6 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-23.722

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:C100930

Texte de la décision

CIV. 1

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 septembre 2017




Cassation partielle


Mme BATUT, président



Arrêt n° 930 F-D

Pourvoi n° V 15-23.722







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société DSO interactive, venant aux droits de la société Din, société anonyme, dont le siège est [...]                         ,

contre l'arrêt rendu le 16 juin 2015 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme Anne-Marie X..., divorcée Y..., domiciliée [...]                         ,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 20 juin 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Girardet, conseiller, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société DSO interactive, de la SCP Gaschignard, avocat de Mme X..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1700 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant offre préalable acceptée le 15 juin 1993, la société Din a consenti un prêt à Mme X... ;
qu'à la suite d'incidents de paiement, elle a prononcé la déchéance du terme ; qu'une ordonnance d'injonction de payer le solde du prêt, signifiée en mairie le 27 janvier 1995, a été revêtue de la formule exécutoire ; que, le 21 mai 2007, la société Din a cédé à la société DSO interactive (la société) sa créance au titre du prêt ; qu'en recouvrement de celle-ci, la société a signifié à Mme X... un commandement aux fins de saisie-vente, puis une saisie-attribution ; que, le 26 août 2011, Mme X... a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ;

Attendu que, pour admettre le droit de retrait de Mme X... sur le fondement de l'article 1699 du code civil, l'arrêt retient que, n'ayant pas été signifiée à personne avant la cession de créance, l'ordonnance d'injonction de payer pouvait ultérieurement être frappée d'opposition, de sorte qu'elle ne constituait pas un titre fixant définitivement la créance et qu'au jour de la cession, le droit de la société était litigieux ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, le droit cédé n'avait fait l'objet d'aucune contestation sur le fond antérieurement à la cession, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme X... est bien fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 1699 du code civil et en ce qu'il enjoint à la société DSO interactive de produire tous éléments permettant de justifier le prix de cession de la créance litigieuse, l'arrêt rendu le 16 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-sept. Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour la société DSO interactive

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit Mme X... bien fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 1699 du code civil ;

Aux motifs propres que « le tribunal a, par une juste application des dispositions de l'article 1411 du code de procédure civile, dit que l'ordonnance rendue le 1er décembre 1991 n'était pas caduque pour avoir été signifiée le 27 janvier 1995 ; que c'est également par une exacte application des dispositions des articles 1689 et suivants du code civil que le tribunal a, par des motifs que la cour adopte, dit que le cessionnaire, la Sa Dso interactive, était investi de l'ensemble des droits antérieurement détenus par le cédant, la Sa Din, notamment du bénéfice du titre exécutoire, de sorte qu'il était redevable à agir contre Anne-Marie X... ; qu'aux termes de l'article 1699 du code civil, celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite ; que selon l'article 1700 du même code, la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit ; que le retrait litigieux, qui tend à mettre un terme au litige portant sur les droits cédés, par le remboursement au retrayé du prix que celui-ci est tenu de payer à son cédant, est une institution dont le caractère exceptionnel impose une interprétation stricte ; qu'il ne peut être exercé que par un défendeur à l'instance qui conteste le droit litigieux ; que la cession en bloc d'un grand nombre de droits et créances, comme en l'espèce, ne fait pas obstacle à l'exercice du droit de retrait litigieux à l'égard d'une créance qui y est incluse, dès lors que la détermination de son prix est possible ; qu'en l'occurrence, l'extrait de l'annexe du contrat de cession de créances du 21 mai 2007 mentionne le numéro du contrat souscrit par Anne-Marie X..., le nom de celle-ci, la date du 22 juin 1993 et la somme de 16 294,44 euros ; or, il s'avère qu'antérieurement à la cession, l'ordonnance d'injonction de payer la somme de 14 479,4 euros ne fixait pas définitivement la créance et que la débitrice a formé opposition après signification de la cession de créance ; qu'Anne-Marie X... indique contester l'existence même de la créance en faisant valoir que la créance est de nature commerciale et qu'elle est prescrite ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a constaté le caractère litigieux du droit cédé et dit qu'il y avait lieu, en application de l'article 1699 du code civil, de déterminer le prix de cession, lequel n'est pas mentionné dans les documents produits (arrêt pages 4 et 5) ;

Et aux motifs adoptés des premiers juges que « l'article 1411 du code de procédure civile prévoit que l'ordonnance portant injonction de payer est non avenue si elle n'a pas été signifiée dans les 6 mois de sa date ; qu'en l'espèce, l'ordonnance a été rendue le 1er décembre 1994 et le greffier du tribunal d'instance a apposé la formule exécutoire le 28 mars 1995, en visant la signification réalisée le 27 janvier 1995 ; que cette dernière a bien eu lieu avant l'expiration du délai de 6 mois courant à compter du 1er décembre 1994 et l'ordonnance n'est dès lors nullement caduque ou non avenue, quelle que soit la date de signification de l'ordonnance exécutoire ; que la recevabilité de l'opposition n'est par ailleurs pas contestée, ayant été formée dans le délai d'un mois suivant le premier acte délivré à personne ou ayant eu pour effet de rendre indisponible tout ou partie des biens de la débitrice ; qu'il est justifié de la cession par la société Din à la société Dso d'un ensemble de créances dont celle détenue sur Mme X... au titre du crédit litigieux suivant contrat du 21 mai 2007, l'annexe au contrat comporte en effet le numéro du prêt et sa date (+7 jours correspondant au délai de rétractation) ; que cette cession a été régulièrement signifiée à Mme X... le 7 juillet 2011 ; que le cessionnaire est investi de l'ensemble des droits antérieurement détenus par le cédant et notamment du bénéfice d'un titre exécutoire, lequel n'est qu'un accessoire de la créance objet de la cession, par application de l'article 1692 du code civil ; que la société Dso est donc recevable à agir contre Mme X... sur le fondement de l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 1er décembre 1994 ; que cette ordonnance qui n'a jamais donné lieu à signification à personne avant la date de la cession de créance, ne constitue pour autant pas un titre fixant définitivement la créance puisque l'opposition en restait possible et a ainsi été mise en oeuvre par Mme X... ; que le droit de la société Din au jour de la cession est donc toujours litigieux au sens de l'article 1699 du code civil qui permet au débiteur de se faire tenir quitte par le cessionnaire en lui remboursant le prix réel de la cession outre frais, loyaux coûts et intérêts ; qu'il sera constaté que la jurisprudence invoquée à cet égard par la demanderesse n'écarte l'application de l'article 1699 précité qu'en retenant l'existence d'un jugement définitif ce que n'est pas le titre dont pouvait se prévaloir la société Din ; qu'il importe dès lors de déterminer le prix de cession de la créance, lequel ne peut être nul contrairement aux affirmations de la défenderesse, la passation en pertes et profits par le cédant étant une écriture comptable sans effet sur le fait qu'un prix de cession a effectivement été fixé et acquitté ; que ce prix déterminé de manière globale par référence à un pourcentage de la valeur faciale des créances cédées, n'est pas mentionné dans la copie de médiocre qualité produite aux ébats par la société Dso ; qu'il convient en conséquence d'ordonner la réouverture des débats et d'enjoindre à la demanderesse de produire tous éléments permettant de justifier du prix de cession de la créance litigieuse, et de permettre l'exercice du droit de retrait de la débitrice » (jugement pages 3 et 4) ;

1°) Alors que le retrait litigieux n'est valablement exercé que si, antérieurement à la cession, le débiteur a contesté judiciairement la créance, en mettant en cause son existence même ; qu'en jugeant que Mme X... était fondée à se prévaloir du retrait litigieux, tout en constatant que la débitrice avait formé opposition à l'injonction de payer le 26 août 2011, soit postérieurement à la cession de la créance intervenue le 21 mai 2007 et qui lui avait été signifiée le 7 juillet 2011, la cour d'appel a violé les articles 1699 et 1700 du code civil ;

2°) Alors que la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit ; qu'en jugeant que la créance cédée avait un caractère litigieux, pour cela qu'elle n'était pas définitive car fondée sur une ordonnance d'injonction de payer susceptible d'opposition, quand la possibilité d'une contestation ne constitue pas un droit litigieux, la cour d'appel a violé l'article 1700 du code civil ;

3°) Alors que la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit ; qu'en se bornant à énoncer que Mme X... indiquait contester l'existence même de la créance en faisant valoir que la créance était de nature commerciale et qu'elle était prescrite, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ces moyens n'étaient pas purement fantaisistes, de sorte qu'ils n'étaient pas de nature à rendre la créance litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1700 du code civil.

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