13 juillet 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-14.857

Chambre sociale - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:SO10829

Texte de la décision

SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 juillet 2017




Rejet non spécialement motivé


M. X..., conseiller le plus ancien
faisant fonction de président



Décision n° 10829 F

Pourvoi n° E 16-14.857







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. Jean Y..., domicilié [...],

contre l'arrêt rendu le 3 février 2016 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant à la société Z... B..., société par actions simplifiée, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

La société Z... B... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 juin 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller le plus ancien faisant fonction de président et rapporteur, MM. Maron, Déglise, conseillers, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP François-Henri Briard, avocat de M. Y..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Z... B... ;

Sur le rapport de M. X..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens au pourvoi principal ainsi que celui au pourvoi incident annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP François-Henri Briard, avocat aux Conseils, pour M. Y... (demandeur au pourvoi principal).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir constaté que le contrat de travail de M. Y... a été suspendu entre le 17 juin 1991 et le 21 mai 2013 du fait de l'exercice de son mandat social, d'avoir rejeté la demande de nullité du licenciement et les demandes subséquentes à titre de rappel de salaire sur le fondement de la garantie de ressources et à titre de dommages intérêts pour perte de points de retraite et préjudice moral consécutif au harcèlement, et d'avoir condamné M. Y... à restituer à la société Z... B... la somme de 100.781,05 euros indûment perçue;

Aux motifs que « SUR LE CUMUL ENTRE LE CONTRAT DE TRAVAIL DE MONSIEUR Y... ET SON MANDAT SOCIAL, la société Z... B... soutient que Monsieur Y... n'avait aucune fonction technique distincte de ses fonctions résultant de son mandat social et aucun lien de subordination avec la société qu'il dirigeait ; qu'en conséquence son contrat de travail a été suspendu pendant la durée des mandats sociaux qu'il a exercés ; que Monsieur Y... rétorque que ses fonctions techniques étaient réelles et qu'il supervisait l'activité de l'atelier, outre le fait qu'il était chargé de la commercialisation des produits ; qu'un mandat social n'est pas incompatible avec un contrat de travail ; que toutefois pour que le cumul soit possible il faut que le contrat de travail corresponde à un emploi effectif s'entendant de fonctions techniques distinctes de celles de direction, donnant lieu en principe à rémunération distincte, exercées dans le cadre d'un lien de subordination vis à vis de la société et dans des conditions exclusives de toute fraude à la loi ; qu'en présence d'un contrat de travail écrit antérieur au mandat social, il appartient à celui qui soutient qu'il n'y avait pas eu cumul du contrat de travail et du mandat social postérieur d'en rapporter la preuve ; que comme soulevé à juste titre par la société Z... B..., l'établissement de fiches de paie, le paiement d'une indemnité de licenciement ou les mentions du commissaire aux comptes relatives au salaire de Monsieur Y... sont insuffisants à caractériser la poursuite du contrat de travail et le maintien d'un lien de subordination ; que la société Z... B... produit les procès verbaux des assemblées générales nommant Monsieur Y... comme mandataire social à, partir de 1991 et précisant, lorsque la société est devenue une société anonyme, qu'il était investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances en son nom ; que les fonctions de directeur technique et commercial précisées dans le contrat de travail de Monsieur Y... consistaient notamment à analyser les données du marché pour les articles distribués par la société ainsi que la position des concurrents, fixer, en accord avec la direction, la politique commerciale, les objectifs de vente, la pratique des prix, marges, tarifs et remises, gérer les effectifs, promouvoir les articles distribués par la société, visiter personnellement les clients importants, accompagner les représentants au besoin, enquêter sur la solvabilité des clients, superviser toutes études et solutions techniques liées à l'exploitation des produits, diriger l'ensemble des services affectés à la vente, apporter sa contribution à la croissance permanente des activités de l'entreprise, tout en améliorant sa rentabilité ; qu'en qualité de gérant puis président de la société Z... B... petite structure comprenant moins de 11 salariés et dont l'activité était principalement la vente en B... des produits fabriqués par le groupe, Monsieur Y... était investi des plus larges pouvoirs dans sa direction générale et les attributions figurant dans son contrat de travail ne se distinguaient pas de celles liées à l'exercice de son mandat social, qui se confondaient avec l'objet social de l'entreprise ; qu'ainsi, le mandat absorbait les fonctions de directeur technique et commercial ; qu'en outre, Monsieur Y... lui même indique dans ses conclusions que : - les faits reprochés dans la lettre de licenciement relevaient du mandat de président et non de l'exécution du contrat de travail ; - le système de reporting mis en place permettait à Monsieur Thomas Z... d'être informé de l'activité de la société et de donner des instructions niais qui ne concernaient pas l'activité de directeur commercial et technique mais son mandat social de président qu'il exerçait sous sa tutelle constante ; - Monsieur Thomas Z... ne venait en B... voir sa filiale qu'une fois par an, lors de l'assemblée générale ordinaire, exceptionnellement pour une AG extraordinaire et qu'en 23 ans, il n'avait fait que 4 visites avec lui pour rencontrer des clients importants et deux autres visites pour rencontrer des sociétés qu'il projetait de racheter ; que de même, les demandes faites par l'actionnaire unique à Monsieur Y... lors de l'assemblée générale extraordinaire du 1er mars 2013 concernant notamment le budget ou la réduction des coûts relevaient de son mandat social ; qu'ainsi, dès lors que Monsieur Y... exerçait tontes les fonctions de direction de la société et qu'aucun secteur ne lui échappait, plus aucun lien du subordination ne perdurait avec le signataire de son contrat de travail, étant précisé que le lien de subordination ne doit pas se confondre avec les directives que peut recevoir le mandataire de la part des associés ou du conseil d'administration et qui sont la conséquence logique de son mandat ; qu'en conséquence, à défaut de fonctions techniques distinctes de celles de direction et de lien de subordination vis à vis de la société Z... B..., le contrat de travail de Monsieur Y... a été automatiquement suspendu pendant la durée des différents mandats exercés à compter du 17 juin 1991 jusqu'au 21 mai 2013 ; qu'en revanche, à compter du 22 mai 2013, suite à sa démission de son dernier mandat social, le contrat de travail de Monsieur Y... a repris ses effets » ; (arrêt p. 3, antépénultième à dern. al. et p. 4)

Alors, d'une part, que le contrat de travail est caractérisé par l'existence de fonctions techniques distinctes exercées dans un lien de subordination qui soumet le salarié au pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l'employeur ; que dès lors en citant les fonctions commerciales de M. Y... et en affirmant que, dans cette petite structure, le salarié était investi « des plus larges pouvoirs dans sa direction générale et les attributions figurant dans son contrat de travail ne se distinguaient pas de celles liées à son mandat qui se confondaient avec elle » pour dire que les attributions commerciales de M. Y... n'étaient pas distinctes de son mandat social et se confondaient avec lui, sans même s'expliquer sur ces fonctions ni exposer en quoi les tâches qu'elle énumérait étaient comprises dans la fonction de président, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Alors, d'autre part, qu'en se bornant à citer les fonctions commerciales de M. Y... pour dire que ces attributions ne se distinguaient pas de celles liées à son mandat qui se confondaient avec elle, sans s'expliquer sur les attributions techniques de M. Y..., liées à sa qualité d'ingénieur compétent en matière de transfert d'hydrocarbures, fonctions totalement distinctes du mandat social et exercées sous le seul contrôle et les seules directives de l'associée unique de la société Z... B..., la SAETA, société exclusivement familiale dont le principal dirigeant était M. Thomas Z..., la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Alors, au surplus, qu'en affirmant que « M. Y..., exerçant toutes les fonctions de direction, plus aucun lien de subordination ne perdurait », sans rechercher si l'autorité et l'hégémonie dans la conduite de la filiale française de M. Thomas Z..., dirigeant de droit et de fait du groupe Z..., ne caractérisaient pas, au travers des instructions et directives continuelles qu'il donnait dans tous les domaines d'activité, le lien de subordination de M. Y... à l'égard de la société mère et de la filiale, en sa qualité de président comme en celle de directeur commercial et technique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Alors, encore, qu'en s'abstenant de rechercher si la persistance du contrat de travail et la subordination de M. Y... envers la société Z... B..., dont l'actionnaire majoritaire était la société mère allemande la SAETA GmbH & Co.KG, elle même dirigée par M. Thomas Z..., ne résultait pas de l'établissement, pendant 23 ans sans discontinuité, y compris pendant l'exercice du mandat social, de bulletins de salaire faisant état de sa fonction directeur technique et commercial comme de son ancienneté au 1er septembre 1990, de l'absence de contestation de la qualité de salarié avant l'audience d'appel, y compris lors de la rupture qui avait été prononcée sous les formes et la qualification d'un licenciement et assortie des indemnités correspondantes, de l'acceptation par la société Z... B... de la compétence prudhommale qui impliquait reconnaissance de la qualité de salarié de M. Y... et, enfin, des motifs du licenciement lui reprochant des fautes dans l'accomplissement de ses fonctions de directeur commercial, projets de budget pour 2013 irréalistes, propositions de redressement de la situation économique non viables, manquement à ses obligations en matière de process, base de données, classification clients, activité commerciale, présence dans l'entreprise, règlement du dossier Magyar, ensemble de tâches relevant spécifiquement de la direction commerciale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Alors, en outre, qu'en constatant que la société Z... B... « justifiait avoir engagé M. A... en qualité de responsable des ventes à compter du 14 octobre 2013 avec des fonctions similaires à celles de M. Y... », ce dont il résultait que M. Y... avait été remplacé par un salarié non mandataire social et que ses fonctions étaient donc bien celles d'un salarié, étrangères à un mandat social, et en déclarant néanmoins que M. Y... n'avait pas exercé de fonctions techniques distinctes de son mandat social, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Et alors, enfin, qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir du chef du rejet du cumul d'un mandat social et du contrat de travail, entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt ayant déclaré que le harcèlement invoqué par M. Y... était intervenu alors que le contrat de travail était suspendu et portait sur l'exercice du mandat social, de 1991 au 23 mai 2013, ayant rejeté ses demandes à titre de rappel de salaires au titre de la garantie de ressources, dommages intérêts pour perte de points de retraite et l'ayant condamné à restituer à la société Z... B... la somme de 100.781,05 euros indûment perçue ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Y... à restituer à la société Z... B... l'indemnité de licenciement d'un montant de 100.781,05 €

Aux motifs que s'agissant de l'ancienneté de monsieur Y..., aux termes de l'article L1234-11 du Code du travail "les circonstances entraînant la suspension du contrat de travail, en vertu soit de dispositions légales, soit d'une convention ou d'un accord collectif de travail, soit de stipulations contractuelles, soit d'usages, ne rompent pas l'ancienneté du salarié appréciée pour la détermination du droit à l'indemnité de licenciement ; toutefois, la période de suspension n'entre pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier de ces dispositions".

Comme soulevé à juste titre par l'employeur, le contrat de travail de M. Y... a été suspendu pendant l'exercice de ses mandats sociaux (du 17 juin 1991 au 21 mai 2013) puis pendant ses arrêts pour maladie (du 17 mai 2013 au 18 juillet 2013) et son ancienneté s'élevait donc à :
- 9 mois et demi du 1er septembre 1990 au 16 juin 1991,
- 1 mois du 18 juillet 2013 au 17 août 2013,
soit un total de 10 mois et demi.
« aux termes de l'article L. 1234-9 du Code du travail "le salarié titulaire d'un contrat de. travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement" ; que l'article 37 de la convention collective du commerce de gros prévoit la même ancienneté minimale de 1 an pour que le salarié puisse bénéficier d'une indemnité de licenciement ; qu'en l'espèce, l'ancienneté de Monsieur Y... ne lui ouvrait pas droit à une indemnité de licenciement et il a donc perçu à tort la somme de 100.781,05 euros calculée sur 22 ans et 11 mois qu'il devra restituer à la société Z... B... » (arrêt p. 7, alinéas 5, 6, 7, 11, 12)

Alors, d'une part, qu'il est loisible à l'employeur de reconnaître à un salarié une ancienneté continue couvrant les périodes de suspension du contrat de travail ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la société avait toujours en sa possession les éléments de fait et de droit lui permettant d'apprécier la situation de M. Y... et de lui donner sa qualification et son ancienneté exactes, qu'elle avait pendant 23 ans établi ses bulletins de salaire faisant état de sa fonction directeur technique et commercial comme de son ancienneté au 1er septembre 1990 et se référant à la convention collective ; que dès lors en condamnant M. Y... à rembourser à la société Z... B... l'indemnité de licenciement qu'elle lui avait versée sans rechercher si le paiement de cette indemnité n'avait pas été effectué volontairement et en toute connaissance de cause, au vu de son contrat de travail que l'employeur ne contestait pas et au vu de son ancienneté au 1er septembre 1990 qu'il lui avait reconnu sans discontinuité depuis cette date, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 et 1376 du code civil ;

Alors, d'autre part, que commet une faute l'employeur qui, parfaitement informé de la situation d'une personne travaillant pour son compte, la laisse dans l'erreur sur sa qualification et l'entretient dans la croyance qu'elle a la qualité de salarié en lui payant les rémunérations et indemnités correspondantes ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la société Z... B... avait établi pendant 23 ans sans discontinuité, y compris pendant l'exercice du mandat social, des bulletins de salaire au nom de M. Y... faisant état de sa fonction de directeur technique et commercial comme de son ancienneté au 1er septembre 1990, qu'elle n'avait jamais contesté sa qualité de salarié ni son ancienneté, et qu'elle avait attendu l'audience d'appel pour demander reconventionnellement le remboursement des indemnités versées spontanément lors du licenciement ; qu'en faisant droit à cette demande de la société Z... B..., la cour d'appel a violé les articles 1376, 1377 et 1382 du Code civil ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné à M. Y... de restituer à la société Z... B... la somme de 100.781,05 € à titre d'indemnité de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2013 (dispositif de l'arrêt p. 8, 4e al.)

Alors que, sauf mauvaise foi de celui qui a reçu le paiement, les intérêts au taux légal ne sont dus qu'au jour de la sommation de payer ou d'un acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit ; que dès lors en ordonnant à M. Y..., dont la mauvaise foi n'était pas alléguée, de restituer à la société Z... B... la somme de 100.781,05 € versée à titre d'indemnité de licenciement « avec intérêts au taux légal à compter du septembre 2013 » date de son paiement par l'employeur et non à la date à laquelle l'employeur en avait réclamé le remboursement, soit par conclusions soutenues à l'audience du 15 décembre 2015, la cour d'appel a violé les articles 1153 alinéa 3 et 1378 du code civil ;


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Z... B... (demanderesse au pourvoi incident).

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société Z... B... à verser à M. Y... les sommes de 57 132 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 5 713,20 euros de congés payés afférentes, de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, d'AVOIR ordonné la compensation entre les créances réciproques des parties, d'AVOIR condamné la société Z... B... à verser à M. Y... la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de l'AVOIR condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « sur le licenciement pour inaptitude
Aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnels, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Il appartient à l'employeur d'établir qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié inapte à son poste. En outre, lorsque l'entreprise fait partie d'un groupe, les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité.
M. Y... a été placé en arrêt maladie le 17 mai 2013 jusqu'au 17 juillet et a été déclaré inapte à son poste le 18 juillet 2013 avec danger immédiat. Le 25 juillet 2013, le médecin du travail précisait après étude du poste que M. Y... était "inapte au poste dans l'entreprise mais restait apte à un poste équivalent dans un contexte organisationnel distinct".
La société Z... B... rappelle que le groupe C... Z... auquel elle appartient est un groupe familial dirigé par ses membres, en particulier par messieurs Thomas et Bernd Z... et qu'un reclassement s'avérait donc impossible au vu de la préconisation du médecin du travail qui demandait un autre contexte organisationnel ; que par ailleurs aucun poste au sein des entreprises du groupe n'était susceptible d'être proposé à M. Y....
Si la société produit des attestations des dirigeants des sociétés du groupe qui indiquent l'absence de poste de directeur technique et commercial en leur sein en juillet/août 2013, force est de constater que seul est mentionné le poste précédemment occupé par le salarié sans que la recherche ne soit élargie à d'autres postes compatibles avec les capacités de l'intéressé même d'une qualification inférieure.
Il en ressort également que monsieur Thomas Z..., même s'il faisait partie des comités de direction, n'était pas le dirigeant des entités du groupe se trouvant en dehors de l'Allemagne, ce qui rendait possible un 'autre contexte organisationnel' conforme aux préconisations médicales.
En effet, il ressort des pièces produites que M. Y... s'est plaint essentiellement de relations difficiles avec monsieur Thomas Z... et qu'il n'avait pas de contact régulier avec les autres membres de la famille, étant en tout état de cause relevé que les dirigeants des filiales étrangères n'en faisaient pas partie et qu'il appartenait à l'employeur en cas de doute sur la signification de l'avis du médecin de l'interroger sur ce point.
Enfin, tous les documents produits par la société pour justifier de l'impossibilité de reclassement datent de l'année 2015, soit deux ans après le licenciement de M. Y..., ce qui ne permet pas de considérer que l'employeur avait, au moment du licenciement, engagé une véritable recherche en ce sens.
En conséquence, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse et le jugement infirmé de ce chef.
(…) M. Y... peut prétendre en premier lieu au paiement du préavis contractuel de 6 mois qui ne lui avait pas été versé du fait de son inaptitude non professionnelle mais dont la société est redevable du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement, soit la somme de 57 132 euros et les congés payés afférents.
En second lieu, en application de l'article L1235-5 alinéa 1 et 2 du code du travail, la société employant moins de 11 salariés, M. Y... peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi, lequel comprend la perte de points de retraite.
Le salarié a exposé à l'audience avoir liquidé ses droits à la retraite après son licenciement.
En raison de son ancienneté (10 mois et demi), de son âge lors du licenciement et du montant de la rémunération qui lui était versée, la cour dispose des éléments suffisants pour lui allouer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts » ;

1°) ALORS QUE la preuve étant libre en matière prud'homale, l'employeur peut prouver le respect de son obligation de reclassement de son salarié inapte par la production d'éléments postérieurs au licenciement ; qu'en l'espèce, la société Z... B... avait produit aux débats les attestations des dirigeants des différentes sociétés du groupe affirmant qu'il n'existait aucun poste disponible pouvant être proposé à M. Y... en juillet/août 2013, au moment de son licenciement ; qu'en écartant ces attestations au prétexte qu'elles avaient été établies en 2015, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

2°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, était versée aux débats l'attestation de M. Thomas Z... affirmant qu' « aucun poste correspondant aux qualifications de M. Y... et répondant aux préconisations du médecin du travail n'état disponible au sein du groupe Z... » ; qu'en affirmant que la recherche de reclassement n'avait pas été élargie aux autres postes que celui que le salarié occupait antérieurement, compatibles avec ses capacités même de qualification inférieure, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer les documents soumis à son examen ; qu'en l'espèce, parmi les attestations des dirigeants des sociétés du groupe produites par l'exposante, l'une d'entre elles certifiait qu'« aucun poste correspondant aux qualifications de M. Y... et répondant aux préconisations du médecin n'était disponible au sein du groupe Z... » (attestation de M. Thomas Z...) ; qu'en énonçant que les attestations des dirigeants des sociétés du groupe mentionnaient seulement le poste précédemment occupé par M. Y... pour en déduire que la recherche de reclassement n'avait pas été élargie à d'autres postes compatibles avec les capacités du salarié même d'une qualification inférieure, la cour d'appel a dénaturé l'attestation litigieuse et violé le principe susvisé ;

4°) ALORS QUE le reclassement d'un salarié dont le licenciement pour inaptitude est envisagé ne peut être tenté que s'il existe des postes disponibles ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver par voie d'attestations qu'il ne disposait d'aucun poste disponible dans son entreprise ni dans le groupe auquel elle appartenait ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir élargi la recherche à d'autres postes que celui occupé antérieurement, même de catégorie inférieure (arrêt p.6 §9), sans constater qu'il existait des postes disponibles compatibles avec l'état de santé du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

5°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens soulevés par les parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir et offrait de prouver (productions n° 5 à 19) que M. Y... qui avait exprimé dès 2010 son souhait de quitter l'entreprise, avait pris lors de son arrêt de travail pour maladie en mai 2013, la décision de ne plus revenir dans l'entreprise (conclusions d'appel de l'exposante p.6 §1, p.8, p.26 à 29, p.33, p.40 et p.64); qu'en ne répondant pas au moyen soulevé par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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