tenu de la décision intervenue, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS



LA COUR,



Statuant dans les limites de la cassation de l'arrêt du 21 juin 2016,



Infirme le jugement déféré :



'en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés CB Associés et Suitace à payer à Mme [F] les sommes de :



-15 045,84 euros à titre de rappel de salaire de mars, avril et mai 2011

-14 400 euros à titre de retenue de salaire



'sur le montant de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés ;



Statuant à nouveau,



Condamne la société CB'A à payer à Mme [F] les sommes de :



-4800 euros à titre d'indemnité de préavis

-4984 euros à titre de congés payés



Y ajoutant,



Condamne la société CB'A à payer à Mme [F] la somme de 2000 euros au titre du préjudice de formation et d'accompagnement



Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution des décisions, les sommes devant être restituées portant intérêts de droit 6 à compter de la notification de la décision ouvrant droit à restitution ;



Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;



Condamne la société CB'A aux dépens.



LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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