9 février 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-22.179

Chambre commerciale financière et économique - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2016:CO00145

Titres et sommaires

CAUTIONNEMENT - Caution - Information annuelle - Preuve - Mode

La seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi. Se détermine, dès lors, par des motifs impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par l'article L. 341-6 du code de la consommation, la cour d'appel qui retient que la banque verse aux débats la copie de lettres simples détaillant le montant des engagements de la caution au 31 décembre de l'année précédente en principal, intérêts et accessoires

Texte de la décision

COMM.

CM

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 février 2016


Cassation partielle


Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 145 FS-P+B

Pourvoi n° X 14-22.179




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. [L] [G], domicilié [Adresse 1],

contre l'arrêt rendu le 2 mai 2014 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire rives de Paris, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;


LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 12 janvier 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Robert-Nicoud, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, MM. Zanoto, Guérin, Mme Vallansan, MM. Marcus, Remenieras, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, conseillers, MM. Lecaroz, Arbellot, Mmes Schmidt, Jollec, Barbot, conseillers référendaires, M. Le Mesle, premier avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Robert-Nicoud, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. [G], de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Banque populaire rives de Paris, l'avis de M. Le Mesle, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 14 mars 2007, la société Step-BTP (la société) a signé une convention de compte courant avec la société Banque populaire rives de Paris (la banque) ; que, le 14 septembre 2007, M. [G] (la caution) s'est rendu caution solidaire, dans une certaine limite, de tous les engagements de la société à l'égard de la banque ; que le 12 octobre 2009, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société ; que la banque a assigné en paiement la caution ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la banque une certaine somme alors, selon le moyen, qu'en considérant que l'annulation de l'acte de caution régulièrement souscrit et auquel la banque n'avait pas renoncé ne résultait pas des éléments invoqués par la caution, sans rechercher comme elle y avait été conviée si la caution ne s'était pas engagée comme caution de la société Step-BTP qu'à titre provisoire, dans l'attente de la mise en place d'un dossier d'affacturage qui devait, selon l'accord des parties, se substituer au cautionnement litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, par acte du 14 septembre 2007, la caution s'était rendue caution solidaire de la société à l'égard de la banque pour une durée de dix ans et retenu qu'il ne résultait pas des éléments invoqués par la caution l'annulation de son engagement de caution, régulièrement souscrit et auquel la banque n'a jamais renoncé, la cour d'appel a effectué la recherche prétendument omise ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa deuxième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 341-6 du code de la consommation ;

Attendu que pour condamner la caution à payer une certaine somme à la banque, l'arrêt, après avoir constaté qu'elle prétend ne pas avoir reçu les lettres d'information annuelle qui doivent lui être adressées, retient que la banque justifie avoir satisfait à son obligation en versant aux débats copie des lettres simples des 8 février 2008 et 19 février 2009 détaillant chacune le montant des engagements de la caution au 31 décembre de l'année précédente en principal, intérêts et accessoires ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le texte susvisé, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [G] à payer à la société Banque populaire rives de Paris la somme de 150 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2009, et en ce qu'il statue sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, l'arrêt rendu le 2 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Banque populaire rives de Paris aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. [G] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. [G]

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'avoir condamné M. [L] [G] à payer à la Banque Populaire Rives de Paris la somme de 150.00 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2009 ;

AUX MOTIFS QUE : « M. [L] [G] expose que la caution qu'il a fournie était destinée à garantir pendant une période provisoire les découverts bancaires de la société Step-BTP jusqu'à la mise en place du dossier d'affacturage, que dès la mise en place de ce dossier il a réduit le découvert et demandé à la BPRP l'annulation de sa garantie personnelle par lettre du 16 octobre 2008, ce à quoi la banque n'a pas répondu.

(¿) contrairement à ce que le tribunal a jugé, il ne résulte pas de ces éléments l'annulation de l'engagement de caution, régulièrement souscrit et auquel la banque n'a jamais renoncé ;

(¿) M. [L] [G], poursuivi en qualité de caution est recevable à opposer à la banque les fautes commises lors du fonctionnement du compte courant qui seraient de nature à l'exonérer de son obligation de paiement au titre de son cautionnement ; (¿) il reproche à la banque d'avoir procédé sans instruction de sa part et au mépris de ses protestations à des virements du compte de la société Step-BTP à celui de la société Topp-BTP pour des montants de 387.677 euros et de 99.800 euros en 2009 ; (¿) il précise que sans ces mouvements irréguliers, le compte courant de la société Step-BTP aurait présenté un solde créditeur de 356.130,81 euros ;

Mais (¿) M. [L] [G] ne verse aux débats qu'une télécopie du 26 septembre 2008 dans laquelle il reproche à la banque d'avoir effectué sans son autorisation un virement de 58.000 ¿ du compte de la société Step-BTP sur celui de la société Topp-BTP et lui demande sa régularisation ainsi que sa télécopie du même jour dans laquelle il remercie la banque d'avoir fait le nécessaire ; (¿) il ne justifie d'aucune autre contestation ; (¿) il n'a jamais contesté les relevés de compte des deux sociétés sur lesquels figuraient chacun des virements de la société Step-BTP au profit de la société Topp-BTP, la banque indiquant, sans être contredite, que la première ayant pour activité les travaux de voirie et de terrassement payait ainsi les factures de la seconde qui lui louait du matériel de travaux publics ; (¿) ces virements ayant été implicitement approuvés, M. [L] [G] est mal fondé à soulever maintenant leur irrégularité ;


(¿) en conséquence, M. [L] [G] doit exécuter son engagement de caution et payer à la banque sans la limite de son engagement, la somme de 150.000 ¿ avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2009, date de la mise en demeure » ;

1°) ALORS QUE en considérant que l'annulation de l'acte de caution régulièrement souscrit et auquel la banque n'avait pas renoncé ne résultait pas des éléments invoqués par M. [G], sans rechercher comme elle y avait été conviée si M. [G] ne s'était pas engagé comme caution de la société Step-BTP qu'à titre provisoire, dans l'attente de la mise en place d'un dossier d'affacturage qui devait, selon l'accord des parties, se substituer au cautionnement litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil ;

2°) ALORS QUE l'absence de contestation par le client des relevés d'un compte bancaire n'emporte qu'une présomption d'accord sur les opérations y figurant, laquelle ne prive pas celui-ci de la faculté de les contester ; qu'ainsi en considérant que, M. [G] n'ayant pas contesté les relevés de compte litigieux, il serait mal fondé à soulever maintenant leur irrégularité, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1937 du code civil ;

3°) ALORS QU' un créancier professionnel doit adresser chaque année avant le 31 mars à une caution personne physique une information sur le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente ; qu'en ne vérifiant pas que les lettres simples d'information annuelle dont seule une copie était versée au débat par la banque avaient bien été adressées à M. [G], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 341-6 du code de la consommation.

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