8 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-13.032

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2017:C100297

Titres et sommaires

NOM - nom patronymique - changement - faculté de choix - déclaration - demande postérieure - irrecevabilité - cas

L'article 23 de la loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 relative au nom de famille, modifié par l'article 11 de la loi n° 2003-516 du 18 juin 2003, a prévu un dispositif transitoire permettant aux parents, pendant un délai de dix-huit mois suivant la date d'entrée en vigueur, fixée au 1er janvier 2005, de demander, par déclaration conjointe à l'officier de l'état civil, au bénéfice de l'aîné des enfants communs lorsque celui-ci avait moins de treize ans au 1er septembre 2003 ou à la date de la déclaration, l'adjonction en deuxième position du nom du parent qui ne lui avait pas transmis le sien, dans la limite d'un seul nom de famille, le nom ainsi attribué étant dévolu à l'ensemble des enfants communs, nés et à naître. Ce texte prévoyait, comme l'article 311-24 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, que la faculté de choix ne pouvait être exercée qu'une seule fois, de sorte que le choix des parents d'accoler leurs deux noms était irrévocable. Toute demande postérieure à cette déclaration, visant à modifier judiciairement le nom de l'enfant, est dès lors irrecevable et relève de la procédure de changement de nom prévue à l'article 61 du code civil

Texte de la décision

CIV. 1

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 mars 2017




Rejet


Mme X..., président



Arrêt n° 297 FS-P+B+I

Pourvoi n° W 16-13.032







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Daniel Y..., domicilié [...],                                

2°/ Mme Carine Z..., épouse Y..., domiciliée [...],                                

contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2015 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre B), dans le litige les opposant au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié [...],                                                         

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 31 janvier 2017, où étaient présents : Mme X..., président, Mme B..., conseiller référendaire rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, MM. Hascher, Reynis, Mme Reygner, M. Vigneau, Mme Bozzi, M. Acquaviva, Mme Auroy, conseillers, Mme Guyon-Renard, MM. Mansion, Roth, Mmes Mouty-Tardieu, Gargoullaud, conseillers référendaires, M. Bernard de La Gatinais, premier avocat général, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme B..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. et Mme Y..., l'avis de M. Bernard de La Gatinais, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 novembre 2015), que Lola A..., née le [...], a été reconnue par sa mère, Mme Z..., le 11 avril 2002, et par son père, M. Y..., le 19 mai 2005 ; que le même jour, ceux-ci ont choisi, par déclaration conjointe reçue par un officier de l'état civil, d'accoler leurs deux noms afin qu'elle se nomme Z...-Y... ; qu'après leur mariage, célébré le 29 octobre 2009, ils ont, par requête du 6 mai 2014, saisi le président du tribunal de grande instance afin que l'enfant porte exclusivement le nom de son père ;

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur requête alors, selon le moyen :

1°/ que la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que, pour décider que les parents ne pouvaient plus solliciter un changement de nom de l'enfant, l'arrêt attaqué a considéré que, le 19 mai 2005, ils avaient déjà exercé la faculté prévue à l'article 311-23 du code civil qui ne peut être utilisée qu'une seule fois ; qu'en se prononçant ainsi quand elle constatait que cette disposition avait été introduite par l'ordonnance du 4 juillet 2005 entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que, avant cette date et a fortiori avant sa promulgation, les parents n'avaient pu solliciter le changement de nom de l'enfant sur son fondement et n'avait donc jamais pu exercer la faculté de choix prévue par ce texte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation des articles 2 et 311-23 du code civil ;

2°/ qu'au cours des dix-huit mois qui ont suivi le 1er janvier 2005, les parents d'un enfant né avant cette date ont pu demander, par déclaration conjointe à l'officier d'état civil, l'adjonction en seconde position du nom du parent qui ne lui avait pas transmis le sien ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté que, le 19 mai 2005, lors de l'établissement du second lien de filiation avec le père, les parents de l'enfant avaient, par déclaration conjointe devant l'officier d'état civil, choisi d'adjoindre à son nom celui du père ; qu'en décidant néanmoins qu'ils avaient exercé la faculté de changement de nom prévue par l'article 311-23 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 4 juillet 2005, quand les parents d'un enfant né le [...] avaient bénéficié du régime transitoire issu de la loi du 18 juin 2003 permettant uniquement à ceux-ci d'adjoindre en seconde position le nom du parent qui n'avait pas transmis le sien, la cour d'appel a violé ensemble les articles 2 et 311-23 du code civil ainsi que l'article 11 de la loi du 18 juin 2003 ;

Mais attendu que l'article 23 de la loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 relative au nom de famille, modifié par l'article 11 de la loi n° 2003-516 du 18 juin 2003, a prévu un dispositif transitoire permettant aux parents, pendant un délai de dix-huit mois suivant la date d'entrée en vigueur, fixée au 1er janvier 2005, de demander, par déclaration conjointe à l'officier de l'état civil, au bénéfice de l'aîné des enfants communs lorsque celui-ci avait moins de treize ans au 1er septembre 2003 ou à la date de la déclaration, l'adjonction en deuxième position du nom du parent qui ne lui avait pas transmis le sien, dans la limite d'un seul nom de famille, le nom ainsi attribué étant dévolu à l'ensemble des enfants communs, nés et à naître ;

Que ce texte prévoyait, comme l'article 311-24 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, que la faculté de choix ne pouvait être exercée qu'une seule fois, de sorte que le choix des parents d'accoler leurs deux noms était irrévocable ;

Que toute demande postérieure à cette déclaration, visant à modifier judiciairement le nom de l'enfant, est dès lors irrecevable et relève de la procédure de changement de nom prévue à l'article 61 du code civil ;

Que, la cour d'appel ayant constaté que, le 19 mai 2005, les parents avaient, par déclaration conjointe devant l'officier de l'état civil, choisi d'accoler leurs noms, il en résulte que ces derniers ne pouvaient présenter une demande de changement de nom, sur le fondement de l'article 311-23, alinéa 2, du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 4 juillet 2005 ; que, par ce motif de pur droit, substitué dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les parents d'un enfant né hors mariage le [...] (M. Y... et Mme Z... épouse Y..., les exposants) de leur requête en substitution du nom du père à celui de l'enfant ;

AUX MOTIFS QUE la filiation de l'enfant Lola-A... avait été établie en premier lieu à l'égard de sa mère qui l'avait reconnue le 11 avril 2002 ; que l'enfant avait ainsi pris le nom Z... de cette dernière et que, lors de l'établissement du second lien de filiation avec son père M. Daniel Nicolas Y..., le 19 mai 2005, les parents de Lola-A... avaient, par déclaration conjointe devant l'officier d'état civil, choisi d'accoler leurs noms Z...-Y... et que le changement de nom de l'enfant avait été mentionné en marge de son acte de naissance ; que l'article 20 de l'ordonnance n° 2005-759 portant réforme de la filiation énonçait que, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, la présente ordonnance était applicable aux enfants nés avant comme après son entrée en vigueur ; que l'article 311-24 du code civil disposait que la faculté de choix ouverte en application des articles 311-21 et 311-23 du code civil du même code ne pouvait être exercée qu'une fois, selon l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 qui était applicable aux enfants nés avant comme après son entrée en vigueur le [...]            ; que la faculté de changement de nom prévue par l'article 311-23 du code civil avait été exercée par les parents de l'enfant Lola-A... le 19 mai 2005, de sorte que ces derniers ne pouvaient plus solliciter un nouveau changement de nom pour leur enfant et qu'il convenait de les débouter de leur demande tendant à voir rectifier l'acte de naissance de leur fille ;

ALORS QUE, d'une part, la loi ne dispose que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; que, pour décider que les parents ne pouvaient plus solliciter un changement de nom de l'enfant, l'arrêt attaqué a considéré que, le 19 mai 2005, ils avaient déjà exercé la faculté prévue à l'article 311-23 du code civil qui ne peut être utilisée qu'une seule fois ; qu'en se prononçant ainsi quand elle constatait que cette disposition avait été introduite par l'ordonnance du 4 juillet 2005 entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que, avant cette date et a fortiori avant sa promulgation, les parents n'avaient pu solliciter le changement de nom de l'enfant sur son fondement et n'avait donc jamais pu exercer la faculté de choix prévue par ce texte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en violation des articles 2 et 311-23 du code civil ;

ALORS QUE, d'autre part, au cours des dix-huit mois qui ont suivi le 1er janvier 2005, les parents d'un enfant né avant cette date ont pu demander, par déclaration conjointe à l'officier d'état civil, l'adjonction en seconde position du nom du parent qui ne lui avait pas transmis le sien ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté que, le 19 mai 2005, lors de l'établissement du second lien de filiation avec le père, les parents de l'enfant avaient, par déclaration conjointe devant l'officier d'état civil, choisi d'adjoindre à son nom celui du père ; qu'en décidant néanmoins qu'ils avaient exercé la faculté de changement de nom prévue par l'article 311-23 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 4 juillet 2005, quand les parents d'un enfant né le [...] avaient bénéficié du régime transitoire issue de la loi du 18 juin 2003 permettant uniquement à ceux-ci d'adjoindre en seconde position le nom du parent qui n'avait pas transmis le sien, la cour d'appel a violé ensemble les articles 2 et 311-23 du code civil ainsi que l'article 11 de la loi du 18 juin 2003.

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