21 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-16.246

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2017:SO01962

Titres et sommaires

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - conventions et accords collectifs - conventions diverses - sécurité sociale - convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale - article 46 - congé de maternité - congé suivant l'expiration du congé de maternité - bénéficiaires - limites - détermination - portée

Il résulte de l'article 46 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 qu'à l'expiration du congé légal de maternité, l'employée qui élève elle-même son enfant a droit à un congé de trois mois à demi-traitement ou à un congé d'un mois et demi à plein traitement. Viole ce texte l'arrêt qui fait droit à la demande de dommages-intérêts du père fondée sur la rupture du principe de l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes, alors que cette disposition, qui a pour objet d'attribuer un congé supplémentaire de maternité à l'expiration du congé légal de maternité, vise ainsi à la protection des rapports particuliers entre la femme et son enfant au cours de la période qui fait suite à la grossesse et à l'accouchement

Texte de la décision

SOC.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2017




Cassation


M. FROUIN, président



Arrêt n° 1962 FS-P+B

Pourvoi n° Q 16-16.246







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Yéro Y..., domicilié [...],

2°/ le syndicat CGT, dont le siège est [...],

contre l'arrêt rendu le 4 mars 2016 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige les opposant à la caisse d'allocations familiales (CAF) du Rhône, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

La caisse d'allocations familiales (CAF) du Rhône a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 20 juin 2017, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Schmeitzky-Lhuillery, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mmes Goasguen, Vallée, Guyot, Aubert-Monpeyssen, MM. Rinuy, Schamber, Ricour, Mmes Van Ruymbeke, Capitaine, conseillers, M. Flores, Mme Ducloz, MM. David, Silhol, Belfanti, Mme Ala, M. Duval, Mme Valéry, conseillers référendaires, M. Richard de La Tour, avocat général, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Schmeitzky-Lhuillery,, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. Y... et du syndicat CGT, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'allocations familiales (CAF) du Rhône, l'avis de M. Richard de La Tour, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y..., employé par la caisse d'allocations familiales du Rhône (la CAF), a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir notamment un rappel de prime de guichet prévue par l'article 23 de la convention collective nationale du travail des personnels des organismes de sécurité sociale, outre des dommages-intérêts pour résistance abusive ; que le syndicat CGT (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Vu l'article 23, alinéas 1 et 2, de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957, ensemble le chapitre X du règlement intérieur type annexé à la convention ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappel d'indemnité de guichet, l'arrêt retient qu'il ne rapportait pas la preuve d'être en contact permanent avec le public et que le versement d'une indemnité de guichet proratisée correspond au temps de travail effectivement passé au guichet ;

Attendu cependant, qu'en application de l'article 23 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 et du règlement intérieur type auquel il renvoie, l'indemnité de guichet est attribuée aux agents dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public et qui occupent un emploi ayant pour objet le règlement complet d'un dossier prestations ; qu'il en résulte que les agents bénéficiaires de l'indemnité de guichet sont ceux qui, au regard de leurs tâches, sont affectés de façon permanente au service du public pour assurer l'exécution complète de prestations déterminées ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'indemnité de guichet n'est pas réservée aux salariés placés en contact permanent avec le public et qu'il résultait de ses constatations que le salarié en cause était affecté de façon permanente au service du public pour assurer le règlement complet de dossiers de prestations, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la cassation encourue sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif critiqué par le second moyen sur les dommages-intérêts demandés par le syndicat ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :

Vu l'article 46 de la convention collective nationale du travail des personnels des organismes de sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte qu'à l'expiration du congé légal de maternité, l'employée qui élève elle-même son enfant a droit à un congé de trois mois à demi-traitement ou à un congé d'un mois et demi à plein traitement ;

Attendu que pour faire droit à la demande de dommages-intérêts du salarié en réparation du préjudice né de la privation indue du congé spécifique pour nouvel enfant, l'arrêt énonce que ces jours de congés supplémentaires pour nouvel enfant à charge n'étaient pas destinés à compenser un désavantage résultant d'un éloignement du travail lié à la grossesse, ni à protéger la maternité ou à corriger une inégalité de fait affectant les femmes en matière d'emploi ou de promotion professionnelle, mais qu'ils avaient pour objet de favoriser la présence d'un parent auprès d'un enfant nouveau né, à l'expiration du congé maternité de la mère, de sorte qu'ils ne pouvaient être refusés aux hommes qui, assurant la garde et l'éducation de leurs enfants dans les conditions prévues par l'accord collectif, se trouvaient dans la même situation que les travailleuses et avaient ainsi vocation à en bénéficier, au regard des exigences découlant de l'article 141 du Traité CE, devenu l'article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 46 de la convention collective a pour objet d'attribuer un congé supplémentaire de maternité à l'expiration du congé légal de maternité rappelé à l'article précédent et vise ainsi à la protection des rapports particuliers entre la femme et son enfant au cours de la période qui fait suite à la grossesse et à l'accouchement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. Y... et le syndicat CGT

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR débouté les salariés de leur demande de rappel de salaire liée au versement de l'indemnité de guichet de 4 % et, par conséquent, de leur demande tendant au versement de dommages-intérêts pour résistance abusive.

AUX MOTIFS QUE sur la prime de guichet et la demande en paiement présentée à ce titre ; que cette prime est versée par l'employeur en application de l'article 23 de la convention collective précitée qui stipule, dans sa rédaction issue du protocole d'accord du 30 novembre 2004, que « Les agents techniques perçoivent, dans les conditions fixées par le règlement intérieur type, une indemnité de guichet équivalente à 4 % de leur coefficient de qualification sans points d'expérience ni points de compétences. En cas de changement de poste ou d'absence au cours d'un mois, cette prime est payée au prorata du temps pendant lequel l'emploi donnant lieu à attribution de la prime aura été exercé. L'agent technique, chargé d'une fonction d'accueil, bénéficie d'une prime de 15 % de son coefficient de qualification sans points d'expérience ni points de compétences lorsqu'il est itinérant » ; que le règlement intérieur type pris pour l'application de cette convention collective contient un paragraphe « indemnité de guichet » ainsi rédigé : « Indemnité de guichet. Une indemnité spéciale dite de guichet est attribuée en application de l'article 23 de la convention collective, aux agents dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public, et qui occupent un emploi ayant pour objet le règlement complet d'un dossier prestations, soit : - décompteurs, liquidateurs A.V.T.S., liquidateurs d'une législation de sécurité sociale, liquidateurs de pensions et rentes A.T., employés à la constitution des dossiers A.F., liquidateurs maladie, maternité, décès, et incapacité temporaire A.T., contrôleurs des liquidations de décomptes. Cette indemnité est également due aux vérificateurs techniques et contrôleurs de comptes employeurs en contact avec le public. La liste des agents bénéficiaires de l'indemnité de guichet est établie le dernier jour de chaque mois par les chefs de service responsables. L'indemnité de guichet n'entre pas en ligne de compte pour le calcul des échelons d'ancienneté et de mérite, non plus que pour la détermination de la prime d'assiduité » ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que pour pouvoir prétendre à cette indemnité de guichet, un salarié de la CAF doit remplir les conditions cumulatives suivantes, dont il lui appartient de démontrer la réunion : - il doit occuper un emploi d'agent technique, - cet emploi doit avoir pour objet le règlement complet d'un dossier prestations, - sa fonction doit nécessiter un contact avec le public, - et ce contact avec le public doit être permanent, au sens du règlement intérieur type ; que les deux premiers de ces points ne posent pas de difficulté en l'espèce, les parties ne les contestant pas au regard de l'emploi occupé par le salarié et des tâches qui sont confiées à cet agent ; que la CAF du Rhône estime par contre être en droit de ne pas verser l'intégralité de cette prime au salarié et d'en proratiser le montant en fonction du temps très partiel effectivement passé au guichet par cet agent ; qu'en ce sens elle fait valoir que l'accueil du public au sein de la CAF du Rhône est organisé de façon spécifique puisqu'il est confié d'une part à un pôle d'accueil téléphonique et d'autre part à un service dédié au guichet physique, auquel sont affectés 58 agents, tous bénéficiaires de la prime de guichet a taux plein ; qu'elle précise : - que compte tenu de la pénibilité de cette fonction d'accueil, ces agents sont affectés à 60 % au guichet et à 40 % à la liquidation des prestations hors la présence des allocataires, - que 210 autres agents, en l'occurrence des techniciens conseils de niveau 3 et des gestionnaires allocataires de niveau 4 dont la mission principale commune est la liquidation et la gestion des dossiers allocataires et du courrier, sont donc amenés à participer en renfort à l'accueil de manière occasionnelle et sur la base d'un planning prévisionnel au mois, la moyenne pour ces salariés étant ainsi de 2 à 3 vacations d'une demi journée d'accueil par mois ; - que ces agents venant en renfort bénéficient actuellement à ce titre de la prime de guichet de 4 % proratisée en fonction du temps de travail effectif d'accueil sur les sites de [...] et Saint Fons ; - qu'en ce qui concerne le site de Villefranche sur Saône, il a été mis en place une équipe de 10 agents dédiée à l'accueil, qui bénéficient tous de la prime de guichet à taux plein, et que les autres agents de ce site qui effectuent occasionnellement des prestations à l'accueil perçoivent quant a eux cette prime sur la base forfaitaire d'un mois par an de prime à 4 % ; que la CAF dans ses conclusions prétend que la prime de guichet prévue par la convention collective ne doit être versée à taux plein qu'aux personnels affectés aux services guichet et au pôle téléphonique, qui seuls peuvent être considérés comme étant en contact permanent avec le public ; que cette position est toutefois contraire à la lettre et à l'esprit des textes conventionnels, dont il résulte que l'indemnité de guichet n'est pas juridiquement réservée aux salariés affectés à un guichet ou à une plate-forme téléphonique, ni conditionnée à une confrontation physique directe entre l'agent de la caisse et l'usager, cette indemnité pouvant, nonobstant son nom, être due à des salariés en contact avec le public ailleurs qu'au guichet et/ou par d'autres moyens de communication, notamment ceux nés des technologies numériques ; que d'ailleurs la CAF reconnaît par sa propre pratique le mal fondé de cette affirmation puisqu'elle verse elle-même en réalité la prime de guichet en totalité aux agents d'accueil titulaires qui, de son propre aveu, ne passent pourtant en moyenne que 60 % de leur temps au guichet, consacrant le reste de leur temps à la liquidation hors la présence des allocataires ; qu'il n'en reste pas moins que dans l'esprit des partenaires sociaux qui l'ont créée, cette indemnité dite « de guichet » a pour objet de compenser - au moins partiellement - la pénibilité du travail d'accueil direct des usagers et les contraintes spécifiques subies par les agents d'accueil par suite de leur contact permanent avec le public (charge émotionnelle accrue, gestion du flux souvent très dense des allocataires, gestion des incivilités,...) ; qu'il convient ici de distinguer, contrairement à l'amalgame pratiqué par les premiers juges dans le jugement déféré, la notion d'agent « affecté de façon permanente au service du public » de celle, qui seule doit ici être prise en compte, d'agent « dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public », au sens du règlement intérieur précité ; qu'il appartient donc à la Cour d'apprécier ici au cas par cas dans quelle mesure l'agent concerné est ou non concrètement en contact avec le public, et s'il l'est bien de façon permanente au sens des textes conventionnels précités, étant rappelé que c'est à cet agent qu'il appartient de rapporter la preuve de ce qu'il remplit bien ces conditions d'octroi de l'indemnité ; qu'en l'espèce le salarié occupe un emploi de gestionnaire allocataires de niveau 4 et se borne en ce sens à invoquer la description de cet emploi figurant sur la fiche du référentiel des métiers en vigueur au sein de la CAF pour en déduire qu'il est nécessairement en contact permanent avec le public ; que cette description d'emploi est ainsi rédigée : « Finalité (raison d'être de l'emploi) : contribuer par son niveau de technicité à faciliter l'accès aux droits et aux institutions sociales pour les allocataires. Activités principales l'emploi : - assure l'ensemble des activités effectuées par les techniciens conseil allocataires : gestion globale du dossier allocataires (accueil, diagnostic, conseil...), - prend en charge le traitement des situations les plus complexes et de certains dossiers ou activités spécifiques impliquant la mise en application d'une réglementation particulière, - assure une interface technique entre son groupe de travail et l'encadrement, - conseille, apporte un appui technique au sein de son service en activités quotidiennes de production, - participe à la formation et au perfectionnement technique à destination du public interne, - assure le monitorat des agents formation de techniciens conseil PF, - contribue à des projets, participe à des groupes de travails, des actions d'information, des événements organisés à destination des publics internes et externes » ; que bien plus, la CAF précise dans ces écritures, sans être contredite par les intimés, qu'hormis les temps assez réduits qu'ils passent matériellement à l'accueil du public au guichet, les gestionnaires allocataires niveau 4 : - ne sont destinataires que d'appels téléphoniques de second rang, les premiers ayant été gérés par la plate-forme téléphonique qui a déjà pu renseigner l'assuré au moins partiellement, - ne sont destinataires que de courriels adressés au service puis redistribués en interne selon les numéros d'affectation, - ne prennent l'initiative d'appeler un allocataire pour traitement du dossier que lorsqu'ils le jugent utile ; qu'en l'état de ces éléments, la cour ne peut que constater que le salarié ne rapporte pas la preuve de son contact permanent avec le public au sens des textes conventionnels litigieux ; que cet agent n'est donc pas fondé à revendiquer par application de ces textes le paiement total ou partiel de l'indemnité de guichet ; que dans ces conditions, il apparaît que le versement d'une indemnité de guichet proratisée en fonction du temps de travail effectivement passé au guichet, dont cet agent a bénéficié ces dernières années de même que tous ses collègues assurant des prestations ponctuelles d'accueil au guichet, ne s'est pas fait dans le cadre d'une exécution des stipulations conventionnelles précitées mais constitue un simple usage dans l'entreprise, usage dont le salarié ne peut ici revendiquer judiciairement l'extension au-delà de ses contours actuels ; que le salarié est donc mal fondé à solliciter le paiement par l'employeur de l'indemnité de guichet à taux plein et sera donc débouté de sa demande en paiement tant d'un rappel d'indemnité de ce chef que de dommages-intérêts pour une prétendue résistance abusive de la CAF, qui n'est en rien démontrée.

1°/ ALORS QU'en application de l'article 23 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 et du règlement intérieur type auquel il renvoie, l'indemnité de guichet est attribuée aux agents dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public et qui occupent un emploi ayant pour objet le règlement complet d'un dossier prestations ; qu'il en résulte que les agents bénéficiaires de l'indemnité de guichet sont ceux qui, au regard de leurs tâches, sont affectés de façon permanente au service du public pour assurer l'exécution complète de prestations déterminées ; que pour débouter les salariés de leurs demandes de rappels d'indemnité de guichet, l'arrêt retient qu'il convient de distinguer, contrairement à l'amalgame pratiqué par les premiers juges dans le jugement déféré, la notion d'agent « affecté de façon permanente au service du public » de celle, qui seule doit ici être prise en compte, d'agent « dont la fonction nécessite un contact permanent avec le public » et qu'il appartient donc à la cour d'apprécier au cas par cas dans quelle mesure l'agent concerné est ou non concrètement en contact avec le public et s'il l'est bien de façon permanente ; que le salarié se borne à invoquer la description de son emploi figurant sur la fiche du référentiel des métiers en vigueur au sein de la CAF et que la CAF précise qu'hormis les temps assez réduits qu'ils passent matériellement à l'accueil du public au guichet, les gestionnaires allocataires niveau 4 : - ne sont destinataires que d'appels téléphoniques de second rang, les premiers ayant été gérés par la plate-forme téléphonique qui a déjà pu renseigner l'assuré au moins partiellement, - ne sont destinataires que de courriels adressés au service puis redistribués en interne selon les numéros d'affectation, - ne prennent l'initiative d'appeler un allocataire pour traitement du dossier que lorsqu'ils le jugent utile ; qu'en l'état de ces éléments, la cour ne peut que constater que le salarié ne rapporte pas la preuve de son contact permanent avec le public au sens des textes conventionnels litigieux et qu'il n'est donc pas fondé à revendiquer par application de ces textes le paiement total ou partiel de l'indemnité de guichet ; qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité de guichet n'est pas réservé aux salariés affectés en permanence à un guichet ou une plate-forme téléphonique, ni aux salariés exerçant des fonctions nécessitant en permanence une confrontation physique et directe entre l'agent de la caisse et l'usager, et alors qu'il ressort tant de la description de l'emploi figurant sur la fiche du référentiel des métiers en vigueur au sein de la CAF que de précisions de cette dernière que les salariés étaient affectés de façon permanente au service du public pour assurer l'exécution complète de prestations déterminées, la cour d'appel a violé l'article 23, alinéas 1 et 2, de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957, ensemble le chapitre X du règlement intérieur type annexé à la convention.

2°/ ALORS QUE si un accord collectif peut contenir des mesures plus favorables pour certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause puissent bénéficier de cet avantage, à moins que la différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que tous les agents qui, au regard de leurs tâches, sont affectés de façon permanente au service du public pour assurer l'exécution complète de prestations déterminées sont placés dans une situation identique au regard de l'indemnité de guichet ; qu'à supposer que le motif selon lequel « dans l'esprit des partenaires sociaux qui l'ont créée, l'indemnité dite « de guichet » a pour objet de compenser - au moins partiellement - la pénibilité du travail d'accueil direct des usagers et les contraintes spécifiques subies par les agents d'accueil par suite de leur contact permanent avec le public (charge émotionnelle accrue, gestion du flux souvent très dense des allocataires, gestion des incivilités,...) » puisse se lire comme affirmant que les exposants n'étaient pas soumis aux mêmes sujétions particulières que les agents en contact direct, physique ou seulement verbal, avec le public, la cour d'appel aurait violé le principe d'égalité de traitement.

3°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que dans ses écritures, la CAF demandait simplement à la cour de dire et juger que la CAF avait fait une juste application des dispositions de l'article 23 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957, portant attribution d'un prime de guichet de 4 % proratisable ; que dès lors, en retenant que le salarié n'est pas fondé à revendiquer par application de l'article 23 de la convention collective nationale précitée et du chapitre X du règlement intérieur type annexé à la convention le paiement total ou partiel de l'indemnité de guichet et que dans ces conditions, il apparaît que le versement d'une indemnité de guichet proratisée en fonction du temps de travail effectivement passé au guichet, dont cet agent a bénéficié ces dernières années de même que tous ses collègues assurant des prestations ponctuelles d'accueil au guichet, ne s'est pas fait dans le cadre d'une exécution des stipulations conventionnelles précitées mais constitue un simple usage dans l'entreprise, la cour d'appel a dépassé les termes du litige fixé par les parties et ainsi violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

4°/ ALORS QUE la cassation à intervenir sur la première, la deuxième ou la troisième branche du moyen de cassation emportera également cassation de la décision en ce qu'elle a rejeté la demande de salariés en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive, et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR débouté le syndicat des employés et cadres des organismes sociaux et similaires de Lyon et du Rhône CGT-FO et le syndicat CGT de leurs demandes de dommages et intérêts en raison de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession.

AUX MOTIFS visés au premier moyen.

Et AUX MOTIFS QU'en l'état des éléments qui précédent, cette intervention du syndicat s'avère recevable mais mal fondée faute de preuve d'une quelconque atteinte à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; que cette partie intervenante sera donc déboutée de l'ensemble de ses prétentions.

1°/ ALORS QU'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera cassation du présent moyen. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse d'allocations familiales (CAF) du Rhône

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la CAF du Rhône à payer à M. Yero Y... la somme de 2.688 euros bruts de dommages-intérêts en réparation du préjudice né pour lui de la privation indue du congé spécifique pour nouvel enfant prévu par l'article 46 de la convention collective.

AUX MOTIFS QUE sur la demande d'application de l'article 46 de la convention collective ; qu'il est ici constant que M. Yéro Y..., à l'approche de la naissance de son enfant, a demandé à son employeur, la CAF du Rhône de bénéficier du congé parental supplémentaire prévu à l'article 46 de la convention collective, et il résulte de la réponse que lui a adressé son employeur le 19 novembre 2013 que ce congé lui a été refusé au motif qu'il était réservé par la convention collective aux seules épouses employées mère de familles, et que les employés pères de famille ne pourrait donc y avoir droit ; que Yero Y... conteste cette décision qu'il considère comme fautive, estimant que ces dispositions sont indûment discriminatoires à l'encontre des hommes pères de famille, et sollicite l'octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice né pour lui de cette faute de son employeur ; que la convention collective applicable à la relation de travail liant les parties contient les articles 45 et 46 suivants ; ART 45 « Pendant la durée du congé légal de maternité, le salaire est maintenu aux agents comptant au moins six mois d'ancienneté. Il ne peut se cumuler avec les indemnités journalières dues à l'agent en tant qu'assuré social. Ce congé n'entre pas en compte pour le droit aux congés de maladie et ne peut entraîner aucune réduction de la durée des congés annuels » ART 46 « A l'expiration du congé prévu à l'article précédent, l'employée qui élève elle-même son enfant a droit successivement : - à un congé de trois mois à demi-traitement ou à un congé d'un mois et demi plein traitement ; - à un congé sans solde d'un an. Toutefois, lorsque l'employée est une femme seule ou lorsque son conjoint se trouve privé de ses ressources habituelles (invalidité, maladie de longue durée, service militaire), elle bénéficiera d'un congé de trois mois à plein salaire (...) » ; que le principe d'égalité entre les sexes en matière de rémunération est posé par l'article 157 du traité de fonctionnement de l'Union Européenne, qui est directement applicable dans l'ordre juridique interne français et qui est ainsi rédigé ; « Article 157 : 1. Chaque Etat membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail. 3. Le Parlement européen et le Conseil, statuant selon la procédure législative ordinaire et après consultation du Comité économique et social, adoptent des mesures visant à assurer l'application du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes en matière d'emploi et de travail, y compris le principe de l'égalité des rémunération pour un même travail ou un travail de même valeur. 4. Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un Etat membre de maintenir ou d'adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe-sous représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle » ; que le congé rémunéré prévu par l'article 46 précité de la convention entre bien dans le champ d'application de ces dispositions communautaires, qui comprend notamment tous les « avantages payés directement ou indirectement, en espèce ou en nature, par l'employeur au travailleur, en raison de l'emploi de ce dernier » ; que si l'on s'en tient à la lettre de ce texte conventionnel, les salariés de sexe masculin sont privés de ces jours de congés spécifiques, puisqu'ils ne sont accordés qu'aux seules employées, à l'issue de leur congé maternité prévue par l'article 45 et à la condition qu'elles élèvent elles-mêmes leur enfant ; que ces jours de congés supplémentaires pour nouvel enfant à charge ne sont pas destinés à compenser un désavantage résultant d'un éloignement du travail lié à la grossesse, ni à protéger la maternité ou à corriger une inégalité de fait affectant les femmes en matière d'emploi ou de promotion professionnelle ; qu'ils ont pour objet de favoriser la présence d'un parent auprès d'un enfant nouveau né, à l'expiration du congé maternité de la mère ; que ce congé spécifique ne peut donc être refusé aux hommes qui, assurant la garde et l'éducation de leur enfant dans les conditions prévues par l'accord collectif, se trouvent dans la même situation que les employées et ont ainsi vocation à en bénéficier, au regard des exigences découlant de l'article 157 précité ; qu'il s'avère par ailleurs, au vu du courrier précité de la CAF du 19 novembre 2013, que Yero Y... remplissait bien toutes les conditions pour bénéficier de ce texte et que seul le fait qu'il soit un homme et non une femme l'a empêché d'obtenir le congé parental en cause ; qu'il en résulte que la CAF du Rhône, en lui refusant indûment ces six semaines de congés-payés auxquelles il avait droit par application des textes précités et qu'il ne peut plus prendre aujourd'hui, a effectivement commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle ; qu'elle sera condamnée à l'indemniser du préjudice né de cette faute, que Yero Y... évalue pertinemment à un mois et demi de son salaire ; qu'il réclame à ce titre une indemnité de 2.467 euros nets ; qu'il résulte toutefois de la déclaration de saisine du Conseil de prud'hommes de Lyon déposée par Yero Y... le 14 mars 2013 que son salaire brut moyen sur les trois derniers mois était alors de 1.792 euros, si bien que la CAF du Rhône sera condamnée à lui payer de ce chef la somme de 2.688 euros bruts à titre de dommages-intérêts, cette somme devant être ensuite soumise aux prélèvement sociaux applicables en la matière.

1° - ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé qu'au regard du principe d'égalité entre les sexes en matière de rémunération posé par l'article 157 du traité de fonctionnement de l'union européenne, directement applicable dans l'ordre juridique interne français, M. Y... était fondé à obtenir le congé rémunéré prévu à l'article 46 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale, lequel entrait bien dans le champ d'application de ces dispositions communautaires ; qu'en statuant ainsi lorsqu'il résulte de l'arrêt que les parties avaient soutenu oralement à l'audience leurs conclusions écrites en indiquant « n'avoir rien à y ajouter » et que celles-ci ne visaient nullement ce traité, la cour d'appel qui a soulevé d'office ce moyen de droit sans avoir recueilli les observations des parties sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile.

2° - ALORS QUE l'article 46 de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale qui prévoit qu'à l'expiration du congé légal de maternité, l'employée qui élève elle-même son enfant a droit à un congé de un mois et demi à plein traitement, a pour objet de prolonger le congé de maternité et partant, de protéger la maternité; qu'il n'a pas pour objet de favoriser la présence d'un parent auprès de l'enfant nouveau né pour assurer sa garde et son éducation ; qu'en affirmant le contraire pour dire qu'un employé homme se trouvait dans la même situation qu'une employée femme et qu'il pouvait en conséquence bénéficier des six semaines de congés payés supplémentaires prévues par cet article, la cour d'appel a violé l'article 46 précité, ensemble le principe d'égalité de traitement et l'article 157 du traité de fonctionnement de l'Union Européenne.

3° - ALORS QUE ne commet pas de faute engageant sa responsabilité contractuelle l'employeur qui applique à la lettre une disposition de la convention collective ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a admis que si l'on s'en tenait à la lettre de l'article 46 de la convention collective applicable, les salariés de sexe masculins étaient privés des jours de congés spécifiques qui n'étaient accordés qu'aux seules employées; qu'en jugeant que la CAF, qui avait fait une application à la lettre de cette disposition en refusant d'accorder ces congés à M. Y... au prétexte qu'ils étaient réservés aux employées, avait néanmoins commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle et justifiant l'allocation de dommages-intérêts, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble l'article 46 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale.

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