7 décembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-23.820

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2016:SO02271

Texte de la décision

SOC.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 décembre 2016




Rejet


M. CHAUVET, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président



Arrêt n° 2271 F-D

Pourvoi n° B 15-23.820







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. [S] [L], domicilié [Adresse 2],

contre l'arrêt rendu le 18 juin 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société [T] et Guillouet, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de M. [T], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bergame,

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 8 novembre 2016, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Slove, conseiller rapporteur, Mme Basset, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Slove, conseiller, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet en lieu et place de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. [L], de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société [T] et Guillouet, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu selon l'arrêt attaqué, (Paris, 18 juin 2015), que M. [L] a été engagé le 1er janvier 2001 par la société Artepack, filiale de la société Artecom, en qualité de directeur commercial ; que le 24 avril 2003, il a été nommé administrateur de la société Artecom devenue la société Bergame ; qu'il a été engagé le 1er janvier 2006 par la société Bergame en qualité de directeur technico-commercial et responsable qualité de la branche PLV du groupe Bergame ; que la société Bergame a été placée en liquidation judiciaire et la société [T] et Guillouet désignée en qualité de liquidateur ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que M. [L] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le contrat de travail conclu avec la société Bergame était affecté de nullité absolue alors, selon le moyen, qu'un salarié peut cumuler cette qualité et celle d'administrateur de la société qui l'emploie lorsque son contrat de travail est antérieur à son mandat social ; qu'en cas de mutation du salarié à l'intérieur d'un groupe de sociétés, étroitement associées et présentant une cohésion économique, c'est dans le cadre de ce groupe qu'il convient d'apprécier la condition d'antériorité d'un contrat de travail ; qu'en refusant d'apprécier la condition d'antériorité du contrat de travail conclu par M. [L] à sa nomination en qualité d'administrateur de la société Bergame le 24 avril 2003, au niveau du groupe, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la filiale avec laquelle M. [L] avait conclu le 1er décembre 2001 et la société mère au sein de laquelle il était muté n'étaient pas étroitement associées et ne présentaient pas une cohésion économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 225-22 du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que M. [L] avait conclu un nouveau contrat de travail avec la société Bergame, dans le cadre d'une réorganisation interne du groupe, sans poursuite du contrat de travail antérieurement conclu avec la société Artepack, pour des fonctions et une rémunération différentes, la cour d'appel qui n'avait pas à faire une recherche que ses constatations rendaient inutiles, en a exactement déduit que ce contrat qui avait pris effet le 1er janvier 2006 alors que l'intéressé occupait des fonctions d'administrateur, était nul ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen, ci-après annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que M. [L] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société [T] et Guillouet, prise en la personne de M. [T], ès qualités, la somme de 1 089 648 euros alors, selon le moyen :

1°/ que l'effet rétroactif attaché à l'annulation d'un contrat impose de replacer les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant son exécution, au moyen de restitutions réciproques ; qu'ainsi, en cas de nullité d'un contrat de travail, si le salarié est condamné à rembourser les salaires qu'il a perçus au titre du contrat annulé, il doit également être indemnisé pour les prestations qu'il a fournies ; qu'en se bornant à condamner à M. [L] à rembourser les rémunérations brutes perçues par celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil ;

2°/ que l'annulation d'un contrat de travail qui impose au salarié de rembourser les rémunérations perçues sans être indemnisé pour les prestations fournies porte une atteinte manifestement disproportionné aux droits de celui-ci sur les fruits de son travail, protégés par l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne des droits de l'homme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la privation de toute indemnisation de M. [L] quant au travail fourni en exécution du contrat de travail annulé ne portait pas une atteinte disproportionné au droit de créance du salarié tenant à la mise à disposition de son travail, eu égard au bénéfice qu'en avait malgré tout retiré de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des exigences de ce texte et de l'article L. 225-44 du code de commerce ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 225-44 du code de commerce que, pendant la durée de son mandat social, l'administrateur d'une société anonyme ne peut percevoir de la société aucune rémunération, permanente ou non, à la seule exception de celles prévues par les articles L. 225-45, L. 225-46, L. 225-47 et L. 225-53 de ce code ; qu'ayant constaté que le contrat de travail qui liait M. [L] à la société Bergame à compter du 1er janvier 2006 était atteint de nullité, pour avoir été conclu et exécuté alors qu'il était administrateur en fonction, la cour d'appel qui a condamné l'intéressé à rembourser le montant des salaires perçus depuis cette date, sans avoir à rechercher si cette condamnation était disproportionnée, les dispositions du texte précité étant d'ordre public, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres branches du moyen, ci-après annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [L] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Delvolvé et Trichet en lieu et place de la SCP Delaporte et Briard, avocat aux Conseils, pour M. [L].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le contrat de travail conclu entre la société Bergame et M. [L] était affecté de nullité absolue ;

Aux motifs que conformément à l'article L. 225-44 du code de commerce les administrateurs ne peuvent recevoir de la société aucune rémunération, permanente ou non, autre que celles autorisées, à savoir, les jetons de présence, celles exceptionnelles pour une mission donnée, celle du président du conseil d'administration, celle du directeur général ou du directeur général délégué ; que la loi du 22 mars 2012 a ouvert une possibilité aux administrateurs de devenir salariés, mais un tel cumul était impossible avant l'entrée en vigueur de cette dernière ; qu'ainsi, sous l'empire de la loi ancienne applicable au cas présent, un administrateur ne pouvait devenir salarié de la même société ; qu'en l'espèce, le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration du 30 décembre 2005 porte les mentions suivantes : " (..) Le Conseil est appelé à délibérer sur l'ordre du jour suivant : "EMBAUCHE DE MONSIEUR [S] [L] EN QUALITE DE DIRECTEUR COMMERCIAL RESPONSABLE DE LA QUALITE : statut salarié - cumul avec le mandat d'administrateur et tout autre mandat social à venir. Monsieur Le Président rappelle que Monsieur [S] [L], qui occupe actuellement les fonctions d'administrateur au sein de la Société BERGAME (mandat pour lequel il n'est pas rémunéré) va être embauché par la société BERGAME le 1er janvier 2006, en qualité de directeur technico-commercial et responsable qualité de la branche PLV du Groupe. (..) Il cumulera donc son statut d'administrateur avec celui de salarié (...). La rémunération mensuelle brute qui sera allouée à Monsieur [S] [L] s'élèvera à 7 435 € (SEPT MILLE QUATRE CENT TRENTE CINQ EUROS) sur 12 mois, hors fiais professionnels." ; que Monsieur [L] soutient que la réorganisation du groupe Bergame a eu pour conséquence le transfert de son contrat de travail avec la reprise de son ancienneté, et que ce transfert lui confère l'antériorité nécessaire à la validité de celui-ci, son mandat d'administrateur de la société Bergame SA étant postérieur à sa qualité de salarié au sein du groupe ; que cependant, et contrairement à ce que voudrait voir retenir monsieur [L], son contrat de travail n'a pas été transféré nonobstant les termes, sans portée dans le cadre du présent litige, du "Livre entrée et sortie du personnel" de la société Artepack ; qu'en effet, il n'y a pas eu rachat de la société Artepack par la société Bergame mais seulement une réorganisation interne qui ne saurait emporter les effets d'une cession ; que sur ce point, comme le souligne maître [T] ès qualités aux termes du procès-verbal des délibérations du conseil d'administration du 29 juillet 2005, versé aux débats par monsieur [L], il est exposé: "afin de rationaliser l'organisation du groupe et de réduire les frais de fonctionnement de chaque filiale, il est envisagé de confier à la société BERGAME une mission de conseil et d'assistance permanente dans le cadre de la gestion administrative, commerciale, technique, juridique et financière, auprès de ses filiales, par la signature entre BER GAME et ces dernières, d'une convention de prestations de services." ; que Monsieur [L] ne saurait mieux se limiter à contester la valeur probante du procès-verbal de délibération précité du 30 décembre 2005 en faisant valoir que ledit procès-verbal n'apparaît pas comme une décision côtée et paraphée au registre des réunions du conseil d'administration, alors en tout état de cause qu'il n'en justifie pas, la pièce qu'il prétend produire sur ce point et figurant à son bordereau de communication sous le numéro 17 n'étant que la copie du procès-verbal du 29 juillet 2005 ; que dans tous les cas, la poursuite de son contrat de travail antérieurement conclu avec la société Attepack n'est pas démontrée, il n'a pas été établi d'avenant au contrat initial et la reprise de son ancienneté par la société Bergame ne saurait caractériser le transfert du contrat initial ; qu'il sera encore observé que le périmètre fonctionnel du contrat conclu avec la société Artepack était différent de celui conclu avec la société Bergame puisque de directeur commercial, il est devenu, moyennant une rémunération très largement supérieure, directeur technico-commercial et responsable qualité au sein de la société holding qui facturait des prestations de services pour ses filiales ; que dès lors, il convient de retenir que monsieur [L] a bien été engagé par la société Bergame avec laquelle il a conclu un nouveau contrat de travail à compter du 1er janvier 2006 et alors qu'il y exerçait les fonctions d'administrateur depuis 2003 ; que dans ces conditions, la décision des premiers juges ne peut qu'être confirmée en ce qu'ils ont retenu que le contrat de travail était affectée d'une nullité absolue ;

Et, à les supposer adoptés, aux motifs que M. [L] était administrateur en fonction lorsqu'il a été embauché en tant que salarié par la SA Bergame le 1er janvier 2006 ; que M. [L] a effectivement travaillé au sein du groupe Bergame depuis le 1er janvier 2001 mais son arrivée chez Bergame fait suite à une embauche comme l'indique le procès-verbal de la réunion du 30 décembre 2005 ; que la présence du mot « embauche » aurait pu être le fruit d'une erreur de plume ; qu'en l'absence d'avenant au contrat de M. [L], comme ce fut le cas pour M. [W], conduit le tribunal à rejeter l'éventualité d'une erreur de plume ; qu'en conséquence, il y a réellement eu embauche et que celle-ci a eu lieu alors que M. [L] était administrateur de la SA Bergame ; que le contrat est nul et de nul effet ;

Alors, d'une part, qu'un salarié peut cumuler cette qualité et celle d'administrateur de la société qui l'emploie lorsque son contrat de travail est antérieur à son mandat social ; qu'en cas de mutation du salarié à l'intérieur d'un groupe de sociétés, étroitement associées et présentant une cohésion économique, c'est dans le cadre de ce groupe qu'il convient d'apprécier la condition d'antériorité d'un contrat de travail ; qu'en refusant d'apprécier la condition d'antériorité du contrat de travail conclu par M. [L] à sa nomination en qualité d'administrateur de la société Bergame le 24 avril 2003, au niveau du groupe, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la filiale avec laquelle M. [L] avait conclu le 1er décembre 2001 et la société mère au sein de laquelle il était muté n'étaient pas étroitement associées et ne présentaient pas une cohésion économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 225-22 du code de commerce ;

Alors, d'autre part et subsidiairement, qu'au sein d'un groupe de sociétés, le transfert d'un salarié d'une société à une autre s'analyse en une modification de son contrat de travail ; qu'en cas d'accord du salarié, c'est le même contrat de travail qui est de plein droit, poursuivi au sein de l'autre société du groupe ; qu'en jugeant néanmoins que le transfert de M. [L] de la société Artepack à la société mère, la société Bergame, à compter du 1er janvier 2006, emportait la rupture du contrat initialement conclu avec la société Artepak et la conclusion, à compter de cette date, d'un nouveau contrat avec la société Bergame, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Alors, par ailleurs et plus subsidiairement, que la novation du contrat de travail ne se présume pas ; qu'en retenant que la mutation de M. [L] auprès de la société mère avait opéré une rupture de son contrat de travail précédemment conclu avec la filiale et la conclusion d'un nouveau contrat de travail avec la société mère, sans caractériser l'intention du salarié de substituer un nouveau contrat à l'ancien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1273 du code civil ;

Alors, ensuite et plus subsidiairement encore, que il appartient au demandeur d'apporter la preuve des faits qu'il invoque à l'appui de sa prétention ; qu'en l'espèce, il incombait à M. [T], ès qualités, qui s'en prévalait à l'appui de sa demande de nullité du contrat de travail de M. [L], de justifier de la rupture du précédent contrat de M. [L] et de la conclusion d'un nouveau contrat avec la société Bergame ; qu'en annulant le contrat de travail de M. [L] au motif qu'il ne rapportait pas la preuve de la poursuite au sein de la société Bergame du contrat conclu le 1er janvier 2001 avec une filiale de celle-ci, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;

Alors, de surcroît et toujours aussi subsidiairement, que le maintien de l'ancienneté acquise figurant sur les bulletins de paie du salarié muté dans une société appartenant au même groupe présume du transfert de son contrat de travail ; qu'en retenant que le maintien de son ancienneté par la société Bergame ne pouvait caractériser le transfert du contrat initial conclu par M. [L] auprès de la société Artepack, la cour d'appel a violé les article 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

Alors, de plus et toujours aussi subsidiairement, que dès lors que le salarié est dans l'impossibilité morale d'obtenir un avenant à son contrat de travail, la preuve de la poursuite de celui-ci à des conditions modifiées peut se faire par tous moyens ; qu'en opposant à M. [L] qu'il n'apportait pas la preuve de la poursuite de son contrat de travail dès lors qu'aucun avenant n'avait été établi à son contrat de travail initial, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

Alors, d'autre part et toujours subsidiairement, que l'application des règles d'ordre public du droit du travail ne dépend pas de la qualification donnée par l'employeur pour définir sa relation avec ses salariés ; qu'en retenant néanmoins, par motifs adoptés, que la mutation de M. [L] au sein de la société Bergame valait conclusion d'un nouveau contrat de travail dès lors que le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration de la société Bergame en date du 30 décembre 2005 faisait état de « l'embauche » de ce salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Alors, enfin et plus subsidiairement, que l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail n'est pas limitée au seul cas du rachat d'une société par une autre ; qu'en écartant l'application de ces dispositions au seul motif qu'il n'y a pas eu rachat de la société Artepack par la société Bergame mais seulement une réorganisation interne, sans mieux caractériser en quoi cette « réorganisation » excluait l'application de ce texte, la cour d'appel l'a violé.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. [L] à payer à la Selarl [H], prise en la personne de maître [P] [T], ès qualités, la somme de 1 089 648 euros ;

Aux motifs que la décision des premiers juges ne peut qu'être confirmée en ce qu'ils ont retenu que le contrat de travail était affectée d'une nullité absolue ; que M. [L] doit en conséquence remboursement des salaires bruts indûment perçus ; qu'étant précisé que contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges qui seront infirmés sur ce point, les demandes en remboursement relatives à la période allant de janvier 2006 à juin 2008 ne sont pas prescrites ; qu'en effet, aux termes de l'ancien article 2262 du code civil le délai de prescription était fixé à 30 ans, ce délai a été ramené à 5 ans par la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, mais les dispositions transitoires de l'article 2222 du code civil ont prévu :"En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure." ; que conformément à l'article 1er du code civil, la loi n°2008-56I du 17 juin 2008 est entrée en vigueur le 19 juin 2008, soit, en l'absence de dispositions spécifiques, le lendemain de sa publication le 18 juin au journal officiel ; que dès lors, un nouveau délai de cinq ans a commencé à courir à compter du 19 juin 2008, et l'assignation ayant été délivrée le 18 juin 2013, la prescription n'est pas encourue ; qu'enfin doit demeurer sans incidence sur les effets de la nullité le fait que le juge-commissaire ait maintenu les salaires de monsieur [L] sur le fondement du contrat de travail que celui-ci produisait ; qu'au vu des pièces produites, monsieur [L] est donc redevable de la somme de 89.220 euros pour chacune des années 2006 et 2007, de la somme 181.752 euros pour chacune des années 2008, 2009 et 2010, et de celle de 182.976 pour chacune des années 2011 et 2012, soit un montant total de 1.089.648 euros au paiement duquel il doit être condamné au profit de maître [T] ès qualités » ;

Alors, d'une part, que l'effet rétroactif attaché à l'annulation d'un contrat impose de replacer les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant son exécution, au moyen de restitutions réciproques ; qu'ainsi, en cas de nullité d'un contrat de travail, si le salarié est condamné à rembourser les salaires qu'il a perçus au titre du contrat annulé, il doit également être indemnisé pour les prestations qu'il a fournies ; qu'en se bornant à condamner à M. [L] à rembourser les rémunérations brutes perçues par celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil ;

Alors, d'autre part, que l'annulation d'un contrat de travail qui impose au salarié de rembourser les rémunérations perçues sans être indemnisé pour les prestations fournies porte une atteinte manifestement disproportionné aux droits de celui-ci sur les fruits de son travail, protégés par l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne des droits de l'homme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la privation de toute indemnisation de M. [L] quant au travail fourni en exécution du contrat de travail annulé ne portait pas une atteinte disproportionné au droit de créance du salarié tenant à la mise à disposition de son travail, eu égard au bénéfice qu'en avait malgré tout retiré de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des exigences de ce texte et de l'article L. 225-44 du code de commerce ;

Alors, par ailleurs et à titre subsidiaire, que la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit qui a introduit dans le code de commerce l'article L. 225-21-1 du code de commerce autorisant sous certaines conditions le cumul d'un mandat d'administrateur et d'un contrat de travail, est d'application immédiate ; qu'en conséquence, à compter de son entrée en vigueur le 23 mars 2012, lorsque ses conditions sont réunies, l'administrateur peut cumuler cette qualité et celle de salarié ; qu'en condamnant M. [L] à rembourser le montant des rémunérations perçues après l'entrée en vigueur de ce texte, la cour d'appel l'a violé ainsi que l'article 2 du code civil ;

Alors, enfin et toujours subsidiairement, que l'ordonnance du 12 octobre 2012 rendu par le juge-commissaire désigné au redressement judiciaire de la société Bergame a été rendu au visa de l'article L. 631-11 du code de commerce, en sorte qu'elle avait pour objet de fixer la rémunération de M. [L], en sa qualité de mandataire pendant la période d'observation ; qu'en jugeant cette ordonnance avait seulement pour objet de maintenir le salaire de M. [L] sur le fondement du contrat de travail, en sorte qu'elle n'était sans conséquence sur la nullité, la cour d'appel l'a dénaturée, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

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