28 juin 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-26.616

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:SO01030

Texte de la décision

SOC.

CGA



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 juin 2018




Cassation partielle


Mme V..., conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1030 F-D

Pourvoi n° V 14-26.616






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Proma SSA, société de droit italien, dont le siège est (Italie),

contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2014 par la cour d'appel d'Orléans, dans le litige l'opposant :

1°/ à M. Cyrille Y..., domicilié [...] ,

2°/ à M. Olivier Z..., domicilié [...] ,

3°/ à M. Jean-Paul A..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur de la société Proma France,

4°/ au CGEA AGS d'Orléans, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation ;

MM. Y... et Z... ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 mai 2018, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon ,conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Salomon , conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Salomon , conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Proma SSA, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. A..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. Y... et Z..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. Y... et Z... ont été engagés respectivement le 5 juillet 2004 et le 3 avril 2005 par la société Proma France, filiale française de la société Proma SSA, société de droit italien appartenant au groupe Gruppo Roma ; que la société Proma France ayant été mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Orléans du 11 mars 2010, ils ont été licenciés pour motif économique le 1er juin 2010 par M. A..., liquidateur judiciaire, après obtention d'une autorisation administrative de licenciement, eu égard à leur qualité de représentant du personnel ; qu'ils ont saisi le 29 septembre 2011 la juridiction prud'homale de demandes dirigées contre le mandataire liquidateur de la société Proma France et la société Proma SSA en qualité de co-employeur tendant à ce que leur licenciement soit déclaré nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident des salariés :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la société Proma SSA :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail :

Attendu que pour dire que les sociétés Proma France et Proma SSA ont la qualité de co-employeurs et les condamner solidairement au paiement de diverses sommes, l'arrêt retient que Proma SSA détient quasiment en totalité le capital social de la société française, que l'ensemble des directeurs généraux et directeurs d'usine sont des salariés du groupe Proma et même de Proma SSA qui règlent leurs rémunérations, que non seulement les dirigeants mais aussi de nombreux salariés disposant de responsabilités fonctionnelles importantes au sein de l'entreprise sont mis à disposition et payés par le groupe, que le président du groupe est également président de Proma France tandis que les responsables administratif et financier et responsable de la logistique étaient mis à disposition par le groupe, que les accords annuels sur les salaires et la durée du travail étaient conclus par les dirigeants du groupe ou des mandataires mis à la disposition par le groupe, que M. C..., seul directeur qui ait été salarié par la société française, et ayant en charge les ressources humaines, était toujours assisté par un représentant du groupe pour signer les accords liés aux négociations annuelles obligatoires, que la société Proma SSA s'est engagée au cours du redressement judiciaire à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi et a co-signé le protocole de fin de grève du 11 septembre 2008, que la société Proma SSA négociait les contrats pour l'ensemble du groupe avec les sous-traitants du premier niveau puis les répartissait au sein de ses filiales en fonction de leur capacité à produire ses équipements, que les clients n'étaient pas attitrés à la société Proma France mais gérés directement par le groupe, que Proma France ne disposait ni d'un service commercial ni d'un service recherche-développement en sorte que tant au niveau de la recherche de nouveaux marchés ou encore des négociations d'achat, c'est le groupe qui assurait toutes les fonctions ;

Attendu cependant que hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le fait que les dirigeants de la filiale proviennent du groupe et agissent en étroite collaboration avec la société mère, que la politique du groupe déterminée par la société mère ait une incidence sur la politique de développement ou la stratégie commerciale et sociale de sa filiale et que la société mère se soit engagée au cours du redressement judiciaire à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi ne pouvaient suffire à caractériser une situation de co-emploi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal de la société Proma SSA pris en sa première branche :

Attendu que la cassation sur le premier moyen, entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif critiqué par le deuxième moyen, pris d'une cassation par voie de conséquence ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal de la société Proma SSA pris en sa deuxième branche

Vu le protocole d'accord du 11 septembre 2008 ;

Attendu que pour condamner la société Proma SSA à verser aux salariés une indemnité supra-légale de licenciement, l'arrêt retient encore qu'une indemnité supra-légale a bien été prévue dans un document du 11 septembre 2008, à la suite de tractations entre, d'une part, la société Proma France et d'autre part, les syndicats CGT, CFDT, FO et CGC, que les syndicats ont tenu à ce que le représentant de la société italienne soit partie au contrat puisqu'il avait suivi toutes les réunions, en conséquence de quoi M. D..., président de la société italienne a pu apposer sa signature sur le document après l'avoir lu et approuvé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que cet accord, intitulé « protocole d'accord entre la société Proma France et les délégations syndicales CFDT, FO et CFE-CGC » avait été conclu entre ces parties, que, dans son préambule, la société Proma France s'engageait à mettre en oeuvre toutes les actions nécessaires pour maintenir une activité suffisante et garantir les emplois sur l'usine de Gien et, dans le cas où elle ne saurait atteindre à moyen terme cet objectif et serait contrainte de revoir ses effectifs à la baisse, Proma France s'engage à appliquer les garanties énumérées aux articles suivants, que cet accord était signé par M. C... « pour la société Proma France » et que le fait que M. D... y ait apposé la mention « Lu et approuvé » n'en modifiait pas la portée dès lors qu'il était à la fois président du groupe et président de Proma France, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

Et sur le premier moyen du pourvoi incident des salariés :

Vu la loi des 16 et 24 août 1790, et les articles L. 1411-1 et L.1235-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu que le salarié protégé dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail peut contester l'absence d'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi devant la juridiction judiciaire et lui demander de tirer les conséquences légales de cette abstention, sans que cette contestation, qui ne concerne pas le bien-fondé de la décision administrative qui a autorisé son licenciement, porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ;

Attendu que pour débouter les salariés de leurs demandes tendant à ce qu'il soit fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Proma France une indemnité pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, l'arrêt retient que, dans la mesure où le plan de sauvegarde de l'emploi n'avait pas encore été mis en oeuvre au moment de leur licenciement, ils ne peuvent exciper de son insuffisance puisque le licenciement a été autorisé en dehors de ce schéma ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que les salariés demandaient l'annulation de leur licenciement pour défaut d'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi, de sorte que la juridiction prud'homale était compétente pour connaître de cette demande et des demandes subséquentes, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la cassation à intervenir sur ce moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le troisième moyen du pourvoi incident des salariés en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute MM. Y... et Z... de leur demande de dommage-intérêts pour défaut d'information relative aux modalités de mise en oeuvre de la priorité de réembauchage et fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Proma France une somme de 2 700,32 euros pour M. Y... et une somme de 1 843,63 euros pour M. Z..., l'arrêt rendu le 18 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Proma SSA

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les sociétés PROMA FRANCE et PROMA SSA ont la qualité de co-employeurs et d'AVOIR condamné solidairement la société PROMA SSA à verser à Messieurs Y... et Z... la somme de 32.000 euros à titre d'indemnité supra-légale de licenciement et, respectivement, les sommes de 2.700,32 euros et 1.843,63 euros à titre d'indemnité pour procédure de licenciement en l'absence d'institutions représentatives du personnel valables ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'allégation de co-emploi : En application de l'article L. 1221 - 1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun et, notamment, au droit commun des contrats et, à ce titre tes dispositions de l'article 1165 du Code civil disposent que les conventions n'ont d'effets qu'entre les parties contractantes ; qu'il en résulte que le principe premier est celui de l'unicité de l'employeur. Il s'en suit qu'un salarié ayant signé son contrat de travail avec une société filiale d'un groupe ne saurait, du fait de sa seule appartenance à ce groupe, être lié contractuellement à la société mère, dès lors que cette dernière n'est pas partie au contrat ; qu'en vertu du principe de l'autonomie des personnes morales, les sociétés appartenant à un groupe conservent chacune leur personnalité juridique distincte ; que toutefois, afin de faire coïncider la réalité du pouvoir décisionnel de licencier et les responsabilités morales et pécuniaires, la notion de co-emploi dégagée par la jurisprudence permet au juge de dépasser les apparences et l'écran de la personnalité juridique pour imputer la responsabilités des licenciements à leurs vrais décideurs ; que l'introduction de cette notion a pour but d'identifier l'employeur de fait. A cette fin, la jurisprudence recherche l'existence d'un rapport d'autorité et de subordination juridique pour déterminer qui, précisément, aux côtés de l'employeur officiel, exerce effectivement le pouvoir de direction et de contrôle des salariés ; puis, qu'une conception plus souple a émergé pour permettre la reconnaissance du co-emploi au moyen du critère de la triple confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre sociétés. Aussi appartient-il à celui qui invoque ta triple confusion de caractériser ces trois aspects cumulatifs, sans s'arrêter aux seules participations financières ; A) sur la confusion d'intérêts et de direction : que PROMA SSA détient quasiment en totalité le capital social de la société française, à hauteur de 9900 actions, le reste appartenant à Monsieur Nicola D..., dirigeant tant de PROMA SSA que de PROMA FRANCE ; que le jugement du tribunal de commerce d'Orléans du 24 septembre 2013 révèle encore que ta société française ne dispose d'aucune autonomie réelle de gestion, puisque l'ensemble des directeurs généraux et directeurs d'usine sont des salariés du groupe PROMA, ou même de PROMA SSA, qui règlent leurs rémunérations ; qu'il est opportun d'examiner les organigrammes successifs de la société française, ce qui permettra de constater que non seulement les dirigeants mais aussi de nombreux salariés, disposant de responsabilités fonctionnelles importantes au sein de l'entreprise, sont mis à disposition et payés par le groupe : - l'organigramme d'octobre 2004 met en valeur que le directeur d'usine, Monsieur E... , son adjoint, Monsieur F..., et d'autres cadres, MM. G..., H... , I..., XX..., J..., ne sont pas mentionnés sur le registre du personnel de la société française, en sorte qu'ils sont nécessairement mis à disposition par le groupe italien ; qu'il en est de même pour d'autres salariés: MM. D..., K..., L..., - les organigrammes de novembre 2005 et du 15 mars 2006 mettent en évidence que Monsieur Nicola D..., président du groupe, est également président de PROMA FRANCE, de même que MM. Luca D... et Luigi M... apparaissent respectivement comme directeur d'usine et directeur général, tandis que les responsable administratif et financier et responsable de la logistique étaient mis à disposition par le groupe ; qu'il était précisé que te directeur général, Monsieur M... ne percevrait aucune rémunération de PROMA FRANCE, dans ta mesure où il était déjà rémunéré par la société mère. Lors de l'assemblée générale du 7 juin 2006, celui-ci représentait l'actionnaire principal tout en étant directeur général, en sorte qu'il n'est pas excessif d'en déduire qu'il rendait compte à lui-même ; - L'organigramme de décembre 2007 fait intervenir Monsieur C... en qualité de directeur d'usine, qui reconnaît lui -même avoir dû se partager à 80% de son temps en Italie et à 20% en FRANCE ; B) la gestion sociale et les activités communes. Les pièces du dossier démontrent encore que les accords annuels sur les salaires et la durée du travail étaient conclus par les dirigeants du groupe ou des mandataires mis à la disposition par le groupe: - l'accord du 12 juin 2005 a été signé par Monsieur N..., - celui du 30 août 2006 par MM. Luca D... et N..., - ceux des 7 juin 2007 et 13 juin 2008 et l'avenant du 3 juillet 2007 par. MM. C... et N... ; qu'il convient de remarquer que, de fait, Monsieur C... ,seul directeur qui ait été salarié par la société française, et ayant en charge les ressources humaines, était toujours assisté par un représentant du groupe pour signer les accords liés aux négociations annuelles obligatoires ; que par ailleurs, il était fréquent que les mandataires du groupe contresignent tes différents accords, par exemple en vue de la sauvegarde de l'emploi sur Gien, par exemple MM. Nicola D... et Brian O... ; que PROMA SSA s'est engagée, au cours du redressement judiciaire, et auprès de Me P..., administrateur judiciaire, à prendre en charge, le financement du plan de sauvegarde de l'emploi et elle a co-signé le protocole de fin de grève du 11 septembre 2008 ; que le tribunal de commerce d'Orléans a encore relevé dans son jugement du 27 janvier 2011 que la société PROMA SSA était bien le décideur pour les engagements généraux puisqu'elle négociait les contrats pour l'ensemble du groupe avec les sous traitants de premier niveau puis les répartissait au sein de ses filiales en fonction de leur capacité à produire ses équipements ; que dans un autre jugement du 24 septembre 2003, ce tribunal de commerce a relevé que tes clients n'étaient pas attitrés à la société PROMA FRANCE mais gérés directement par le groupe, celle-ci ayant bénéficié de la part du groupe et de ta société italienne depuis sa création, de l'expérience des Italiens en matière commerciale, technique, financière de même que du personnel de ces sociétés qui est intervenue à de multiples reprises sur le site de Gien sans qu'aucun honoraire de prestations n'ait été effectué. La société italienne a même déclaré au tribunal qu'elle était le principal fournisseur de sa filiale française ; qu'il était relevé également le soutien très important de la société mère à l'égard de sa filiale puisque le rapport de l'administrateur judiciaire chiffrait à 24,7 millions d'euros au 1er décembre 2009 son concours, sans qu'il y ait lieu à restitution ; qu'en outre, l'ensemble des activités dispose d'un centre de développement et d'actualisation commun et le service commercial est à la charge de la maison-mère comme l'expliquera lui-même Monsieur C... ; que Mme Q... atteste que la société PROMA FRANCE ne disposait ni d'un service commercial ni d'un service recherche développement en sorte que tant au niveau de la recherche de nouveaux marchés ou encore des négociations d'achat, c'est le groupe qui assurait toutes les fonctions. Lors du choix des fournisseurs de matières premières, la négociation des conditions d'achat était assurée par M. Vincenzo D..., directeur des achats pour le groupe et à compter de début 2008 Monsieur C... directeur du site de Gien, a pris en parallèle la direction de PROMA SA GRUGLIASCO ; que le rapport du commissaire aux comptes sur l'exercice clos le 31 décembre 2008 précise que la société française bénéficiait de la part des sociétés italiennes depuis sa création, de leur expérience en matière commerciale technique et financière puisque le personnel de ces sociétés était amené à intervenir sur les sites industriels de Gien et que ces deux sociétés italiennes avaient décidé de ne facturer aucun honoraire au titre de l'exercice 2008, une des sociétés italiennes ayant décidé de mettre gratuitement à disposition de la société française le matériel relatif à trois projets ; qu'il est certain que la nature commune des activités des sociétés italiennes et françaises a rendu indispensable un travail en commun et le suivi de projets industriels par tes équipes des deux entités. Cependant, il se déduit de tous les éléments précités l'existence d'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction pour au moins deux sociétés du groupe, la société PROMA FRANCE et la société PROMA SSA, sans que les pièces apportées par la société italienne puissent contrecarrer utilement celles qui établissent entre ces deux sociétés la situation de coemploi de manière particulièrement évidente » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES QUE « le groupe Italien GRUPPO PROMA a créé une société PROMA FRANCE, société par actions simplifiées, contrôlée quasi-exclusivement par la société de droit italien PROMA SSA pour reprendre l'usine de Gien (Loiret) appartenant à la société ISRI FRANCE, spécialisée dans la fabrication d'armatures métalliques de sièges automobiles ; qu'il est incontestable que les contrats de travail des salariés de la société ISRI FRANCE ont été transférés à la société PROMA FRANCE à compter du 1er septembre 2003, qu'il existait une intervention permanente des dirigeants du groupe dans la gestion quotidienne de PROMA FRANCE caractérisée par une très forte instabilité des directions mises en place de manière successive, et une forte implication de salariés des autres entités du groupe dans le fonctionnement interne ; qu'il est admis que la situation de co-emploi puisse être caractérisée au sein d'un groupe de sociétés lorsque l'une ou l'autre des deux conditions suivantes sont réunies, voire les deux ensemble : - le salarié exécute son travail sous l'autorité d'un co-employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner ses manquements, - la société avec laquelle le salarié a conclu un contrat de travail se trouve en confusion d'intérêts, d'activités et de direction avec une société du groupe ;
qu'en l'espèce, il apparaît au Conseil que la société PROMA FRANCE était possédée quasiment en totalité, soit à hauteur de 9 900 actions de son capital d'un million d'euros par la société de plein droit italien PROMA SSA, sise à San Nicola La Strada, d'un groupe GRUPPO PROMA ; que PROMA FRANCE ne dispose d'aucune autonomie de gestion, puisque l'ensemble des directeurs d'usine se trouvent être des salariés de GRUPPO PROMA, particulièrement de PROMA SSA qui assure le paiement de leur rémunération ; que l'analyse des organigrammes successifs de la SAS PROMA FRANCE, sur lesquels apparaît systématiquement le logo de GRUPPO PROMA, permet de constater que non seulement les dirigeants mais aussi les salariés disposant de responsabilités fonctionnelles importantes de l'entreprise sont mis à disposition et réglés par le groupe, mais qu'ils sont aussi domiciliés en Italie ; que l'organigramme d'octobre 2004 permet de constater que le directeur d'usine Monsieur E... , son adjoint Monsieur F... mais aussi toute la troisième ligne hiérarchique (quality B. G..., production A.H... , logistique A. I..., process eng J.G... quality systems S.J..., program management R...) ne sont pas des salariés de la société PROMA FRANCE mais mis à disposition par le groupe ; que l'organigramme de novembre 2005 et celui du 15 mars 2006 montrent qu'un nouveau changement de directeur de site est annoncé en septembre 2005 avec la nomination par intérim de Monsieur S..., vice président des opérations dans le groupe en lieu et place de Monsieur W... appelé à d'autres mandats pour des activités étrangères du groupe, ce qui représente six directeurs en l'espèce de deux ans, ce qui démontre l'absence de toute autonomie de gestion à l'égard du groupe ; que dans le nouvel organigramme apparaissait Nicola T... D..., président du groupe mais aussi président de la SAS PROMA FRANCE avec Luca D... comme nouveau Plant Manager (directeur d'usine) et Luigi M... comme directeur général ; que le nouveau directeur d'usine avait indiqué au comité d'entreprise de PROMA FRANCE qu'il avait été formé chez PROMA Turin où il avait ensuite pris la direction de l'usine ; que Monsieur M..., nouveau directeur général, ne recevait aucune rémunération de la part de PROMA FRANCE dans la mesure où il était déjà rémunéré par la société mère la société PROMA SSA (résolution de l'Assemblée générale de PROMA FRANCE du 21 décembre 2005), que celui-ci représentait l'actionnaire principal lors de l'assemblée générale du 7 juin 2006 bien qu'il en était le directeur général ; que l'organigramme de décembre 2007 indique que la direction de l'usine est confiée à Monsieur C... qui cumule aussi la fonction de ressources humaines ; que la fonction de ressources humaines était assurée par des représentants du groupe, ce qui se traduit par une intervention de ceux-ci dans toutes les décisions de négociations avec les représentants du personnel, que c'est le président du groupe et de la société PROMA FRANCE N.G.D... qui s'engagera à garantir l'ensemble des emplois au cours des années futures, que l'ensemble des accords annuels sur les salaires et la durée du travail étaient conclus par des dirigeants du groupe ou des mandataires mis à disposition par le groupe : - accord du 12 juin 2005 signé par Monsieur Vincenzo N..., - accord du 30 août 2006 signé par Messieurs Lucas D... et Vincenzo N..., - accord du 7 juin 2007, avenant du 3 juillet 2007 et accord du 13 juin 2008 signés par Messieurs C... et N... ; que, même si Monsieur C... apparaissait sur les organigrammes comme responsable des ressources humaines, il devait toujours être assisté par un représentant du groupe pour signer les accords liés à la négociation annuelle obligatoire ; que, lors d'une négociation importante visant à conclure un protocole en vue de la sauvegarde de l'emploi sur le site de Gien, les représentants du personnel discutaient avec un mandataire du groupe Monsieur U... ; que c'est la société PROMA SSA qui s'engageait auprès de Maître Franck P..., administrateur judiciaire pour prendre en charge, sous certaines conditions (finalement non réalisées), le financement du plan de sauvegarde de l'emploi à venir, qu'il est certain que la nature commune des activités des sociétés PROMA FRANCE et PROMA SSA a rendu indispensable le travail en commun et le suivi de projets industriels par les équipes des deux entités, qu'il existe bien une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre PROMA FRANCE et PROMA SSA ; que dans ses conclusions, la société PROMA SSA en Italie reconnaît que certains salariés italiens ont été mis à disposition de la société française et que certains salariés de PROMA FRANCE sont allés travailler en Italie ; que la société PROMA SSA ne conteste pas qu'elle détenait une part importante du capital de PROMA FRANCE mais seulement l'implication directe de celle-ci dans les directives prises par les dirigeants de PROMA FRANCE ; qu'elle estime qu'il n'y a pas de lien de subordination entre PROMA SSA et PROMA FRANCE, tout en omettant d'apporter des explications sur la présence systématique de directeurs venant du groupe PROMA SSA et rémunérés par celle-ci et sur son implication directe auprès de Maître Franck P..., administrateur judiciaire de PROMA FRANCE ; qu'au vu des organigrammes de PROMA FRANCE apparaît toujours le logo GRUPPO PROMA ; que l'ensemble des directeurs d'usine PROMA FRANCE se trouvent être des salariés de GRUPPO PROMA, particulièrement de PROMA SSA qui assure le paiement de leur rémunération ; que sur le pouvoir en date du 5 juin 2006 de Monsieur Nicola D... représentant légal de PROMA SSA demeurant en Italie , il est noté qu'il donne pouvoir pour le représenter à l'assemblée générale du 7 juin 2006 à Monsieur M..., directeur général de PROMA FRANCE mais toujours domicilié en Italie ; que sur les contrats de travail des salariés, si ceux-ci mentionnent bien qu'ils sont embauchés par PROMA FRANCE SAS, il apparaît sur ces mêmes contrats le logo GRUPPO PROMA ainsi que sur les certificats de travail ; qu'en conséquence de tous les éléments développés ci-dessus, le Conseil reconnaît le bien fondé des demandes des requérants et constate que la société PROMA SSA a la qualité de co-employeur à l'égard du personnel de la société PROMA FRANCE » ;

1. ALORS, D'UNE PART, QUE hors l'existence d'un lien de subordination, la société mère d'un groupe ne peut être considérée comme co-employeur du personnel d'une filiale que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la première dans la gestion économique et sociale de la seconde ; qu'en relevant, en l'espèce, que le capital social de la société PROMA FRANCE est détenu quasiment en totalité par la société PROMA SSA, que l'ensemble des dirigeants et certains des cadres de la société PROMA FRANCE proviennent de la société PROMA SSA et sont rémunérés par elle, que la société PROMA SSA négociait les contrats avec les donneurs d'ordres pour l'ensemble du groupe et les répartissait entre les filiales, que la société PROMA FRANCE a bénéficié de l'expérience du groupe en matière commerciale, technique et financière, notamment par la mise à disposition de matériel et de personnel, parfois sans facturation d'aucun honoraire de prestation, que la société PROMA FRANCE ne disposait ni d'un service commercial, ni d'un service recherche-développement, la société mère assurant ces fonctions, et que la société mère a apporté un soutien très important à sa filiale se chiffrant à 24,7 millions d'euros, la cour d'appel n'a pas caractérisé une immixtion anormale de la société mère dans la gestion opérationnelle de sa filiale, mais simplement la coordination par la société mère des activités de ses filiales et l'état de domination économique résultant de l'appartenance de la société PROMA FRANCE à un groupe ; qu'en affirmant néanmoins qu'il existait une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la société PROMA FRANCE et la société PROMA SSA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;

2. ALORS, D'AUTRE PART, QUE hors l'existence d'un lien de subordination, la société mère d'un groupe ne peut être considérée comme co-employeur du personnel d'une filiale que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la première dans la gestion économique et sociale de la seconde ; que le seul fait que la société mère d'un groupe ait été amenée, dans le cadre de la coordination des politiques salariales du groupe, à contresigner des accords collectifs relatifs aux salaires conclus par sa filiale, que les dirigeants communs de la filiale et de la société mère aient pris des engagements financiers à l'égard des salariés de la filiale en cas de licenciement économique et que la société mère se soit engagée à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi de sa filiale, ne suffit pas à caractériser une immixtion de la société mère dans la gestion sociale de sa filiale ; qu'en relevant que les sociétés PROMA FRANCE et PROMA SSA avaient des dirigeants communs, que la société PROMA SSA avait mis à la disposition de sa filiale certains cadres exerçant des responsabilités fonctionnelles, qu'elle rémunérait, que les accords annuels sur les salaires et la durée du travail étaient conclus par les dirigeants communs de la société PROMA SSA et de la société PROMA FRANCE ou contresignés par des mandataires du groupe aux côtés du directeur de l'usine, qui avait en charge la direction des ressources humaines de l'usine, que l'accord du 16 septembre 2008 en vue de la sauvegarde de l'emploi de l'usine était pareillement signé par le directeur de l'usine et contresigné par le Président du groupe également Président de la société PROMA FRANCE, que la société PROMA SSA s'est engagée au cours du redressement judiciaire, auprès de l'administrateur judiciaire, à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel n'a pas fait ressortir une prise en main de la direction du personnel et de la gestion des ressources humaines de la société PROMA FRANCE par la société PROMA SSA, les interventions de cette dernière restant ponctuelles, limitées à certains thèmes et relevant soit de l'harmonisation des politiques de rémunération au sein du groupe, soit du soutien d'une société mère à sa filiale ; qu'en affirmant néanmoins qu'il existait entre les deux sociétés une confusion d'intérêts, d'activités et de direction justifiant d'attribuer la qualité de co-employeur à la société PROMA SSA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement la société PROMA SSA à verser à Messieurs Y... et Z... une indemnité supra légale de licenciement ;

AUX MOTIFS QU' « (
) il était fréquent que les mandataires du groupe contresignent les différents accords, par exemple en vue de la sauvegarde de l'emploi sur Gien, par exemple par MM. Nicola D... et Brian O... ; (
) ; que PROMA SSA s'est engagée, au cours du redressement judiciaire, et auprès de Me P..., administrateur judiciaire, à prendre en charge le financement du plan de sauvegarde de l'emploi et elle a co-signé le protocole de fin de grève du 11 septembre 2008 ; (
) ; qu'une indemnité supra-légale a bien été prévue dans un document du 11 septembre 2008, à la suite de tractations entre, d'une part la société PROMA FRANCE et d'autre part, les syndicats CGT, CFDT, FO et CGC ; que les syndicats ont absolument tenu à ce que le représentant de la société italienne soit partie au contrat puisqu'il avait suivi toutes les réunions, en conséquence de quoi M. Nicola Giorgio D..., président de la société italienne a pu apposer sa signature sur le document après l'avoir lu et approuvé ; que cet accord comporte trois parties et il convient de ranger le cas de Messieurs Y... et Z... dans la première qui prévoit un licenciement sans plan de sauvegarde de l'emploi, ce qui est leur cas précis, puisque ce plan n'a été engagé qu'après leur licenciement, comme il a été précisé plus haut ; que dans ces conditions, c'est la somme de 32.000 € qui était prévue dans ce cas précis et elle devra leur être allouée » ;

1. ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera cassation, par voie de conséquence, du chef de l'arrêt ayant condamné solidairement la société PROMA SSA à verser à chaque salarié une indemnité supra-légale de licenciement prévue par l'accord du 11 septembre 2008, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2. ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les éléments de la cause ; qu'en l'espèce, la société PROMA SSA soutenait qu'elle n'avait ni pris part à l'accord du 11 septembre 2008 conclu entre la société PROMA FRANCE et les organisations syndicales, ni accepté de garantir l'exécution des engagements de sa filiale ; qu'elle soutenait, à cet égard, que Monsieur D... n'avait signé cet accord en y apposant la mention « lu et approuvé » qu'en sa qualité de Président de la société PROMA FRANCE et donc de représentant légal de cette seule société ; qu'il est indiqué, en tête du protocole d'accord du 11 septembre 2008, que cet accord est conclu « entre la société Proma FRANCE et les délégations syndicales CFDT, FO et CFE-CGC » et que « le terme « les parties » (
) désigne les participants décrits précédemment » ; que l'accord décrit ensuite les garanties offertes aux salariés, en utilisant des formules telles que « la direction s'engage à (
) », « la société Proma FRANCE s'engage à (
) » ou « les engagements de Proma FRANCE » ; qu'en affirmant néanmoins que la société PROMA SSA a participé à cet accord, au motif que Monsieur Nicola Giorgio D... a participé aux tractations et a apposé sa signature précédée de la mention « lu et approuvé » sur cet accord, cependant que cette signature n'était accompagnée d'aucune mention indiquant qu'il agissait en qualité de Président de la société PROMA SSA et non en qualité de Président de la société PROMA FRANCE, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cet accord, a violé le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les éléments de la cause.








Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour MM. Y... et Z...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté MM. Y... et Z... de leurs demandes tendant à ce qu'il soit fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Proma France et que soit condamnée solidairement la société Proma SSA au paiement d'une indemnité pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents.

AUX MOTIFS QUE MM. Y... et Z... sont d'accord pour reconnaître que le plan de sauvegarde de l'emploi n'a été établi qu'à l'issue des refus d'autorisation de licenciement intervenus en juin 2010 ; qu'en effet le plan de sauvegarde de l'emploi n'a été évoqué pour la première fois avec les salariés protégés que le 20 juillet 2010, la réunion ayant pour objet l'information sur les mesures de reclassement mis en place par le mandataire judiciaire, tandis que la seconde réunion visait l'information et la consultation sur la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que la demande d'autorisation administrative de licenciement pour ces deux salariés protégés a été adressée à l'inspection du travail le 26 avril 2010 et ce fonctionnaire a accordé l'autorisation le 28 mai 2010. Les deux salariés se sont bien abstenus d'exercer un recours contre cette décision devant le tribunal administratif d'Orléans, comme ils auraient pu le faire si la décision ne rencontrait pas leur assentiment ; que dès lors, cette décision administrative du 28 mai 2010 est devenue définitive et elle a permis de fonder le licenciement pour motif économique du 1er juin 2010 ; que pour surmonter l'impossibilité du juge judiciaire d'apprécier, en l'espèce l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, ils avancent qu'il existe des exceptions à cette règle en se fondant sur un arrêt de la Cour de Cassation du 10 mai 2012 qui énoncé ceci : « le salarié dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail peut, sans remettre en cause le bien-fondé de la décision administrative et porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, contester devant le juge judiciaire le caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi et, lorsque la nullité n'est pas également encourue en raison de cette insuffisance, laquelle prive alors le licenciement de cause réelle et sérieuse, demander des dommages et intérêts réparant le préjudice en résultant. » ; que cependant, comme les deux salariés l'admettent parfaitement, le plan de sauvegarde de l'emploi n'avait pas encore été mis en oeuvre au moment de leur licenciement ; qu'ils ne peuvent donc exciper de son insuffisance puisque le licenciement a été effectué en dehors de ce schéma ; qu'il en résulte que l'exception au principe avancée par ceux-ci s'avère inopérante et ne peut être reçue ; que par ailleurs, la décision administrative d'autorisation met en avant le motif économique invoqué, la délibération du comité d'entreprise du 23 avril 2010 qui avait rendu un avis favorable au licenciement et la prolongation du délai de réponse qui avait été signifiée aux parties le 29 avril 2010, ainsi que l'enquête contradictoire effectuée le mai 2010 alors que le jugement du 11 mars 2010 du tribunal de commerce d'Orléans avait prononcé la liquidation judiciaire de la société Proma France à Gien ; qu'il s'agit d'une motivation suffisante qui ne permet pas subsidiairement de la remettre en cause, alors qu'il existe une certaine cohérence dans tous les éléments exposés ; que pour tous ces motifs, le licenciement pour motif économique de ces deux salariés ne peut souffrir de critiques et sera donc validé ; qu'en conséquence leurs demandes concernant les dommages et intérêts pour licenciement nul ou, à tout le moins, sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents devront être rejetées comme mal fondées ; que subsidiairement, les deux salariés sollicitent un sursis à statuer, dans l'attente d'une décision définitive du juge administratif relatif à la question préjudicielle en appréciation de la légalité des autorisations administratives des ruptures de leur contrat de travail ; qu'à cet égard, ils souhaitent que cette cour les invite à introduire l'action en appréciation de l'égalité devant la juridiction administrative ; que leur licenciement pour motif économique remonte à près de quatre ans et demi : aucun des deux ne prouve avoir engagé une action administrative en appréciation de la légalité de l'autorisation administrative accordée et ils n'ont pas besoin du levier de la cour pour lancer une telle procédure ; qu'en conséquence, le moyen subsidiaire soulevé aujourd'hui s'apparente à une manoeuvre dilatoire que la cour ne pourra que repousser.

1/ ALORS QUE le salarié protégé dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail peut contester l'absence d'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi devant la juridiction judiciaire et lui demander de tirer les conséquences légales de cette abstention, sans que cette contestation, qui ne concerne pas le bien-fondé de la décision administrative qui a autorisé son licenciement, porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ; que pour exclure sa compétence, la cour d'appel a retenu que les salariés ne pouvaient exciper de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi qui n'avait pas encore été mis en oeuvre au moment de leur licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé la loi des 16 et 24 août 1790, et les articles L. 1411-1 et L. 1235-10 du code du travail.

2/ ALORS QUE le juge judiciaire saisi d'une difficulté sérieuse portant sur la légalité d'une autorisation administrative dont dépend l'appréciation du bien-fondé des demandes du salarié, est tenu de surseoir à statuer, de soulever une question préjudicielle et de renvoyer les parties à saisir la juridiction administrative ; qu'en retenant que les salariés ne prouvaient pas avoir engagé une action administrative en appréciation de la légalité de l'autorisation administrative de leur licenciement pour refuser de surseoir à statuer et soulever la question préjudicielle qu'elle était invitée à soulever , la cour d'appel a violé la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an X... et l'article 49 du code de procédure civile.

3/ ALORS QUE la constatation par le juge civil de l'existence d'une question préjudicielle administrative constitue nécessairement un préalable à la saisine du juge administratif ; que par contre, une action directe ne peut être menée que dans un délai de deux mois à compter de la décision, en sorte que, ce délai expiré, seul un renvoi préjudiciel en appréciation de légalité peut permettre de saisir la juridiction administrative ; qu'en retenant que les salariés ne prouvaient pas avoir engagé une action administrative en appréciation de la légalité de l'autorisation administrative de leur licenciement pour refuser de surseoir à statuer et soulever la question préjudicielle qu'elle était invitée à soulever, quand les salariés n'étaient pas recevables à saisir eux-mêmes le juge administratif d'une question préjudicielle, la cour d'appel a encore violé la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an X... et l'article 49 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté MM. Y... et Z... de leur demande tendant à ce qu'il soit fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Proma France et que soit condamnée solidairement la société Proma SSA au paiement de dommages-intérêts pour défaut d'information relative aux modalités de mise en oeuvre de la priorité de réembauchage.

AUX MOTIFS QUE l'article L.321-14 du code du travail en vigueur à l'époque des faits précisait que le salarié licencié pour motif économique ou ayant adhéré à une convention de conversion bénéficiait d'une priorité au cours de cette année de réembauchage dans un délai d'un an à compter de la date de la rupture du contrat s'il manifestait le désir d'user de cette priorité dans un délai de quatre mois à partir de cette date ; que le mandataire liquidateur avait précisé dans la lettre de licenciement qu'en cas de reprise d'activité les salariés bénéficieraient d'une priorité de réembauche conformément à cet article ; que si cette phrase restait peut-être un peu lapidaire, elle se référait à l'article précité qui mentionnait des conditions de mise en oeuvre de la priorité de réembauche et, en ce sens, les salariés n'ont pas subi de préjudice et devront être déboutés de leur demande de euros de dommages-intérêts chacun comme mal fondée.

ALORS QUE la lettre de licenciement pour motif économique doit mentionner tant la priorité de réembauche que les conditions de mise en oeuvre de cette priorité ; que ne satisfait pas à ces exigences la lettre de licenciement qui se borne à indiquer qu'en cas de reprise d'activité les salariés bénéficieraient d'une priorité de réembauche conformément à l'article L.321-14 du code du travail ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.1233-42 et L.1233-45 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 32 000 euros la somme au paiement de laquelle la société Proma SSA a été condamnée et fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Proma France au profit de MM. Y... et Z... au titre de l'indemnité supra légale de licenciement.

AUX MOTIFS QU'une indemnité supra légale a bien été prévue dans un document du 11 septembre 2008, à la suite de tractations entre, d'une part la société Proma France et d'autre part, les syndicales CGT, CDT, FO et CGC ; que les syndicats ont absolument tenu à ce que le représentant de la société italienne soit partie au contrat puisqu'il avait suivi toutes les réunions, en conséquence de quoi M. Nicola D..., président de la société italienne a pu apposer sa signature sur le document après l'avoir lu et approuvé ; que cet accord comporte trois parties et il convient de ranger le cas de MM. Y... et Z... dans la première qui prévoit un licenciement sans plan de sauvegarde de l'emploi, ce qui est leur cas précis, puisque ce plan n'a été engagé qu'après leur licenciement, comme il a été précisé plus haut ; que dans ces conditions, c'est la somme de 32 000 euros qui était prévue dans ce cas précis et elle devra leur être allouée à chacun.

1/ ALORS QU'il résulte du protocole d'accord du 11 septembre 2008 d'une part que les salariés licenciés pour motif économique devaient bénéficier d'une enveloppe de 35 000 euros dès lors que l'employeur devait procéder à la mise en place d'un plan social, d'autre part que pouvaient être déduites de cette enveloppe, dans la limite de 12 000 euros, les seules sommes réellement exposées pour la mise en oeuvre de mesures d'accompagnement ; qu'en limitant à 32 000 euros la somme à allouer de ce chef aux salariés licenciés sans que leur employeur ait élaboré le plan social – devenu plan de sauvegarde de l'emploi – auquel il était tenu, la cour d'appel a violé le protocole d'accord du 11 septembre 2008.

2/ ALORS à tout le moins QU'il résulte du protocole d'accord du 11 septembre 2008 d'une part que les salariés licenciés pour motif économique devaient bénéficier d'une enveloppe de 35 000 euros dès lors que l'employeur devait procéder à la mise en place d'un plan social, d'autre part que pouvaient être déduites de cette enveloppe, dans la limite de 12 000 euros, les seules sommes réellement exposées pour la mise en oeuvre de mesures d'accompagnement ; qu'en retenant qu'aucun plan social n'avait concerné ces salariés pour limiter à 32 000 euros la somme à leur allouer au titre de la majoration de la prime de licenciement, la cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur n'était pas tenu à l'élaboration d'un tel plan, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du protocole d'accord du 11 septembre 2008.

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