9 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-11.728

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2017:C300306

Titres et sommaires

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - nullité - exception de nullité - caractère perpétuel - limites - commencement d'exécution de l'acte - auteur du commencement d'exécution - absence d'influence

L'inscription d'une hypothèque constitue un commencement d'exécution indépendamment de la personne qui l'effectue. Dès lors, doit-être cassé l'arrêt qui, pour accueillir l'exception de nullité de l'engagement d'une société civile immobilière (SCI), retient que le fait de procéder à l'inscription de l'hypothèque ne constitue pas un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement par la SCI, l'inscription ayant été effectuée par la banque sur les suites immédiates de l'engagement nul et ne procédant pas d'un acte de volonté de cette société

Texte de la décision

CIV.3

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 mars 2017




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 306 FS-P+B+R+I

Pourvoi n° D 16-11.728







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France, société anonyme, dont le siège est [...],                       

contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Nouni, société civile immobilière, dont le siège est [...],                              

2°/ au syndicat des copropriétaires [...], [...] et [...], représenté par son syndic la société cabinet J Sotto, dont le siège est [...],                      

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 31 janvier 2017, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Maunand, conseiller rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, MM. Pronier, Nivôse, Mme Le Boursicot, M. Bureau, Mme Greff-Bohnert, M. Jacques, conseillers, Mmes Abgrall, Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, M. Charpenel, premier avocat général, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Maunand, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Nouni, l'avis de M. Charpenel, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 2426 du code civil, ensemble l'article 1134 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 décembre 2015), que, par acte notarié du 21 janvier 2008, la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France (la Caisse d'épargne) a accordé à M. et Mme C... un prêt qui était garanti par une hypothèque consentie par la société civile immobilière Nouni (la SCI) ; que la Caisse d'épargne a poursuivi la vente forcée de l'immeuble hypothéqué, suivant commandement de payer valant saisie immobilière du 18 juillet 2014, et a assigné la SCI devant le juge de l'exécution afin de voir fixer les modalités de la vente ;

Attendu que, pour accueillir l'exception de nullité de l'engagement de la SCI, l'arrêt retient que le fait de procéder à l'inscription de l'hypothèque ne constitue pas un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement par la SCI, l'inscription ayant été effectuée par la banque sur les suites immédiates de l'engagement nul et ne procédant pas d'un acte de volonté de la société ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'inscription d'une hypothèque constitue un commencement d'exécution indépendamment de la personne qui l'effectue, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la SCI Nouni aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Nouni et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la CEIDF de l'ensemble de ses demandes, prononcé la nullité du commandement de payer délivré le 18 juillet 2014 et ordonné la mainlevée de la procédure de saisie immobilière ;

AUX MOTIFS QUE : « par acte reçu le 21 janvier 2008 par Maître D..., notaire associé à Paris, fondant la saisie immobilière querellée, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France, ci-après la Caisse d'Epargne, a consenti à M. Franck C... et à Mme Nathalie E... son épouse un prêt d'un montant de 700.000 euros ; que cet emprunt était garanti par le cautionnement hypothécaire de « la Sci Nouni représentée par M. Franck C... et à Mme Nathalie E... son épouse, en qualité de seuls associés de la Sci Nouni, intervenant aux présentes » ; qu'il résulte des éléments de la cause et des pièces produites qu'au jour de l'acte, les époux C... n'étaient nullement les « seuls associés » de la Sci, ainsi qu'ils l'affirmaient faussement, dès lors que, par acte du 22 décembre 2003, dûment enregistré, M. Franck C... avait cédé l'intégralité de ses dix parts, soit 9 parts à Mme Nathalie E... et 1 part à Mme Thérèse C... et n'était donc plus associé, Mmes Nathalie E... et Thérèse C... étant les seules associées de la Sci Nouni ; que l'accord de Mme Thérèse C... pour consentir à cet acte de disposition n'ayant pas été obtenu, aucun procès-verbal d'assemblée de la société n'étant produit, c'est à bon droit que le premier juge a relevé que l'engagement hypothécaire de la Sci était nul faute d'accord unanime des associés ; qu'à ce titre, c'est vainement que l'appelante croit pouvoir soutenir que l'exception de nullité soulevée par la Sci serait prescrite pour n'avoir pas été soulevée dans le délai de cinq ans suivant la publication de l'inscription hypothécaire sur son bien immobilier, dès lors que, contrairement à l'analyse qu'en fait l'appelante, le fait de procéder à ladite inscription ne saurait constituer un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement par la Sci, l'inscription ayant été effectuée par la banque sur les suites immédiates de l'engagement nul, et ne procédant pas d'un acte de volonté de la société ; que de même, le fait que M. et Mme C... aient faussement déclaré auprès de la banque être les seuls associés de la Sci, alors même qu'aucun d'eux ne pouvait ignorer l'acte du 22 décembre 2003, ne saurait engager la société ni conférer aucune validité à l'acte ; que la nullité de l'acte de cautionnement étant acquise, il est sans intérêt de rechercher si ledit cautionnement était ou non conforme à l'intérêt social ; que la procédure de saisie immobilière se trouvant privée de tout effet eu égard à l'absence de titre exécutoire de nature à la fonder, l'examen de la demande relative à la prescription de la créance excède les pouvoirs du juge de l'exécution, ainsi que ceux de la cour statuant en matière de saisie immobilière ; qu'au demeurant, la Sci, qui poursuit et obtient la nullité de son propre cautionnement, n'a aucun intérêt à voir statuer sur la prescription de l'action de la Caisse d'Epargne ; que la demande tendant à voir « ordonner la mention de la déclaration de nullité et de la mainlevée ordonnée en marge de la copie du commandement » n'est fondée sur aucune disposition légale et sera rejetée ; que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions, sauf à dire que les dépens en seront mis à la charge de la Caisse d'Epargne qui succombe et conservera la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, la demande de la Sci Nouni fondée sur l'article 700 du code de procédure civile étant toutefois rejetée pour des motifs d'équité » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « que l'article R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution énonce que le juge doit vérifier que les conditions de la saisie immobilière posées aux articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du même code sont réunies, c'est-à-dire que le créancier est muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et que le bien saisi est de nature immobilière et saisissable ; qu'en l'espèce, le créancier poursuivant justifie de la copie exécutoire d'un acte notarié reçu par Maître D..., notaire à Paris le 24 janvier 2008 comprenant prêt au profit de M. et Mme C..., et cautionnement hypothécaire de la SCI Nouni, représentée à l'acte par M. C... et Mme C... son épouse, se déclarant seuls associés de la SCI ; qu'il est également justifié d'une mise en demeure valant déchéance du terme en date du 5 avril 2012 ; que sur la prescription de l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'article L. 137-2 du code de la consommation prévoit que l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ; que le code de la consommation dispose à titre préliminaire qu' « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 137-2 ne sont applicables qu'aux personnes physiques que ne constituent pas les sociétés civiles immobilières, même si leur personnalité morale paraît limitée, notamment au regard du droit fiscal ; que la SCI Nouni n'est donc pas fondée à convoquer la prescription biennale ; que sur la prescription de l'exception de nullité, la Caisse d'Epargne d'Ile de France fait valoir en premier lieu que l'exception de nullité de la garantie hypothécaire soulevée par la SCI Nouni est prescrite ; qu'il est cependant constant que la nullité, soulevée par voie d'exception, est perpétuelle, à moins que l'acte n'ait reçu un commencement d'exécution ; qu'en l'espèce, l'inscription de l'hypothèque consentie par la SCI Nouni, inscription intervenue à la seule initiative de la Caisse d'Epargne d'Ile de France postérieurement à l'engagement, ne constitue pas un commencement d'exécution ; qu'il n'est par ailleurs justifié d'aucun commencement d'exécution de la part de la SCI Nouni qui s'est constamment opposée à tout paiement ; que l'exception de nullité est donc recevable ; que sur la validité de la garantie hypothécaire, la SCI Nouni fait principalement valoir que lors de la souscription de l'engagement, les associés de la SCI étaient Mme Nathalie C..., épouse de M. Georges C... et Mme Thérèse C..., sa mère, par suite d'une cession opérée le 22 décembre 2003 des parts détenues par M. C... ; qu'il est justifié en l'espèce, d'une part de l'acte de cession, d'autre part de la signification à la SCI de cette cession par acte extrajudiciaire du 11 février 2004 ; que l'article 1849 du code civil dispose que dans les rapports avec les tiers le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social ; qu'il résulte des dispositions de l'article 1852 du code civil qu'au sein des sociétés civiles immobilières, les décisions qui excèdent les pouvoirs reconnus aux gérants sont prises selon les dispositions statutaires ou en l'absence de telles dispositions à l'unanimité des associés ; qu'en l'espèce, la SCI a pour objet la gestion, l'acquisition et l'exploitation de biens immobiliers et la location de tous immeubles, et toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société ; qu'il est précisé que le gérant dispose vis-à-vis des tiers des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société et faire tous les actes et opérations entrant dans l'objet social et qu'il ne peut accomplir les actes de disposition de biens de la société qui requièrent l'accord unanime des associés ; que l'hypothèque conventionnelle consentie pour garantir les dettes personnelles du gérant et de son épouse n'entre donc pas dans l'intérêt social et par conséquent, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation, une telle garantie ne peut être accordée que par accord unanime des associés, cet accord unanime n'étant valable qu'à la condition que cet engagement ne soit pas contraire à l'intérêt social ; que force est de constater que les associés n'ont pas donné leur accord à l'unanimité puisqu'il n'est justifié d'aucune assemblée ni d'aucune intervention de Mme Thérèse C..., associée depuis l'année 2004 ; qu'il importe donc peu que l'engagement hypothécaire n'ait pas été de nature à compromettre l'existence de la société en cas de mise en oeuvre de la garantie et partant qu'il ne soit pas nécessairement contraire à l'objet social, sa nullité étant encourue du seul fait que Mme Thérèse C... n'a pas donné son accord ; que par ailleurs, s'il est exact que l'irrégularité de l'engagement résulte des fausses déclarations du gérant de la société et de son épouse agissant dans leur intérêt personnel, lesquels ont déclaré à l'acte être les seuls associés, cette circonstance ne saurait interdire à la société de se prévaloir de l'irrégularité résultant de l'absence d'accord unanime, faute de quoi la société et les autres associés seraient privés de tout recours contre un gérant peu scrupuleux ; qu'il convient donc de constater que l'engagement de caution hypothécaire est nul et de nul effet, et que la Caisse d'Epargne d'Ile de France ne dispose d'aucun titre exécutoire à l'encontre de la SCI Nouni ; qu'il convient par conséquent de débouter la Caisse d'Epargne d'Ile de France de sa demande de vente forcée et de prononcer la nullité du commandement valant saisie immobilière du 8 juillet 2014 ; que les dépens seront compris dans les frais taxés de vente » ;

ALORS 1/ QUE l'exception de nullité ne peut être opposée lorsque la convention litigieuse a reçu commencement d'exécution, y compris lorsque celui-ci a émane de la partie demanderesse à l'encontre de laquelle l'exception est soulevée ; que, pour dire que la SCI Nouni pouvait valablement invoquer en défense la nullité de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a retenu que l'inscription hypothécaire avait été prise à l'initiative de la CEIDF et ne procédait pas d'un acte de volonté de la part de la SCI Nouni, laquelle s'était constamment opposée à tout paiement sans se livrer à aucun acte d'exécution ; qu'en statuant ainsi, quand le commencement d'exécution de l'acte de cautionnement hypothécaire paralysait le jeu de l'exception de nullité, bien qu'il eût émané de la banque par la réalisation des formalités de publicité foncière, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil ;

ALORS 2/ QUE pour dire que la SCI Nouni pouvait valablement invoquer en défense la nullité de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a retenu que l'inscription hypothécaire avait été prise à l'initiative de la CEIDF et ne procédait pas d'un acte de volonté de la part de la SCI Nouni, laquelle s'était constamment opposée à tout paiement sans se livrer à aucun acte d'exécution ; qu'en statuant ainsi, quand l'acte de cautionnement stipulait que « pour l'accomplissement des formalités de publicité foncière, les parties agissant dans un intérêt commun, donnent tous pouvoirs nécessaires à tout clerc de la société civile professionnelle dénommée en tête des présentes » (acte du 24 janvier 2008, p. 12), ce dont il résultait que les deux parties étaient à l'origine de l'inscription, laquelle ne provenait pas exclusivement de la CEIDF, la cour d'appel a dénaturé la convention des parties et violé par là-même l'article 1134 du code civil ;

ALORS 3/ QUE la publication de l'hypothèque conventionnelle est requise à peine d'inopposabilité aux tiers, ce dont il résulte qu'elle constitue un acte d'exécution nécessaire à la réalisation des droits du créancier ; que pour dire que la SCI Nouni pouvait valablement invoquer en défense la nullité de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a retenu, par un motif éventuellement adopté, que « l'inscription de l'hypothèque consentie par la SCI Nouni, inscription intervenue à la seule initiative de la Caisse d'Epargne d'Ile de France postérieurement à l'engagement, ne constitu[ait] pas un commencement d'exécution » (jugement, p. 3, dernier §) ; qu'en statuant ainsi, à supposer qu'elle ait entendu par-là que l'inscription de l'hypothèque en elle-même ne constituait pas un commencement d'exécution, indépendamment de la personne qui l'a effectuée, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, ensemble l'article 2422 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce ;

ALORS 4/ QUE pour dire que la SCI Nouni pouvait valablement invoquer en défense la nullité de l'acte de cautionnement, la cour d'appel a retenu que l'inscription hypothécaire avait été prise sur les suites immédiates de l'acte nul ; qu'en statuant ainsi, quand le commencement d'exécution d'un acte annulable a précisément pour effet de priver le débiteur de se prévaloir de la nullité par voie d'exception, la cour d'appel s'est déterminée par un motif impropre, violant ainsi l'article 1304 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté la CEIDF de l'ensemble de ses demandes, prononcé la nullité du commandement de payer délivré le 18 juillet 2014 et ordonné la mainlevée de la procédure de saisie immobilière ;

AUX MOTIFS QUE : « par acte reçu le 21 janvier 2008 par Maître D..., notaire associé à Paris, fondant la saisie immobilière querellée, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance d'Ile de France, ci-après la Caisse d'Epargne, a consenti à M. Franck C... et à Mme Nathalie E... son épouse un prêt d'un montant de 700.000 euros ; que cet emprunt était garanti par le cautionnement hypothécaire de « la Sci Nouni représentée par M. Franck C... et à Mme Nathalie E... son épouse, en qualité de seuls associés de la Sci Nouni, intervenant aux présentes » ; qu'il résulte des éléments de la cause et des pièces produites qu'au jour de l'acte, les époux C... n'étaient nullement les « seuls associés » de la Sci, ainsi qu'ils l'affirmaient faussement, dès lors que, par acte du 22 décembre 2003, dûment enregistré, M. Franck C... avait cédé l'intégralité de ses dix parts, soit 9 parts à Mme Nathalie E... et 1 part à Mme Thérèse C... et n'était donc plus associé, Mmes Nathalie E... et Thérèse C... étant les seules associées de la Sci Nouni ; que l'accord de Mme Thérèse C... pour consentir à cet acte de disposition n'ayant pas été obtenu, aucun procès-verbal d'assemblée de la société n'étant produit, c'est à bon droit que le premier juge a relevé que l'engagement hypothécaire de la Sci était nul faute d'accord unanime des associés ; qu'à ce titre, c'est vainement que l'appelante croit pouvoir soutenir que l'exception de nullité soulevée par la Sci serait prescrite pour n'avoir pas été soulevée dans le délai de cinq ans suivant la publication de l'inscription hypothécaire sur son bien immobilier, dès lors que, contrairement à l'analyse qu'en fait l'appelante, le fait de procéder à ladite inscription ne saurait constituer un commencement d'exécution de l'acte de cautionnement par la Sci, l'inscription ayant été effectuée par la banque sur les suites immédiates de l'engagement nul, et ne procédant pas d'un acte de volonté de la société ; que de même, le fait que M. et Mme C... aient faussement déclaré auprès de la banque être les seuls associés de la Sci, alors même qu'aucun d'eux ne pouvait ignorer l'acte du 22 décembre 2003, ne saurait engager la société ni conférer aucune validité à l'acte ; que la nullité de l'acte de cautionnement étant acquise, il est sans intérêt de rechercher si ledit cautionnement était ou non conforme à l'intérêt social ; que la procédure de saisie immobilière se trouvant privée de tout effet eu égard à l'absence de titre exécutoire de nature à la fonder, l'examen de la demande relative à la prescription de la créance excède les pouvoirs du juge de l'exécution, ainsi que ceux de la cour statuant en matière de saisie immobilière ; qu'au demeurant, la Sci, qui poursuit et obtient la nullité de son propre cautionnement, n'a aucun intérêt à voir statuer sur la prescription de l'action de la Caisse d'Epargne ; que la demande tendant à voir « ordonner la mention de la déclaration de nullité et de la mainlevée ordonnée en marge de la copie du commandement » n'est fondée sur aucune disposition légale et sera rejetée ; que le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions, sauf à dire que les dépens en seront mis à la charge de la Caisse d'Epargne qui succombe et conservera la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, la demande de la Sci Nouni fondée sur l'article 700 du code de procédure civile étant toutefois rejetée pour des motifs d'équité » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « que l'article R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution énonce que le juge doit vérifier que les conditions de la saisie immobilière posées aux articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du même code sont réunies, c'est-à-dire que le créancier est muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et que le bien saisi est de nature immobilière et saisissable ; qu'en l'espèce, le créancier poursuivant justifie de la copie exécutoire d'un acte notarié reçu par Maître D..., notaire à Paris le 24 janvier 2008 comprenant prêt au profit de M. et Mme C..., et cautionnement hypothécaire de la SCI Nouni, représentée à l'acte par M. C... et Mme C... son épouse, se déclarant seuls associés de la SCI ; qu'il est également justifié d'une mise en demeure valant déchéance du terme en date du 5 avril 2012 ; que sur la prescription de l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'article L. 137-2 du code de la consommation prévoit que l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ; que le code de la consommation dispose à titre préliminaire qu' « au sens du présent code, est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 137-2 ne sont applicables qu'aux personnes physiques que ne constituent pas les sociétés civiles immobilières, même si leur personnalité morale paraît limitée, notamment au regard du droit fiscal ; que la SCI Nouni n'est donc pas fondée à convoquer la prescription biennale ; que sur la prescription de l'exception de nullité, la Caisse d'Epargne d'Ile de France fait valoir en premier lieu que l'exception de nullité de la garantie hypothécaire soulevée par la SCI Nouni est prescrite ; qu'il est cependant constant que la nullité, soulevée par voie d'exception, est perpétuelle, à moins que l'acte n'ait reçu un commencement d'exécution ; qu'en l'espèce, l'inscription de l'hypothèque consentie par la SCI Nouni, inscription intervenue à la seule initiative de la Caisse d'Epargne d'Ile de France postérieurement à l'engagement, ne constitue pas un commencement d'exécution ; qu'il n'est par ailleurs justifié d'aucun commencement d'exécution de la part de la SCI Nouni qui s'est constamment opposée à tout paiement ; que l'exception de nullité est donc recevable ; que sur la validité de la garantie hypothécaire, la SCI Nouni fait principalement valoir que lors de la souscription de l'engagement, les associés de la SCI étaient Mme Nathalie C..., épouse de M. Georges C... et Mme Thérèse C..., sa mère, par suite d'une cession opérée le 22 décembre 2003 des parts détenues par M. C... ; qu'il est justifié en l'espèce, d'une part de l'acte de cession, d'autre part de la signification à la SCI de cette cession par acte extrajudiciaire du 11 février 2004 ; que l'article 1849 du code civil dispose que dans les rapports avec les tiers le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social ; qu'il résulte des dispositions de l'article 1852 du code civil qu'au sein des sociétés civiles immobilières, les décisions qui excèdent les pouvoirs reconnus aux gérants sont prises selon les dispositions statutaires ou en l'absence de telles dispositions à l'unanimité des associés ; qu'en l'espèce, la SCI a pour objet la gestion, l'acquisition et l'exploitation de biens immobiliers et la location de tous immeubles, et toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société ; qu'il est précisé que le gérant dispose vis-à-vis des tiers des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société et faire tous les actes et opérations entrant dans l'objet social et qu'il ne peut accomplir les actes de disposition de biens de la société qui requièrent l'accord unanime des associés ; que l'hypothèque conventionnelle consentie pour garantir les dettes personnelles du gérant et de son épouse n'entre donc pas dans l'intérêt social et par conséquent, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation, une telle garantie ne peut être accordée que par accord unanime des associés, cet accord unanime n'étant valable qu'à la condition que cet engagement ne soit pas contraire à l'intérêt social ; que force est de constater que les associés n'ont pas donné leur accord à l'unanimité puisqu'il n'est justifié d'aucune assemblée ni d'aucune intervention de Mme Thérèse C..., associée depuis l'année 2004 ; qu'il importe donc peu que l'engagement hypothécaire n'ait pas été de nature à compromettre l'existence de la société en cas de mise en oeuvre de la garantie et partant qu'il ne soit pas nécessairement contraire à l'objet social, sa nullité étant encourue du seul fait que Mme Thérèse C... n'a pas donné son accord ; que par ailleurs, s'il est exact que l'irrégularité de l'engagement résulte des fausses déclarations du gérant de la société et de son épouse agissant dans leur intérêt personnel, lesquels ont déclaré à l'acte être les seuls associés, cette circonstance ne saurait interdire à la société de se prévaloir de l'irrégularité résultant de l'absence d'accord unanime, faute de quoi la société et les autres associés seraient privés de tout recours contre un gérant peu scrupuleux ; qu'il convient donc de constater que l'engagement de caution hypothécaire est nul et de nul effet, et que la Caisse d'Epargne d'Ile de France ne dispose d'aucun titre exécutoire à l'encontre de la SCI Nouni ; qu'il convient par conséquent de débouter la Caisse d'Epargne d'Ile de France de sa demande de vente forcée et de prononcer la nullité du commandement valant saisie immobilière du 8 juillet 2014 ; que les dépens seront compris dans les frais taxés de vente » ;

ALORS 1/ QUE le gérant d'une société civile engage la société vis-à-vis des tiers par les actes entrant dans l'objet social ; que, pour rejeter les demandes de la CEIDF, la cour d'appel a relevé que l'accord de madame Thérèse C..., associée minoritaire, était requis pour consentir à un acte de disposition, de sorte qu'en l'absence de procès-verbal d'assemblée de la SCI Nouni, le cautionnement hypothécaire devait être déclaré nul ; qu'en statuant ainsi, quand la qualification d'acte de disposition importait peu dès lors qu'il entrait dans l'objet social et que la délimitation de l'objet social constituait le seul critère à appliquer pour déterminer si la SCI Nouni était ou non engagée envers le créancier par l'acte de cautionnement conclu par sa gérante, madame Nathalie C..., la cour d'appel a violé l'article 1849 du code civil, ensemble l'article 1134 du même code ;

ALORS 2/ QUE le gérant d'une société civile engage la société vis-à-vis des tiers par les actes entrant dans l'objet social ; que, pour rejeter les demandes de la CEIDF, la cour d'appel a relevé, par motifs éventuellement adoptés du premier juge, que le cautionnement hypothécaire n'entrait pas dans l'objet social de la SCI Nouni ; qu'en statuant ainsi, quand elle relevait pourtant que la société garante avait pour objet « la gestion, l'acquisition et l'exploitation de biens immobiliers et la location de tous immeubles, et toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société », ce dont il résultait que l'objet social était défini de manière suffisamment large pour inclure la conclusion d'un cautionnement hypothécaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS 3/ QUE la sûreté consentie par une société et n'entrant pas directement dans son objet est néanmoins valable lorsqu'existe une communauté d'intérêts entre elle et la personne dont la dette est ainsi garantie, même si les associés n'ont pas donné unanimement leur accord ; qu'en déclarant nul le cautionnement hypothécaire donné par la SCI Nouni sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'existait pas une communauté d'intérêts entre la SCI garante et les époux débiteurs principaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1852 et 1854 du code civil ;

ALORS 4/ QUE une société civile ne peut se prévaloir à l'encontre des tiers d'une nullité imputable à son gérant ; qu'en déclarant nul le cautionnement hypothécaire quand elle constatait pourtant que les époux C... s'étaient faussement présentés comme seuls associés de la SCI Nouni, ce dont il résultait que cette dernière ne pouvait se prévaloir d'une nullité imputable à son représentant légal, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil, ensemble l'article 1849 du même code.

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