22 novembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-18.825

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:CO10484

Texte de la décision

COMM.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 novembre 2017




Rejet non spécialement motivé


Mme D..., conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10484 F

Pourvoi n° T 16-18.825







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ M. Ahmed X...,

2°/ Mme Yamina X...,

tous deux domiciliés [...]                                      ,

3°/ la société Hôtel E...            , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...]                          ,

4°/ la société E...             II, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...]                              ,

contre l'arrêt rendu le 3 mars 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant :

1°/ à M. Michel Y..., domicilié [...]                   , en qualité de liquidateur de la société Cabinet Y... & Bigot,

2°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [...]                                                      , venant aux droits de la société Covea Risks,

3°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, dont le siège est [...]                                                      , venant aux droit de la société Covéa Risks,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 octobre 2017, où étaient présents : Mme D..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Orsini, conseiller, M. A..., avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP François-Henri Briard, avocat de M. et Mme X... et des sociétés Hôtel E...             et E...             II, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Y..., ès qualités, et des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles ;

Sur le rapport de M. Z..., conseiller référendaire, l'avis de M. A..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... et les sociétés Hôtel E...             et E...             II aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. Y..., ès qualités, et aux sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP François-Henri Briard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X... et les sociétés Hôtel E...             et E...             II

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir écarté tout manquement du cabinet d'expertise comptable Y... & Bigot à l'origine du préjudice des sociétés LDV, LDV II, de M. et Mme X... et d'avoir infirmé la décision rendue le 26 novembre 2014 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'elle avait fixé au passif de la société Cabinet Y... & Bigot, à titre de créances indemnitaires, la somme de 600 euros au profit de la société LDV et celle de 500 euros au profit de M. et Mme X... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « l'expert-comptable doit apporter dans l'exécution de sa mission toute la diligence qu'elle requiert, il est tenu à ce titre à une obligation de moyen et il appartient à son client co-contractant qui entend voir engager sa responsabilité civile professionnelle de faire la preuve d'une faute commise dans l'accomplissement de la mission, d'un préjudice indemnisable et d'un lien de causalité entre le dommage et le manquement allégués ; qu'en l'espèce, il n'est pas discuté qu'aucune lettre de mission n'a été établie entre les parties, et il convient donc de rechercher l'étendue de la mission convenue, étant rappelé que le décret n°2007-1387 du 13 septembre 2007 n'a pas vocation à s'appliquer les exercices concernés par les redressements lui étant antérieurs ; que les factures produites sont relatives à l'établissement et la présentation des comptes annuels des sociétés, aux formalités nécessaires à l'approbation des comptes annuels et aux déclarations relatives à la taxe d'apprentissage sur les salaires et à la taxe sur les séjours ; qu'elles ne permettent pas de retenir qu'une mission complète de tenue de la comptabilité aurait été confiée au cabinet d'expertise ; que n'y suffisent pas non plus la justification d'actes réalisés ponctuellement et ayant donné lieu à une facturation supplémentaire, à l'occasion de la modification de statuts, ou de l'assistance juridique et fiscale lors du contrôle de la comptabilité par l'administration ; que les deux attestations produites par les appelants, établies les 8 juin 2014 et 25 février 2015 par monsieur B... ancien salarié du cabinet Y... et Bigot - la seconde visant à régulariser la première au regard des dispositions de l'article 202 du code de procédure civile - comportent des termes généraux qui ne permettent pas face aux éléments concordants précités de retenir que la preuve serait faite d'une mission complète de tenue de comptabilité pour les années présentement concernées 2001 à 2004 ; que de même, la production par les appelants de deux correspondances qui auraient été adressées au cabinet d'expertise, émanant de monsieur X... réclamant des pièces comptables des sociétés, ne suffit pas à faire la preuve de la mission générale prétendue, nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même ; que ne sont pas plus pertinentes les pièces relatives à la mission sociale non en cause présentement, ni la déclaration de sinistre faite en tant que de besoin par monsieur Y... auprès de son assureur, ni mieux, le montant des honoraires dont les appelants font valoir qu'ils se sont avérés être en 2004 d'un montant très comparable à celui appliqué en 2014 par la société Y... & Associés, successeur de l'intimée et en charge d'une mission complète, l'intimée rappelant qu'il est d'usage afin de fidéliser la clientèle d'étendre le périmètre de la mission sans augmenter les honoraires ; que sur ce point, il convient de souligner que dans la lettre de mission produite par les appelants, régularisée le 3 novembre 2014 avec la société Y... & Associés, celle-ci précisait : « Nous effectuons depuis plusieurs années une mission de présentation des comptes (
) » ; qu'ainsi, font défaut au soutien de la demande des appelants, auxquels incombe la charge de la preuve, les éléments probants déterminants, factures et autres, de nature à démontrer sans extrapolation la réalité de la mission par eux prétendue ; qu'il convient donc de rechercher si le cabinet d'expertise a manqué, dans le cadre de sa mission d'établissement des comptes, à l'obligation qui lui incombait d'ale1ter son client sur des incohérences ou anomalies de nature à lui faire encourir un risque fiscal, étant rappelé qu'il s'agit d'une obligation de moyen ayant pour corollaire le devoir de coopération et d'information du client et que l'intimé n'était pas débiteur d'une obligation générale d'investigation et d'alerte. à l'égard de la société LDV ; qu'en premier lieu, à propos des trois écritures portées au crédit du compte courant d'associé de monsieur X..., le 31décembre2002, pour 22.867,35 euros, 36.774,45 euros et 49.774,45 euros, et comme l'ont exactement relevé les premiers juges, il n'est pas démontré que les dites écritures - dont au demeurant monsieur X... n'établit pas qu'elles correspondent à des remboursements de prêts octroyés par la société - aient présenté un caractère anormal ou incohérent que l'expert comptable devait relever lors de son contrôle des comptes ; qu'il n'est pas discutable, en effet, que le gérant pouvait réaliser des apports en compte courant d'associé sans susciter de questionnement de son expert comptable ; que c'est dans le cadre de son contrôle général visant à identifier d'éventuels éléments de minoration de l'assiette de l'impôt sur les sociétés que l'administration fiscale s'est quant à elle arrêtée sur les dites écritures ; que si celles-ci ont été lues par l'administration fiscale lors de la procédure de rectification du 4 novembre 2004, mais encore par le tribunal administratif de Paris dans sa décision du 25 novembre 2010, confirmée en appel, comme des actes d'augmentation non causés des apports dans le but de diminuer l'assiette de l'impôt sur les sociétés, c'est bien en raison de la non justification des dits apports, en dépit des demandes des services fiscaux ; que ces derniers ont ainsi considéré, alors que la société soutenait que l'apport en compte courant de monsieur X... correspondait à des remboursements de dettes contractées auprès de tiers lors de sa création, que : « les pièces produites et en particulier les déclarations sur l'honneur de remboursement selon lesquelles le père de Monsieur X... aurait effectué les remboursements en Algérie, établies postérieurement à la proposition de rectification, ne permettent d'établir ni la réalité des prêts consentis, ni celle des remboursements par Monsieur X... ; que dès lors, et en tout état de cause, faute de démonstration du versement effectif des sommes alléguées, celles-ci n'ont pu être considérées comme des charges grevant l'assiette du calcul de l'impôt sur les sociétés pour l'exercice 2001 de la société LDV ; que de manière semblable et en deuxième lieu, à propos des primes acquittées lors des années 1999 et 2000, il résulte de la procédure de rectification et de la décision du tribunal administratif précitées que la société LDV n'a pas produit de justificatif afin d'établir la cause des sommes ainsi mises à sa charge et ne démontre pas plus aujourd'hui qu'en première instance qu'elle disposait alors des pièces nécessaires et aurait été en mesure de les fournir à l'expert comptable s'il lui en avait fait la demande ; qu'en effet, l'administration fiscale a rejeté une écriture passée au crédit du compte courant d'associé de monsieur X..., à raison de 650.000 francs, supposée correspondre à une rémunération de gérance, ce rejet ayant été motivé par l'absence d'approbation de l'assemblée générale des associés, le défaut de définition du mode de calcul, le défaut de paiement effectif des charges sociales afférentes et l'absence de mention sur les déclarations annuelles de salaires ; que c'est postérieurement, comme le rappellent les intimés, que monsieur X... a indiqué que la somme en litige correspondait en réalité à une prime attribuée à monsieur C..., directeur commercial, dont certains bulletins de salaires ont été versés entre les mains de l'administration fiscale qui a finalement admis la somme de 32.067 euros comme charge justifiée, le surplus soit 62.874 euros ayant été rejeté sans contestation à la suite de la part de la société ; que les appelants soutiennent que cette erreur est imputable à l'intimée qui établissait les bulletins de salaire, cette dernière oppose que ceux-ci étaient établis sur la base des instructions qui lui étaient communiquées ; qu'enfin, et dans tous les cas, la cour constate comme l'a fait la juridiction administrative, que n'est pas justifié par les appelants le paiement effectif du montant rejeté ; qu'aussi, la société LDV qui ne démontre pas la réalité des charges prétendues, n'établit-elle pas en tout état de cause que les conséquences dommageables de la rectification auraient pu lui être évitées ; que la décision déférée sera en conséquence partiellement infirmée sur ce point, en ce qu'elle a admis un manquement du cabinet d'expertise à l'origine d'un préjudice pour la société LDV qu'elle a évalué à la somme de 600 euros en réparation d'une perte de chance de ne pas subir la procédure de rectification fiscale, ses propres carences s'avérant être à l'origine de celle-ci à l'égard de la société LDV II ; qu'il a été notifié à la société LDV II deux propositions de rectification les 16 décembre 2005 et 20 mars 2006 au titre de l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée ; que la comptabilité de la société a été rejetée et il a été procédé à une reconstitution de son chiffre d'affaires ; que le tribunal administratif de Paris, confirmé en appel, a en particulier retenu qu'aucune pièce justificative des recettes n'avait pu être présentée par la société lors du contrôle ; qu'il s'est avéré en effet que la société n'avait pas utilisé les bandes de sa caisse enregistreuse pour établir son chiffre d'affaires; cette omission a été considérée comme délibérée dans le but de minorer l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée ; que dans ces conditions et alors qu'il est présentement admis que le cabinet Y... & Bigot n'était pas en charge d'une mission de tenue complète de comptabilité, c'est à tort que la société lui fait grief de ne lui avoir pas réclamé les bandes de caisse ; que mais encore, la société LDV Il ne peut sérieusement soutenir avoir méconnu son obligation de conserver les éléments de nature à démontrer que la comptabilité dont la tenue lui incombait avait été établie sur la base de pièces comptables probantes, la conservation des fiches et rouleaux des caisses enregistreuses constituant une obligation légale dont son activité la rendait débitrice ; que dès lors, il ne saurait en tout état de cause être fait grief à l'expert comptable d'avoir failli à un devoir de mise en garde à propos d'obligations connues de sa cliente qui n'a pu ignorer le risque par elle encouru de voir rejeter sa comptabilité en cas de contrôle fiscal ; que la décision déférée étant confirmée » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « s'agissant en premier lieu des demandes formées par les sociétés LDV et LDV II : les SARL LDV et LDV Il reprochent au cabinet Y... & BIGOT et à la SAS FICO d'avoir omis de leur réclamer les pièces que l'administration fiscale leur a ensuite reproché de ne pas avoir produites, à savoir les pièces justificatives des prêts qu'aurait consentis la SARL LDV à différentes personnes physiques ainsi que les pièces justificatives des primes de gérance versées à M. X..., et les bandes de caisse de la SARL LDV II ; qu'elles soutiennent que le cabinet Y... & BIGOT était chargé d'une mission de supervision générale des comptes, et que dans ces conditions il devait exiger les pièces justificatives ; que s'agissant de la SAS FICO, il sera relevé que les demandeurs reconnaissent eux-mêmes dans leurs écritures que les prestations effectuées ne concernaient que le « traitement ordinateur », soit les travaux d'édition, d'impression et de traitement informatique, que les pièces produites, et en particulier les factures, confirment ces éléments, que les demandeurs n'établissent ni même n'allèguent aucune faute en lien avec ces services, et qu'aucun élément ne permet de démontrer que la société serait intervenue hors de son champ d'activité de manière fautive, de sorte que les demandes de dommages et intérêts dirigées à son encontre seront rejetées ; que s'agissant du cabinet Y... & BIGOT, il est constant qu'aucune lettre de mission n'a été régularisée entre les parties afin de définir l'étendue de ses attributions ; qu'il résulte des quelques factures (pièces 7) produites par les demandeurs que le cabinet a assuré chaque année une mission de base d'établissement des comptes annuels, et qu'il a, ponctuellement, facturé en sus des actes spécifiques tels que la modification des statuts ou l'assistance juridique et fiscale à l'occasion du contrôle de la comptabilité engagé par l'administration ; que l'attestation de M. B..., ancien salarié du cabinet Y... & BIGOT, rédigée en termes généraux en 2014, en cours de procédure, et sans reporter les mentions obligatoires prévues par l'article 202 du code de procédure civile, n'est pas suffisante à rapporter la preuve de l'existence d'une mission complète de tenue des comptes en l'absence de factures de ce chef ou d'autres éléments concrets plus probants ; qu'il est en tout état de cause de principe que la mission d'établissement des comptes comprend, pour l'expert-comptable, l'obligation d'alerter son client en cas d'incohérence ou d'anomalie et de l'avertir des risques, notamment fiscaux, qui en découlent ; qu'en l'espèce, d'une part, il n'est pas établi que les écritures passées en 2002 au crédit du compte d'associé de M. X... dans les comptes de la société LDV, qu'il affirme correspondre à des remboursements de prêts octroyés par la société, aient revêtu en elles-mêmes un caractère anormal ou incohérent que l'expert-comptable aurait dû relever lors du contrôle des comptes, le gérant étant parfaitement libre de réaliser des apports en compte courant d'associé sans que l'expert-comptable ait à l'interroger sur la cause des versements, et l'administration fiscale n'ayant procédé à des vérifications sur ces écritures qu'à l'occasion de son contrôle général, au cours duquel elle a recherché, et identifié, des éléments de minoration de l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; que d'autre part, les demandeurs ne démontrent pas en quoi la communication des pièces justificatives des causes de ces écritures, en 2002, à l'expert-comptable, et à supposer que ces pièces existaient à cette date, cc qui n'est pas justifié, aurait pu éviter la réalisation du dommage qu'ils déplorent ; qu'en effet, il résulte des motifs de la procédure de rectification fiscale du 15 novembre 2004 et de la décision du tribunal administratif de PARIS du 25 novembre 2010, confirmé par arrêt de la cour administrative d'appel de PARIS, non produit, que les apports litigieux en compte courant n'ont pas été justifiés malgré les demandes de l'administration, cc qui a conduit cette dernière puis le juge administratif à interpréter ces écritures comme des actes d'augmentation non causée des apports, diminuant l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; que la demande de fixation d'une créance indemnitaire formée de cc chef sera donc rejetée ; que sur les griefs portés contre le cabinet Y... & BIGOT au titre des primes de gérance versées à M. X... en 1999 et 2000, il résulte de la proposition de rectification du 15 novembre 2004 et de la décision du tribunal administratif de PARIS du 25 novembre 2010, qu'aucun justificatif n'a été produit afin de justifier de la cause des sommes mises à la charge de la société LDV à ce titre ; que la société n'établit pas davantage aujourd'hui qu'elle disposait à l'époque des pièces justificatives qu'elle aurait pu, sur sa demande, communiquer à l'expert-comptable afin d'échapper aux conséquences de la rectification fiscale, de sorte qu'elle ne démontre pas que le dommage qu'elle déplore aurait pu être évité si cette demande lui avait été faite ; qu'il résulte en revanche de la motivation de la proposition de rectification sur ce point que, compte tenu de l'accumulation d'irrégularités (absence d'approbation de la prime alléguée par l'assemblée générale, absence du mode de calcul, absence du paiement des charges et de déclaration) afférentes à cette gratification comptabilisée comme une charge de la SARL LDV, l'expert-comptable était tenu, à tout le moins, d'alerter la société des risques fiscaux encourus ; que toutefois, le préjudice indemnisable de la société LDV, qui ne peut inclure le montant des impôts, dont le paiement est dû par le contribuable, et ne consiste qu'en une perte de la chance de ne pas subir la procédure de rectification fiscale, est manifestement très réduit, la société LDV ayant créé elle-même la grande majorité des conditions de réalisation de ce risque en comptabilisant intentionnellement une charge non causée, dans le seul intérêt de son gérant M. X... ; qu'il sera alloué à ce titre à la SARL LDV la somme de 600 euros, qui sera donc fixée au passif de la liquidation de la société Y... & BIGOT en tant que créance indemnitaire, et au paiement de laquelle la SA COVEA RISKS, qui ne dénie pas sa garantie, sera condamnée ; qu'enfin, sur la demande de la société LDV II relative aux bandes de caisse, il résulte de la motivation de la proposition de rectification fiscale du 16 décembre 2005 et de la décision du tribunal administratif de PARIS confirmée par arrêt de la cour administrative d'appel, non produit, que l'omission de comptabilisation des recettes a été considérée comme «délibérée», dans le but de minorer l'assiette de la TVA, que l'administration a dû reconstituer sans pièces ; qu'il ne peut être sérieusement reproché au cabinet Y... & BIGOT de ne pas avoir mis en garde la société, au titre de son devoir général d'alerte, sur la nécessité de conserver les fiches et rouleaux des caisses enregistreuses afin de justifier de ses écritures comptables en cas de contrôle, nécessité qui constitue une obligation légale élémentaire dont il est de principe que le professionnel doit, à titre de précaution, s'assurer lui-même de respecter ; qu'à titre surabondant, les agissements comptables de la SARL LDV II étant qualifiés d'intentionnels, compte tenu notamment de leur caractère systématique et de la durée de la non conservation des bandes de caisse, dont tout commerçant comprend, même sans l'assistance d'un tiers expert, la nécessité, ils ont contribué à la réalisation du dommage dans une mesure telle qu'elle absorberait, à la supposer établie, la faute de l'expert-comptable ; que la demande de la SARL LDV II sera donc rejetée ; que les demandes formées par les sociétés au titre du préjudice subi du fait de la procédure fiscale seront rejetées, aucun justificatif d'atteinte à leur fonctionnement normal ou à leur image, ni aucun justificatif de frais spécifique supporté, hors les frais de procédure qui font l'objet d'une demande particulière sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, n'étant produit » ;

ALORS, PREMIEREMENT, QUE les juges du fond sont tenus d'examiner et d'analyser les documents régulièrement soumis à leur examen, serait-ce sommairement ; que les exposants avaient soumis à la cour d'appel les factures émises par le cabinet Y... & Bigot les 4 octobre 2003 et 10 novembre 2003, une lettre du 14 février 2003 ainsi que des factures émises par son partenaire, le cabinet Fico, en date du 8 juillet 2003 ; qu'il apparaissait, à la lecture de ces documents, que le cabinet d'expertise comptable avait été mandaté pour l'établissement et la présentation des comptes annuels mais aussi pour l'établissement de la taxe d'apprentissage et de formation, pour l'édition des documents comptables obligatoires (journaux, grand livre, balance), pour la rédaction de la liasse fiscale au régime normal, pour la rédaction de l'assemblée annuelle, du rapport de gestion et des montants annexes ; qu'il en résultait que le cabinet Y... et Bigot était tenue d'une mission générale d'expertise comptable à l'égard des sociétés Hôtel E...             et société E...             II ; qu'en considérant pourtant que la société Y... et Bigot n'était tenue que de l'établissement et de la présentation des comptes, sans s'intéresser ni même analyser ces documents, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, DEUXIEMEMENT ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE même s'il a une mission limitée à la présentation des comptes annuels de l'entreprise, l'expert comptable est tenu, à l'égard, de son client, d'une obligation générale d'investigation et d'alerte ainsi que d'un devoir de conseil ; qu'en l'espèce, l'administration fiscale a adressé, aux sociétés Hôtel E...             et E...             II, une proposition de rectification pour un montant total de 113.998 euros portant sur des rappels de cotisations d'impôts sur les sociétés pour les exercices 2001 à 2003, une proposition de rectification pour un montant total de 136.931 euros portant sur des rappels au titre de la TVA pour les exercices 2002 à 2004 ainsi que des propositions de redressement ; qu'elle a également adressé, à M. et Mme X..., une proposition de rectification portant sur l'impôt sur le revenu et les contributions sociales au titre des années 2003 et 2004 ; que pour se déterminer ainsi, l'administration fiscale a jugé que la comptabilité présentée par les sociétés Hôtel E...             et E...             II était irrégulière et non probante ; qu'en s'abstenant d'alerter les exposantes de l'existence d'une irrégularité portant sur la comptabilité qui avait été présentée, le cabinet Y... & Bigot a méconnu son devoir de conseil et d'alerte ; qu'en écartant néanmoins tout manquement imputable à ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur version alors applicable ;

ALORS, TROISIEMEMENT, QUE la mission dévolue à l'expert-comptable emporte nécessairement une obligation de conseil et de mise en garde touchant en particulier les irrégularités ou les anomalies apparaissant dans la comptabilité de son client ; que dans ce cadre, il doit exiger les documents nécessaires pour établir une comptabilité probante et sincère ; que l'administration fiscale, pour établir des redressements fiscaux à l'égard des exposants, a indiqué que la comptabilité n'avait pas été effectuée à partir des bandes journalières mais à partir des seuls encaissements en banque ; qu'il en résulte que l'expert-comptable ne s'est pas assuré que la comptabilité présentée à l'administration fiscale s'appuyait sur des éléments probants et sur une méthode admise par cette dernière ; qu'en écartant néanmoins tout manquement imputable à ce dernier, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur version alors applicable.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir écarté tout manquement du cabinet d'expertise comptable Y... & Bigot à l'origine du préjudice des sociétés LDV, LDV II, de M. et Mme X... et d'avoir infirmé la décision rendue le 26 novembre 2014 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'elle avait fixé au passif de la société Cabinet Y... & Bigot, à titre de créances indemnitaires, la somme de 600 euros au profit de la société LDV et celle de 500 euros au profit de M. et Mme X... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article 1382 du code civil « Tout.fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ; que si un manquement contractuel peut être constitutif d'une faute délictuelle à l'égard de tiers à la convention, il reste qu'en l'espèce, aucun manquement dans l'exécution de sa mission n'étant retenu à l'encontre du Cabinet Le bèque & Bigot, les demandes des époux X... ne peuvent qu'être rejetées. La décision déférée étant à cet égard infirmée ; que pour les motifs qui précèdent, les appelants ne peuvent que voir rejetées leurs demandes en paiement de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral, aucune faute n'étant retenue à l'encontre du Cabinet Le bègue & Bigot » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Les époux X... reprochent aux défenderesses d'être responsables du redressement fiscal qu'ils ont subi au titre de l'impôt sur les revenus et les contributions sociales des années 2001 à 2004 du fait des fautes contractuelles commises au préjudice des sociétés dont M. X... était gérant ou associé ; qu'il résulte de la présente décision que seule une faute est caractérisée à l'encontre de la société Y... & BIGOT, au titre d'un manquement à son devoir d'alerte au préjudice de la société LDV afférent à la comptabilisation de la rémunération versée au gérant, dont il est résulté pour les époux X... une perte de la chance d'éviter le redressement fiscal qu'ils déplorent ; que s'il résulte du mémoire en défense soutenu par l'administration fiscale devant la cour administrative d'appel de PARIS que les rappels d'impôt sur le revenu ont été maintenus au titre de la prime de gérance non justifiée, les demandeurs ne fournissent aucune pièce justificative des sommes effectivement réclamées à cc titre, le montant des droits ayant manifestement varié depuis le début de la procédure ; qu'il s'ensuit que sur la base des seules écritures de l'administration fiscale, versées aux débats, il sera alloué à M. et Mme X... la somme de 500 euros, qui sera fixée au passif de la liquidation de la société Y... & BIGOT, à titre indemnitaire, et au paiement de laquelle sera condamnée la SA COVEA RISKS ; que le surplus de leurs demandes sera rejeté, aucun préjudice moral, financier ou matériel spécifique n'étant établi ».

ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur l'une quelconque des branches du moyen précédent entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du Code de procédure civile, l'annulation des chefs du dispositif de l'arrêt attaqué écartant tout manquement du cabinet d'expertise comptable Y... & Bigot à l'origine des redressements fiscaux subis par M. et Mme X....

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