13 septembre 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-20.099

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2018:C201118

Titres et sommaires

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - dommage - réparation - pluralité de responsables - obligation in solidum - recours d'un responsable contre les autres - etendue - détermination

Un coauteur, responsable d'un accident sur le fondement de l'article 1242, alinéa 1, du code civil, peut recourir pour le tout contre un coauteur fautif. Encourt, dès lors, la cassation l'arrêt qui rejette le recours contributif du coauteur, gardien d'une chose, contre le coauteur fautif au motif que leur responsabilité est partagée dans l'accident

Texte de la décision

CIV. 2

JT

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2018


Cassation partielle


Mme FLISE, président


Arrêt n° 1118 F-P+B

Pourvoi n° Y 17-20.099




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Etablissements Haristoy, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

contre l'arrêt rendu le 23 janvier 2017 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Eurovia Grands projets et industrie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...],

2°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [...],

3°/ à la société GAN assurance, société anonyme, dont le siège est [...],

4°/ à la société Eurovia, société par actions simplifiée, dont le siège est [...],

5°/ à la société GAN assurances, dont le siège est [...],

défenderesses à la cassation ;

La société GAN assurances a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 27 juin 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, M. Becuwe, conseiller référendaire rapporteur, M. Savatier, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Becuwe, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Etablissements Haristoy , de la SCP Marc Lévis, avocat de la société GAN assurances, de la SCP Odent et Poulet, avocat de la société Eurovia Grands projets et industrie, l'avis de M. Lavigne, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à la société Etablissements Haristoy (la société Haristoy) du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Allianz IARD ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'afin de réaliser des travaux d'élargissement d'une autoroute, la société Eurovia Grands projets et industrie (la société Eurovia GPI) a fait appel courant 2012 à la société TBM Hendaye (la société TBM) pour lui livrer des enrobés ; que cette dernière a loué auprès de la société Haristoy, assurée pour sa responsabilité auprès de la société Allianz IARD, une semi-remorque avec benne assurée auprès de la société GAN assurances (la société GAN) ; que, le 28 juin 2012, un accident s'est produit sur le chantier à la suite de la rupture de l'axe de rotation arrière droit de la benne dans lequel le véhicule de la société Libaros a été endommagé ; que cet accident ayant retardé la poursuite du chantier, la société Eurovia GPI a assigné en indemnisation de ses préjudices la société Haristoy et son assureur ainsi que la société GAN ; que celle-ci, pour s'opposer aux demandes, a versé aux débats un rapport d'expertise établi, en présence des sociétés Haristoy et TBM, par M. A..., l'expert qu'elle avait mandaté, pour qui l'origine du sinistre était imputable à la société Haristoy qui n'avait pas procédé à la réparation de la fissure affectant cet axe de rotation depuis un grave accident subi en 2009 par la benne ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société Haristoy, pris en sa première branche, qui est recevable comme né de la décision attaquée :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour dire que la responsabilité de la société Haristoy est établie dans l'accident du 28 juin 2012, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que la qualité de l'expertise de M. A..., réalisée lors d'opérations menées contradictoirement, confère à ses conclusions une force qui ne peut être ignorée d'autant qu'aucun autre élément, ni pièces ni expertise complémentaire, n'est produit, en particulier par la société Haristoy, de nature à les contrecarrer ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence des parties, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident de la société GAN, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;

Attendu que, pour limiter à la somme de 7 500 euros la condamnation de la société Haristoy envers la société GAN au titre de l'action récursoire exercée par celle-ci, l'arrêt énonce que si cette dernière sollicite la condamnation de la société Haristoy à lui payer la somme de 15 000 euros en remboursement de l'indemnité qu'elle a payée à l'assureur de la société Libaros, il convient, dès lors que la responsabilité des sociétés TBM et Haristoy est partagée dans l'accident, la première au titre de l'article 1384, alinéa 1, du code civil et la seconde au titre de l'article 1382 de ce code, de ne pas faire droit pour le tout au recours contributif ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'un coauteur, responsable d'un accident sur le fondement de l'article 1242, alinéa 1, du code civil, peut recourir pour le tout contre un coauteur fautif, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement déféré disant que la responsabilité de la société Haristoy est établie et la condamne à payer à la société GAN assurances la somme de 7 500 euros au titre de l'indemnité versée à l'assureur des établissements Libaros, l'arrêt rendu le 23 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Haristoy, demanderesse au pourvoi principal

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait dit que la responsabilité de la société Haristoy était établie et de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société Gan Assurances, dans la limite de la franchise contractuelle de 450 euros pour ce qui concerne cette dernière, à payer à la société Eurovia la somme de 124 588,18 euros en réparation de son préjudice, avec intérêts au taux légal à compter du 11 février 2014 ;

AUX MOTIFS QUE sur la cause de l'accident ; que deux expertises ont été diligentées, l'une réalisée par le cabinet A... le 28 décembre 2012 à l'initiative de la SA GAN ASSURANCES, l'autre réalisée par le cabinet POLYEXPERT le 13 mars 2013 à l'initiative de la SA ALLIANZ ; que le rapport d'expertise du cabinet POLYEXPERT ne présente pas d'intérêt pour le litige puisqu'il se borne à rapporter les dires de la SARL HARISTOY, sans que le véhicule n'ait été examiné ; que l'expert M. A... a en revanche examiné à deux reprises la benne, en présence de la SARL HARISTOY et de la société TBM. Il a rappelé en préliminaire de son rapport que la benne avait été violemment accidentée lors d'un précédent sinistre en 2009. Il a constaté que l'axe de pivotement de la benne était rompu côté gauche et fortement tordu côté droit et que le profil de cassure laissait apparaître des traces de fissuration antérieures au jour du sinistre. Il en a conclu que l'axe de pivotement s'était rompu car il était massivement fissuré antérieurement au sinistre ; que la SARL HARISTOY ne produit aucun élément de nature à contrecarrer les constats et conclusions du cabinet A... ; que la cause de l'accident telle que déterminée par l'expert doit donc être retenue (
) ; qu'aux termes de l'article 1382 (ancien) du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ; que selon l'article 1383 (ancien) du même code, chacun est responsable du dommage qu'il a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ; qu'en l'espèce, la SARL HARISTOY a procédé à des réparations sur la benne en 2010 alors que le véhicule avait été gravement accidenté et était considéré comme économiquement irréparable ; que l'expert M. A... relève que sur la facture de remise en état établie par la SARL HARISTOY à cette occasion, il n'est mentionné aucun contrôle ni action sur l'axe de pivotement, pourtant fortement sollicité ; que si en application des articles L. 327-1 et suivants du code de la route, un expert a effectivement examiné le véhicule avant d'autoriser sa mise en circulation, en indiquant dans son rapport que le véhicule était en état de circuler dans des conditions normales de sécurité, cependant aucun élément de ce rapport ne permet d'établir qu'un contrôle de l'axe de pivotement aurait été effectué ; qu'en remettant en location un véhicule gravement accidenté sans s'être préalablement assuré, par un examen approfondi du véhicule, que celui-ci ne présentait pas de défaut en lien avec l'accident subi, en particulier au niveau de son axe de pivotement, la SARL HARISTOY a fait preuve de négligence.

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Sur les responsabilités des Sociétés en la cause au niveau des conséquences de l 'accident du 28/06/2012 ; qu'attendu qu'il y aura lieu d'examiner dans un premier temps et respectivement les responsabilités éventuelles des Sociétés TBM HENDAYE et Etablissements Haristoy, au vu notamment du contrat de location du 05/06/2012, des pièces versées aux débats et plus particulièrement des rapports d'expertise réalisés, avant de déterminer dans quelle mesure les garanties de leurs Sociétés d'Assurances GAN ASSURANCES et ALLIANZ IARD pourraient être actionnées (
) ; que sur les responsabilités de la Société Etablissements Haristoy ; qu'attendu que, en sa qualité de loueur de véhicules « lourds », la Société Etablissements Haristoy était tenue de procéder régulièrement et au moins annuellement au contrôle technique de ses véhicules, comme le prévoit l'arrêté du 27 juillet 2004 relatif au contrôle technique des véhicules lourds en son annexe VIII ; qu'en ce sens, la Société Haristoy produit aux débats en ses pièces référencées sous le N° 9 les copies du carnet d'entretien de la semi-remorque [...] , ainsi que la copie des procès-verbaux des contrôles techniques effectués de 2001 à 2010, à l'exception de celui concernant l'année 2003, le dernier étant effectué le 03/12/2010 avec une validité de un an, soit expirant le 02/12/2011 ; que, nonobstant, elle produit dans ses dernières conclusions la pièces n° 10 copie de la carte grise du véhicule [...] , sur laquelle figurent les vignettes prévues par l'article 3 de l'arrêté du 16/07/2010 modifiant l'arrêté du 27/07/2004, lequel prévoit qu' « II est indiqué notamment la date de validité du visa, c'est-à-dire la date au-delà de laquelle le véhicule ne peut être maintenu en circulation sans avoir été soumis à un nouveau contrôle technique, ainsi que la lettre AS ou R selon, respectivement, que les défectuosités constatées, s'il y en a, ne justifient pas une contre-visite (A), justifient une contre-visite sans interdiction de circuler (S) ou avec interdiction de circuler (R), et, à compter du 01/01/2011, l'immatriculation du véhicule »;
que force est de constater que la carte grise du véhicule comporte bien la vignette revêtue de la lettre « A » indiquant la date de fin de validité au 07/12/2012, preuve que le contrôle technique a bien été effectué en date du 07/12/2011, et bien que le procès-verbal de cet examen ne figure pas dans les pièces versées ; qu'il est donc avéré que la Société Etablissements Haristoy a bien respecté les obligations concernant le contrôle technique du semi-remorque [...] jusqu'à une date de validité (07/12/2012) postérieure à la date de l'accident survenu le 28/06/2012 ; qu'attendu que, cependant, il y aura lieu de prendre en considération les conclusions de l'expertise contradictoire du cabinet A... du 21/12/2012, en se référant notamment à l'accident préalablement survenu à ce véhicule le 17/12/2009 ; qu'en ce sens, le Tribunal jugera important de reproduire dans son attendu les principales constatations et conclusions de ce rapport d'expertise contradictoire : « Page 3 : La benne est reposée sur le châssis ; L'axe de pivotement de la benne est rompu côté gauche et fortement tordu côté droit, Le profil de cassure laisse apparaître des traces de fissurations antérieures au jour du sinistre ,-La chape droite de la benne est correctement graissée : Les obturateurs D et G de l'axe de pivotement sont équipés de graisseurs. Après dépose de l'obturateur gauche de l'axe de pivotement, on aperçoit la présence de graisse. Le morceau de l'axe de pivotement est coincé dans la chape gauche ; Un procès-verbal d'examen et de constatation contradictoire a été établi et signé par les parties présentes » ; « Page 4 - origine des dommages : L'axe de pivotement s'est rompu car il était massivement fissuré antérieurement au sinistre. L'examen morphologique détaillé du profil de cassure laisse apparaître la présence : - de très nombreuses lignes de crête sur toute la périphérie de cet axe. A noter que pour chaque ligne de crête correspondent deux amorces de fissures en périphérie de l'axe. - d'une zone de rupture bien antérieure au sinistre. L'absence de torsion de cet arbre avant sa rupture prouve également qu'il était très fortement fragilisé par des fissures antérieures. D'autre part, sur l'une des photographies prises immédiatement sur les lieux mêmes du sinistre, on aperçoit très clairement de la corrosion sur environ 'A du faciès de rupture. Or, cette corrosion n'a pas pu se faire instantanément. Elle résulte d'un processus naturel d'oxydation lent et progressif du métal. Cela prouve de manière indiscutable, que cet axe était fissuré bien avant la date du sinistre et bien avant le 05 juin 2012 date de la location de la benne par la Société TBM. Très important : Il est à noter que cette benne a été violemment accidentée lors d'un précédent sinistre en décembre 2009. Elle s'était également couchée sur le côté gauche et avait été déclarée économiquement irréparable par le Cabinet Adour Expertise. Les Etablissements Haristoy, propriétaires de cette benne, ont toutefois décidé de la réparer. Sur la facture de remise en état, nous ne relevons aucun contrôle ni action sur cet axe de pivotement pourtant très fortement sollicité » ; que sur la base de ces constatations, les conclusions du rapport d'expertise amiable contradictoire sont les suivantes : « page 6 : Compte tenu de ce qui précède, nous pouvons dire de façon certaine que le graissage n'est pas à l'origine des dommages, que cet axe s'est rompu car il était massivement fissuré bien avant le 05/06/2012 date de location par la Sté TBM ; que la responsabilité de la Sté TBM n'est pas engagée dans ce sinistre » ; que l'étendue et la précision des investigations effectués par les experts lors de ces opérations contradictoires du 21/12/2012 ne sauraient être soumises à caution ; que la qualité des experts sachant confère à leurs conclusions une force que le Tribunal de céans ne peut ignorer, d'autant plus qu'aucun autre document, ni examen de pièces, ni d'expertise complémentaire n'est produit aux débats ; qu'attendu que les conclusions des experts prouvent que l'origine de l'accident du 28/06/2012 est bien antérieure à cette date et en tout état de causes à la date de location de la benne à la Société TBM HENDAYE le 05/06/2012 ; que la probabilité de ce que la rupture de l'axe de rotation arrière droit de la benne survenue le 28/06/2012 trouve son origine dans le précédent accident subi par cette même benne le 17/12/2009 sera dès lors retenue par le Tribunal de céans ; que, au cours de leurs investigations, les experts ont pu constater que les réparations effectuées suite à l'accident du 17/12/2009 ne font état « d'aucun contrôle ni action sur cet axe de pivotement, pourtant très fortement sollicité » ; que lesdites réparations ont été effectuées par le propre garage des Etablissements Haristoy à [...], objet d'une facture du 27/08/2010 d'un montant de 9.330,45 euros, soit huit mois après l'accident du 17/12/2009 ; que les causes et circonstances dudit accident sont inconnues du Tribunal de céans, mis à part ce qu'en disent les experts dans le rapport du cabinet A..., précisant, en présence de Mr Haristoy, que la benne « s'était également couchée sur le côté gauche et qu'elle avait été déclarée économiquement irréparable » ; que les Etablissements Haristoy ne produisent aux débats aucune expertise d'assurance afférente à cet accident qui aurait pu déterminer exactement les réparations à effectuer ; que, dès lors, les Etablissements Haristoy ont de leur propre chef procédé aux réparations en décidant de conserver ce véhicule dans leur flotte, mais en omettant de vérifier et donc de réparer ou de changer comme il se devait l'axe de rotation de la benne qui pourtant avait de l'avis même des experts été fortement sollicité lors de cet accident ; que ce défaut de réparation qui aura échappé aux divers contrôles techniques effectués postérieurement à l'accident du 17/12/2009 aurait pu être détecté et mis en lumière par une expertise effectuée à la demande des Etablissements Haristoy avant d'entamer les réparations, ce qui n'a visiblement pas été demandé ; qu'en ce sens, les Etablissements Haristoy, pourtant professionnels reconnus dans le domaine des véhicules lourds, ont manqué de vigilance et fait preuve de négligence, connaissant parfaitement les conséquences prévisibles de l'accident par affaissement sur le côté gauche de l'engin le 17/12/2009, et n'effectuant aucun contrôle ni à fortiori de réparations sur l'axe de rotation en question ; que cette négligence coupable était d'autant plus grave que les Etablissements Haristoy savaient qu'ils destinaient ce véhicule à la location à des tiers ; qu'en définitive il apparaît que les causes du dommage sont en lien direct avec un vice caché de la benne, préexistant à la location que l'article 1721 du code civil précise à cet effet que « il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail » ; qu'en conséquence, le Tribunal dira que la responsabilité de la Société Etablissements Haristoy est établie dans l'accident survenu le 28/06/2012, et la condamnera à régler à la Société EUROVIA OPE le préjudice qu'elle a subi du fait des conséquences de l'accident du 28/06/2012 et qui seront déterminés par le présent jugement, la renvoyant le cas échéant à mieux se pourvoir à l'encontre des Sociétés de Contrôle Technique sollicitées après l'accident du 17/12/2009.

1°) ALORS QUE le juge ne peut se fonder exclusivement sur le rapport établi à la suite d'une expertise réalisée à la demande de l'une des parties ; qu'en se fondant exclusivement sur le rapport d'expertise établi par le cabinet A... à l'initiative de la société Gan, assureur de la société TBM Hendaye, pour se prononcer sur les causes de l'accident survenu 28 juin 2012 et juger qu'il serait résulté de la fissuration antérieure de l'axe de pivotement (arrêt, p. 7 ; antepen. al. à p. 8 al. 2 ; jugement p. 15, pen. al. à p. 16, al. 8), la cour d'appel a méconnu l'article 16 du code de procédure civile, ensemble celle de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) ALORS QUE le propriétaire d'un véhicule accidenté n'a pas à effectuer d'autres diligences que celles prévues aux articles L. 327 et suivants du code de la route, avant de le remettre en circulation ; qu'en imputant à faute à la société Haristoy d'avoir remis le véhicule accidenté en circulation après l'accident de 2009 car elle ne se serait pas « préalablement assuré, par un examen approfondi du véhicule que celui-ci ne présentait pas de défaut en lien avec (cet) accident » (arrêt, p. 8, dern. al. ; jugement p. 16, pen. al. à p. 17 al. 1) tout en relevant qu' « un expert a(vait) effectivement examiné le véhicule avant d'autoriser sa mise en circulation », « en application des articles L 327-1 et suivants du code de la route » (arrêt, p. 8, pen. al.) de sorte que la société Haristoy qui avait suivi la procédure d'ordre public encadrant la remise en circulation des véhicules endommagés, n'était tenue à aucune autre diligence, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 1383 du même code, dans leur rédaction applicable à l'espèce. Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société GAN assurances, demanderesse au pourvoi incident

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la responsabilité de la société TBM était établie et d'AVOIR, en conséquence, condamné in solidum la société Haristoy et la société Gan Assurances, dans la limite de la franchise contractuelle de 450 € pour ce qui concerne cette dernière, à payer à la SAS Eurovia la somme de 124 588,18 € en réparation de son préjudice, avec intérêts au taux légal à compter du 11 février 2014 ;

AUX MOTIFS QU'il est constant que le locataire d'un bien dont la garde lui a été transférée est responsable du dommage causé par ce bien en application de l'article 1384 alinéa 1 (ancien) du code civil ; qu'il pèse une présomption de responsabilité sur le gardien, qui ne peut être écartée que par la preuve d'un cas fortuit ou de force majeure qui ne lui soit pas imputable ; que le vice inhérent à la chose qui a causé le dommage ne constitue pas un cas fortuit ou de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité envers les tiers ; qu'en l'espèce, l'accident a été causé par un vice affectant la benne ; que dans ces conditions, en l'absence de force majeure, la responsabilité de la société TBM dans la survenance du dommage doit être retenue ; qu'il convient par conséquent d'infirmer en ce sens le jugement déféré ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, la société Eurovia, victime du dommage, avait invoqué à l'encontre de la société TBM un manquement à ses obligations contractuelles et formellement exclut que la responsabilité de celle-ci soit recherchée sur le fondement de l'article 1384 ancien du code civil ; qu'en jugeant néanmoins que la responsabilité de la société TBM dans la survenance du dommage devait être retenue sur ce fondement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, subsidiairement, QU'un coauteur fautif est sans recours contre un coobligé tenu uniquement sur le fondement d'une responsabilité sans faute, lequel ne peut être tenu de contribuer à la dette ; qu'en l'espèce, la société Haristoy, auteur d'une faute ayant provoqué le dommage, était irrecevable à invoquer la responsabilité de la société TBM en sa qualité de gardien de la benne litigieuse ; qu'en jugeant que la responsabilité de la société TBM dans la survenance du dommage devait être retenue en sa qualité de gardien, que seule la société Haristoy avait invoqué, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1, ancien, du code civil, devenu l'article 1242, alinéa 1, du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Haristoy à payer à la société Gan Assurances la seule somme de 7 500 € au titre de l'indemnité versée à l'assureur des établissements Libaros ;

AUX MOTIFS QUE (sur l'action récursoire exercée par le Gan Assurances) que la SA Gan Assurances sollicite la condamnation de la SARL HARISTOY à lui payer à la somme de 15 000 € en remboursement du montant de l'indemnité qu'elle a dû payer à l'assureur des établissements Libaros ; que dès lors qu'il a été jugé que la responsabilité de la société TBM et de la société Haristoy était partagée, il convient de condamner la SARL HARISTOY à payer à la SA Gan Assurances la somme de 7 500 € à ce titre ;

1°) ALORS QU'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen du pourvoi incident entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt condamnant limitant à la somme de 7 500 € la condamnation de la société Haristoy au titre de l'indemnité versée par la société Gan Assurances à l'assureur des établissement Libaros ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QU'un coauteur fautif est sans recours contre un coobligé tenu uniquement sur le fondement d'une responsabilité sans faute, lequel ne peut être tenu de contribuer à la dette ; qu'en limitant à la somme de 7 500 € la condamnation de la société Haristoy au titre de l'indemnité versée par la société Gan Assurances à l'assureur des établissement Libaros au motif que la responsabilité de la société Haristoy, fondée sur la faute, était partagée avec celle retenue à l'encontre de la société TBM sur le fondement de la responsabilité sans faute de l'article 1384 alinéa 1, ancien, du code civil, la cour d'appel a violé ce texte, devenu l'article 1242, alinéa 1, du code civil.

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