2 novembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-84.211

Chambre criminelle - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2016:CR04743

Titres et sommaires

CASSATION - Moyen - Moyen nouveau - Récidive - Condamnation antérieure - Caractère définitif - Absence de contestation devant les juges du fonds - Recevabilité

Est recevable le moyen invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation critiquant les énonciations d'un arrêt relatives à l'état de récidive d'un prévenu. N'encourt pas la censure l'arrêt qui déclare un prévenu coupable des délits de recel et de corruption, en récidive, sans constater que la condamnation retenue par la prévention comme premier terme de la procédure avait un caractère définitif au moment où les faits objet de la poursuite ont été commis, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer par la lecture du casier judiciaire du prévenu que la condamnation constituant ce premier terme est devenue définitive, à défaut d'appel interjeté par le prévenu ou le ministère public du jugement rendu contradictoirement, et qu'une partie des faits visés à la prévention des chefs de recel et de corruption est postérieure à la date à laquelle cette condamnation a acquis un caractère définitif

RECIDIVE - Conditions pour la retenir - Premier terme d'une récidive - Condamnation antérieure - Caractère définitif - Contestation - Contrôle de la Cour de cassation - Portée

Texte de la décision

N° U 15-84.211 FS-P+B

N° 4743


ND
2 NOVEMBRE 2016


REJET


M. GUÉRIN président,





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

REJET du pourvoi formé par M. [G] [K], contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 9 juin 2015, qui, pour recel aggravé et corruption, en récidive, l'a condamné à deux ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende et dix ans d'interdiction professionnelle ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 septembre 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, MM. Straehli, Buisson, Mme Durin-Karsenty, MM. Larmanjat, Ricard, Bonnal, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, Ascensi, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Lagauche ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, que M. [K], agent privé de recherches, ayant obtenu de sa nièce, militaire de la gendarmerie, en contrepartie d'une rémunération, de multiples consultations des fichiers nationaux de l'automobile, des permis de conduire, des véhicules volés, et des antécédents judiciaires de la gendarmerie nationale, ainsi que la communication de ces consultations, a été cité des chefs susénoncés, pour des faits commis entre novembre 2008 et février 2012, devant le tribunal correctionnel, qui l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dont dix-huit mois assortis du sursis avec mise à l'épreuve, et dix ans d'interdiction professionnelle ; que M. [K] et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de l'article 14, § 3, d, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, des articles 417, 591 et 593 du code de procédure pénale :

"en ce que l'arrêt a confirmé le jugement entrepris sur la culpabilité de M. [K] qui a comparu non assisté d'un avocat le jour de l'audience sans avoir été informé de son droit à l'assistance d'un avocat et, le réformant sur la peine d'emprisonnement, l'a condamné à la peine de deux ans d'emprisonnement et a confirmé le jugement pour le surplus ;

"alors que l'exercice de la faculté de se faire assister par un défenseur implique, pour être effectif, que le prévenu a été préalablement informé de cette faculté ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt que M. [K] a comparu devant la chambre des appels correctionnels sans être assisté d'un avocat ; qu'en entrant en voie de condamnation sans avoir au préalable informé M. [K], qui comparaissait seul, de son droit d'être assisté d'un avocat, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que la Cour de cassation est en mesure de s‘assurer que le prévenu, cité devant la cour d'appel, par exploits d'huissier signifiés à personne l'informant de sa faculté d'être assisté par un avocat, puis, selon les notes d'audience, représenté par un avocat lors du renvoi de l'affaire à l'audience de jugement, au cours de laquelle, comparant et non assisté, il a été entendu en ses moyens de défense et a eu la parole en dernier, a été mis en mesure de bénéficier d'un avocat ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 132-8 à 132-19-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale :

"en ce que l'arrêt a confirmé le jugement entrepris sur la culpabilité et, le reformant sur la peine d'emprisonnement, a condamné M. [K] à la peine de deux ans d'emprisonnement et a confirmé le jugement pour le surplus ;

"aux motifs que les infractions reprochées à Mme [Z] ont été reconnues par elle et ont donné lieu à sa condamnation désormais définitive du 21 juin 2013 ; que M. [K] a reconnu s'être fait communiquer par sa nièce et à de très nombreuses reprises des relevés de fichiers qui lui permettaient de satisfaire les demandes de renseignements émanant de son employeur, la société Credipar, afin de localiser des débiteurs indélicats ; que lors des débats devant le tribunal correctionnel, M. [K] a admis que son aide financière apportée à sa soeur, sous forme d'argent liquide puis de mandats cash, constituait une rémunération du service rendu par sa nièce qui lui avait communiqué à sa demande des données à caractère personnel issues de fichiers confidentiels auxquels elle avait accès en sa qualité de gendarme ; que devant la cour, l'intéressé reconnaît intégralement les infractions qui lui sont reprochées en admettant que les sommes d'argent remises à sa nièce en contrepartie de la communication habituelle à sa demande de données à caractère personnel provenant de façon illicite de diverses applications du ministère de l'intérieur détournées de leur finalité, n'avaient aucun caractère désintéressé ; que c'est dans ces conditions à juste titre et par des motifs pertinents que les premiers juges ont considéré que les faits reprochés à M. [K] étaient établis, l'intéressé étant en état de récidive légale pour avoir été condamné le 9 octobre 2009 par le tribunal correctionnel de Saint-Quentin pour des faits de même nature de recel de bien provenant d'un délit et de corruption active à l'égard d'une personne dépositaire de l'autorité publique, à une peine de deux ans d'emprisonnement ; que la cour confirmera le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité ; que M. [K] n'exerce plus son activité d'agent privé de recherches depuis sa radiation du 1er août 2013 ; qu'il était auparavant à la tête de son cabinet de détective nommé "Delta Renseignement" au sein duquel il se versait une rémunération mensuelle de l'ordre de 1 500 à 2 000 euros par mois ; qu'il déclare désormais travailler en qualité de sophrologue dans des maisons de retraite et disposer de revenus mensuels de l'ordre de 950 euros par mois ; que M. [K] a déjà été condamné à deux reprises, par le tribunal correctionnel de Saint-Quentin le 27 juin 2000 à un mois d'emprisonnement avec sursis pour usurpation de titre ou de qualité, et le 9 octobre 2009 à deux ans d'emprisonnement avec sursis pour recel de bien provenant d'un délit, corruption active à l'égard d'une personne dépositaire de l'autorité publique ; qu'il est en récidive légale au regard de la condamnation du 9 octobre 2009 ; qu'ainsi que l'ont justement énoncé les premiers juges, M. [K] a manifestement réitéré les mêmes infractions durant deux années après sa première condamnation, au préjudice de sa propre nièce, de sorte qu'il apparaît qu'il ne tient aucun compte des avertissements solennels qui lui ont été précédemment délivrés et s'est délibérément affranchi des règles déontologiques inhérentes à son ancienne activité de renseignement au profit d'organismes privés dans l'unique but d'améliorer sa situation financière ; que dans ces conditions et en raison de la gravité des faits et des éléments de personnalité du prévenu, le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme apparaît seul de nature à le dissuader de commettre de nouveaux faits délictueux, toute autre sanction étant manifestement inadéquate ; qu'il convient de condamner M. [K] à la peine de deux ans d'emprisonnement, sans aménagement en l'absence de toute production de pièces justifiant de sa situation socio-professionnelle le jugement sera partiellement reformé en conséquence ; qu'il convient également de confirmer le jugement pour le surplus, s'agissant du prononcé d'une peine d'amende de 15 000 euros et de l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ayant permis la commission de l'infraction, dans le domaine de la collecte du renseignement, pour une durée de dix ans ;

"1°) alors que seule une condamnation pénale définitive peut constituer le premier terme d'une récidive ; qu'en entrant en voie de condamnation à l'encontre de M. [K] pour des faits commis entre le 1er novembre 2008 et le 28 février 2012 en état de récidive légale pour avoir été condamné le 9 octobre 2009 alors que la condamnation du 9 octobre 2009 ne pouvait avoir acquis un caractère définitif au moment où les faits antérieurs à cette date ont été commis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"2°) alors qu'en tout état de cause, en entrant en voie de condamnation à l'encontre de M. [K] pour des faits commis entre le 1er novembre 2008 et le 28 février 2012 en état de récidive légale pour avoir été condamné le 9 octobre 2009 par le tribunal correctionnel de Saint-Quentin pour des faits de même nature sans constater que l'arrêt du 9 octobre 2009 avait un caractère définitif au moment où les faits nouveaux ont été commis, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, en violation des textes susvisés" ;

Attendu que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer par la lecture du casier judiciaire du prévenu que la condamnation retenue comme premier terme de la récidive, prononcée le 9 octobre 2009, est devenue définitive, à défaut d'appel interjeté par le prévenu ou le ministère public du jugement rendu contradictoirement, et qu'une partie des faits visés à la prévention des chefs de recel et de corruption est postérieure à la date à laquelle cette condamnation a acquis un caractère définitif ;

Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux novembre deux mille seize ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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