4 avril 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-11.793

Chambre sociale - Formation plénière de chambre

ECLI:FR:CCASS:2018:SO00624

Texte de la décision

SOC.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 avril 2018




Rejet


M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président,



Arrêt n° 624 FP-D

Pourvois n° N 17-11.809
V 17-11.793
à Y 17-11.796
A 17-11.798
à F 17-11.803
G17-11.805
M17-11.808
P 17-11.810
à S 17-11.813
U 17-11.815
à D 17-11.824 JONCTION




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois n° N 17-11.809, V 17-11.793, à Y 17-11.796, A 17-11.798 à F 17-11.803, G 17-11.805, M 17-11.808, P 17-11.810 à S 17-11.813, U 17-11.815 à D 17-11.824 formés respectivement par :

1°/ M. Romain Y..., domicilié [...]                                      ,

2°/ Mme Aline Z..., domiciliée [...]                           ,

3°/ M. Julien A..., domicilié [...]                                  ,

4°/ M. Jean-Noël B..., domicilié [...]                                 ,

5°/ Mme Cindy C..., domiciliée [...]                                         ,

6°/ M. Fabien D..., domicilié chez M. Robert D...[...]                                     ,

7°/ Mme Geneviève E..., domiciliée [...]                      ,

8°/ Mme Virginie F..., domiciliée [...]                                                   ,

9°/ Mme Héloïse G..., domiciliée [...]                                ,

10°/ Mme Noëlle H..., domiciliée [...]                      ,

11°/ Mme I... Salat, domiciliée [...]                                      ,

12°/ Mme Huguette J..., [...]                           ,

13°/ Mme Martine K..., 688 chemin de Marios BB... , [...] ,

14°/ Mme Isabelle L..., domiciliée [...]                                  ,

15°/ M. Julien M..., domicilié [...]                                     ,

16°/ M. Laurent N..., domicilié [...]                                 ,

17°/ Mme Delphine O..., domiciliée [...]                             ,

18°/ Mme Antonia P..., domiciliée [...]                             ,

19°/ M. Mustapha Q..., domicilié [...]                                       ,

20°/ M. Jean Roland R..., domicilié [...]                                          ,

21°/ M. Thierry S..., domicilié [...]                                     ,

22°/ Mme Catherine T..., domiciliée [...]                           ,

23°/ M. Régis U..., domicilié [...]                                         ,

24°/ Mme Odile V..., domiciliée [...]                    ,

25°/ Mme Martine W..., domiciliée [...]                                                ,

26°/ M. Pascal XX..., domicilié [...]                             ,

27°/ M. José YY..., domicilié [...]                                       ,

28°/ le syndicat CGT FAPT 82, dont le siège est [...]                         ,

contre vingt sept arrêts rendus le 1er décembre 2016 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2, chambre sociale), dans le litige les opposant à la société La Poste, société anonyme, dont le siège est [...]                           ,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leurs pourvois, les deux moyens de cassation communs annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 14 mars 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme ZZ..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Goasguen, M. Chauvet, Mme Farthouat-Danon, M. Maron, Mme Aubert-Monpeyssen, MM. Rinuy, Pion, Schamber, Mme Slove, M. Ricour, conseillers, Mmes Ducloz, Salomon, Depelley, conseillers référendaires, Mme AA..., avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme ZZ..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat, de M. Y..., de vingt-six autres salariés et du syndicat CGT FAPT 82, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société La Poste, l'avis de Mme AA..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la connexité, joint les pourvois n° N1711809, V1711793 à Y1711796, A 1711798 à F1711803, G1711805, M1711808, P1711810 à S1711813, U1711815 à D1711824 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 1er décembre 2016), que M. Y... et vingt-six autres salariés de La Poste ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaires au titre du complément Poste et d'indemnité au titre de l'entretien de leur tenue de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de rejeter leur demande au titre du complément Poste, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de rémunération, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge pour son employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; que le salarié, agent contractuel (ACO), avait produit, au soutien de sa demande, un tableau reprenant les sommes perçues mois par mois à titre de complément poste et celles versées chaque mois, sur la même période, à un agent fonctionnaire (AFO) de grade équivalent ; qu'il avait ainsi satisfait à la charge de l'allégation qui pesait sur lui ; qu'en le déboutant néanmoins de sa demande sans exiger de La Poste qu'elle justifie la différence de traitement ainsi mise en exergue, la cour d'appel a d'ores et déjà violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;

2°/ qu'en déboutant le salarié de sa demande au motif que La Poste aurait justifié de ce que la comparaison qu'elle opérait n'aurait pas fait apparaître de différences, quand l'employeur avait choisi comme élément de comparaison des fonctionnaires du secteur médian et avait sciemment occulté dans son comparatif tous les fonctionnaires du secteur haut, de sorte que la comparaison se trouvait faussée, la cour d'appel a encore violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les salariés ne se comparaient à aucun fonctionnaire déterminé exerçant au même niveau des fonctions identiques ou similaires, la cour d'appel en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, qu'aucune atteinte au principe d'égalité de traitement n'était caractérisée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de rejeter leur demande au titre des frais d'entretien de leur tenue de travail pour la période allant de juillet 2013 à décembre 2014, alors, selon le moyen :

1°/ que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; qu'aux termes de l'article 17 du règlement intérieur de La Poste et de l'instruction du 23 août 2006, le personnel doit porter la tenue de travail fournie quand l'exercice du service l'exige et il doit, s'il est en contact avec la clientèle, adopter une tenue correcte ; que les salariés du service de distribution, et plus particulièrement les facteurs, sont ainsi tenus de porter une tenue de travail aux couleurs et marque de La Poste, tenue qu'ils peuvent acheter, moyennant un crédit accordé par leur employeur, via un site internet ; qu'en affirmant néanmoins que le salarié ne justifiait pas, au regard des textes applicables dans l'entreprise, de l'obligation de porter une tenue de travail spécifique, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; que la cour d'appel a constaté que le salarié disposait d'un crédit annuel alloué par l'employeur auprès d'un fournisseur pour acheter des vêtements siglés La Poste ; qu'en affirmant que cet élément n'était pas de nature à caractériser le port obligatoire d'une tenue de travail spécifique quand l'octroi de ce crédit ne pouvait avoir pour autre but que de s'assurer que les facteurs de la poste revêtent bien une tenue de travail permettant d'identifier leur employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu que selon l'article 17 du règlement intérieur de La Poste, quand l'exercice du service l'exige et sauf en cas de conditions climatiques exceptionnelles, le personnel doit porter la tenue de travail fournie et, s'il est en contact de la clientèle, adopter une tenue correcte ; qu'en vertu de l'article 2 de l'arrêté du 3 mai 2006 pris en application de l'article R. 1-2-6 du code des postes et télécommunications, le prestataire édicte les règles d'identification de ses employés pour ses activités de distribution des envois de correspondance, que ceux-ci sont porteurs d'une carte professionnelle comportant une photographie mentionnant prénom et qualité du détenteur, raison sociale, adresse et sigles éventuels du prestataire titulaire de l'autorisation et sont également porteurs d'un signe distinctif identifiant ce prestataire ; qu'il résulte de ces textes que le facteur n'est pas soumis au port d'une tenue de travail spécifique ;

Et attendu que seuls les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur devant, dès lors qu'ils résultent d'une sujétion particulière, être supportés par ce dernier, la cour d'appel a statué à bon droit ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens communs produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. Y..., et vingt six autres demandeurs aux pourvois n° N17-11.809 (dossier pilote) et autres.


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré mal fondée l'action du salarié portant sur le complément poste et rejeté ses demandes en dommages et intérêts ainsi que celles du syndicat FAPT 82 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la différence de traitement entre les salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que le complément poste perçu par l'ensemble des agents de La Poste, qu'ils soient contractuels ou fonctionnaires, rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ; qu'ainsi, il est nécessaire de comparer la situation de Romain Y..., salarié de droit privé, par rapport à un fonctionnaire placé dans la même situation et de rechercher s'il existe concrètement une ou plusieurs raisons objectives justifiant la différence de complément poste ; que ces raisons objectives doivent être recherchées dans le niveau de fonction et/ou la maîtrise du poste ; qu'en l'espèce, Romain Y..., lequel est entré à La Poste le 22 avril 2008, actuellement classée au grade ACC12, c'est à dire au niveau 1.2 et exerce les fonctions de facteur, se borne à produire un tableau élaboré par ses soins par lequel il compare le montant de son complément poste perçu de juin 2010 à 2015 au montant du complément poste seuil haut perçu par un fonctionnaire indéterminé de niveau I.2 ; que la comparaison effectuée par l'appelant ne permet pas de vérifier, d'une part, qu'il est dans la même situation qu'un fonctionnaire déterminé de même niveau percevant un complément poste seuil haut et d'autre part, qu'il n'existe pas, concrètement, de raisons objectives de justifier la différence de montant de complément poste ; que l'employeur, pour sa part, produit les bulletins de salaire correspondant à un fonctionnaire déterminé dont le matricule est BDR795, recruté en 2003, exerçant les fonctions de facteur et a élaboré un tableau comparatif du complément poste perçu par ce fonctionnaire avec celui perçu par l'appelant ; que la comparaison opérée par La Poste ne fait pas apparaître de différence de montant du complément poste ; que compte tenu de ces éléments, la décision des premiers juges relative au rappel de complément poste et aux dommages et intérêts pour violation du principe « à travail égal, salaire égal » sera confirmée ;

ET AUX MOTIFS, EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE La Poste a décidé de fusionner l'ancien système des primes et indemnités en un seul et même complément indemnitaire dénommé « complément poste » et ce, à compter de 1993 pour les fonctionnaires et de 1995 pour les contractuels de droit privé ; que ce complément poste est attribué à l'ensemble des salariés de La Poste, quel que soit leur statut public ou privé ; qu'il existe deux sortes de versement au titre du complément poste : - un versement mensuel, - un versement trimestriel ; que le principe « à travail égal, salaire égal » repris par les articles L. 3221-1 et suivants du code du travail impose à l'employeur d'assurer l'égalité de rémunération entre les salariés qui sont placés dans une situation identique ; qu'il incombe au salarié qui invoque une méconnaissance du principe « à travail égal, salaire égal » de démontrer qu'il ne perçoit pas la même rémunération qu'un salarié placé dans une situation identique ; que dans ce cas, l'employeur doit démontrer que cette différence de traitement est justifiée par une raison objective et pertinente ; qu'en l'espèce, les demandeurs se comparent à un fonctionnaire indéterminé, qui percevrait un montant mensuel de complément poste correspondant au secteur haut du champ de normalité ; qu'il n'est pas démontré que ce fonctionnaire existe effectivement ; qu'ils ne rapportent pas d'éléments de fait concrets permettant une comparaison avec la situation d'autres salariés d'un niveau hiérarchique et d'une ancienneté comparables à la leur ; qu'en conséquence, ils seront déboutés de leurs demandes au titre du complément poste et de leurs demandes de dommages et intérêts pour non respect de la règle « à travail égal, salaire égal » ;

ALORS, D'UNE PART, QU'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de rémunération, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge pour son employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; que le salarié, agent contractuel (ACO), avait produit, au soutien de sa demande, un tableau reprenant les sommes perçues mois par mois à titre de complément poste et celles versées chaque mois, sur la même période, à un agent fonctionnaire (AFO) de grade équivalent ; qu'il avait ainsi satisfait à la charge de l'allégation qui pesait sur lui ; qu'en le déboutant néanmoins de sa demande sans exiger de La Poste qu'elle justifie la différence de traitement ainsi mise en exergue, la cour d'appel a d'ores et déjà violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en déboutant le salarié de sa demande au motif que La Poste aurait justifié de ce que la comparaison qu'elle opérait n'aurait pas fait apparaître de différences, quand l'employeur avait choisi comme élément de comparaison des fonctionnaires du secteur médian et avait sciemment occulté dans son comparatif tous les fonctionnaires du secteur haut, de sorte que la comparaison se trouvait faussée, la cour d'appel a encore violé le principe « à travail égal, salaire égal ».

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté le salarié de ses demandes relatives aux frais d'entretien de la tenue de travail et à l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que le syndicat FAPT 82 de sa demande fondée sur ce texte ;

AUX MOTIFS QUE seuls les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent, des lors qu'ils résultent d'une sujétion particulière, être supportés par ce dernier ;
qu'il est établi qu'à compter de janvier 2015, La Poste a pris en charge les frais d'entretien des tenues de facteurs ; que cette prise en charge ne constitue pas un aveu pour la période antérieure ; que pour la période de juillet 2013 à décembre 2014, sur laquelle porte la demande de l'appelant, il y a lieu de retenir que l'article 17 du règlement intérieur de La Poste dispose « quand l'exercice du service l'exige et sauf en cas de conditions climatiques exceptionnelles, le personnel doit porter la tenue de travail fournie et, s'il est en contact avec la clientèle, adopter une tenue correcte » ; que le fait que Romain Y... dispose d'un crédit annuel alloué par son employeur auprès d'un fournisseur tiers pour acheter librement des vêtements siglés La Poste n'est pas de nature à caractériser le port obligatoire d'une tenue de travail spécifique ; que le salarié, facteur, ne justifie pas au regard de ce texte de l'obligation de porter une tenue de travail spécifique ; que les conditions pour obtenir une indemnisation des frais d'entretien d'une tenue obligatoire ne sont donc pas remplies ; que l'appelant sera donc débouté et le jugement réformé de ce chef ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; qu'aux termes de l'article 17 du règlement intérieur de La Poste et de l'instruction du 23 août 2006, le personnel doit porter la tenue de travail fournie quand l'exercice du service l'exige et il doit, s'il est en contact avec la clientèle, adopter une tenue correcte ; que les salariés du service de distribution, et plus particulièrement les facteurs, sont ainsi tenus de porter une tenue de travail aux couleurs et marque de La Poste, tenue qu'ils peuvent acheter, moyennant un crédit accordé par leur employeur, via un site internet ; qu'en affirmant néanmoins que le salarié ne justifiait pas, au regard des textes applicables dans l'entreprise, de l'obligation de porter une tenue de travail spécifique, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; que la cour d'appel a constaté que le salarié disposait d'un crédit annuel alloué par l'employeur auprès d'un fournisseur pour acheter des vêtements siglés La Poste ; qu'en affirmant que cet élément n'était pas de nature à caractériser le port obligatoire d'une tenue de travail spécifique quand l'octroi de ce crédit ne pouvait avoir pour autre but que de s'assurer que les facteurs de la poste revêtent bien une tenue de travail permettant d'identifier leur employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail.
Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour Mme J... demanderesse au pourvoi n°G 17-11.805.


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme J... de sa demande au titre du complément poste et de sa demande en dommages et intérêts pour non respect de la règle « à travail égal, salaire égal » ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la différence de traitement entre les salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que le complément poste perçu par l'ensemble des agents de La Poste, qu'ils soient contractuels ou fonctionnaires, rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ; qu'ainsi, il est nécessaire de comparer la situation de Huguette J..., salariée de droit privé, par rapport à un fonctionnaire placé dans la même situation et de rechercher s'il existe concrètement une ou plusieurs raisons objectives justifiant la différence de complément poste ;
que ces raisons objectives doivent être recherchées dans le niveau de fonction et/ou la maîtrise du poste ; qu'en l'espèce, Huguette J..., laquelle est entrée à La Poste le 1er avril 1995, actuellement classée au grade ACC13, c'est à dire au niveau I.3 et exerce les fonctions d'agent de production, se borne à produire un tableau élaboré par ses soins par lequel elle compare le montant de son complément poste perçu de juin 2008 à 2015 au montant du complément poste seuil haut perçu par un fonctionnaire indéterminé de niveau 1.3 ; que la comparaison effectuée par l'appelante ne permet pas de vérifier, d'une part, qu'elle est dans la même situation qu'un fonctionnaire déterminé de même niveau percevant un complément poste seuil haut et d'autre part, qu'il n'existe pas, concrètement, de raisons objectives de justifier la différence de montant de complément poste ; que l'employeur, pour sa part, produit les bulletins de salaire correspondant à un fonctionnaire déterminé dont le matricule est CNU618, recruté en 1995, exerçant les fonctions de facteur et a élaboré un tableau comparatif du complément poste perçu par ce fonctionnaire avec celui perçu par l'appelante ; que la comparaison opérée par La Poste ne fait pas apparaître de différence de montant du complément poste ; que compte tenu de ces éléments, la décision des premiers juges relative au rappel de complément poste et aux dommages et intérêts pour violation du principe « à travail égal, salaire égal » sera confirmée ;

ET AUX MOTIFS, EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE La Poste a décidé de fusionner l'ancien système des primes et indemnités en un seul et même complément indemnitaire dénommé « complément poste » et ce, à compter de 1993 pour les fonctionnaires et de 1995 pour les contractuels de droit privé ; que ce complément poste est attribué à l'ensemble des salariés de La Poste, quel que soit leur statut public ou privé ; qu'il existe deux sortes de versement au titre du complément poste : - un versement mensuel, - un versement trimestriel ; que le principe « à travail égal, salaire égal » repris par les articles L. 3221-1 et suivants du code du travail impose à l'employeur d'assurer l'égalité de rémunération entre les salariés qui sont placés dans une situation identique ; qu'il incombe au salarié qui invoque une méconnaissance du principe « à travail égal, salaire égal » de démontrer qu'il ne perçoit pas la même rémunération qu'un salarié placé dans une situation identique ; que dans ce cas, l'employeur doit démontrer que cette différence de traitement est justifiée par une raison objective et pertinente ; qu'en l'espèce, les demandeurs se comparent à un fonctionnaire indéterminé, qui percevrait un montant mensuel de complément poste correspondant au secteur haut du champ de normalité ; qu'il n'est pas démontré que ce fonctionnaire existe effectivement ; qu'ils ne rapportent pas d'éléments de fait concrets permettant une comparaison avec la situation d'autres salariés d'un niveau hiérarchique et d'une ancienneté comparables à la leur ; qu'en conséquence, ils seront déboutés de leurs demandes au titre du complément poste et de leurs demandes de dommages et intérêts pour non respect de la règle « à travail égal, salaire égal » ;

ALORS, D'UNE PART, QU'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de rémunération, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge pour son employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; que Mme J..., agent contractuel (ACO) de grade ACC 13 avait produit, au soutien de sa demande, un tableau reprenant les sommes perçues mois par mois à titre de complément poste et celles versées chaque mois, sur la même période, à un agent fonctionnaire (AFO) de grade équivalent ; qu'elle avait ainsi satisfait à la charge de l'allégation qui pesait sur elle ; qu'en la déboutant néanmoins de sa demande sans exiger de La Poste qu'elle justifie la différence de traitement ainsi mise en exergue, la cour d'appel a d'ores et déjà violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en déboutant Mme J... de sa demande au motif que La Poste aurait justifié de ce que la comparaison qu'elle opérait n'aurait pas fait apparaître de différences, quand l'employeur avait choisi comme élément de comparaison un fonctionnaires du secteur médian et avait sciemment occulté dans son comparatif tous les fonctionnaires du secteur haut, de sorte que la comparaison se trouvait faussée, la cour d'appel a encore violé le principe « à travail égal, salaire égal ».

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme J... de ses demandes relatives aux frais d'entretien de la tenue de travail et à l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que le syndicat FAPT 82 de sa demande fondée sur ce texte ;

AUX MOTIFS QUE seuls les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent, des lors qu'ils résultent d'une sujétion particulière, être supportés par ce dernier ; qu'il est établi qu'à compter de janvier 2015, La Poste a pris en charge les frais d'entretien des tenues de facteurs ; que cette prise en charge ne constitue pas un aveu pour la période antérieure ; que pour la période de juillet 2013 à décembre 2014, sur laquelle porte la demande de l'appelante, il y a lieu de retenir que l'article 17 du règlement intérieur de La Poste dispose « quand l'exercice du service l'exige et sauf en cas de conditions climatiques exceptionnelles, le personnel doit porter la tenue de travail fournie et, s'il est en contact avec la clientèle, adopter une tenue correcte » ;
que le fait que Huguette J... dispose d'un crédit annuel alloué par son employeur auprès d'un fournisseur tiers pour acheter librement des vêtements siglés La Poste n'est pas de nature à caractériser le port obligatoire d'une tenue de travail spécifique ; que la salariée, agent de production, ne justifie pas au regard de ce texte de l'obligation de porter une tenue de travail spécifique ; que les conditions pour obtenir une indemnisation des frais d'entretien d'une tenue obligatoire ne sont donc pas remplies ; que l'appelante sera donc déboutée et le jugement réformé de ce chef ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; qu'aux termes de l'article 17 du règlement intérieur de La Poste et de l'instruction du 23 août 2006, le personnel doit porter la tenue de travail fournie quand l'exercice du service l'exige et il doit, s'il est en contact avec la clientèle, adopter une tenue correcte ; que les salariés sont ainsi tenus de porter une tenue de travail aux couleurs et marque de La Poste, tenue qu'ils peuvent acheter, moyennant un crédit accordé par leur employeur, via un site internet ; qu'en affirmant néanmoins que Mme J... ne justifiait pas, au regard des textes applicables dans l'entreprise, de l'obligation de porter une tenue de travail spécifique, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier ; que l'employeur doit assumer la charge de l'entretien du vêtement de travail dont le port est obligatoire et inhérent à l'emploi des salariés concernés ; que la cour d'appel a constaté que Mme J... disposait d'un crédit annuel alloué par l'employeur auprès d'un fournisseur pour acheter des vêtements siglés La Poste ; qu'en affirmant que cet élément n'était pas de nature à caractériser le port obligatoire d'une tenue de travail spécifique quand l'octroi de ce crédit ne pouvait avoir pour autre but que de s'assurer que les employés de la poste revêtent bien une tenue de travail permettant d'identifier leur employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail.

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