23 novembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-18.092

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2016:SO02098

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude au travail - Obligation de reclassement - Obligation de l'employeur - Mise en oeuvre - Caractère sérieux - Appréciation souveraine

Peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte par le médecin du travail, l'employeur auquel il appartient de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. Relève du pouvoir souverain des juges du fond l'appréciation du caractère sérieux de la recherche de reclassement (arrêt n° 1, pourvoi n° 14-26.398 et arrêt n° 2, pourvoi n° 15-18.092)

POUVOIRS DES JUGES - Appréciation souveraine - Contrat de travail - Maladie - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude physique du salarié - Obligations de l'employeur - Recherche d'un poste de reclassement - Caractère sérieux

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Services de santé au travail - Examens médicaux - Inaptitude physique du salarié - Inaptitude au poste occupé - Reclassement du salarié - Obligations de l'employeur - Etendue - Détermination

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude physique du salarié - Obligation de reclassement - Impossibilité - Justification par l'employeur - Eléments pris en considération - Détermination - Portée

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 novembre 2016




Cassation partielle


M. FROUIN, président



Arrêt n° 2098 FS-P+B+R+I
sur le premier moyen

Pourvoi n° A 15-18.092







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par Mme [W] [K], domiciliée [Adresse 1],

contre l'arrêt rendu le 12 mars 2015 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à la société Lidl, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 2], et ayant un établissement secondaire, [Adresse 3],

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 octobre 2016, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Wurtz, conseiller référendaire rapporteur, M. Chollet, conseiller doyen, M. Mallard, Mmes Goasguen, Vallée, Guyot, Aubert-Monpeyssen, Schmeitzky-Lhuillery, MM. Rinuy, Schamber, Ricour, Mme Van Ruymbeke, conseillers, MM. Alt, Flores, Mmes Ducloz, Brinet, MM. David, Silhol, Belfanti, Mme Ala, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Courcol-Bouchard, premier avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Wurtz, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de Mme [K], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Lidl, l'avis de Mme Courcol-Bouchard, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [K] a été engagée par la société Lidl en qualité de caissière pour une durée mensuelle de 112,38 heures ; qu'entre 2005 et 2010, afin de remplacer, pendant une période limitée, une chef-caissière, elle a signé plusieurs avenants temporaires au contrat de travail ayant pour effet de porter la durée contractuelle du travail de 26 à 31 heures hebdomadaires et d'augmenter sa rémunération ; qu'à l'issue de deux examens médicaux des 21 juin et 2 août 2011, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste ; que licenciée le 6 octobre 2011 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de ses demandes au titre d'un licenciement abusif, alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, doit justifier de l'impossibilité de reclassement, le cas échéant au sein du groupe auquel il appartient parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que, pour dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé qu'il ne pouvait être fait grief à l'employeur de ne pas avoir étendu ses recherches aux sociétés européennes du groupe au sein desquelles la société Lidl avait proposé des postes à d'autres salariés dans la mesure où l'intéressée n'avait pas répondu aux propositions de postes présentés en France ; qu'en statuant ainsi, lors même qu'elle constatait que la société Lidl appartenait à un groupe de taille européenne, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-10 du code du travail ;

2°/ que l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail déclarant le salarié inapte à occuper son poste de travail ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que les juges du fond doivent caractériser l'impossibilité de l'employeur de mettre en oeuvre de telles mesures ; que, pour dire que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé que le mode d'organisation du travail au sein de la société Lidl, la polyvalence des postes de travail dans cette entreprise où les salariés exécutent des tâches de manutention et de magasinage et les restrictions médicales mentionnées dans l'avis d'inaptitude justifiaient que la société Lidl ait orienté ses recherches de reclassement exclusivement sur des postes administratifs ; qu'en statuant par ces motifs qui ne sont pas de nature à caractériser l'impossibilité pour l'employeur de mettre en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise ou des sociétés du groupe européen auquel elle appartient, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;

Mais attendu qu'il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que l'appréciation du caractère sérieux de la recherche de reclassement relève du pouvoir souverain des juges du fond ;

Et attendu qu'ayant constaté que la salariée n'avait pas accepté des postes à Strasbourg et fait ressortir qu'elle n'avait pas eu la volonté d'être reclassée au niveau du groupe, la cour d'appel a souverainement retenu que l'employeur avait procédé à une recherche sérieuse de reclassement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la durée hebdomadaire, ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps plein ; que cette exigence légale d'un écrit s'applique non seulement au contrat initial, mais aussi à ses avenants modificatifs de la durée du travail ou de sa répartition, fussent-ils temporaires et prévus par une convention collective ; qu'à défaut, le contrat de travail à temps partiel doit, à compter de la première irrégularité, être requalifié en contrat de travail à temps plein ;

Attendu que, pour limiter à 499,68 euros la somme allouée à la salariée à titre de rappel de salaire, l'arrêt retient qu'au regard du caractère temporaire des avenants irréguliers, alors même que le contrat de travail du 27 décembre 2003 porte mention de la répartition des heures de travail sur les semaines du mois conformément aux dispositions de l'article L. 3123-14 du code du travail, la requalification en temps plein ne peut concerner que les périodes correspondant aux avenants dits "faisant fonction" et non à l'ensemble de la période de la relation de travail à partir du premier contrat non conforme ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les conditions de la requalification étaient réunies à la date du premier avenant irrégulier du 31 janvier 2005, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie les avenants temporaires et limitant le montant des salaires et congés payés, déboute la salariée de sa demande en paiement de la somme de 20 840,82 euros à titre de rappel de salaire, l'arrêt rendu le 12 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Condamne la société Lidl aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Lidl à payer à Mme [K] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme [K]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR dit que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté cette dernière de ses demandes afférentes à un licenciement abusif ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « selon les dispositions de l'article L.1226-10 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise... L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail. Il ressort des pièces versées aux débats que l'employeur a procédé à une recherche de postes au sein de l'ensemble des directions régionales et au siège de l'entreprise à [Localité 1] en l'orientant sur des postes de type administratif. Au sein de la SNC Lidl, l'organisation du travail est fondée sur une structure bâtie sur trois échelons hiérarchiques au niveau d'un magasin ainsi que sur la polyvalence des personnels amenant ceux-ci, tant le chef de magasin que les chefs caissières ou les caissières employées libre-service, à effectuer des tâches de port de charges et de magasinage. Le mode d'organisation du travail dépend du seul pouvoir de gestion, direction et contrôle du chef d'entreprise, le juge ne pouvant que vérifier si l'employeur a mis en oeuvre de manière loyale et sérieuse son obligation de reclassement et notamment par une mesure d'aménagement de poste. Or en l'espèce, les restrictions médicales mentionnées dans l'avis d'inaptitude consistant en ne pas pouvoir exercer un appui prolongé sur le pied droit et limiter la station debout prolongée s'avèrent en réalité si importantes que les mesures d'aménagement de poste au regard de la polyvalence des postes et de la répartition sur l'ensemble des postes des tâches de manutention et de magasinages étaient impossibles et empêchaient Madame [K] d'occuper tout poste en magasin et en entrepôt. En conséquence il ne saurait être fait grief à la SNC Lidl d'avoir orienté ses recherches sur des postes administratifs. La SNC Lidl a procédé à ses recherches au sein de l'ensemble des directions régionales et du siège strasbourgeois et les postes disponibles ont été offerts à Mme [K]. Ainsi au cours de l'entretien de reclassement du 30 août 2011, 6 postes situés à [Localité 1] ont été proposés à la salariée : employée administratif service achat-bilingue allemand, assistant ressources humaines, standardiste, assistant logistique, assistant service de publicité, secrétaire technique, avec mention des tâches, de l'expérience professionnelle, des qualités recherchés, de la durée du contrat, du statut, du nombre d'heures hebdomadaires, du salaire brut mensuel soit dans des termes suffisamment précis pour lui permettre de prendre utilement position. Ces propositions ont été réitérées par courrier du 31 août 2011 en lui demandant de faire part de sa réponse avant le 12 septembre 2011 et en précisant qu'en fonction de sa réponse, l'employeur pourra évaluer ses compétences par rapport à celles requises pour occuper le poste qui l'intéresse et estimer si une formation sera suffisante pour l'occuper. Mme [K] n'a pas répondu à ces propositions de sorte que par courrier du 16 septembre 2011 la SNC Lidl a considéré qu'elle les refusait comme elle l'a avertie dans son courrier précédent. Cette absence de réponse alors que la salariée avait bénéficié d'un temps suffisant pour pouvoir utilement prendre sa décision a été exactement considéré comme valant refus de la salariée à ces postes, étant précisé que l'employeur proposait une formation complémentaire. Ce faisant, en refusant des postes situés à [Localité 1], en France et dont un nécessitait d'être bilingue en allemand et la formation éventuellement nécessaire en cas d'acceptation, alors même qu'un au moins était susceptible de correspondre à sa qualification professionnelle, la salariée ne saurait faire grief à la SNC Lidl de ne pas avoir étendu ses recherches aux sociétés européennes du groupe pour lesquelles, elle avait dans un contexte différent d'un accord de mobilité, proposé des postes à d'autres salariés en Irlande et en Allemagne. Contrairement à ce que prétend la salariée, la SNC Lidl justifie de son niveau de préoccupation en matière de reclassement par les nombreuses autorisations de licenciement accordées par l'inspection du travail pour des salariés protégés et par les attestations de salariés. En conséquence, la SNC Lidl a rempli de manière loyale et sérieuse son obligation de reclassement de sorte que Mme [K] sera déboutée de sa demande tendant à dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que de ses demandes subséquentes ; le jugement sera confirmé à ce titre ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « le conseil note deux visites médicales avec des préconisations; dans le dossier figure bien des réponses de différentes directions régionales mais la société Lidl est taisante sur la demande et les informations fournies pour la recherche de reclassement. La note interne du 8 août 2011 liste les postes à pourvoir sous réserve des compétences du candidat pour occuper ceux-ci. La recherche n'a pas été précédée d'une évaluation ou de l'établissement des compétences acquises et ou transférables de Mme [W] [K]. Mme [W] [K] fournit la liste des filiales du groupe. Cependant aucun courrier de ces dernières n'apparaît dans le dossier pour justifier des demandes faites auprès d'elles. Le 26 août 2011, la société Lidl a informé les délégués du personnel. Cependant, se basant sur la liste des postes proposés, les réponses faites par les directions régionales et l'information des délégués du personnel, le conseil valide le licenciement de Mme [W] [K] pour inaptitude professionnelle. Le conseil déboute donc Mme [W] [K] de ses demandes liées à son inaptitude ».

1. ALORS QUE l'employeur, quelque que soit la position prise par le salarié, doit justifier de l'impossibilité de reclassement, le cas échéant au sein du groupe auquel il appartient parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel; que pour dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé qu'il ne pouvait être fait grief à l'employeur de ne pas avoir étendu ses recherches aux sociétés européennes du groupe au sein desquelles la société Lidl avait proposé des postes à d'autres salariés dans la mesure où l'intéressée n'avait pas répondu aux propositions de postes présentés en France ; qu'en statuant ainsi, lors même qu'elle constatait que la société Lidl appartenait à un groupe de taille européenne, la cour d'appel a violé l'article L.1226-10 du code du travail.

2. ALORS QUE l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail déclarant le salarié inapte à occuper son poste de travail ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise, et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que les juges du fond doivent caractériser l'impossibilité de l'employeur de mettre en oeuvre de telles mesures ; que pour dire que le licenciement de la salariée reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé que le mode d'organisation du travail au sein de la société Lidl, la polyvalence des postes de travail dans cette entreprise où les salariés exécutent des tâches de manutention et de magasinage et les restrictions médicales mentionnées dans l'avis d'inaptitude justifiaient que la société Lidl est orientée ses recherches de reclassement exclusivement sur des postes administratifs; qu'en statuant par ces motifs qui ne sont pas de nature à caractériser l'impossibilité pour l'employeur de mettre en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise ou des sociétés du groupe européen auquel elle appartient, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR requalifié en temps plein les avenants temporaires au contrat de travail des 7 février 2005, 27 juillet 2005, 3 mars 2006, 12 mai 2006, 6 juin 2006, 23 août 2006, 27 novembre 2006, 8 février 2007, 22 février 2007, 20 mai 2007, 26 juin 2009, 27 août 2009, 26 août 2009, 22 septembre 2009 et 19 juillet 2010, condamné la société Lidl à payer à Mme [K] 499,68 euros à titre de rappel de salaire à compter du 15 février 2007 outre les congés payés afférents et débouté l'intéressée du surplus de ses demandes de rappels de salaire.

AUX MOTIFS QUE « Mme [K] a bénéficié d'avenants à son contrat de travail lui permettant temporairement d'occuper les fonctions d'une chef caissière absente. Dans ce cadre la durée du travail passait de 26 heures à 31 heures hebdomadaires avec une prime hebdomadaire "faisant fonction" lui permettant d'être rémunérée selon la grille "chef caissière". La convention collective nationale applicable prévoit le remplacement provisoire en indiquant dans son article 4-4-3 que la nature même de certaines fonctions implique que les salariés qui les exercent sont à même de suppléer totalement ou partiellement un supérieur hiérarchique en cas d'absence occasionnelle de celui-ci. En dehors des cas ci-dessus, les salariés qui se voient confier pendant au moins quatre semaines consécutives la responsabilité d'une fonction correspondant à un niveau supérieur au leur bénéficient proportionnellement au temps passé du salaire garanti à celui-ci.
Cette situation ne peut excéder six mois; à I'issue de ce délai l'employeur et le salarié remplaçant acteront au regard du motif du remplacement, les conséquences qui en découlent sur le contrat de travail. Ainsi l'employeur avait la possibilité d'augmenter par avenant la durée de travail de la salariée, ce qu'il a fait sans contrevenir aux dispositions légales et conventionnelles précitées. Or, il ressort des pièces versées aux débats que les avenants "faisant fonction" qui avaient pour effet de notamment de porter l'horaire hebdomadaire de Mme [K] de 26 heures à 31 heures ne comportent pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois en application des dispositions de l' article L 3123- 14 du code du travail de sorte que la présomption de temps plein s'applique à compter du premier contrat qui a débuté le 31 janvier 2005. Il incombe alors à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur. La succession d'avenants sur des périodes de 5 jours à 2 mois de remplacement signés au mieux 5 jours avant leur prise d'effet voire de manière habituelle le jour même voire postérieurement empêche de considérer, en l'absence de tout élément factuel apporté par la SNC Lidl, que la salariée a eu connaissance de ses horaires deux semaines à l'avance comme prévu dans la convention collective nationale. L'employeur échoue donc à démontrer que sa salariée n'est pas restée à sa disposition permanente pendant ces périodes. Néanmoins au regard du caractère temporaire de ces avenants alors même que le contrat de travail du 27 décembre 2003 porte mention de la répartition des heures de travail sur les semaines du mois conformément aux dispositions de l'article L. 3123-14 du code du travail, la re-qualification en temps plein ne peut concerner que les périodes correspondant aux avenants dits "faisant fonction" et non à l'ensemble de la période de la relation de travail à partir du premier contrat non conforme aux dispositions légales et Madame [K] est fondée à réclamer un rappel de salaire uniquement sur les périodes correspondant aux avenants. Il convient en conséquence de requalifier en temps plein les avenants temporaires au contrat de travail des 7 février 2005, 27 juillet 2005, 3 mars 2006, 12 mai 2006, 6 juin 2006, 23 août 2006, 27 novembre 2006, 8 février 2007, 22 février 2007, 20 mai 2007, 26 juin 2009, 27 août 2009, 26 août 2009, 22 septembre 2009 et 19 juillet 2010. Au regard de la saisine du conseil de prud'hommes le 15 février 2012 et de la prescription quinquennale applicable, la salariée ne peut réclamer des salaires sur la base d'un temps plein que sur la période à compter du 15 février 2007. Elle a, à compter du 15 février 2007 et jusqu'à la rupture du contrat, bénéficié de huit contrats dits « faisant fonction » sur des périodes d'une durée au moins hebdomadaires permettant de considérer que pendant douze semaines elle aurait dû bénéficier d'un salaire correspondant à trente-cinq heures alors qu'elle n'a été rémunérée qu'à hauteur de trente et une heures. La société Lidl reste donc lui devoir la somme de 499,68 euros ainsi calculée 4 hx12 semaines x10,41 euros = 499,68 euros outre les congés payés afférents pour la somme de 49,97 euros. La société Lidl sera en conséquence condamnée à lui payer 499,68 euros à titre de rappel de salaire outre les congés payés afférents pour la somme de 49,97 euros. Il sera ainsi ajouté au jugement s'agissant d'une demande nouvelle ».

ALORS QU'aux termes de l'article L.3123-14 du code du travail, l'absence d'écrit mentionnant la durée hebdomadaire, ou le cas échéant mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, fait présumer que l'emploi est à temps complet; que l'employeur qui conteste cette présomption peut rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que lorsque l'employeur ne démontre pas que le salarié connaissait son rythme de travail, la relation de travail est requalifiée en contrat de travail à temps plein à compter de la première irrégularité pour toute la durée de la relation de travail; que la cour d'appel a relevé que la présomption de travail à temps complet s'appliquait à compter du 31 janvier 2005 en l'absence de mention sur les avenants au contrat de travail conclus de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois; que la cour d'appel a également constaté que l'employeur a échoué à démontrer que la salariée n'était pas restée à sa disposition permanente durant cette période; que la cour d'appel aurait dû déduire de ses énonciations que le contrat de travail à temps partiel devait être requalifié en contrat de travail à temps plein à compter du 31 janvier 2005; qu'en requalifiant uniquement les avenants temporaires au contrat de travail des 7 février 2005, 27 juillet 2005, 3 mars 2006, 12 mai 2006, 6 juin 2006, 23 août 2006, 27 novembre 2006, 8 février 2007, 22 février 2007, 20 mai 2007, 26 juin 2009, 27 août 2009, 26 août 2009, 22 septembre 2009 et 19 juillet 2010, signés pour occuper des fonctions de chef caissière pour une durée de travail de trente et une heure hebdomadaires et en condamnant l'employeur à un rappel de salaire pour une seule période de douze semaines, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.3123-14 du code du travail.

ET ALORS QUE la requalification d'un contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet doit être ordonnée à compter de la première irrégularité lorsque le recours par l'employeur à des heures complémentaires a eu pour effet de porter, fût-ce pour une période limitée et malgré l'accord du salarié, la durée de travail au niveau de la durée légale; que la cour d'appel a constaté qu'à compter du 31 janvier 2005, la salariée qui a signé des avenants temporaires pour occuper des fonctions de chef caissière pour une durée de travail de trente et une heure hebdomadaires tandis que le contrat de travail initial mentionnait vingt-six heures de travail hebdomadaires devait se tenir à la disposition permanente de son employeur; qu'il en résultait nécessairement que le recours par l'employeur à des heures complémentaires avait eu pour effet de porter la durée de travail au niveau de la durée légale, en sorte que la requalification en contrat de travail à temps plein devait être ordonnée à compter du 31 janvier 2005; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-17 du code du travail.

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