17 janvier 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-40.040

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:C300102

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Droit des biens - Code de la construction et de l'habitation - Articles L. 651-4, L. 651-6 et L. 651-7 - Principe de liberté individuelle - Principe d'inviolabilité du domicile - Caractère sérieux - Renvoi au Conseil constitutionnel

Texte de la décision

CIV.3

COUR DE CASSATION



LG


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 17 janvier 2019




RENVOI


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 102 FS-P+B+I

Affaire n° U 18-40.040







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu l'ordonnance en la forme des référés rendue le 11 octobre 2018 par le président du tribunal de grande instance de Paris, transmettant à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 19 octobre 2018, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

1°/ M. X..., domicilié [...],

2°/ Mme Y..., domiciliée [...],

D'autre part,

- la Ville de Paris, représentée par son maire en exercice, domicilié Hôtel de Ville, 75004 Paris,

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 janvier 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Jacques , conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, MM. Pronier, Nivôse, Bureau, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, M. Bech, conseillers, Mmes Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Jacques , conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. X... et de Mme Y..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Ville de Paris, l'avis de M. Brun, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que, faisant grief à M. X... et Mme Y..., propriétaires d'un local à usage d'habitation, d'avoir changé sans autorisation l'usage de ce local en le louant pour de courtes durées à une clientèle de passage, la Ville de Paris les a assignés en la forme des référés aux fins de voir prononcer une amende à leur encontre et ordonner, sous astreinte, le retour à l'habitation des locaux ; que le président du tribunal de grande instance a transmis la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

« Dans la rédaction des articles L. 651-4, L. 651-6 et L. 651-7 du code de la construction et de l'habitation applicables au litige, le pouvoir conféré aux agents assermentés du service municipal du logement de visiter les locaux à usage d'habitation situés dans le territoire relevant du service municipal du logement et prévoyant que l'occupant ou le gardien du local est tenu de laisser visiter sur présentation de l'ordre de mission, que la visite s'effectue en sa présence et qu'en cas de carence de la part de l'occupant ou du gardien du local, l'agent assermenté du service municipal du logement peut, au besoin, se faire ouvrir les portes et visiter les lieux en présence du maire ou du commissaire de police, les portes devant être refermées dans les mêmes conditions, ce sans qu'il soit organisé de mécanisme d'autorisation judiciaire préalable ni de recours effectif contre la décision de visite ni enfin de mécanisme de contrôle par l'autorité judiciaire des opérations menées, sont-ils conformes aux principes de protection de la liberté individuelle et d'inviolabilité du domicile tels que garantis par les articles 66 de la Constitution ainsi que 2, 4 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? » ;

Attendu que les dispositions contestées sont applicables au litige au sens de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Attendu que la question posée présente un caractère sérieux dès lors que ces dispositions reconnaissent aux agents assermentés du service municipal du logement le pouvoir de pénétrer dans des lieux à usage d'habitation en l'absence et sans l'accord de l'occupant du local, sans y avoir été préalablement autorisés par le juge judiciaire, qu'elles ne comportent pas de précisions suffisantes relatives aux conditions d'exercice des visites des locaux et d'accès aux documents s'y trouvant et ne prévoient pas de voies de recours appropriées permettant de faire contrôler par un juge la régularité des opérations ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-neuf.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.