7 mars 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-20.650

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:SO00386

Texte de la décision

SOC.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 mars 2018




Rejet


M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 386 F-D

Pourvoi n° B 16-20.650


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ l'AGS, dont le siège est [...]                              ,

2°/ l'Unedic, dont le siège est [...]                              , agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile [...]                                                                                                  ,

contre l'arrêt rendu le 11 mai 2016 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale), dans le litige les opposant :

1°/ à M. Luciano Y..., domicilié [...]                                                       ,

2°/ à M. Fabien Z..., domicilié [...]                                       , pris en qualité de mandataire liquidateur de la société MPLS,

défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2018, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS et de l'Unedic - CGEA de Nancy, de la SCP Boulloche, avocat de M. Y..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 11 mai 2016), qu'engagé le 1er octobre 1994 par la société MPLS (la société), M. Y... a été licencié le 18 décembre 2006 pour faute grave ; que par jugement du 5 octobre 2010, la société a été mise en redressement judiciaire puis, par décision du 9 novembre 2010, en liquidation judiciaire, M. Z... étant désigné liquidateur ; qu'ayant saisi la juridiction prud'homale, le salarié a obtenu, par décision du 2 décembre 2013, la fixation au passif de la société de créances d'un montant de 205 386,73 euros à titre d'un rappel de salaires de janvier 2000 à novembre 2006, de 20 538,67 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents et de 49 611,11 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ; qu'ayant sollicité l'exécution de cette décision, le salarié s'est vu opposer par le Centre de gestion et d'étude AGS le plafond 6 de garantie de l'AGS ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que l'AGS fait grief à l'arrêt de la juger tenue de garantir les sommes dues au salarié à concurrence du plafond 13 applicable antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 24 juillet 2003 et de la condamner à verser au salarié une certaine somme au titre du solde de sa garantie lui restant due alors, selon le moyen, que le montant maximum de la garantie prévue à l'article L. 3253-17 du code du travail relève d'un plafond unique, fixé à six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage ; qu'il s'apprécie toutes créances du salarié confondues, à la date à laquelle est due la créance du salarié ; que la garantie de l'AGS n'intervient qu'en raison de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ; que l'exigibilité de la créance du salarié à l'égard de l'AGS est subordonnée à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ; qu'en soumettant au plafond 13 les créances dues à M. Y..., après avoir constaté que la société MPLS avait été placée en redressement judiciaire le 5 octobre 2010, date à laquelle les créances du salarié ne pouvaient relever que du plafond 6, la cour d'appel a violé les articles L. 3253-6, L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail ;

Mais attendu que la détermination du montant maximum de la garantie de l'AGS s'apprécie à la date à laquelle est née la créance du salarié et au plus tard à la date du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire ; que lorsque les créances salariales, en raison des dates différentes auxquelles elles sont nées, relèvent, les unes du plafond 13, fixé par l'article D. 143-2 de l'ancien code du travail, les autres du plafond 6, fixé par l'article D. 3253-5 du code du travail, ces plafonds leur sont respectivement applicables, dans la limite globale du plafond 13 alors applicable ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a retenu que les demandes en paiement de rappels de salaire portaient sur la période allant de janvier 2000 à novembre 2006, et que, si elles avaient été sollicitées par le salarié à l'occasion de la rupture du contrat de travail, ces créances salariales n'étaient pas la conséquence de cette dernière et que leur date d'exigibilité correspondait à la date habituelle de paiement des salaires, a exactement décidé que l'AGS était tenue de garantir à concurrence d'une certaine somme, compte tenu du montant maximum du plafond 13 applicable jusqu'au 29 juillet 2003 et des sommes déjà versées par l'AGS ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'AGS-Unedic aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'AGS-Unedic et les condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'AGS et l'Unedic - CGEA de Nancy

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le CGEA est tenu de garantir les sommes dues à M. Y... à hauteur du plafond 13 applicable antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 24 juillet 2003 et d'avoir condamné l'AGS CGEA de Nancy à verser à M. Y... la somme de 64 328 euros au titre du solde de sa garantie lui restant due ;

AUX MOTIFS QUE M. Y... sollicite l'application du plafond 13 en vigueur antérieurement à l'application du décret du 24 juillet 2003 ; qu'il a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave en date du 18 décembre 2006 ; que la société MPLS a été placée en redressement judiciaire le 5 octobre 2010, converti en liquidation judiciaire le 9 novembre 2010 ; que suite à la contestation de son licenciement, la cour d'appel de Metz, par arrêt rendu le 2 décembre 2013, a fixé la créance de M. Luciano Y... au passif de la liquidation judiciaire de la société MPLS ; que la garantie de l'AGS s'applique à toutes les sommes dues aux salariés en exécution du contrat de travail et exigibles à la date du jugement d'ouverture ; que le CGEA a limité sa garantie au montant du plafond 6 en vigueur à la date de la rupture du contrat de travail, soit le 18 décembre 2006 ; que le décret du 24 juillet 2003 a modifié les plafonds de garantie due par l'AGS avec effet au 29 juillet 2003, sachant que le montant du plafond s'apprécie à la date à laquelle est due la créance du salarié et au plus tard à la date du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire, par application des dispositions de l'article D. 3253-5 du code du travail ; qu'il convient dès lors de distinguer, parmi les créances, celles nées avant et celles nées après l'entrée en vigueur du décret du 24 juillet 2003 ; que le salarié soutient que ses créances de salaire et indemnité de travail dissimulé sont nées à la date d'exigibilité des salaires, de sorte qu'il convient d'appliquer le plafond 13 pour les sommes dues avant le 29 juillet 2003, et le plafond 6 pour les sommes dues après le 29 juillet 2003 ; qu'en l'espèce, les sommes dues concernent des rappels de salaires sur la période de janvier 2000 à novembre 2006 et une indemnité pour travail dissimulé ; que si les demandes de rappel de salaires et de l'indemnité pour travail dissimulé ont été sollicitées par le salarié à l'occasion de la rupture du contrat de travail sous forme de licenciement, ces créances ne sont pas les conséquences de la rupture du contrat de travail et ne sont donc pas nées en raison du licenciement du salarié ; que les règles de périodicité du salaire d'ordre public régies par les articles L. 3242-1 et suivants du code du travail signifient que, pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire, y compris les heures supplémentaires effectuées, afférent au mois considéré ; qu'il en résulte que la créance de M. Y... au titre de rappel de salaire sur la période de janvier 2000 à novembre 2006, est née au fur et à mesure de la date habituelle du paiement des salaires de l'entreprise ; que la répartition des rappels de salaires entre les sommes dues avant et après le 29 juillet 2003 effectuée par le salarié n'est pas contestée par le CGEA ; que lorsque deux plafonds sont applicables en raison des dates différentes auxquelles sont dues les créances, il convient d'appliquer le plafond le plus élevé à la totalité des créances additionnées ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, le CGEA est tenu de garantir les sommes dues à hauteur du plafond 13 applicable antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 24 juillet 2003 ; que le jugement entrepris, sera infirmé sur ce point ;

ALORS QUE le montant maximum de la garantie prévue à l'article L. 3253-17 du code du travail, relève d'un plafond unique, fixé à six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage ; qu'il s'apprécie toutes créances du salarié confondues, à la date à laquelle est due la créance du salarié ; que la garantie de l'AGS n'intervient qu'en raison de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ; que l'exigibilité de la créance du salarié à l'égard de l'AGS est subordonnée à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ; qu'en soumettant au plafond 13 les créances dues à M. Y..., après avoir constaté que la société MPLS avait été placée en redressement judiciaire le 5 octobre 2010, date à laquelle les créances du salarié ne pouvaient relever que du plafond 6, la cour d'appel a violé les articles L. 3253-6, L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

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