22 février 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-17.166

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2017:CO00219

Titres et sommaires

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Taxe d'apprentissage - Participation au développement de la formation professionnelle continue - Fait générateur - Date d'expiration du délai pour procéder aux dépenses et investissements

Si, en application de l'article 228 bis, devenu l'article 1599 ter I, du code général des impôts, et de l'article R. 6331-9 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, les employeurs sont astreints au paiement de la taxe d'apprentissage et de la participation au développement de la formation professionnelle à raison des salaires versés au cours de l'année écoulée, le fait générateur des créances fiscales résultant de cette obligation, et donc leur naissance régulière, se situe à la date à laquelle expire le délai qui est imparti aux employeurs pour procéder aux dépenses et investissements libératoires prévus par la loi, soit le 31 décembre de l'année considérée. Lorsque leur fait générateur se situe après le jugement d'ouverture de la procédure collective, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue constituent, pour les entreprises qui y sont assujetties, une obligation légale et sont inhérentes à l'activité poursuivie après le jugement d'ouverture, de sorte que la taxe et la participation précitées entrent dans les prévisions de l'article L. 622-17 du code de commerce

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Sauvegarde - Période d'observation - Poursuite de l'activité - Régime de faveur des créances nées après le jugement d'ouverture - Conditions - Naissance pour les besoins de la procédure - Applications diverses - Taxe d'apprentissage et participation au développement de la formation professionnelle continue

Texte de la décision

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 février 2017


Rejet


Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 219 F-P+B+I

Pourvoi n° U 15-17.166






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société [R] [X], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], agissant en qualité d'administrateur judiciaire et de mandataire ad hoc de la société Groupe Parisot,

2°/ la société [S], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Groupe Parisot,

contre l'arrêt rendu le 4 mars 2015 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, représenté par le comptable public du service des impôts des entreprises de [Localité 1], dont le siège est [Adresse 3],

défendeur à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 janvier 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la SCP [R] [X], ès qualités et de la SCP [S], ès qualités, de la SCP Foussard et Froger, avocat du comptable public du service des impôts des entreprises de Luxueil-les-Bains, l'avis de Mme Guinamant, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 4 mars 2015, RG n° 14/01945), que la société Groupe Parisot a été mise en sauvegarde par un jugement du 6 novembre 2012 ; que la procédure a été convertie en redressement judiciaire le 11 février 2014, le plan de cession totale de l'entreprise étant arrêté par un jugement du 8 avril 2014 et la liquidation judiciaire prononcée le 6 mai 2014 ; qu'assujettie à la taxe d'apprentissage et à la participation des employeurs à la formation professionnelle continue, la société Groupe Parisot avait déposé le 30 avril 2013, sans paiement, deux déclarations couvrant la période comprise entre le 1er janvier et le 5 novembre 2012 pour des montants respectifs de 26 016 euros et de 28 591 euros ; que les 28 juin et 16 août 2013, le comptable du service des impôts des entreprises a mis en demeure la société de payer respectivement la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue, en considérant qu'il s'agissait de créances nées postérieurement au jugement d'ouverture ;

Attendu que la SCP [R] [X], agissant en qualité de mandataire ad hoc de la société Groupe Parisot, et la SCP [S], en qualité de liquidateur de cette société, font grief à l'arrêt de les autoriser à régler, conformément aux dispositions de l'article L. 622-17 du code de commerce, les sommes réclamées par la direction générale des finances publiques au titre de la taxe d'apprentissage et de la participation à la formation professionnelle continue dues pour l'année 2012 alors, selon le moyen :

1°/ que seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; que l'employeur de dix salariés et plus procède, avant le 1er mars de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due, au versement de la participation au titre de la formation professionnelle continue ; que celle-ci est constituée d'un pourcentage minimal du montant des rémunérations versées pendant l'année en cours, s'élevant à 1 % ; qu'il en résulte que le versement de la taxe, au 1er mars de l'année N, est dû à raison des salaires versés au cours de l'année N-1 ; qu'en disant cependant que la taxe déclarée le 1er mars 2013, au titre de la participation à la formation professionnelle, et correspondant aux salaires versés avant le 6 novembre 2012, date du jugement d'ouverture, devait être payée prioritairement en application de l'article L. 622-17 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble les articles L. 6331-9 et R. 6331-9 du code du travail ;

2°/ que seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; que la taxe d'apprentissage, due sur les salaires versés au titre d'une année, doit être versée avant le 1er mars de l'année suivant celle du versement des salaires ; qu'il en résulte que le versement de la taxe, au 1er mars de l'année N, est dû à raison des salaires versés au cours de l'année N-1 ; qu'en disant cependant que la taxe d'apprentissage déclarée le 1er mars 2013, et correspondant aux salaires versés avant le 6 novembre 2012, date du jugement d'ouverture, devait être payée prioritairement en application de l'article L. 622-17 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble les articles 224, 225, et 228 bis du code général des impôts ;

3°/ que seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que les taxes litigieuses, bien qu'assises sur les salaires versés l'année précédente, étaient nées le 1er mars 2013, soit postérieurement au jugement d'ouverture, sans constater qu'elles étaient nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-17 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que si en application de l'article 228 bis, devenu l'article 1599 ter I, du code général des impôts, et de l'article R. 6331-9 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, les employeurs sont astreints au paiement de la taxe d'apprentissage et de la participation au développement de la formation professionnelle à raison des salaires versés au cours de l'année écoulée, le fait générateur des créances fiscales résultant de cette obligation, et donc leur naissance régulière, se situe à la date à laquelle expire le délai qui est imparti aux employeurs pour procéder aux dépenses et investissements libératoires prévus par la loi, soit le 31 décembre de l'année considérée ; qu'abstraction faite des motifs erronés fixant le fait générateur des créances de taxes à la date de leur exigibilité le 1er mars 2013, l'arrêt a exactement retenu que ces créances étaient nées postérieurement à l'ouverture de la sauvegarde le 6 novembre 2012 ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant énoncé que lorsque leur fait générateur se situe après le jugement d'ouverture de la procédure collective, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle constituent, pour les entreprises qui y sont assujetties, une obligation légale et sont inhérentes à l'activité poursuivie après le jugement d'ouverture, la cour d'appel en a exactement déduit que la taxe et la participation précitées entraient dans les prévisions de l'article L. 622-17 du code de commerce ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SCP [R] [X], en qualité de mandataire ad hoc de la société Groupe Parisot, et la SCP [S], en qualité de liquidateur de cette société, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la SCP [R] [X], ès qualités et la SCP [S], ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir autorisé la SCP [R]-[X], prise en la personne de Me [X] ès qualités, et la SCP Guyon Daval, ès qualités à régler, conformément aux dispositions de l'article L. 622-17 du code de commerce, les sommes réclamées par la Direction générale des finances publiques de [Localité 1] au titre de la taxe d'apprentissage et de la participation à la formation professionnelle continue dues pour l'année 2012 ;

AUX MOTIFS QU'entrent dans les prévisions de l'article L.622-17 du code de commerce, lorsque leur fait générateur se situe après le jugement d'ouverture de la procédure collective, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue lesquelles constituent, pour les sociétés qui y sont assujetties, une obligation légale et sont inhérentes à leur activité lorsque celle-ci est poursuivie après le jugement d'ouverture ; qu'en l'espèce, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue pour leur montant querellé sont assises sur les salaires versés entre le 1er janvier et le 5 novembre 2012 ; que conformément à l'article R. 6331-9 du code du travail, le fait générateur de la participation se situe au 1er mars de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due, soit à la date à laquelle expire le délai imparti à l'employeur pour réaliser ses contributions ou investissements ; que l'article 228 bis du code général des impôts, dans sa version applicable au 1er janvier 2014, disposait que l'employeur a jusqu'au 1er mars de l'année suivant celle du versement des salaires pour verser la taxe d'apprentissage aux organismes collecteurs habilités ; qu'il s'ensuit que, bien qu'assises sur les salaires versés l'année précédente, la taxe d'apprentissage et la participation des employeurs à la formation professionnelle continue litigieuses ne sont nées que le 1er mars 2013, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective ;

1) ALORS QUE seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; que l'employeur de dix salariés et plus procède, avant le 1er mars de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due, au versement de la participation au titre de la formation professionnelle continue ; que celle-ci est constituée d'un pourcentage minimal du montant des rémunérations versées pendant l'année en cours, s'élevant à 1 % ; qu'il en résulte que le versement de la taxe, au 1er mars de l'année N, est dû à raison des salaires versés au cours de l'année N-1 ; qu'en disant cependant que la taxe déclarée le 1er mars 2013, au titre de la participation à la formation professionnelle, et correspondant aux salaires versés avant le 6 novembre 2012, date du jugement d'ouverture, devait être payée prioritairement en application de l'article L.622-17 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble les articles L. 6331-9 et R. 6331-9 du code du travail ;

2) ALORS QUE seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; que la taxe d'apprentissage, due sur les salaires versés au titre d'une année, doit être versée avant le 1er mars de l'année suivant celle du versement des salaires ; qu'il en résulte que le versement de la taxe, au 1er mars de l'année N, est dû à raison des salaires versés au cours de l'année N-1 ; qu'en disant cependant que la taxe d'apprentissage déclarée le 1er mars 2013, et correspondant aux salaires versés avant le 6 novembre 2012, date du jugement d'ouverture, devait être payée prioritairement en application de l'article L.622-17 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble les articles 224, 225, et 228 bis du code général des impôts ;

3) ALORS QUE, en tout état de cause, seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que les autres créances nées après le jugement d'ouverture, comme celles nées avant ce jugement, doivent être déclarées au mandataire judiciaire ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que les taxes litigieuses, bien qu'assises sur les salaires versés l'année précédente, étaient nées le 1er mars 2013, soit postérieurement au jugement d'ouverture, sans constater qu'elles étaient nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.622-17 du code de commerce.

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