7 juillet 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-13.763

Chambre sociale - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2016:SO10627

Texte de la décision

SOC.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 juillet 2016




Rejet non spécialement motivé


M. MALLARD, conseiller le plus ancien faisant fonction de président



Décision n° 10627 F

Pourvoi n° V 15-13.763







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme Q... E..., domiciliée [...] ,

contre l'arrêt rendu le 19 décembre 2014 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le litige l'opposant à la société [...] , société anonyme, dont le siège est [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;



LA COUR, en l'audience publique du 7 juin 2016, où étaient présents : M. Mallard, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Brinet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmeitzky-Lhuillery, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme E..., de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la société Cabinet d'expertise comptable [...] ;

Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme E... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille seize.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme E...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Q... E... de ses demandes en paiement de dommages intérêts réparant le préjudice découlant de la modification de son contrat de travail imposée par la société [...] et de la perte de rémunération s'en étant suivie ;

AUX MOTIFS QU'il est constant que depuis son arrivée au sein de la société [...] en 1998, Q... E... a vu son contrat faire l'objet de plusieurs avenants et que le dernier en date était donc un avenant du 8 février 2007 aux termes duquel elle continuait d'exercer, comme depuis un précédent avenant, intervenu en 2004, les fonctions de chargé de clientèle senior au bureau de Dunkerque, le principal élément nouveau figurant dans cet avenant consistant en ce que sa rémunération était désormais exclusivement constituée d'un salaire mensuel fixe, étant précisé que cette rémunération faisait l'objet d'une convention de forfait en jours en application d'un accord qui était intervenu en 1999 au sein de la société [...] relativement à l'aménagement et la réduction du temps de travail ; que Q... E..., qui ne conteste avoir signé cet avenant prétend, en substance, que celuici lui 'aurait été en réalité imposé par son employeur et que la société [...] aurait ainsi procédé à une modification unilatérale de son contrat de travail, lui imposant ainsi, d'une part un changement de ses attributions puisqu'elle aurait été ainsi dépossédée de son portefeuille de clients et rétrogradée à la qualification d'assistante comptable afin que sa rémunération, puisse être désormais uniquement constituée d'un salaire fixe, et d'autre part un changement substantiel dans les conditions de sa rémunération ; qu'elle sollicite donc, en réparation de la totalité du préjudice qu'elle estime avoir ainsi subi, une indemnité globale de 81.513 euros destinée à réparer : -le préjudice ayant directement découlé, selon elle, de la modification unilatérale de son contrat, - le manque-à-gagner qu'elle soutient avoir subi et consistant, semble-t-il (bien que ses explications sur ce manque-à-gagner salarial soient quelque peu confuses), d'une part dans la différence entre les rémunérations qu'elle aurait dû percevoir si cet avenant ne lui avait pas été imposé et les rémunérations qu'elle a perçues consécutivement à ce même avenant, et d'autre part dans le manque-à-gagner résultant, selon elle, de ce que, puisqu'on l'avait de fait rétrogradée aux fonctions d'assistant comptable, il lui avait été ainsi illicitement imposé un forfait annuel d'heures supplémentaires non rémunérées ; mais que force est de constater, là encore, que Q... E... n'a en définitive apporté, au soutien des longues explications qu'elle a présentées sur ce point dans ses écritures susvisées, aucun véritable élément de preuve ni même commencement de preuve tendant à montrer que bien qu'elle ait effectivement signé l'avenant dont il s'agit, celui-ci lui aurait été imposé par son employeur et que son consentement à cet avenant aurait été vicié d'une façon quelconque, et qu'il n'apparaît pas davantage établi que, contrairement aux mentions figurant très clairement dans l'avenant dont il s'agit qui l'avait maintenue dans ses fonctions de chargée de clientèle senior, elle aurait été en réalité rétrogradée aux fonctions d'assistante comptable ; qu'ainsi, il apparaît que les demandes d'indemnisation formées par Q... E... tant au titre du préjudice ayant directement découlé de la modification de son contrat de travail qu'au titre de son « manque à gagner salarial » ne peuvent qu'être écartées ;

ALORS D'UNE PART QUE constitue une modification du contrat de travail le retrait à un salarié des responsabilités essentielles à ses fonctions aboutissant à un déclassement même si le salarié conserve son titre et sa qualification contractuelle ; que la Cour d'appel qui se borne à énoncer, pour considérer que la société [...] n'avait pas imposé de modification de son contrat de travail à Madame E..., qu'il n'est pas établi que contrairement aux mentions de l'avenant signé le 2007 la maintenant dans ses fonctions de chargée de clientèle senior, la salariée aurait été en réalité rétrogradée aux fonctions d'assistante comptable sans rechercher, comme elle y était invitée, si Madame E... ne s'était pas vu retirer au mois d'octobre 2006 la gestion de son portefeuille clients, qui constituait une attribution essentielle de ses fonctions de chargée de clientèle senior, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QUE la salariée faisait valoir que la société [...] avait elle-même reconnu dans plusieurs documents versés aux débats, dont le compte rendu de l'enquête interne menée le 12 janvier 2011 établi par le Directeur des ressources humaines et le rapport d'entretien annuel de la salariée pour l'année 2007, qu'en contrepartie d'une rémunération au fixe, la gestion des portefeuille clients avait été retirée aux chargés de clientèle senior pour être reprise par le directeur manager, ce dernier assumant à leur place les missions afférentes de facturation et recouvrement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des conclusions de la salariée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS ENFIN QUE l'accord du salarié à une modification de son contrat de travail doit être libre et éclairé ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun élément de preuve n'est apporté tendant à démontrer que l'avenant à son contrat de travail du 8 février 2007 stipulant que sa rémunération serait désormais constituée d'un salaire mensuel fixe lui aurait été imposé par son employeur et que son consentement aurait été vicié sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la suppression de ses attributions de gestionnaire de portefeuille clients avait fait l'objet d'une proposition soumise à son accord et si la salariée n'avait pas été privée de l'information nécessaire lui permettant d'apprécier les conséquences du changement de système de rémunération que la société lui demandait d'accepter, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame E... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral

AUX MOTIFS QU'il est certes exact qu'un salarié qui a fait l'objet d'un licenciement, abusif peut prétendre à l'allocation de dommages-intérêts particuliers en réparation d'un préjudice moral mais à la condition qu'il apporte la preuve de ce que, à ce titre, il a subi avec certitude un préjudice réellement distinct de celui que l'indemnité de l'article L. 1235 - 3 du code du travail a pour objet de réparer ; qu'en l'espèce, Q... E..., à l'appui de sa demande de dommagesintérêts, pour un montant de 60 000 €, invoque, en substance, un ensemble de comportements de la société [...] durant ses périodes d'activité professionnelle, mais aussi postérieurement à la rupture de son contrat de travail, comportements dont elle expose très longuement le détail dans ses écritures (page 80 et 81 de ses conclusions) et dont elle prétend qu'ils ont porté atteinte à son honneur et à sa réputation professionnelle, lui causant ainsi des difficultés dans le cadre de ses recherches en vue de retrouver un travail de comptable, en même temps qu'ils auraient entraîné pour elle un choc moral et porté ainsi atteinte à son état de santé, ce d'autant qu'elle avait été amenée à subir deux interventions chirurgicales dans le courant de l'année 2010 ; mais que force est de constater que l'appelante, au soutien de ces prétentions très longuement exposées, ne fournit en réalité aucune explication précise ni surtout aucune pièce justificative particulière apportant la preuve de ce que, à raison des faits et comportements de son employeur qu'elle invoque, et à supposer ceux-ci établis, elle a subi un préjudice véritablement particulier distinct du préjudice moral ou des difficultés habituelles subis par tout salarié en conséquence d'un licenciement abusif ; que cette demande doit donc être écartée ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut procéder par voie de considérations générales et abstraites et doit apprécier concrètement les faits nécessaires à la solution du litige ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que la salariée n'apportait pas la preuve de ce qu'à raison des comportements de son employeur qu'elle invoque elle a subi un préjudice véritablement particulier distinct du préjudice moral ou des difficultés habituelles subis par tout salarié en conséquence d'un licenciement abusif, sans procéder à aucune analyse des fautes reprochées par Madame E... à la société [...], ni des conséquences en résultant pour elle, la Cour d'appel qui s'est ainsi déterminée par voie de considérations générales et abstraites, a privé sa décision de tout motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE tout manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité travailleurs occasionne au salarié un préjudice dont celui-ci est fondé à demander réparation ; qu'en affirmant, pour débouter Madame E... de sa demande indemnitaire, que cette dernière n'apporte pas la preuve qu'elle avait subi un préjudice distinct de celui découlant d'un licenciement abusif sans rechercher, comme elle y était invitée, si les propos agressifs et désobligeants tenus par les dirigeants de l'entreprise en réaction à la dénonciation par Madame E... des faits de harcèlement dont elle était victime, puis les conditions dans lesquelles s'était déroulée l'enquête interne menée par la société [...], plus d'un mois seulement après la dénonciation des faits, de façon partiale en limitant l'audition des témoins à des personnes membres ou proches de la direction et en refusant à Madame E... la possibilité d'être assistée par un salarié de son choix et d'avoir connaissance du contenu des autres témoignages et, enfin, les jugements péjoratifs et humiliants portés sur sa personne dans le rapport de l'enquête interne ayant conclu à l'absence d'agissements de harcèlement moral commis à son encontre, n'étaient pas de nature à causer à la salariée un préjudice distinct de celui né de la rupture postérieure de son contrat de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1152-1 et L.1222-1 du Code du travail, ensemble l'article 1147 du Code civil ;

ALORS ENFIN QUE lorsque le salarié qui s'estime victime d'agissements de harcèlement moral établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; qu'outre le retrait sans justification de la gestion de son portefeuille clients en octobre 2006, Madame E... invoquait le fait que depuis son arrivée dans l'établissement de DUNKERQUE au mois de mai 2009, le nouveau manager avait alternativement cherché à lui imposer des tâches de planification du travail de l'équipe qui relevaient de ses propres attributions et exigé d'elle de manière répétée l'accomplissement des tâches subalternes de manutentionnaire des bureaux, communiquant ses instructions essentiellement par mail en refusant le dialogue avec l'équipe ou élevant la voix pour donner ses ordres, que pour l'inciter à réaliser le travail de planification qui lui incombait en sa qualité de manager, il lui avait refusé au mois d'août et de novembre 2010 l'autorisation de s'absenter pour passer des examens médicaux, qu'il était allé le 10 décembre 2010 jusqu'à l'agresser verbalement en hurlant qu'il la considérerait « comme démissionnaire si elle franchissait le seuil de son bureau » ; qu'en ne recherchant pas si n'était pas ainsi caractérisé un ensemble de faits faisant présumer l'existence d'un harcèlement moral et ayant entraîné pour la salariée un préjudice nécessairement distinct de celui résultant de la perte de son emploi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à la somme de 5000 euros le montant de l'indemnisation due à Madame E... en réparation du préjudice subi par elle en conséquence de la mise en oeuvre de la clause illicite de non concurrence figurant dans son contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de Q... E..., dans sa dernière version issue de l'avenant en date du 8 février 2007, comportait un article 5 intitulé « obligations de loyauté et respect de la clientèle » et qui comportait les dispositions suivantes : « Les clients pour lesquels le salarié est appelé à travailler, même à titre occasionnel sont les clients de la société. Il en est ainsi même pour les missions qui lui seraient confiées à titre personnel (expertises, arbitrages, Commissariats, enseignement, etc.) et dont les honoraires correspondants doivent être encaissés par la société. Ses fonctions lui font un devoir de ne pas détourner ou tenter de détourner les clients de la société à son profit ou au profita, 'un tiers au cours de son contrat de travail. Dans les trois années suivant la rupture des relations contractuelles, le salarié ne peut intervenir directement ou indirectement ou par personne interposée (y compris son nouvel employeur) auprès de la clientèle de la société. En cas de cessation de sa collaboration, à quelque époque et pour quelque cause que ce soit, le salarié s'interdit : …3- d'exercer toute sollicitation directe ou indirecte, sur un client de la société, notamment ceux avec lesquels il aura été en contact au cours de son contrat de travail, visant à reprendre ce client à son profit ou au profit d'un tiers » : qu'une telle clause, qui est ainsi libellée en termes très larges et imprécis, puisqu'elle avait en effet pour objet d'interdire au salarié, postérieurement à la rupture de son contrat de travail, durant une certaine période (au demeurant assez longue) et sans limitation d'espace, d'entrer en relations, quelles qu'en soient les modalités, non seulement avec les clients de la société avec lesquels le salarié avait été en contact au cours de son contrat de travail mais également avec tout client de cette même société [...] société dont il convient de souligner qu'elle indique elle-même, dans ses écritures susvisées, qu'elle est une société importante exerçant son activité sur tout le territoire national - aboutissait en fait à empêcher très largement le salarié, une fois son contrat rompu, d'exercer une activité conforme à sa qualification et à son expérience professionnelle, de sorte qu'il s'agissait bien d'une clause de non-concurrence ; qu'or il apparaît, outre le fait, ci-dessus souligné, que cette clause ne comportait aucune limitation géographique, qu' aucune contrepartie financière n' était prévue à cette obligation de non-concurrence, de sorte que cette clause doit être considérée comme nulle ; qu'au terme de la lettre de licenciement dont les principaux éléments ont été ci-dessus reproduits, la société [...] a indiqué à Q... E... (page 4) : « Nous tenons à vous rappeler, que vous êtes tenue au respect de la clientèle de [...] tant au titre de votre contrat de travail (cf. Conditions générales, article « respect de la clientèle » de votre, contrat de travail), que des dispositions conventionnelles en la matière (cf. avenant 27 ou article 6.3 de la convention collective des cabinets d'expertise comptable et de commissariat aux comptes), Tout détournement de la clientèle de [...] tel gué défini dans voire contrat de travail pourra déclencher l'action judiciaire de [...] à votre encontre.., » ; qu'ainsi, la société [...] a clairement entendu que, postérieurement à la rupture du contrat de travail de Q... E..., il soit fait intégralement application des dispositions de l'article 5 de son contrat, dispositions dont il vient d'être montré qu'elles étaient illicites ; qu'en conséquence, et peu important que, un peu plus loin dans la lettre de licenciement la société [...] ait indiqué à Q... E... qu'il y avait lieu de «considérer comme nulle toute obligation de non-concurrence résultant de votre contrat de travail » - indication qui apparaît en effet, au résultat de tout ce qui précède, comme étant en réalité dépourvue de tout effet - que Q... E..., du fait de la volonté de son employeur de mettre en oeuvre ces dispositions de l'article 5 de son contrat, a incontestablement et nécessairement subi, un préjudice qui apparaît clairement distinct du préjudice habituellement subi par un salarié en conséquence d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul, et que ce préjudice doit faire l'objet d'une réparation particulière, de sorte que la demande de dommages-intérêts formulée à ce titre par Q... E... apparaît fondée en son principe; qu'au regard de l'ensemble des éléments d'appréciation qui ont été fournis à la cour, il apparaît qu'une indemnité de 5 000 € sera de nature à réparer justement ce préjudice ;

ALORS QUE le respect par un salarié d'une clause de non concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il est fondé à obtenir la réparation intégrale ; que Madame E... faisait valoir dans ses écritures d'appel que son préjudice résultant de la mise en oeuvre imposée par la société [...] de la clause de non concurrence nulle pour défaut de contrepartie financière s'évaluait à un montant au moins égal aux sommes dont la convention collective nationale des experts-comptables prévoit le versement à titre d'indemnisation de l'obligation de non concurrence stipulée par un contrat de travail ; qu'en se bornant à énoncer qu'une indemnité de
5000 euros sera de nature à réparer le préjudice subi par la salariée sans répondre à ce chef déterminant des conclusions de cette dernière, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame E... de ses demandes en réparation du préjudice découlant pour elle de la privation du bénéfice de tickets restaurant ;

AUX MOTIFS QUE s'agissant de la réclamation de Q... E... fondée sur le fait que celle-ci aurait été indûment privée du bénéfice de tickets restaurant, il y a lieu simplement d'observer que selon un accord collectif intervenu au sein de la société [...], il avait été décidé que les chargés de clientèle senior ne pourraient bénéficier d'un tel avantage et que cette distinction ainsi opérée par cette disposition conventionnelle apparaît justifiée, ainsi que le souligne à juste titre la société [...] dans ses écritures, par une raison objective consistant en ce que les chargés de clientèle senior qui, contrairement aux catégories non-cadres, bénéficient d'une autonomie dans l'organisation de leur travail et se voient d'ailleurs appliquer une convention de forfait-jour, peuvent se voir attribuer le cas échéant des notes de frais comprenant notamment des frais de déjeuner, ce dont ne peuvent bénéficier les catégories non-cadres ; que cette réclamation n'est donc pas fondée et doit donc être écartée ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE l'accord d'entreprise prévoit l'attribution de tickets restaurants pour le secrétariat, les fonctions supports, le personnel Facilio et les opérateurs comptables ; que Madame E... ne bénéficie pas, en sa qualité de chargée de clientèle senior, de cet avantage ; que le TGI de Paris a récemment applique le principe de la Cour de cassation le 8 juin dernier selon lequel une convention collective peut instituer une différence de traitement entre les catégories professionnelles dès lors que celle-ci a pour objet de «p ? (Sic) ; qu'il peut ainsi être justifié une différence de traitement prévue par une convention collective entre les cadres et la catégorie des employés, techniciens et agents de maîtrise ; qu'en conséquence, Madame E... est déboutée de cette demande ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, qui reproche à l'arrêt d'avoir débouté Madame E... de sa demande de dommages-intérêts réparant le préjudice qu'avait entraîné pour elle la rétrogradation de ses fonctions de chargée de clientèle senior impliquée par le retrait de la gestion de son portefeuille clients ainsi que de toutes les attributions de cette fonction de cadre, entraînera la cassation de l'arrêt en ce qu'il a aussi débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts, fondée sur le préjudice causé par la privation des tickets restaurants, au motif qu'elle ne devait pas bénéficier de cet avantage en sa qualité de chargée de clientèle senior, ce par application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART, et en tout état de cause, QUE la salariée faisait valoir dans ses écritures d'appel que son activité d'assistante comptable depuis l'année 2007 ne lui permettait pas de disposer de notes de frais de déjeuner et qu'aucun élément de preuve établissant que des frais de repas lui auraient été remboursés n'était produit par la société [...] ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des conclusions de l'exposante, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame E... de ses demandes en paiement d'un complément de rémunération pour des prestations fournies non rémunérées ;

AUX MOTIFS QUE de même, Q... E... sollicite l'allocation des sommes complémentaires de 12 000 euros et 60 000 euros en invoquant :

- d'une part le fait que la société [...] avait régulièrement exigé d'elle la réalisation de tâches et d'obligations qui incombaient en réalité au directeur manager du bureau de Dunkerque, de sorte qu'ayant été ainsi placée dans une situation identique à celui-ci et ayant d'ailleurs les mêmes compétences que lui pour occuper un tel poste, il lui est dû à ce titre un complément de rémunération ;

- d'autre part, des tâches et missions non prévues à son contrat de travail, et en particulier des missions de formation, qui lui avaient été confiées et qui n'avaient jamais été rémunérées ;

Mais que, là encore, la cour ne peut que constater qu'il n'est pas produit, au soutien de cette réclamation, de véritables éléments justificatifs, et qu'il n'est en particulier apporté aucun élément justificatif précis relativement aux missions ainsi invoquées par l'appelante qui démontrerait que, de par leur nature même et par leur fréquence, il s'agissait de missions excédant de façon caractérisée les tâches qui avaient été contractuellement confiées à Q... E..., étant rappelé que celle-ci était donc chargée de clientèle senior, avec le statut de cadre, disposant d'une réelle autonomie dans son travail et appelée, ainsi qu'en attestent les documents communiqués aux débats par la société [...] relativement à la définition des types de postes dans l'entreprise (pièce 4 du dossier de l'intimée), à exercer son activité, auprès en particulier des clients dont elle avait la charge, selon des modalités d'intervention très diversifiées ; que ces demandes doivent donc être, elles aussi, écartées ;


ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, qui reproche à l'arrêt d'avoir débouté Madame E... de sa demande de dommages-intérêts réparant le préjudice qu'avait entraîné pour elle la rétrogradation de ses fonctions de chargée de clientèle senior impliquée par le retrait de la gestion de son portefeuille clients et de ses attributions de cadre entrainera la cassation de l'arrêt en ce qu'il a aussi débouté la salariée de sa demande en paiement d'un complément de rémunération pour avoir
effectué des tâches non prévues par son contrat de travail, au motif qu'il n'était pas établi que les missions en question excédaient de façon caractérisée celles d'une chargée de clientèle senior, ce par application de l'article 624 du Code de procédure civile.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé à la somme de 1000 euros le montant de l'indemnisation due à Madame E... au titre de l'illicéité de la clause de son contrat de travail lui ayant imposé de fixé son domicile en un lieu proche de son lieu de travail ;

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de Q... E... comportait une clause précisant que sa résidence professionnelle serait fixée à Dunkerque et qu'il était ajouté : « la résidence personnelle du salarié doit être proche de son lieu de travail » ; qu'une telle clause portait ainsi atteinte à la liberté dont dispose toute personne de choisir son domicile et qu'il y a lieu de relever que la société [...] qui, dans ses écritures, n'a d'ailleurs pas présenté d'explications particulières sur ce point, n'a pas fourni d'éléments tenant en particulier à la nature de la tâche qui allait être celle de Q... E... et qui serait de nature à justifier cette restriction qui avait été ainsi apportée à la liberté de cette salariée ; que Q... E... est donc fondée à se prévaloir du caractère illicite de cette clause ; que toutefois, force est de constater, tout d'abord qu'il n'est fait état d'aucun élément et notamment d'aucune correspondance révélant qu'en application de cette clause la société [...] aurait à un moment quelconque exigé la mise en oeuvre de cette clause et contraint Q... E... à déménager pour venir habiter dans l'agglomération dunkerquoise ; qu'en outre et surtout, il apparaît, à la lecture des explications fournies par Q... E... dans ses écritures, que la demande d'indemnisation que celle-ci formule à ce titre consiste tout simplement à réclamer le remboursement de la totalité des frais de logement qu'elle a dû engager pour venir habiter à Dunkerque, alors que l'on doit considérer que même si elle était restée dans l'agglomération lilloise où elle habitait jusqu'alors, elle aurait dû, là aussi, faire face à des frais de logement, et qu'elle ne démontre par ailleurs nullement que le fait de devoir se loger dans l'agglomération dunkerquoise a, d'une façon générale, entraîné pour elle des frais et dépenses de toute nature plus importants que si elle était restée à Lille ; qu'ainsi, si la demande d'indemnisation présentée par Q... E... apparaît fondée en son principe, il apparaît toutefois, eu égard à l'ensemble des éléments d'appréciation communiqués à la cour, que cette indemnisation sera limitée à la somme de 10OO € ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'après avoir relevé le caractère illicite de la clause du contrat de travail de Madame E... contraignant celle-ci à fixer sa résidence personnelle près de son lieu de travail et constaté que la société [...] n'avait pas conclu sur la demande de dommages intérêts formée à ce titre par la salariée, la Cour d'appel qui, pour fixer à la somme de 1000 euros seulement l'indemnisation due à cette dernière, a retenu qu'il n'était pas établi que la société [...] aurait contraint Madame E... à déménager à DUNKERQUE et qu'en outre, cette dernière devait également faire face à des frais de logement à LILLE où elle demeurait antérieurement et ne démontrait pas que le fait de déménager dans l'agglomération dunkerquoise avait entraîné pour elle des frais plus importants que si elle était restée à LILLE, s'est fondée ainsi sur des éléments qui n'étaient pas dans le débat, en violation de l'article 7 du Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART, et en tout état de cause, QUE le juge doit, en toute circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et, en conséquence, il ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, pour évaluer le préjudice subi par Madame E... pour respect d'une clause de domicile illicite, le moyen tiré de l'absence de volonté manifestée par la société [...] d'exiger la mise en oeuvre de cette clause et celui tiré de la nécessité de comparer les montants respectifs des frais qu'elle devait assumer dans les villes de LILLE et DUNKERQUE, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur ces points, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION

Ce moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame E... de sa demande de dommages-intérêts pour l'entrave à la procédure commise par la société [...] ;

AUX MOTIFS QUE Q... E... sollicite par ailleurs une indemnisation de 50 000 euros en invoquant le fait que la société [...] se serait livrer à une entrave à la procédure en refusant notamment de communiquer contradictoirement l'ensemble des pièces du litige ; qu'il semble, bien que les explications de l'appelante soient sur ce point très sommaire, qu'elle entende viser le fait que la société [...] aurait refuser de communiquer le compte rendu complet de l'enquête interne à laquelle avait donné lieu sa plainte pour harcèlement moral ; qu'il convient toutefois de constater que la société [...] a en définitive indiqué à la cour, lors du premier examen de la présente affaire à l'audience du 25 mars 2014, qu'elle acceptait de communiquer à la cour l'ensemble des pièces relatives à cette enquête, ce qu'elle a d'ailleurs fait ; qu'en conséquence, la demande de dommages-intérêts de Q... E... n'apparaît pas fondée et sera écartée ;

ALORS QU' il résulte des dispositions des articles 15 et 132 du Code de procédure que les parties doivent se communiquer en temps utile et de façon spontanée les pièces dont ils font état à l'appui de leurs prétentions ; qu'en rejetant la demande de dommages-intérêts fondée sur l'entrave à la procédure commise par la société [...] résultant de son refus persistant de communiquer le compte-rendu complet de l'enquête interne relative au harcèlement moral subi par Madame E... au seul motif que la société avait accepté lors de la première audience du 25 mars 2014 de communiquer l'ensemble de ces pièces, ce qu'elle avait fait, sans rechercher si la résistance opposée pendant près de quatre ans par la société J... aux demandes de communication formées par la salariée ne caractérisait pas un abus de se défendre en justice, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble les articles 15 et 132 du Code de procédure civile.

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