30 mars 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 13-12.122

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2016:CO00311

Texte de la décision

COMM.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 mars 2016




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 311 F-D

Pourvoi n° V 13-12.122




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Laboratoires soins experts, société à responsabilité limitée, anciennement dénommée LDA cosmétiques, en liquidation judiciaire, représentée par M. [U] [G], agissant en qualité de liquidateur judiciaire, domicilié [Adresse 1],

2°/ la société Bio Extend, société à responsabilité limitée,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2012 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige les opposant à la société Allergan Inc., société de droit américain, dont le siège est [Adresse 2] (Etats-Unis),

défenderesse à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 février 2016, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Darbois, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Darbois, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat des sociétés Laboratoires soins experts et Bio Extend et de M. [G], ès qualités, de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de la société Allergan Inc., l'avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à M. [G] de ce qu'il reprend l'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Laboratoires soins experts (la société LSE) ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 novembre 2012), que la société Allergan Inc. (la société Allergan), qui commercialise un produit antirides composé de toxine botulique ayant des effets thérapeutiques et cosmétiques connu sous l'appellation « Botox », est titulaire de la marque verbale française « Botolift » n° 07 3 544 503 déposée le 17 décembre 2007 pour désigner, en classes 3 et 5, notamment les produits de cosmétiques ; qu'elle a obtenu, selon décision du 30 juin 2009 du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, statuant sur son opposition, le rejet partiel de la demande d'enregistrement de la marque verbale française « Botoperfect » pour les produits de cosmétiques, déposée le 25 septembre 2008 par la société Bio Extend ; qu'ayant constaté la poursuite de la commercialisation, par cette dernière et la société LDA cosmétiques, devenue la société LSE, d'un produit antirides sous la dénomination « Botoperfect », dont la promotion faisait référence au terme botox, elle a assigné ces sociétés en contrefaçon de marque et parasitisme ; que les sociétés LSE et Bio Extend ont reconventionnellement demandé l'annulation de la marque « Botolift » pour défaut frauduleux et opposé que la référence au botox constituait une publicité comparative licite ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés LSE et Bio Extend font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en nullité, pour dépôt frauduleux, de la marque française « Botolift » n° 07 3 544 503 alors, selon le moyen :

1°/ qu'en application de l'adage « fraus omnia corrumpit », le dépôt frauduleux d'une marque ne peut conférer au déposant un titre de protection valable ; que la fraude ne suppose pas la justification d'une utilisation publique antérieure de signe litigieux par la partie plaignante, mais la preuve d'intérêts sciemment méconnus par le déposant ; qu'en l'espèce, pour débouter les sociétés LSE et Bio Extend de leur demande tendant à ce que soit constatée la nullité de la marque « Botolift », la cour d'appel a considéré que celles-ci ne justifiaient pas de l'exploitation effective de la dénomination « Botoperfect », de sorte qu'il n'était pas établi que la société Allergan poursuivait le dessein d'entraver cette exploitation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 712-6 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble le principe « fraus omnia corrumpit » ;

2°/ que l'annulation d'un dépôt de marque, pour fraude, ne suppose pas la justification de droits antérieurs de la partie plaignante sur le signe litigieux, mais la preuve de l'existence d'intérêts sciemment méconnus par le déposant ; que la cour d'appel, qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si la société Allergan n'avait pas déposé la marque « Botolift », quand elle venait d'être déchue de la marque « Botox », dans la seule intention de priver ses concurrents de la possibilité d'utiliser le préfixe « boto », a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 712-6 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble le principe « fraus omnia corrumpit » ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève, d'un côté, que les sociétés LSE et Bio Extend ne peuvent affirmer à la fois que le produit qu'elles commercialisent sous la dénomination « Botoperfect » fait l'objet d'une exploitation confidentielle et que la société Allergan poursuit le dessein d'entraver cette exploitation, et, de l'autre, que ces sociétés ne justifient d'une exploitation que par la production d'une fiche d'un centre antipoison datée de février 2004, au demeurant en dehors de la vie des affaires ; qu'en l'état de ces appréciations, faisant ressortir qu'en déposant la marque « Botolift », la société Allergan n'avait pas sciemment méconnu les intérêts de ces sociétés, la cour d'appel a justement écarté le caractère frauduleux de ce dépôt ;

Et attendu, d'autre part, que l'arrêt relève que la société Allergan justifie de la notoriété mondiale du produit antirides connu sous la dénomination « Botox » depuis 1990, qu'elle exploite activement, et que l'intention frauduleuse que les sociétés LSE et Bio Extend prêtent à cette société d'avoir déposé la marque « Botolift » pour contourner la décision de justice ayant prononcé la déchéance de ses droits sur la marque française « Botox » ne repose que sur leurs assertions ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les sociétés LSE et Bio Extend font grief à l'arrêt de les condamner pour contrefaçon par imitation de cette marque alors, selon le moyen, que la cassation à intervenir du chef du premier moyen relatif à la nullité de la marque déposée par la société Allergan entraînera par voie de conséquence celle des dispositions visées au moyen en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le deuxième moyen ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les sociétés LSE et Bio Extend font grief à l'arrêt de les condamner pour actes de concurrence déloyale alors, selon le moyen, que pour considérer que les sociétés LSE et Bio Extend avaient commis des agissements parasitaires, la cour d'appel a jugé que les mentions « l'alternative aux injections de Botox » et « botox like » portées sur les produits desdites sociétés avaient pour but de créer un lien dans l'esprit du consommateur entre ces produits et le produit commercialisé par la société Allergan ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si, tout au contraire, ces mentions ne constituaient pas des termes de comparaison objective entre deux produits de manière à les distinguer l'un de l'autre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé la valeur économique et le succès en France et à l'étranger remporté par l'exploitation, dans ses applications thérapeutiques et cosmétiques, d'un produit composé de toxine botulique, commercialisé par la société Allergan sous la dénomination « Botox » adoptée en 1990, ainsi que l'importance des investissements réalisés par cette société dans la recherche et le développement mondial de ce produit, l'arrêt retient que c'est sans nécessité que les sociétés LSE et Bio Extend, qui commercialisent sous l'appellation « Botoperfect » un produit ne contenant pas de toxine botulique, ont apposé sur ce produit la mention « l'alternative aux injections de Botox » et assuré sa promotion avec le slogan « botox like », cherchant à créer un lien dans l'esprit du consommateur entre leur produit et l'image positive véhiculée par le produit « Botox », afin de tirer parti de la force attractive de ce dernier ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui a fait ressortir le caractère fautif de la comparaison, nonobstant l'absence de droits privatifs en France de la société Allergan sur la dénomination « Botox », a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que les sociétés LSE et Bio Extend font grief à l'arrêt de prononcer des mesures d'interdiction et de retrait alors, selon le moyen :

1°/ qu'en prononçant des mesures d'interdiction et de retrait sans aucunement motiver sa décision à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en prononçant des mesures d'interdiction et de retrait, sans lien avec les fautes retenues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir procédé à l'évaluation des dommages-intérêts alloués en réparation des préjudices résultant respectivement des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire, l'arrêt retient qu'il sera fait droit aux demandes d'interdiction et de retrait sollicitées, lesquelles suffisent à réparer le préjudice subi, sans qu'il y ait lieu d'ordonner les mesures de destruction et de publication également demandées ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui a motivé sa décision, a fait ressortir le lien entre les fautes relevées et les mesures prononcées ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bio Extend et M. [G], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Laboratoires soins experts aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Allergan Inc. la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Bio Extend et M. [G], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Laboratoires soins experts

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les sociétés exposantes de leur demande tendant à ce qu'il soit constaté que la marque française Botolift n° 07 3 544 503 avait été déposée frauduleusement et prononcé sa nullité ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « les sociétés intimées poursuivent la nullité de la marque "Botolift" ; Qu'elles entendent voir juger qu'après le prononcé de la décision de la cour d'appel du 19 janvier 2007 et celle de la Cour de cassation précitée, le dépôt de la marque "Botolift" en décembre 2007 portant sur des produits cosmétiques et pharmaceutiques en classes 3 et 5 avait "visiblement" pour but de contourner cette déchéance en tentant de maintenir un droit privatif sur la "particule Boto" dans certains domaines d'activité et que ce dépôt est "indéniablement" frauduleux en ce qu'il tente de contourner une décision de justice afin de maintenir un monopole sur un signe déchu et d'empêcher ainsi indûment "ses concurrents" de l'utiliser ; Considérant, ceci exposé, qu'il convient d'observer que l'intention frauduleuse qu'elles prêtent à la société Allergan Inc., qui a été déchue de ses droits sur la marque "Botox" au motif qu'elle ne pouvait justifier de son exploitation réelle et sérieuse durant cinq années pour les produits et services considérés, ne reposent que sur leurs assertions ; Qu'il y a lieu, par ailleurs, de relever que nul ne plaide par procureur et que les intimées ne peuvent à la fois affirmer que le produit dénommé "Botoperfect" aurait fait l'objet d'une exploitation confidentielle(§ 1,6ème page de leurs écritures) et qu'en déposant cette marque la société Allergan poursuivait le dessein d'entraver une exploitation dont elles ne peuvent justifier qu'en produisant une fiche d'un centre antipoison de février 2004 - laquelle, au demeurant, ne saurait constituer une preuve d'exploitation dans la vie des affaires ; Qu'avec pertinence, enfin, la société Allergan Inc. précise que, dans le cadre de la présente procédure, elle ne se prévaut d'aucun droit de marque sur la dénomination "Botox" mais entend rappeler la notoriété mondiale du produit antirides qu'elle exploite activement ; Que le jugement qui a rejeté cette demande mérite confirmation » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Les sociétés Bio Extend et LDA Cosmétiques, sans en tirer de conséquence juridique, soutiennent le caractère frauduleux du dépôt de cette marque. Un dépôt de marque est frauduleux lorsqu'il est effectué dans l'intention de priver autrui d'un signe nécessaire à son activité. En l'espèce, les sociétés défenderesses n'établissent pas en quoi le signe déposé les priverait d'un signe nécessaire à leur activité et ce moyen sera rejeté » ;

ALORS 1°/ QU' : en application de l'adage « fraus omnia corrumpit », le dépôt frauduleux d'une marque ne peut conférer au déposant un titre de protection valable ; que la fraude ne suppose pas la justification d'une utilisation publique antérieure de signe litigieux par la partie plaignante, mais la preuve d'intérêts sciemment méconnus par le déposant ; qu'en l'espèce, pour débouter les sociétés exposantes de leur demande tendant à ce que soit constatée la nullité de la marque « botolift », la cour d'appel a considéré que celles-ci ne justifiaient pas de l'exploitation effective de la dénomination « botoperfect » de sorte qu'il n'était pas établi que la société Allergan poursuivait le dessein d'entraver cette exploitation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 712-6 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble le principe « fraus omnia corrumpit » ;

ALORS 2°/ QUE : l'annulation d'un dépôt de marque, pour fraude, ne suppose pas la justification de droits antérieurs de la partie plaignante sur le signe litigieux, mais la preuve de l'existence d'intérêts sciemment méconnus par le déposant ; que la cour d'appel, qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si la société Allergan n'avait pas déposé la marque « botolift », quand elle venait d'être déchue de la marque « botox », dans la seule intention de priver ses concurrents de la possibilité d'utiliser le préfixe « boto », a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 712-6 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble le principe « fraus omnia corrumpit ».

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les sociétés exposantes de leur demande tendant à ce qu'il soit constaté que la marque française Botolift n° 07 3 544 503 avait été déposée frauduleusement et prononcé sa nullitédit qu'en détenant, fabriquant, exportant, important, offrant à la vente, distribuant et commercialisant des produits cosmétiques sous la dénomination « Botoperfect », les sociétés à responsabilité limitée Bio Extend et LDA Cosmétiques (nouvellement dénommée Société Laboratoires Soins Experts) ont commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque « Botolift » n° 07 3 544 503, déposée le 17 décembre 2007 par la société Allergan et condamné les sociétés exposantes à verser à la société Allergan la somme de 15.000 €, - fait interdiction aux sociétés exposantes d'utiliser la dénomination « Botoperfect », sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, pour tous produits identiques ou similaires à ceux visés au libellé de la marque française « Botolift » n° 07 3 544 503, et ordonné le retrait immédiat de tous produits emballages, notices et publicités litigieux constitutifs de contrefaçon de marque ;

ALORS QUE : la cassation à intervenir du chef du premier moyen relatif à la nullité de la marque déposée par la société Allergan entraînera par voie de conséquence celle des dispositions visées au présent moyen en application de l'article 625 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'en commercialisant et en faisant la promotion du produit « Botoperfect » en faisant référence de manière explicite ou implicite au produit « Botox », ceci, notamment sur le produit en tant que tel et sur le site www.lda-cosmetiques.com en s'y comparant de manière fautive et trompeuse dans le but d'assurer la promotion de leur produit « Botoperfect », les sociétés Bio Extend et LDA Cosmétiques (nouvellement dénommée Société Laboratoires Soins Experts) ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Allergan et condamné les sociétés exposantes à verser à la société Allergan la somme de 20.000 € ;

AUX MOTIFS QUE : « Considérant que l'appelante poursuit, par ailleurs, l'infirmation du jugement à ce titre et relève une série d'erreurs d'appréciation qu'aurait commises le tribunal qui a d'abord considéré qu'en raison de son usage courant, il n'était pas fautif de faire référence au produit Botox, la presse évoquant elle-même "l'effet botox", qui a, en outre, estimé que le fait que l'application cosmétique du "botox" soit commercialisée en France sous la marque "Vistabel" suffit à justifier la référence indue par ses concurrents à son produit "Botox" et qui a analysé les mentions figurant sur le produit "Botoperfect" comme une publicité comparative licite ; Qu'exposant que le Botox, "produit à succès", fait l'objet d'un suivisme dégénérant en abus et, par conséquent, en parasitisme, la société Allergan Inc. incrimine d'abord la mention figurant sur le produit litigieux, à savoir : "L'alternative aux injections de Botox ! " ; qu'elle considère comme fautif le profit que tirent indûment les intimées de la notoriété du produit "Botox" et de l'image de marque de la société Allergan Inc., laboratoire mondialement connu, sur le site puisqu'y figure la mention "Botox Like" ; que cette mention, ajoutée au fait que la société LDA Cosmétiques se présente comme un "Laboratoire", abuse, selon elle, le consommateur et que ces pratiques commerciales trompeuses relèvent des dispositions de l'article L. 121-8 du code de la consommation ; Qu'en réplique, les intimées qualifient de surabondante l'argumentation de l'appelante en évoquant à nouveau la déchéance de ses droits sur le produit "Botox" prononcée par la Cour de cassation en 2009 et sollicitent la confirmation du jugement dont elles s'approprient les motifs ; Considérant, ceci exposé, que les pièces versées aux débats et les explications non contestées de l'appelante établissent que la société Allergan Inc. commercialise un composé de la toxine botulique de type A, aux applications à la fois thérapeutiques et cosmétiques, qui a fait l'objet, en France, de deux autorisations de mise sur le marché distinctes ; que la commercialisation de ce produit a été autorisée pour son application thérapeutique sous la dénomination de fantaisie de "Botox" (adoptée en 1990) et, pour son application cosmétique, sous la dénomination de "Vistabel", devenue, comme elle l'explique, résiduelle du fait du large succès remporté au delà des frontières par cette seconde application sous le nom de "Botox" ; que les pièces produites démontrent également la valeur économique et le rayonnement du produit "Botox", la société Allergan Inc. ayant notamment investi plus de 1,3 milliards de dollars dans la recherche et le développement de ce produit et affichant des ventes mondiales de ce produit en progression constante, de 90,1 millions US $ en 1997 à 1.419,4 millions US $ en 2010 (pièce 38, § 33 et 41) ; Que les moyens tirés de la dégénérescence de ce terme "Botox" ne sauraient être valablement opposés à la société Allergan Inc., compte tenu de la teneur du présent arrêt ; que le fait que la société Allergan Inc. ne dispose pas de droits privatifs en France sur ce nom ne saurait faire obstacle à une action fondée sur les dispositions de l'article 1382 du code civil tendant à voir sanctionner des agissements présentés comme des pratiques contrevenant aux usages loyaux et honnêtes du commerce ; Qu'à cet égard, les intimées qui commercialisent un produit ne contenant pas de toxine botulique et qui ont, par conséquent, sans nécessité apposé sur ce produit la mention suivante : "L'alternative aux injections de Botox !" (qui plus est en dotant le terme "Botox" d'une majuscule, ce qui tend à démontrer qu'elles distinguent ce vocable d'un simple nom commun) ou ont assuré leur communication avec le slogan "Like Botox" ont implicitement mais nécessairement cherché à créer un lien dans l'esprit du consommateur entre l'image positive véhiculée par le produit "Botox" (qui, par sa formule et son dosage se distingue de produits concurrents comme de Dysport d'Ipsen ou le Xeomin de Merz) et le produit commercialisé sous le nom de "Botoperfect" afin de tirer profit de la force d'attraction du produit commercialisé par la société Allergan Inc. ; Qu'il peut être considéré que le détournement de clientèle résultant de ces agissements se trouve aggravé par l'ajout de mentions sécurisantes ou rassurantes telles les indications "Laboratoire LDA Cosmétiques" ou "alternatives aux injections" que rien n'imposait et que la société Allergan Inc., soulignant à juste titre qu'elles ne reposent sur aucune réalité, associe à des manoeuvres trompeuses ; Qu'en outre, le fait de laisser entendre que le produit commercialisé sous le nom de "Botoperfect" a des effets comparables à ceux du produit cosmétique "Botox" a pour effet de le banaliser et de le déprécier et porte, de ce fait, atteinte à sa valeur économique ; Qu'il suit que la société Allergan Inc. doit être déclarée fondée en sa demande à ce titre et que le jugement doit être infirmé sur ce point » ;

ALORS QUE : pour considérer que les sociétés exposantes avaient commis des agissements parasitaires, la cour d'appel a jugé que les mentions « l'alternative aux injections de Botox » et « botox like » portées sur les produits desdites sociétés exposantes avaient pour but de créer un lien dans l'esprit du consommateur entre ces produits et le produit commercialisé par la société Allergan ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si, tout au contraire, ces mentions ne constituaient pas des termes de comparaison objective entre deux produits de manière à les distinguer l'un de l'autre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait interdiction aux sociétés Bio Extend et LDA Cosmétiques (nouvellement dénommée Société Laboratoires Soins Experts) de faire référence de manière implicite ou explicite au produit « Botox » sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, à l'exception des cas prévus par la loi, pour tout produit pharmaceutique ou cosmétique, ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée, huit jours après la signification du présent arrêt, étant précisé que l'interdiction s'étend à tous les produits litigieux qui se trouveraient déjà stockés chez des distributeurs ou clients qu'il appartiendra aux sociétés Bio Extend et LDA Cosmétiques (nouvellement dénommée Laboratoires Soins experts) d'informer, et ordonné le retrait immédiat de tous produits emballages, notices et publicités litigieux constitutifs de contrefaçon de marque ou d'actes déloyaux et parasitaires aux frais des sociétés Bio Extend et LDA Cosmétiques (nouvellement dénommée Laboratoires Soins experts) ;

AUX MOTIFS QUE : « Considérant que la société Allergan Inc. poursuit la réparation de son préjudice au titre de la contrefaçon en l'évaluant à la somme de 100.000 €, précisant, toutefois, qu'elle n'a pu avoir accès aux comptes des intimées, malgré la saisie-contrefaçon qu'elle était autorisée à pratiquer, du fait de leur brusque déménagement ; Que les intimées, qui expliquent que leur déménagement est sans lien avec la présente procédure, juge cette demande disproportionnée en regard du chiffre d'affaires réalisé du fait de la vente du produit "Botoperfect" en 2009 et 2010 (soit environ 4.000 €, ainsi que cela résulte de leurs pièces 4 et 5), qu'elles ajoutent que le produit litigieux n'est plus commercialisé et qu'un constat d'huissier établi le 17 janvier 2011 (pièce 7) atteste de l'absence de toute référence au Botox ou au Botoperfect sur le site de la société LDA ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments qui ne permettent pas de connaître précisément la masse contrefaisante, le préjudice subi qui doit tenir compte du gain réalisé, des bénéfices perdus mais aussi à l'avilissement résultant des faits de contrefaçon retenus, sera réparé par l'allocation d'une somme de 15.000 € ; Considérant que pour solliciter la somme de 100.000 € en réparation du préjudice causé par les faits de concurrence déloyale, la société Allergan Inc. se prévaut d'une double atteinte tenant à la fois au profit indu tiré de la notoriété du "Botox" et à sa présentation sous un jour défavorable ; Que si les intimées tentent vainement de jeter le discrédit sur la société Allergan Inc. en produisant deux articles de presse isolés étrangers à la présente affaire, il n'en demeure pas moins que les éléments soumis à l'appréciation de la cour relatifs à la durée et à l'intensité des pratiques commerciales contraires à la probité incriminées ne permettent pas d'évaluer le préjudice subi au montant de la somme réclamée ; que les sociétés intimées seront, en conséquence, condamnées in solidum au paiement de la somme de 20.000 € à ce titre ; Qu'il sera fait droit, par ailleurs, aux demandes d'interdiction et de retrait sollicitées selon les modalités précisées au dispositif » ;

ALORS 1/ QU' : en prononçant des mesures d'interdiction et de retrait sans aucunement motiver sa décision à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS 2/ QU' : en toute hypothèse, en prononçant des mesures d'interdiction et de retrait, sans lien avec les fautes retenues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.

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