7 décembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-12.216

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2016:C101382

Titres et sommaires

REGIMES MATRIMONIAUX - Régimes conventionnels - Communautés conventionnelles - Communauté universelle - Clause d'attribution intégrale au conjoint survivant - Demande des enfants non issus des deux époux de limiter les effets de la clause - Dermande de nullité de la convention - Identité d'objet (non)

S'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de formuler dans la même instance toutes les prétentions fondées sur les mêmes faits. Il n'y a pas identité d'objet, au sens de l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entre l'action ouverte, à l'article 1527, alinéa 2, du code civil, aux enfants non issus des deux époux et tendant à limiter les effets d'une clause d'une convention portant adoption d'une communauté conventionnelle et celle tendant à obtenir la nullité d'une telle convention

CHOSE JUGEE - Identité d'objet - Définition - Exclusion - Cas - Demande des enfants non issus des deux époux de limiter des effets d'une clause d'une convention portant adoption d'une communauté conventionnelle et demande de nullité de cette convention


SUCCESSION - Partage - Partage judiciaire - Conditions - Indivision - Exclusion - Cas - Bénéficiaire d'une indemnité de retranchement et conjoint survivant

Les bénéficiaires d'une indemnité de retranchement ne se trouvant pas en indivision avec le conjoint survivant, il ne peut être ordonné de partage judiciaire de la succession

Texte de la décision

CIV. 1

CGA



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 décembre 2016




Cassation partielle


Mme BATUT, président



Arrêt n° 1382 FS-P+B

Pourvoi n° J 16-12.216







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par Mme [J] [S], veuve [M], domiciliée [Adresse 3],

contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2015 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [G] [M], domicilié [Adresse 2],

2°/ à M. [T] [M], domicilié [Adresse 1],

3°/ à Mme [U] [M], épouse [F], domiciliée [Adresse 4],

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 novembre 2016, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, MM. Hascher, Reynis, Mmes Reygner, Bozzi, M. Acquaviva, conseillers, Mme Guyon-Renard, MM. Mansion, Roth, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, conseillers référendaires, M. Ingall-Montagnier, premier avocat général, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Vigneau, conseiller, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de Mme [S], de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de MM. [G] et [T] [M] et Mme [F], l'avis de M. Ingall-Montagnier, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que [E] [M] et Mme [S], qui s'étaient mariés sans contrat préalable, ont adopté en 2000 le régime de la communauté universelle avec une clause d'attribution intégrale des biens de la communauté au conjoint survivant ; que [E] [M] est décédé le [Date décès 1] 2007, laissant pour lui succéder Mme [S], leur enfant commun, [X], et les trois enfants nés d'une première union, [G], [T] et [U] [M] (les consorts [M]) ; qu'un jugement irrévocable du 2 septembre 2010 a rejeté l'action engagée par ces derniers à l'encontre de Mme [S] aux fins d'obtenir l'annulation du changement de régime matrimonial et le partage de la succession de leur père ; que, par acte du 8 décembre 2010, les consorts [M] ont assigné Mme [S] sur le fondement de l'article 1527, alinéa 2, du code civil dont ils ont demandé le bénéfice dans la succession de leur père, et aux fins de partage de cette succession ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mme [S] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il déclare recevable l'action des consorts [M] fondée sur l'article 1527, alinéa 2, du code civil et ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [E] [M] alors, selon le moyen :

1°/ qu'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ; qu'il incombe en particulier aux enfants d'un premier lit qui sollicitent l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père afin de contester, en tant qu'il porterait atteinte à leurs droits successoraux, l'avantage matrimonial consenti par celui-ci à sa seconde épouse au terme d'une convention de changement de régime matrimonial, de présenter dès cette instance l'ensemble des moyens qu'ils estiment de nature à les rétablir dans leurs droits successoraux ; qu'en accueillant la seconde demande des consorts [M] en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père et en déclarant recevable leur action en retranchement destinée à reconstituer leur réserve héréditaire, cependant que les consorts [M] avaient été préalablement déboutés, par une décision devenue irrévocable, de leur première demande de partage de la succession de leur père fondée sur la prétendue nullité de la convention de changement de régime matrimonial litigieuse, demande également destinée à les rétablir dans leurs droits successoraux, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil et l'article 480 du code de procédure civile ;

2°/ que ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée par Mme [S], si la demande des consorts [M] en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père, fondée sur l'action en retranchement, ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 2 septembre 2010, comme ayant le même objet que celle fondée sur la prétendue nullité de la convention de changement de régime matrimonial, à savoir la contestation des effets de l'avantage matrimonial litigieux afin de les rétablir dans leurs droits successoraux d'héritiers réservataires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;

Mais attendu que s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de formuler dans la même instance toutes les prétentions fondées sur les mêmes faits ; que l'action ouverte, à l'article 1527, alinéa 2, du code civil, aux enfants non issus des deux époux, et tendant à limiter les effets d'une clause d'une convention portant adoption d'une communauté conventionnelle, n'a pas le même objet que celle tendant à obtenir la nullité d'une telle convention ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 840 du code civil ;

Attendu que, pour ordonner le partage judiciaire de la succession de [E] [M], l'arrêt retient que l'indemnité de retranchement, assimilable à une indemnité de réduction, tombe dans la succession, qu'en cas d'insolvabilité du conjoint survivant ou à la demande de celui-ci, la réduction de l'avantage matrimonial peut trouver à s'exercer en nature, de sorte que, dans cette hypothèse, les bénéficiaires de l'indemnité de retranchement se trouvent en indivision avec le conjoint survivant, et qu'en raison de l'existence d'un bien immobilier et de désaccords importants entre Mme [S] et les autres héritiers, le partage amiable est impossible et les opérations difficiles à réaliser ;

Qu'en ordonnant le partage judiciaire de la succession de [E] [M], alors que les consorts [M] ne pouvaient revendiquer de droits indivis avec Mme [S] sur les biens dépendant de la succession, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable la demande reconventionnelle des consort [M] au titre de la somme de 8 700 euros correspondant au coût financier lié au dépôt tardif de la déclaration de succession, et recevable leur action fondée sur l'article 1527, alinéa 2, du code civil, l'arrêt rendu le 27 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne MM. [G] et [T] [M] et Mme [F] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour Mme [S]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR déclaré recevables monsieur [G] [M], monsieur [T] [M] et madame [U] [M] en leur action en retranchement de l'avantage matrimonial dont bénéficiait madame [J] [S] veuve [M], ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [E] [M], désigné le président de la chambre des notaires du Rhône avec faculté de délégation, pour y procéder, à l'exception des notaires des parties, et calculer l'indemnité de retranchement, dit que le juge de la mise en état de la première chambre ferait rapport en cas de difficultés, dit que le notaire désigné pourrait avoir accès au fichier FICOBA et pourrait interroger les organismes financiers et bancaires et se faire communiquer tous relevés bancaires, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel, les frais de recherches étant avancés par les demandeurs, et renvoyé les parties devant le notaire désigné sous le contrôle du juge commis pour l'évaluation du bien immobilier situé à [Localité 1] ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur la recevabilité de l'action en retranchement, l'action en retranchement appartenait aux seuls enfants non issus du couple, en leur qualité de réservataires ; qu'en rejetant la demande des consorts [M] en nullité du changement de régime matrimonial des époux [E] [M]/[J] [S] et en constatant que cette dernière devenait propriétaire de tous les biens composant la communauté ayant existé entre elle et le défunt, le tribunal, par jugement du 2 septembre 2010, en avait tiré la conséquence logique en disant qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner l'ouverture et le partage de la succession de [E] [M] et que seule l'action en retranchement était ouverte aux héritiers ; que peu importait que ce jugement soit aujourd'hui définitif ; qu'il ne pouvait avoir autorité de la chose jugée sur ce point, dans la mesure où le rejet de la demande de liquidation et de partage de la succession était la suite logique du rejet de la demande en nullité de changement de régime matrimonial, en l'absence de demande à l'époque en retranchement de l'avantage matrimonial dont bénéficiait madame [S] veuve [M] ; que par application de l'article 920 du code civil, la réduction spéciale de l'avantage matrimonial ne pouvait être opérée que lors de la liquidation de la succession de l'époux ayant des enfant d'un autre lit ; qu'il ne s'ensuivait pas que la demande même de liquidation, bien que rejetée une première fois pour n'avoir pas été doublée d'une demande en retranchement, ne puisse être à nouveau présentée, précisément à l'occasion de l'introduction de l'action en retranchement ; que ce qui importait, c'était que les demandes soient concomitantes ; que l'action en retranchement restait possible, dès lors qu'elle n'était pas par ailleurs prescrite ; que [G], [T] et [U] [M], qui avaient engagé cette action, moins de 5 ans après le décès de leur père, n'étaient pas forclos et étaient donc parfaitement recevables à agir ; qu'il y avait lieu d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [E] [M] et de désigner le président de la chambre des notaires du Rhône, avec faculté de délégation, pour y procéder, à l'exception des notaires des parties (jugement, pp. 5 et 6) ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la fin de non-recevoir de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 2 septembre 2010, aux termes de son jugement du 2 septembre 2010, le tribunal avait « débouté les consorts [G], [T] et [U] [M] de toutes leurs demandes », que le tribunal qui n'était pas saisi d'une action en retranchement ne s'était donc pas prononcé sur le bien-fondé d'une demande de partage judiciaire comme conséquence de la recevabilité de l'action en retranchement, que dès lors la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée serait rejetée, que sur le bien-fondé de la demande en partage judiciaire, l'indemnité de retranchement, assimilable à une indemnité de réduction tombait dans la succession, ce qui justifiait que soient ordonnées les opérations de compte et liquidation de la succession de [E] [M], que par ailleurs, en cas d'insolvabilité du conjoint survivant ou à la demande de celui-ci, la réduction de l'avantage matrimonial pouvait trouver à s'exercer en nature, de sorte que dans cette hypothèse, les bénéficiaires de l'indemnité de retranchement se trouvant en indivision avec le conjoint survivant, ceux-ci seraient alors bien fondés à demander un partage de cette indivision successorale, qu'enfin, compte-tenu de l'existence d'un bien immobilier, de désaccords importants entre madame [S] veuve [M] et les autres héritiers, de l'impossibilité de parvenir à un partage amiable et de la difficulté des opérations, il convenait de confirmer le jugement en ce qu'il avait ordonné le partage judiciaire de cette succession et conformément à l'article 1364 du code de procédure civile, désigné un notaire sous le contrôle d'un juge commis, pour établir un projet d'état liquidatif, qu'il appartiendrait au notaire qui serait désigné de procéder aux opérations préalables, à savoir à la liquidation du régime matrimonial et au calcul de l'indemnité de retranchement devant revenir aux intimés, qu'il n'y avait donc pas lieu de désigner un « notaire expert » à cet effet (arrêt, p. 6) ;

ALORS QU'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ; qu'il incombe en particulier aux enfants d'un premier lit qui sollicitent l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père afin de contester, en tant qu'il porterait atteinte à leurs droits successoraux, l'avantage matrimonial consenti par celui-ci à sa seconde épouse au terme d'une convention de changement de régime matrimonial, de présenter dès cette instance l'ensemble des moyens qu'ils estiment de nature à les rétablir dans leurs droits successoraux ; qu'en accueillant la seconde demande des consorts [M] en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père et en déclarant recevable leur action en retranchement destinée à reconstituer leur réserve héréditaire, cependant que les consorts [M] avaient été préalablement déboutés, par une décision devenue irrévocable, de leur première demande de partage de la succession de leur père fondée sur la prétendue nullité de la convention de changement de régime matrimonial litigieuse, demande également destinée à les rétablir dans leurs droits successoraux, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil et l'article 480 du code de procédure civile ;

ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée par madame [S] (conclusions, p. 12, alinéa 11, p. 14, alinéa 9 et p. 15, alinéas 1, 2 et 4), si la demande des consorts [M] en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur père, fondée sur l'action en retranchement, ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 2 septembre 2010, comme ayant le même objet que celle fondée sur la prétendue nullité de la convention de changement de régime matrimonial, à savoir la contestation des effets de l'avantage matrimonial litigieux afin de les rétablir dans leurs droits successoraux d'héritiers réservataires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR ordonné le partage judiciaire de la succession de [E] [M] ;

AUX MOTIFS, ADOPTES, QUE sur la recevabilité de l'action en retranchement, l'action en retranchement appartenait aux seuls enfants non issus du couple, en leur qualité de réservataires ; qu'en rejetant la demande des consorts [M] en nullité du changement de régime matrimonial des époux [E] [M]/[J] [S] et en constatant que cette dernière devenait propriétaire de tous les biens composant la communauté ayant existé entre elle et le défunt, le tribunal, par jugement du 2 septembre 2010, en avait tiré la conséquence logique en disant qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner l'ouverture et le partage de la succession de [E] [M] et que seule l'action en retranchement était ouverte aux héritiers ; que peu importait que ce jugement soit aujourd'hui définitif ; qu'il ne pouvait avoir autorité de la chose jugée sur ce point, dans la mesure où le rejet de la demande de liquidation et de partage de la succession était la suite logique du rejet de la demande en nullité de changement de régime matrimonial, en l'absence de demande à l'époque en retranchement de l'avantage matrimonial dont bénéficiait madame [S] veuve [M] ; que par application de l'article 920 du code civil, la réduction spéciale de l'avantage matrimonial ne pouvait être opérée que lors de la liquidation de la succession de l'époux ayant des enfants d'un autre lit ; qu'il ne s'ensuivait pas que la demande même de liquidation, bien que rejetée une première fois pour n'avoir pas été doublée d'une demande en retranchement, ne puisse être à nouveau présentée, précisément à l'occasion de l'introduction de l'action en retranchement ; que ce qui importait, c'est que les demandes soient concomitantes ; que l'action en retranchement restait possible, dès lors qu'elle n'était pas par ailleurs prescrite ; que [G], [T] et [U] [M], qui avaient engagé cette action, moins de 5 ans après le décès de leur père, n'étaient pas forclos et étaient donc parfaitement recevables à agir ; qu'il y avait lieu d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [E] [M] et de désigner le président de la Chambre des notaires du Rhône, avec faculté de délégation, pour y procéder, à l'exception des notaires des parties (jugement, p. 5 et 6) ; que sur le calcul de l'indemnité de retranchement, l'adoption le 27 janvier 2000 du régime de la communauté universelle par les époux [M]/[S], avec clause d'attribution intégrale des biens au conjoint survivant, renvoyait à l'application des dispositions de l'article 1527 du code civil ; que l'action en retranchement, dont bénéficiaient les enfants de la première union de [E] [M], s'exerçait conformément à l'article 1094-1 du code civil à hauteur de la quotité disponible des biens de la succession en pleine propriété, ou d'un quart de ses biens en pleine propriété plus les trois quarts en usufruit ou encore la totalité en usufruit ; que cette action était une action en réduction, régie par les articles 920 et suivants du code civil ; que le succès de cette action supposait néanmoins que soit établie la preuve que l'avantage matrimonial résultant pour madame [S] de l'adoption du régime de la communauté universelle excédait la quotité disponible ; que pour calculer l'avantage, il y avait lieu de liquider fictivement la communauté telle qu'elle aurait dû être si les époux avaient été mariés sous le régime légal, puis de la liquider selon ce qui est prévu par la convention matrimoniale ; qu'une fois l'avantage déterminé, il y aurait lieu de rechercher s'il excédait le montant de la quotité disponible permise entre époux au sens de l'article 1094-1 précité ; que s'il y avait excédent, il serait soumis au retranchement et réintégré à l'actif de la succession ; que pour déterminer les droits des parties, le notaire calculerait le montant de la réserve des héritiers et la quotité disponible et dirait si l'avantage matrimonial dépassait cette quotité ; qu'il calculerait l'indemnité de retranchement en comparant les valeurs (jugement, p. 8, alinéas 3 et suivants) ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE l'indemnité de retranchement, assimilable à une indemnité de réduction tombait dans la succession, ce qui justifiait que soient ordonnées les opérations de compte et liquidation de la succession de [E] [M] ; que par ailleurs, en cas d'insolvabilité du conjoint survivant ou à la demande de celui-ci, la réduction de l'avantage matrimonial pouvait trouver à s'exercer en nature, de sorte que dans cette hypothèse, les bénéficiaires de l'indemnité de retranchement se trouvant en indivision avec le conjoint survivant, ceux-ci seraient alors bien fondés à demander un partage de cette indivision successorale ; qu'enfin, compte-tenu de l'existence d'un bien immobilier, de désaccords importants entre madame [S] veuve [M] et les autres héritiers, de l'impossibilité de parvenir à un partage amiable et de la difficulté des opérations, il convenait de confirmer le jugement en ce qu'il avait ordonné le partage judiciaire de cette succession et conformément à l'article 1364 du code de procédure civile, désigné un notaire sous le contrôle d'un juge commis, pour établir un projet liquidatif ; qu'il appartiendrait au notaire qui serait désigné de procéder aux opérations préalables, à savoir à la liquidation du régime matrimonial et au calcul de l'indemnité de retranchement devant revenir aux intimés ; qu'il n'y avait donc pas lieu de désigner un « notaire expert » à cet effet (arrêt, p. 6) ;

ALORS QUE le succès de l'action en retranchement, qui se traduit par la perception d'une indemnité de retranchement, suppose que soit apportée la preuve que l'avantage a excédé la quotité disponible spéciale entre époux ; qu'en ordonnant d'ores et déjà le partage judiciaire de la succession de monsieur [M], par la considération que les bénéficiaires de l'indemnité de retranchement pourraient se trouver en indivision avec le conjoint survivant et que les désaccords importants entre les héritiers rendaient impossible un partage amiable, cependant qu'il n'était pas établi que l'avantage matrimonial litigieux excédait la quotité disponible spéciale entre époux et que, par voie de conséquence, les bénéficiaires de l'action en retranchement se trouveraient effectivement créanciers d'une indemnité de retranchement et en indivision avec le conjoint survivant, la cour d'appel a violé l'article 840 du code civil.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.