13 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-23.045

Chambre sociale - Formation plénière de chambre

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2017:SO02050

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - harcèlement - harcèlement moral - dénonciation de faits de harcèlement moral - sanction interdite - exception - cas - formulation des faits invoqués - conditions - détermination - portée

Il résulte de l'article L. 1152-2 du code du travail, en sa rédaction applicable à la cause, qu'aucun salarié ne peut être licencié pour avoir relaté des agissements de harcèlement moral. Viole ce texte l'arrêt qui, constatant que le salarié n'avait pas dénoncé des faits qualifiés par lui d'agissements de harcèlement moral, déclare le licenciement nul

Texte de la décision

SOC.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2017




Cassation partielle


M. FROUIN , président



Arrêt n° 2050 FP-P+B

Pourvoi n° J 15-23.045







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Book Distributors France Ltd, société de droit étranger, dont le siège est [...], (États-Unis), anciennement dénommée Encyclopaedia Britannica (France) Ltd, ayant un établissement principal en France [...],

EN PRESENCE DE M. Patrick C..., domicilié [...], pris en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation de la société Book Distributors France,

contre l'arrêt rendu le 11 juin 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige les opposant à M. Jak Y..., domicilié [...],

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 juin 2017, où étaient présents : M. Frouin , président, Mme Basset, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mmes Geerssen, Goasguen, Vallée, M. Chauvet, Mmes Guyot, Farthouat-Danon, conseillers, M. Flores, Mmes Ducloz, Sabotier, Salomon, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Basset, conseiller, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Book Distributors France Ltd et de M. C..., ès qualités, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de M. Y..., l'avis de Mme Berriat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à M. C... de ce qu'il reprend l'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Book Distributors France Ltd ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., engagé par la société Encyclopaedia Britannica France, aujourd'hui dénommée Book Distributors (France) Ltd (la société), exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur commercial et vice président France, Belgique et Suisse, a été licencié pour faute grave le 22 février 2011 ; qu'estimant avoir été licencié pour avoir relaté des agissements de harcèlement moral, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de nullité du licenciement et de réintégration dans l'entreprise ; que la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce en date du 26 juillet 2016, M. C... étant désigné en qualité de liquidateur ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 1152-2 en sa rédaction applicable en la cause et l'article L. 1152-3 du code du travail ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, aucun salarié ne peut être licencié pour avoir relaté des agissements de harcèlement moral ;

Attendu que pour déclarer le licenciement nul, l'arrêt retient que la lettre de licenciement reproche notamment au salarié d'essayer de créer l'illusion d'une brimade, de proférer des accusations diffamatoires en se permettant d'affirmer par écrit, dans un courriel, qu'il subirait des comportements abjects, déstabilisants et profondément injustes sans aucune justification, de tels faits étant qualifiés par l'employeur de dénigrement, de manque de respect manifesté par des propos injurieux, constitutifs d'un abus dans la liberté d'expression ; que ce motif renvoie au courriel adressé le 13 janvier 2011 dans lequel le salarié avisait l'employeur de son souhait de l'informer de vive voix du traitement abject, déstabilisant et profondément injuste qu'il estimait être en train de subir, visant ainsi des agissements de harcèlement moral même si ces termes ne sont pas formellement employés, sollicitant dans un premier temps une rencontre avec son employeur afin de l'informer et dans un second temps une vérification de ses propos ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié n'avait pas dénoncé des faits qualifiés par lui d'agissements de harcèlement moral, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur le premier moyen du chef de la nullité du licenciement entraîne, par voie de conséquence, la cassation sur le deuxième moyen du chef du paiement de rappel de salaire et des salaires pour la période postérieure au licenciement ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il prononce la nullité du licenciement notifié le 22 février 2011, ordonne la réintégration de M. Y... dans un emploi identique à celui qu'il occupait dans la société Encyclopaedia Britannica France Ltd ou, à défaut dans un emploi équivalent, et en ce qu'il condamne la société Encyclopaedia Britannica France Ltd à payer à M. Y... une somme de 1 066 661,62 euros correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014, déduction faite des revenus de remplacement qui lui ont été servis pendant cette période, et au paiement des salaires et congés payés pour la période postérieure sur la base des sommes mensuelles retenues jusqu'à la réintégration, l'arrêt rendu le 11 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Book Distributors France Ltd et M. C..., ès qualités

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement notifié le 22 février 2011 à Monsieur Y..., d'AVOIR ordonné la réintégration de Monsieur Y... dans un emploi identique à celui qu'il occupait dans la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA FRANCE Ltd ou, à défaut, dans un emploi équivalent, et d'AVOIR condamné la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA FRANCE Ltd (désormais dénommée BOOK DISTRIBUTORS (FRANCE) LTD) au paiement d'une somme de 1.066.661,62 euros correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014, déduction faite des revenus de remplacement qui lui ont été servis pendant cette période, outre au paiement des salaires et congés payés pour la période postérieure sur la base des sommes mensuelles retenues, jusqu'à la réintégration, outre la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « selon l'article L.1152-2 du Code du Travail, dans sa rédaction applicable à la cause, 'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié (...) pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés." ; Qu'en vertu de l'article L.1152-3 du Code du Travail, "toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul." ; Qu'il en résulte que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ; Qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reproche notamment au salarié d'avoir procédé à un remboursement précipité d'avances et d'avoir « essayé, pour détourner l'attention, de créer l'illusion d'une brimade», proféré des accusations « diffamatoires » en se permettant d'affirmer par écrit, « dans un mail du 13 janvier 2011 » qu'il subirait des comportements « abjects, déstabilisants et profondément injustes » sans aucune justification, de tels faits étant qualifiés par l'employeur de dénigrement, de manque de respect manifesté par des propos injurieux, constitutifs d'un abus dans la liberté d'expression ; qu'ainsi, ce motif renvoie donc au courriel adressé le 13 janvier 2011 par M. Y... dans lequel celui-ci avisait son employeur de son souhait de l'informer de vive voix « du traitement abject, déstabilisant et profondément injuste » qu'il estimait être en train de subir, et le salarié vise ainsi des agissements de harcèlement moral même si ces termes ne sont pas formellement employés, sollicitant dans un premier temps une rencontre avec son employeur afin de l'informer et dans un second temps une vérification de ses propos ; qu'alors que l'employeur est tenu envers ses salariés en application de l'article L. 1152-4 du code du travail de prendre toutes les dispositions nécessaires en matière de prévention du harcèlement moral et d'une obligation de sécurité de résultat, la société Encyclopaedia Britannica France Ltd a, au cas d'espèce, non seulement commis un manquement à ses obligations légales, en s'abstenant de recevoir le salarié afin, d'abord, d'être plus amplement informée sur les faits que celui-ci estimait subir dans le cadre de son travail et, ensuite, de procéder à leur vérification dans le cadre d'une enquête interne, mais a délibérément pris parti dans la lettre de licenciement qui fait expressément le reproche au salarié d'avoir « sans aucune justification » proféré « des accusations diffamatoires » dans le courriel litigieux ; que de plus, ce motif était invoqué dès le courrier de convocation à l'entretien préalable : « Ce courriel est une suite de contre vérités qui n'est pas digne d'un cadre dirigeant de votre niveau » ; « les termes de votre mail du 13 janvier 2011 constituent des abus dans l'exercice de ce droit [d'expression] », et il résulte du compte rendu d'entretien préalable versé aux débats que ce grief est le premier qui a été invoqué par l'employeur et, qu'alors que M. Y... expliquait que son mail ne faisait aucunement référence au comportement de l'administrateur ni à une quelconque gêne quant aux investigations menées par ce dernier, M. Y... a répondu : « Vous n'apportez pas de preuves, donc c'est diffamatoire. » ; qu'il en résulte, en l'absence de toute démonstration par l'employeur de la mauvaise foi du salarié, laquelle ne se présume pas, ' et en tout cas, ne ressort nullement des termes employés dans le mail critiqué, somme toute assez mesurés et qui n'ont aucun caractère injurieux à l'égard de l'employeur qui n'est pas qualifié d'abject, seul le traitement dont le salarié s'estime la victime l'étant, pas plus que n'est avérée une quelconque volonté de nuire publiquement à l'entreprise ou à ses dirigeants puisque ce mail n'a été adressé qu'à l'actionnaire principal et à M. Y..., sans autre diffusion, et que l'incidence sur la survie de l'entreprise est alléguée sans aucune preuve ' que le grief invoqué, tiré de la relation de faits de harcèlement par le salarié, emporte à lui seul la nullité de plein droit du licenciement, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres motifs ; que le jugement qui a prononcé la nullité du licenciement notifié le 22 février 2011 à M. Y... et a fait droit à sa demande de réintégration sera, par conséquent, confirmé ; qu'il convient d'y ajouter en ordonnant la réintégration du salarié dans ladite société dans un emploi identique à celui qu'il occupait ou, à défaut, dans un emploi équivalent » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « - Sur la nullité du licenciement, au soutien de ce moyen, le demandeur fait valoir deux motifs, qu'il convient d'examiner successivement. En premier lieu, Monsieur Jak Y... soulève l'absence de pouvoir de la société Encyclopaedia Britannica Inc. de procéder à son licenciement, en l'absence de tout lien contractuel entre lui-même et cette société, qui a la qualité de tiers au contrat. Selon la défenderesse, Monsieur B..., signataire de la lettre de licenciement, fait partie de E.B. Inc, avait la qualité de supérieur hiérarchique de Monsieur Jak Y... et était mandaté pour procéder au licenciement. Il est de principe que le directeur d'une société mère, exerçant les fonctions de supérieur hiérarchique des directeurs d'établissement employés par des filiales, n'est pas une personne étrangère à l'entreprise et peut procéder à un licenciement. En l'espèce, il résulte de l'organigramme versé aux débats qu'il existe un lien de droit entre la société Encyclopaedia Britannica Inc et société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA De plus, l'employeur produit le pouvoir écrit dont disposait Monsieur B.... Enfin, il est constant que la décision de licenciement a été ratifiée par la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA et il importe peu dans ces conditions que le courrier ait été expédié sur du papier à en tête de E.B. Inc. En conséquence, ce moyen de nullité sera rejeté. En second lieu, Monsieur Jak Y... fait valoir que la mesure de licenciement prise à son encontre fait suite à sa dénonciation de faits de harcèlement moral. Il résulte des dispositions de l'article L 1152-2 du code du travail qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte (...) pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. En vertu de l'article L 1152-3, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L 1152-1 et L 1152-2 du code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul. Il en résulte que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, qui ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis. En l'espèce, la lettre de licenciement reproche notamment au salarié d'avoir procédé à un remboursement précipité d'avances et d'avoir « essayé, pour détourner l'attention, de créer l'illusion d'une brimade a votre endroit en proférant des accusations diffamatoires avant que j'ai pu découvrir les pratiques déloyales que je viens d'évoquer. C'est ainsi que vous vous êtes permis d'affirmer par écrit, dans un mail du 13 janvier 2011, que vous subiriez des comportements « abjects, déstabilisants et profondément injustes » sans aucune justification. Ce dénigrement et ce manque de respect manifesté par des propos injurieux constitue un abus dans la liberté d'expression, par les termes employés et les conséquences qu'ils ont eues sur le fonctionnement de l'entreprise. ». Ce motif renvoie donc au courriel adressé le 13 janvier 2011 par Monsieur Jak Y..., dans lequel celui-ci avisait son employeur de son souhait de « l'informer de vive voix du traitement abject, déstabilisant et profondément injuste » qu'il estimait être en train de subir. Contrairement à ce que soutient la société défenderesse, les faits visés par le salarié visent des agissements de harcèlement moral et Monsieur Jak Y... sollicitait une rencontre avec son employeur afin de l'informer de ce qu'il estimait subir, dans l'attente d'une vérification de ses propos. L'employeur ne peut davantage nier l'existence d'un lien de causalité entre le courriel du 13 janvier et le licenciement du 22 février, qui en fait expressément mention et vise « des accusations diffamatoires » ainsi que « un dénigrement et un manque de respect manifesté par des propos injurieux qui constitue un abus dans la liberté d'expression, par les termes employés et les conséquences qu'ils ont eues sur le fonctionnement de l'entreprise ». De plus, il résulte du compte-rendu d'entretien préalable versé aux débats que ce grief est le premier à avoir été invoqué par l'employeur. En l'absence de toute démonstration par l'employeur de la mauvaise foi du salarié, qui ne se présume pas, le grief tiré de la dénonciation d'agissements de harcèlement moral entraîne à lui seul la nullité du licenciement, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres motifs » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE si le licenciement motivé par la dénonciation de faits de harcèlement moral est en principe nul, sauf mauvaise foi du salarié, c'est à la condition qu'il soit reproché effectivement au salarié d'avoir dénoncé l'existence de faits de « harcèlement moral » ; que ne caractérise pas un acte de dénonciation de faits de harcèlement moral, au sens de l'article L.1152-2 du code du travail, la démarche du salarié qui consiste à s'opposer aux décisions et directives de l'employeur en prétendant qu'elles sont anormales, sans qu'il ne fasse état d'agissements qu'il qualifie juridiquement de « harcèlement moral » ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait à Monsieur Y... d'avoir « essayé, pour détourner l'attention, de créer l'illusion d'une brimade » et d'avoir « affirm[é] par écrit, dans un mail du 13 janvier 2011, que vous subiriez des comportements « abjects, déstabilisants et profondément injustes » sans aucune justification » ; qu'il n'était donc pas reproché au salarié dans la lettre de licenciement d'avoir dénoncé une situation de harcèlement moral ; qu'en considérant néanmoins que la formulation de la lettre de licenciement autorisait Monsieur Y... à revendiquer le bénéfice des dispositions protectrices de l'article L. 1152-2 du code du travail, et en annulant en conséquence le licenciement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé, ensemble les articles L. 1152-3 et L.1232-6 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET POUR LA MEME RAISON, QU'en retenant que la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA reprochait au salarié dans la lettre de licenciement d'avoir proféré des accusations de « harcèlement moral », la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement du 22 février 2011, ensemble le principe interdisant au juge de dénaturer les documents qu'il examine ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE dans le courrier électronique du 13 janvier 2011 adressé par Monsieur Y... à l'actionnaire majoritaire du groupe, le salarié indiquait à son interlocuteur vouloir le rencontrer pour « vous informer de vive voix du traitement abject, déstabilisant et profondément injuste que je suis en train de subir » ; que si le salarié s'est plaint dans cet écrit d'agissements dont il estimait être victime, il n'a dénoncé aucune situation relevant du régime du harcèlement moral au sens des articles L.1152-1 et L.1152-2 du code du travail ; qu'en retenant néanmoins, pour prononcer la nullité du licenciement, que « le salarié vise ainsi [dans ce courriel] des agissements de harcèlement moral même si ces termes ne sont pas formellement employés », la cour d'appel a dénaturé le courriel du 13 janvier 2011, ensemble le principe interdisant au juge de dénaturer les documents qu'il examine ;

ALORS, DE QUATRIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU'il n'y a pas de dénonciation d'un harcèlement moral lorsque les agissements que prétend dénoncer le salarié ne consistent qu'en l'engagement d'une enquête à l'effet d'établir l'existence de détournements frauduleux ; qu'en une telle hypothèse, il appartient aux juges du fond de rechercher si les détournements ne sont pas établis, de telle sorte que la prétendue dénonciation présente nécessairement un caractère abusif ; que la lettre de licenciement faisait précisément valoir que les accusations du salarié ne visaient qu'à masquer de manière frauduleuse ses importants détournements dans la trésorerie de la société alors même que cette dernière se trouvait dans une situation financière critique ; que dans ces conditions la cour d'appel ne pouvait déduire la nullité du licenciement sans rechercher si, tel que le soutenait la Société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA, les détournements reprochés à Monsieur Y... n'étaient pas établis, de telle sorte que la prétendue dénonciation qui lui était reprochée dans la lettre de licenciement présentait bien un caractère abusif ;
qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6 et L. 1121-1 du code du travail, et de l'article 6, §1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, ENFIN ET PLUS SUBSIDIAIREMENT, QUE la dénonciation de faits de harcèlement moral peut constituer une cause légitime de licenciement lorsque cette dénonciation intervient de mauvaise foi ; que la mauvaise foi est ainsi caractérisée lorsque le salarié a connaissance de la fausseté des faits qu'il dénonce ; qu'en se bornant à retenir « l'absence de démonstration par l'employeur de la mauvaise foi du salarié », sans s'expliquer ne serait-ce que sommairement sur le moyen de défense décisif développé par la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA tiré de ce que les accusations proférées par Monsieur Y... ne consistaient qu'en une stratégie du salarié qui, conscient que les graves détournements qu'il avait effectués dans le cadre de ses fonctions pouvaient conduire à son licenciement disciplinaire, avait « tent[é] de créer l'illusion d'une mise à l'écart au moment même où ses indélicatesses (qualifiées par l'administrateur de « graves dysfonctionnements ») (
) étaient découvertes » (conclusions p. 9 et 10), la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA FRANCE Ltd (désormais dénommée BOOK DISTRIBUTORS (FRANCE) LTD) au paiement d'une somme de 1.066.661,62 euros correspondant aux salaires dont Monsieur Y... a été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014, déduction faite des revenus de remplacement qui lui ont été servis pendant cette période, outre au paiement des salaires et congés payés pour la période postérieure sur la base des sommes mensuelles retenues, jusqu'à la réintégration, outre la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une somme correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé ; qu'il en résulte que doivent être déduits de la réparation du préjudice subi les revenus qu'il a tirés d'une autre activité et le revenu de remplacement qui lui a été servi pendant cette période ; qu'en l'espèce, M. Y... a établi un tableau récapitulatif des sommes qu'il aurait dû percevoir au titre de la rémunération fixe et variable et des congés payés afférents sur la période fixée provisoirement entre le 8 février 2011, date de sa mise à pied conservatoire, et le 30 novembre 2014, calculées sur la base d'une rémunération brute fixe annuelle, en dernier lieu de 22.075 euros sur 12 mois - que confirme l'attestation destinée à Pôle Emploi versée au dossier- et d'une rémunération brute variable annuelle de 45.735 euros, majorées d'une indemnité de congés payés égale au 10e de sa rémunération brute totale, et ressortant à un montant total de 1.309.114 euros, duquel il a déduit la somme de 242.452,38 euros perçue de Pôle Emploi au titre de l'assurance chômage, d'où un solde provisoirement arrêté à 1.066.661,62 euros dont il sollicite le versement par la société Encyclopaedia Britannica France Ltd à titre de provision en faisant valoir qu'il doit obtenir un titre exécutoire sur cette provision et ainsi préserver ses droits compte tenu du fait qu'il n'a aucune garantie de ce que la société procédera à sa réintégration à bref délai, que la procédure est en cours depuis 4 ans sans qu'il n'ait pu bénéficier de l'exécution provisoire et qu'il est en fin de droits depuis octobre 2014 sans aucun revenu de remplacement ; Qu'en réplique, la société Encyclopaedia Britannica France Ltd objecte que le calcul de M. Y... est manifestement erroné puisqu'il sollicite pour chaque année son salaire sur 12 mois, périodes de travail et de congés payés confondues, auquel il ajoute 10 % de congés payés, ce qui revient à les payer une seconde fois, que rien ne justifie le versement de 100 % de la part variable dans l'état de quasi cessation des paiements de la société, qu'il affirme qu'il n'avait pas d'activité pendant cette période et se contente de déduire les seules allocations « (en net) » perçues de Pôle Emploi alors qu'il conviendrait de déduire en outre les revenus de l'activité d'agent commercial qu'il exerce depuis le 19 avril 2013 « même s'il fait tout pour dissimuler ses revenus en refusant de communiquer ses avis de déclaration de revenus et d'imposition pour les années 2011 à 2014 en dépit des sommations qui lui ont été faites, toujours en vain », et qu'enfin, il ne tient pas compte de l'indemnité compensatrice de congés payés de 79.457,74 euros qu'il a perçue en mars 2012 ; Mais attendu, en premier lieu, ainsi que le fait valoir à juste titre M. Y..., qu'en application des dispositions combinées des articles L. 3141-22 et L. 3141-5 du code du travail, les congés payés sont considérés comme du temps de travail effectif et doivent être pris en compte pour déterminer la rémunération annuelle servant de base à l'indemnité de congés payés, que de même, dès lors que la partie variable du salaire était assise sur la réalisation d'objectifs fixés par l'employeur produits par le travail personnel de l'intéressé, nécessairement affectés pendant la période de congé, cet élément de rémunération doit être inclus dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, que par ailleurs, il ressort, d'une part, des attestations de paiement délivrées par Pôle Emploi communiquées par M. Y... au titre de la période considérée que celui-ci a bien déduit les allocations en brut, et d'autre part, de ses avis d'imposition 2011 à 2014 inclus et des déclarations RSI faisant apparaître un chiffre d'affaires nul sur la période du 19 avril 2013 au 30 septembre 2014, qu'il n'a perçu aucun autre revenu sur cette période ; qu'en second lieu, il n'y a pas à faire la déduction, dans le calcul du montant des sommes réclamées, de l'indemnité compensatrice de congés payés de 79.457,74 euros perçue par le salarié en mars 2011 dans le cadre de son solde de tout compte et qui correspond nécessairement à la période antérieure à la rupture de son contrat de travail ; que le salarié est en droit de prétendre au paiement d'une somme correspondant à la réparation de la totalité de son préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre le premier jour de sa mise à pied conservatoire et jusqu'à sa réintégration effective, déduction faite des revenus de remplacement perçus durant cette période ou de ceux tirés d'une autre activité ; que par conséquent, il convient de faire droit à la demande et de condamner la société Encyclopaedia Britannica France Ltd au paiement à M. Y... d'une somme de 1.066.661,62 euros correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014, déduction faite des revenus de remplacement qui lui ont été servis pendant cette période, outre au paiement des salaires et congés payés pour la période postérieure sur la base des sommes mensuelles retenues, jusqu'à la réintégration ; que cette condamnation apparaît suffisante pour permettre d'assurer l'exécution par la Société Encyclopaedia Britannica France Ltd de son obligation de réintégration, et le prononcé d'une astreinte n'est pas nécessaire » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « sur les conséquences de la rupture En raison de la nullité du licenciement, Monsieur Jak Y... est fondé à solliciter sa réintégration au sein de la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA et il convient de faire droit à cette demande, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du délai d'un mois à compter du prononcé de la présente décision. Il est de principe que la réintégration du salarié lui ouvre droit au versement des salaires perdus entre son licenciement et la réintégration sous déduction des revenus de remplacement et des rémunérations perçues pendant cette période, qui comprennent les allocations de chômage. Il convient en conséquence d'ordonner la réouverture des débats et d'enjoindre à Monsieur Jak Y... de produire l'ensemble des éléments relatifs aux revenus perçus ainsi qu'un décompte détaillé et actualisé des sommes réclamées » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'indemnité de congés payés ne peut se cumuler avec les salaires ; que la société exposante faisait en conséquence valoir que le montant des indemnités réclamées par le salarié au titre de la période précédant sa réintégration était irrégulier en ce qu'il sollicitait, pour chaque année concernée (de 2011 à 2014), le versement d'une indemnité correspondant à 12 mois de salaire et d'une indemnité annuelle de congés payés correspondant à 10 % de son salaire annuel ; que, comme le faisait valoir l'exposante, accorder au salarié des rappels de salaire sur la base, chaque année, de douze mois de salaire et d'une indemnité de congés payés de 10 % du montant du salaire annuel, revenait à cumuler l'indemnité de congés payés avec les salaires et, en conséquence, à lui payer deux fois ses congés payés ; qu'en validant néanmoins le mode de calcul retenu par le salarié et en lui accordant en conséquence la somme de 1.066.661,62 €, la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 et L. 1152-3 du code du travail, ensemble l'article 1376 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART ET A TITRE SUBSIDIAIRE , QU'en s'abstenant de répondre au moyen par lequel la société BOOK DISTRIBUTORS faisait valoir que le mode de calcul proposé par Monsieur Y... revenait à lui rémunérer deux fois ses périodes de congés payés au titre des exercices 2011, 2012, 2013 et 2014, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE tel que le faisait encore valoir l'exposante, accorder au salarié des rappels de salaire sur la base, chaque année, de douze mois de salaire sans déduire l'indemnité compensatrice de congés payés qui lui a été versée le jour de son licenciement revenait à nouveau à lui rémunérer plusieurs fois les mêmes périodes de congés ; que l'exposante faisait en conséquence valoir que devait être déduit du montant de l'indemnité accordée à Monsieur Y... au titre de la période précédant sa réintégration, l'indemnité compensatrice de congés payés de 79.457,74 € perçue par le salarié lors de son licenciement ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 et L. 1152-3 du code du travail, ensemble l'article 1376 du code civil ;

ALORS, DE QUATRIÈME PART , QUE sont exclues de la base de calcul de l'indemnité de congés payés les primes ou gratifications calculées sur l'année entière ; que la société BOOK DISTRIBUTORS soutenait qu'étant versées pour l'année entière, périodes de congés payés comprises, les primes variables réclamées par Monsieur Y... n'avaient pas à être intégrées dans l'assiette de calcul des indemnités de congés payés incluses dans le calcul de l'indemnité correspondant aux salaires dont il avait été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014 ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter ce moyen, que « dès lors que la partie variable du salaire était assise sur la réalisation d'objectifs fixés par l'employeur produits par le travail personnel de l'intéressé, nécessairement affectés pendant la période de congé, cet élément de rémunération doit être inclus dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés », sans rechercher si, tel qu'il était soutenu par l'exposante, du fait de leur caractère annuel ces bonus ne devaient pas être exclus de l'assiette de l'indemnité de congés payés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L3141-22 du code du travail ;

ALORS, DE CINQUIEME PART , QUE le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement d'une somme correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont il a été privé ; qu'en accordant au salarié l'intégralité des sommes réclamées au titre de la période précédant sa réintégration sans tenir compte du moyen de la société exposante soutenant que les sommes réclamées avaient été calculées à tort par le salarié en « brut » , cependant que l'indemnisation devait être calculée sur la base de ses salaires en «net», déduction faite de la part salariale des cotisations de sécurité sociale, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, DE SIXIEME PART, QUE la cassation à intervenir sur le premier et/ou le troisième moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA FRANCE Ltd au paiement d'une somme de 1.066.661,62 € correspondant aux salaires dont le salarié aurait été privé depuis le 8 février 2011 jusqu'au 30 novembre 2014, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA FRANCE LTD (désormais dénommée BOOK DISTRIBUTORS (FRANCE) LTD) à payer à Monsieur Y... les sommes de 45.735 euros au titre de la rémunération variable sur 2007, outre 4.573,50 euros au titre des congés payés afférents, de 45.735 euros au titre de la rémunération variable sur 2008, outre 4.573,50 euros au titre des congés payés afférents, de 45.735 euros au titre de la rémunération variable sur 2009, outre 4.573,50 euros au titre des congés payés afférents, et de 45.735 euros au titre de la rémunération variable sur 2010, outre 4.573,50 euros au titre des congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « le contrat stipule : « votre salaire comportera une partie fixe, d'un montant brut annuel de 1.600.000 Fr., payable en 12 mensualités d'égal montant, et une partie variable de 300.000 Fr. soumise à la réalisation d'objectifs annuels qui vous seront précisés en annexe à la présente. Cette partie variable sera payable à la fin de la période de 12 mois considérés, allant pour la première année d'octobre 1999 à fin septembre 2000, selon calendrier Britannica, pour autant que les objectifs fixés soient réalisés » ; que le salarié soutient qu'aucune annexe n'a été jointe au contrat afin de préciser les objectifs annuels qu'il devait atteindre pour percevoir la partie variable, et ce depuis sa signature le 1er septembre 1999 ; que pour autant, la société lui a versé 100 % de sa rémunération variable au titre des exercices 2005 et 2006, et ce bien qu'elle ne lui ait jamais signifié des objectifs dont la réalisation aurait conditionné leur règlement ; qu'il en infère que c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a considéré que les «bonus» au titre des exercices 2007 à 2011 étaient incontestablement dus et a de ce fait fixé le montant de la part variable non versée par référence aux années antérieures ; que la société Encyclopaedia Britannica France Ltd réplique en substance que le contrat de travail prévoyait expressément que « vous assurerez la bonne marche de l'entreprise, au sens le plus large, tant en ce qui concerne (...) le développement des ventes réalisées par la force de vente et par correspondance. Cela sous-entend notamment votre implication directe dans la définition des objectifs à réaliser (...) » et en déduit que le salarié, conformément à son statut de vice-président et à ses obligations contractuelles, fixait lui-même en début d'année les budgets et que le versement des primes d'objectifs de tous les membres du « CODIR », lui compris, était conditionné à l'atteinte de ces budgets; que la simple comparaison du bénéfice d'exploitation budgété et du bénéfice d'exploitation réalisé permet de constater qu'au cours des années 2007 à 2010, les budgets n'ont jamais été atteints, de sorte qu'aucune prime d'objectifs n'est due à M. Y..., raison pour laquelle il n'a jamais rien réclamé pendant ces quatre années ; qu'elle ajoute que le salarié a profité de l'étendue de ses pouvoirs et de l'éloignement de son unique supérieur (M. Jorge Y... à Chicago) pour se verser lui-même des primes en 2005 et 2006, qu'il a soigneusement dissimulées en s'abstenant de le mentionner sur les reportings de masse salariale adressés au groupe sur ses instructions par son assistante personnelle ; Mais attendu que le contrat prévoit une part variable d'un montant annuel de 300.000 Fr. versée en fonction de la réalisation d'objectifs annuels « qui vous seront précisés en annexe à la présente » ; qu'il résulte de cette clause que les objectifs n'étaient pas fixés d'un commun accord entre les parties ni n'étaient fixés par le salarié lui-même mais étaient déterminés unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction ; qu'il est constant que l'annexe n'a pas été jointe au contrat de travail et que, par ailleurs, les objectifs annuels n'ont jamais été postérieurement fixés ; qu'aucun des éléments versés aux débats n'établit la volonté expresse du salarié de renoncer à la perception de cette part variable de sa rémunération, l'absence de réclamation de sa part pendant plusieurs années ne valant pas renonciation ; qu'en conséquence, faute pour l'employeur d'avoir précisé au salarié les objectifs à réaliser ainsi que les conditions de calcul vérifiables, cette rémunération devait être payée intégralement ; que le jugement sera confirmé qui a condamné la société Encyclopaedia Britannica France Ltd à verser à M. Y... les sommes sollicitées au titre de la rémunération variable sur les quatre exercices 2007 à 2010, outre les congés payés y afférents » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « - Sur la demande au titre des commissions, le contrat de travail conclu entre les parties prévoyait que le salarié percevrait une rémunération variable annuelle de 45.734, 71 euros, soumise à la réalisation d'objectifs annuels « précisés en annexe ». Il est établi que l'annexe n'a pas été jointe au contrat et que les objectifs annuels postérieurs n'ont pas été fixés, la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA ayant versé à Monsieur Jak Y... un bonus de 45.734, 71 euros aux mois de janvier 2006 et juin 2007 Après cette période, aucun bonus n'a été versé au salarié. Faute pour l'employeur d'avoir déterminé dans le contrat de travail, en accord avec le salarié, les objectifs dont dépendait cette rémunération variable, il convient de fixer ceux-ci en se référant aux critères retenus pour l'attribution de la part variable pour les années antérieures à 2007, étant rappelé qu'un employeur ne peut faire grief à un salarié de ne pas avoir fixé lui-même ses propres objectifs pour justifier l'absence de versement de la part variable de la rémunération de ce dernier. En l'absence de toute démonstration par l'employeur de la fixation d'objectifs précis au salarié, il convient de faire droit à la demande formée à ce titre par celui-ci, dont l'absence de réclamation pendant plusieurs années ne vaut pas renonciation. La société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA sera en conséquence condamnée à verser à Monsieur Jak Y... les sommes sollicitées à ce titre » ;

ALORS D'UNE PART, QUE lorsque le droit à un bonus variable résulte du contrat de travail, et à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes, de sorte que, si l'objectif de résultats dont le contrat de travail fait dépendre la rémunération variable n'a pas été déterminé, il appartient au juge de le fixer ; qu'en l'espèce ayant constaté que la société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA n'avait pas fixé les objectifs dont le contrat de travail faisait dépendre la rémunération variable, il appartenait donc à la cour d'appel de les fixer elle-même ; qu'en décidant au contraire d'accorder au salarié le montant maximal des primes envisageables, sans fixer le montant des objectifs conditionnant le paiement des primes, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en se fondant sur les primes perçues par Monsieur Y... en 2005 et 2006 pour décider de faire droit à ses demandes au titre des années ultérieures, sans tenir compte du moyen par lequel la Société ENCYCLOPAEDIA BRITANNICA soutenait que le salarié s'était lui-même unilatéralement accordé ses primes en 2005 et 2006 - en sa qualité de directeur général - et avait dissimulé leur paiement à la direction de l'entreprise située aux ÉTATS-UNIS, de sorte qu'il ne pouvait se déduire de ce paiement l'existence d'un accord conclu les années précédentes entre les parties sur lequel les juges avaient pu se fonder pour fixer le montant des primes réclamées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS ENFIN, QU'en retenant péremptoirement qu'à défaut de fixation des objectifs annuels du salarié celui-ci pouvait prétendre au paiement intégral des primes réclamées, sans répondre au moyen par lequel la société BOOK DISTRIBUTORS faisait valoir qu'au regard de l'absence d'atteinte des budgets au titre des exercices 2007 à 2010, le salarié ne pouvait prétendre au paiement de telles primes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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