14 janvier 2020
Cour d'appel de Rennes
RG n° 19/05205

1ère Chambre

Texte de la décision

1ère Chambre








ARRÊT N°12/2020





N° RG 19/05205 - N° Portalis DBVL-V-B7D-P75E




















Mme E T... F...





C/





SAS EOS CREDIREC


SA CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE BRETAGNE


SA CRÉDIT LYONNAIS



































Copie exécutoire délivrée





le :





à :











RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE RENNES


ARRÊT DU 14 JANVIER 2020








COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :





Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,


Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,


Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,





GREFFIER :





Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé





DÉBATS :





A l'audience publique du 04 Novembre 2019 devant Madame Brigitte ANDRÉ, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial





ARRÊT :





Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Janvier 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats





****








APPELANTE :





Madame E T... F...


née le [...] à QUIMPER (29000)


[...]


[...]


[...]





Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES


Représentée par Me CECCALDI, Plaidant, avocat au barreau d'AVIGNON








INTIMÉES :





La SAS EOS CREDIREC, ayant son siège [...] , venant aux droits du CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE DÉVELOPPEMENT (CIFD), venant lui-même aux droits du CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE BRETAGNE (CIFB), agissant poursuites et diligences par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège





Représentée par Me Hélène DAOULAS de la SELARL DAOULAS-HERVE ET ASS., avocat au barreau de QUIMPER











La SA CRÉDIT LYONNAIS dont le siège est [...] , agissant poursuites et diligences de son mandataire SA CRÉDIT LOGEMENT, dont le siège est situé [...], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès- qualités au siège





Représentée par Me Emmanuelle BALK-NICOLAS de la SELARL BAILLEUX - BALK-NICOLAS, avocat au barreau de QUIMPER















EXPOSÉ DU LITIGE





Suivant commandement du 3 juillet 2013, publié le 26 août 2013, la société Crédit Lyonnais a fait procéder à la saisie immobilière d'un immeuble, sis à [...] , cadastré section [...] , propriété de Mme Laure F... . Par jugement d'orientation du 1er octobre 2014, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper a fixé la créance du Crédit Lyonnais à la somme de 107.952,14 euros en principal, frais et accessoires arrêtés au 26 octobre 2012, ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi, fixé la date de l'adjudication au 21 janvier 2015 et donné acte au Crédit Immobilier de France du montant de sa créance arrêtée au 20 novembre 2013 à la somme de 69 372,18 euros.





Mme F... ayant interjeté appel de ce jugement, la cour l'a, par arrêt du 12 septembre 2017, infirmé quant au montant de la créance du Crédit Lyonnais, déclaré l'action en recouvrement prescrite pour les mensualités de remboursement du prêt échues antérieurement au 3 juillet 2011, dit l'action non prescrite pour les mensualités postérieures et le capital restant dû au 10 mai 2012 et a confirmé les autres dispositions du jugement d'orientation.





Parallèlement, la procédure a été poursuivie devant le tribunal de Quimper et par jugement du 21 janvier 2015, le juge de l'exécution a reporté la date de la vente forcée de l'immeuble saisi au 3 juin 2015. Puis par deux jugements du 1er juillet 2015, le juge de l'exécution a, d'une part, prorogé pour une durée de deux ans les effets du commandement et, d'autre part, ordonné sine die le report de la vente forcée. Ces deux jugements ont été publiés le 6 juillet 2015 au Service de la publicité foncière de Quimper sous les références 2015D7930 pour la prorogation et 2015D7938 pour le report de la vente.






Par conclusions du 27 novembre 2018, le Crédit Lyonnais a repris les poursuites devant le juge de l'exécution qui, par jugement du 3 juillet 2019, a notamment :


- dit que la créance du Crédit lyonnais s'établit à la somme de 80261,62 euros en principal, frais et accessoires arrêtés au 10 avril 2019,


- fixé la date de l'audience d'adjudication au 16 octobre 2019 à 11heures,


- ordonné la prorogation pour une durée de deux ans des effets du commandement.





Ce jugement a été mentionné le 12 juillet 2019 sous les références 2019D9601 en marge du commandement de payer valant saisie immobilière publié le 26 août 2013 volume 2013 S n°27.





Mme F... a interjeté appel de ce jugement, demandant à la cour de le confirmer en ce qu'il juge irrecevable la demande du Crédit lyonnais tendant à voir ordonner la vente forcée, de le réformer pour le surplus et statuant à nouveau, de :


- déclarer caduc le commandement de payer valant saisie publié le 26 août 2013 au Service chargé de la publicité foncière de Quimper, 1er bureau, sous les références Vol. 2013 S n° 37 ;


- ordonner la mention de la déclaration de caducité en marge de la copie du commandement publié le 26 août 2013 au Service chargé de la publicité foncière de Quimper ;


- subsidiairement de :


constater que la créance du Crédit lyonnais n'est pas ventilée en capital, intérêts et accessoires ;

constater que la créance du Crédit lyonnais n'est pas exigible ;

juger les poursuites irrecevables ;



- en toute hypothèse, condamner le Crédit lyonnais à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.





Le Crédit lyonnais conclut à la confirmation du jugement, au débouté de Mme F... de ses demandes et à sa condamnation au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.





La SAS EOS Crédirec venant aux droits du CIFD, lui-même venant aux droits du CIFB, créancier inscrit, s'en rapporte à justice.





Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par Mme F... le 4 novembre 2019, par le Crédit lyonnais le 29 octobre 2019 et par la SAS EOS Crédirec venant aux droits du CIFB le 31 octobre 2019.





EXPOSÉ DES MOTIFS





Le créancier saisissant soutient que le jugement du 1er juillet 2015 ordonnant le report de la vente, publié le 6 juillet 2015, a eu pour effet de suspendre le délai de validité du commandement jusqu'à la publication de la vente tandis que selon Mme F... , ce jugement a seulement prorogé pour deux ans, soit jusqu'au 6 juillet 2017, les effets du commandement de payer valant saisie immobilière.





Mais le jugement ordonnant le report de la vente a pour effet, non pas de proroger pour une durée de deux ans les effets du commandement de payer valant saisie immobilière, seul le jugement de prorogation du commandement ayant cet effet, mais de suspendre son délai de validité et ce seulement jusqu'à la survenance de l'événement qui a motivé la décision de report.





En l'occurrence, le commandement valant saisie a été publié le 26 août 2013 et ses effets ont été prorogés par jugement du 1er juillet 2015, publié le 6 juillet (n° d'ordre 11). Parallèlement, le délai de deux ans renouvelé à compter du 6 juillet a été immédiatement suspendu par un second jugement rendu le 1er juillet 2015, publié le même jour mais dans un second temps (n° d'ordre 12), ordonnant le report sine die de la date de la vente.





La décision de report de la vente a été prise sur le fondement de l'article R322-19 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution selon lequel 'Lorsque l'appel est formé contre un jugement ordonnant la vente par adjudication, la cour statue au plus tard un mois avant la date prévue pour l'adjudication. A défaut, le juge de l'exécution peut, à la demande du créancier poursuivant, reporter la date de l'audience de vente forcée.' Il s'ensuit que le délai a été suspendu jusqu'au 12 septembre 2017, date de l'arrêt statuant sur l'appel formé à l'encontre du jugement d'orientation, et a ensuite couru pour une durée de deux ans expirant le 12 septembre 2019. En effet, le délai de deux ans courant à compter de la publication, le 6 juillet 2015, du jugement de prorogation du commandement rendu le 1er juillet 2015 avait été immédiatement suspendu le même jour.





La péremption du commandement de payer valant saisie immobilière n'était donc pas encourue à la date du jugement du 3 juillet 2019 ordonnant une nouvelle prorogation pour une durée de deux ans des effets du commandement, ni à la date à laquelle le dit jugement a été publié le 12 juillet 2019. Le moyen n'est donc pas fondé.





Sur l'absence de ventilation de la créance





Aucune des parties n'a cru devoir produire devant la cour, le décompte communiqué par la banque devant le juge de l'exécution de sorte que leurs allégations ne sont pas vérifiables. En toute hypothèse, l'appelante déduit des conséquences erronées de l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution selon lequel le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires. En effet, ce texte signifie seulement que le jugement doit indiquer le montant total de la créance, en ce y compris tous ses accessoires, et non procéder à sa ventilation.





Sur l'absence d'exigibilité de la créance





En application de l'article R.311-5 du code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires, être formée après l'audience d'orientation ['] à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci.





Mme F... admet ne pas avoir contesté, devant le juge de l'orientation, la déchéance du terme notifiée par le créancier, invoquant seulement la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir du créancier saisissant et, subsidiairement, la fin de non-recevoir de prescription de l'action en recouvrement des sommes dues au titre du prêt du 12 juin 2003. Elle tirait au contraire argument, selon les énonciations du jugement d'orientation, du fait que la SA Crédit logement aux droits de laquelle venait la SA Crédit lyonnais, avait prononcé la déchéance du terme le 10 mai 2012, sans contester la régularité de la dite déchéance. L'existence de la déchéance du terme à la date du 10 mai 2012 n'a pas davantage été contestée devant la cour statuant sur appel du jugement d'orientation et cette date est retenue dans le dispositif de l'arrêt comme constituant celle à laquelle le capital restant dû devenait intégralement exigible. Ainsi le jugement ordonnant la vente forcée sur la base d'une créance exigible a acquis force de chose jugée à la date de l'arrêt rendu le 12 septembre 2017. La contestation actuelle de l'exigibilité de la créance, faute de déchéance du terme, est dès lors doublement irrecevable.





A titre superfétatoire, il sera relevé que dans ses conclusions récapitulatives du 25 février 2019 devant le juge de l'exécution (production 4), Mme F... affirmait toujours que 'La déchéance du bénéfice du terme a été prononcée par courrier RAR de Crédit Logement du 10 mai 2012 à l'encontre de Mme F... ' et que le raisonnement dorénavant tenu pour remettre en cause rétroactivement cette déchéance du terme est spécieux. En effet, l'arrêt du 12 septembre 2017 a seulement déclaré prescrite l'action en recouvrement des échéances impayées antérieures au 3 juillet 2011 et non remis en cause la pertinence du paiement de tout ou partie des dites échéances. Or, des énonciations de l'arrêt, il ressort que le premier incident datait du 15 juin 2009 de sorte que les paiements volontaires effectués entre les 3 juillet 2011 et 10 mai 2012 ont été régulièrement imputés sur ces échéances, étant rappelé que la prescription de l'action en recouvrement n'a pas d'incidence sur l'existence de la dette elle-même dont le paiement volontaire ne peut être remis en cause.





Il serait inéquitable de laisser à la charge du créancier saisissant l'intégralité des frais exposés par lui à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, de sorte qu'il lui sera alloué une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS, LA COUR :





Confirme le jugement rendu le 3 juillet 2019 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper en toutes ses dispositions ;





Y ajoutant,





Déclare irrecevable la contestation par Mme F... de la régularité de la déchéance du terme ;





Condamne Mme E... T... F... à payer à la SA Crédit lyonnais une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;





Condamne Mme E... T... F... aux dépens de la procédure d'appel.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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