9 mai 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-12.073

Première chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:C100398

Titres et sommaires

SOCIETE CIVILE PROFESSIONNELLE - Avocats - Parts sociales - Cession - Prix - Fixation - Fixation par expert - Désignation - Modalités - Détermination - Portée

L'article 21 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, ne dérogeait pas à l'article 1843-4 du code civil, et dans sa rédaction issue de cette dernière loi, il n'y déroge qu'en ce qu'il donne compétence au bâtonnier pour procéder à la désignation d'un expert aux fins d'évaluation des parts sociales de sociétés d'avocats. Dès lors, c'est donc à bon droit qu'un cour d'appel a retenu que l'évaluation des parts sociales d'une société d'avocats était soumise aux dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil et qu'elle-même ne pouvait procéder à cette évaluation

SOCIETE (RèGLES GéNéRALES) - Parts sociales - Cession - Prix - Fixation - Fixation par expert - Article 1843-4 du code civil - Caractère d'ordre public - Portée

SOCIETE (RèGLES GéNéRALES) - Parts sociales - Cession - Prix - Fixation - Fixation par expert - Désignation - Modalités - Détermination

AVOCAT - Exercice de la profession - Différend entre avocats - Arbitrage du bâtonnier - Domaine d'application - Désignation d'un expert pour l'évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats - Recours devant la cour d'appel - Possibilité de procéder à l'évaluation des parts sociales (non)


SOCIETE (RèGLES GéNéRALES) - Parts sociales - Cession - Prix - Fixation - Fixation par expert - Critères - Détermination

Sous l'empire de l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, l'expert disposait d'une entière liberté d'appréciation pour fixer la valeur des parts sociales selon les critères qu'il jugeait opportuns

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 mai 2019




Cassation partielle


Mme BATUT, président



Arrêt n° 398 FS-P+B

Pourvoi n° V 18-12.073







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. O... W..., domicilié [...],

2°/ M. I... N..., domicilié [...],

3°/ la société Evolis avocats, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

4°/ M. P... F..., domicilié [...],

5°/ la société Saint-Laurent, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2017 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. I... Q..., domicilié [...],

2°/ à la société Q... et associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 mars 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Duval-Arnould, M. Truchot, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Dazzan-Barel, Kloda, M. Serrier, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de MM. W..., N... et F..., et des sociétés Evolis avocats et Saint-Laurent, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de M. Q... et de la société Q... et associés, l'avis écrit de M. Sudre, avocat général, et l'avis oral de M. Lavigne, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un différend entre MM. A..., Q..., W..., N... et F..., associés au sein de la société civile professionnelle d'avocats L... A... et associés (la SCP), devenue la société Evolis avocats, M. A... et la société L...-Q..., tous deux retrayants de la SCP, ont saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Rennes, par lettre du 23 mars 2010, d'une demande d'arbitrage portant notamment sur l'établissement des comptes intermédiaires au 30 octobre 2009, date de leur retrait, et sur la valorisation de leurs parts sociales détenues dans la SCP ; que, par décision avant dire droit du 21 juin 2010, le bâtonnier a désigné M. V... en qualité d'expert pour déterminer la valeur des parts sociales de la SCP et en qualité de sapiteur pour lui proposer des éléments lui permettant de trancher les autres points en litige, puis a statué par décision du 27 février 2017 ;

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que la société Evolis avocats et ses associés font grief à l'arrêt de dire que l'expert a commis une erreur grossière, d'écarter en conséquence le caractère impératif de son évaluation des parts sociales, et de renvoyer les parties à désigner ensemble un expert ou à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour y procéder, alors, selon le moyen :

1°/ que l'expertise en vue d'évaluer des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats ordonnée par le bâtonnier chargé, par application de l'article 21, alinéa 3, de la loi du 31 décembre 1971, d'arbitrer un différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, déroge à l'article 1843-4 du code civil ; que, saisi d'une demande d'arbitrage à l'occasion d'une cession ou d'un rachat de parts sociales, le bâtonnier doit lui-même fixer la valeur des parts sociales, au regard de l'évaluation de l'expert, sans qu'en application de ce dernier texte, il soit lié par celle-ci ; qu'en renvoyant les parties à désigner un nouvel expert ou saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes à fin de désignation d'un expert à fin d'évaluation des parts sociales, la cour d'appel, qui a ainsi refusé de procéder elle-même à cette évaluation, a violé l'article 1843-4 du code civil, par fausse application et, par refus d'application, l'article 21, alinéa 3, de la loi du 31 décembre 1971 ;

2°/ que le bâtonnier chargé, par application de l'article 21, alinéa 3, de la loi du 31 décembre 1971, d'arbitrer un différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, ne peut soumettre l'expertise qu'il ordonne en vue d'évaluer des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats aux dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil ; qu'en retenant que l'expertise ordonnée par le bâtonnier était soumise à ce texte dès lors que la décision de désignation de l'expert avait été rendue au visa de celui-ci, la cour d'appel violé les textes susvisés ;

Mais attendu que l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, ne dérogeait pas à l'article 1843-4 du code civil ; que, dans sa rédaction issue de cette dernière loi, il n'y déroge qu'en ce qu'il donne compétence au bâtonnier pour procéder à la désignation d'un expert aux fins d'évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats ; que c'est donc à bon droit qu'ayant constaté que l'expert avait été désigné le 21 juin 2010, la cour d'appel a retenu que son évaluation était soumise aux dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil et qu'elle-même ne pouvait procéder à l'évaluation des parts sociales ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 ;

Attendu que, pour écarter le caractère impératif de l'évaluation par l'expert des parts de la SCP, l'arrêt retient qu'en se fondant sur une disposition abrogée qui a déterminé son choix et en refusant de prendre en compte un usage non discuté conforme tant au règlement intérieur qu'aux statuts modifiés et créateurs de droit, l'expert a commis une erreur grossière quant au mode même de détermination de la valeur des parts sociales ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, sous l'empire des dispositions applicables à la date de sa désignation, l'expert disposait d'une entière liberté d'appréciation pour fixer la valeur des parts sociales selon les critères qu'il jugeait opportuns, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une erreur grossière dans cette évaluation, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. V... a commis une erreur grossière, en ce qu'il écarte le caractère impératif de son évaluation des parts de la SCP L... et A..., devenue Evolis avocats, et en ce qu'il renvoie les parties à désigner ensemble un expert pour évaluer lesdites parts ou la plus diligente à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour y procéder, l'arrêt rendu le 12 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne M. Q... et la société Q... et associés aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour MM. W..., N... et F..., et les sociétés Evolis avocats et Saint-Laurent.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit que M. V... a commis une erreur grossière et écarté en conséquence le caractère impératif de son évaluation des parts de la société L... et A... (devenue Evolis) détenues par la société Q... et Associés et d'avoir renvoyé les parties à désigner ensemble un expert pour évaluer les dites parts ou la plus diligente à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour y procéder ;

Aux motifs qu' « il convient de rappeler que le bâtonnier, saisi d'une demande d'arbitrage, dans le cadre des dispositions de l'article 21 al. 3 de la loi du 31 décembre 1971 (dans sa rédaction résultant de la loi du 12 mai 2009 « tout différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel est, en l'absence de conciliation, soumis à l'arbitrage du bâtonnier ») et 179-1 et suivants du décret du 27 décembre 1991), a désigné Monsieur V... en qualité d'expert au visa de l'article 1843-4 du code civil. Ce texte, dans sa rédaction alors vigueur, disposait que « dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible » ; qu'il sera simplement rappelé que l'estimation de l'expert, désigné dans ce cadre (soit d'accord entre les parties, soit à défaut par le président du tribunal de grande instance), s'impose à celles-ci comme au juge sauf à l'une d'elles de démontrer qu'il a commis une erreur grossière ; que les intimés soutiennent que ces dernières dispositions, nonobstant le visa, ne sont pas applicables à la désignation effectuée par le bâtonnier pour évaluer, notamment dans le cadre d'un retrait, les parts d'une société d'avocat ; qu'il sera toutefois observé qu'en l'espèce, les parties se sont accordées sur le choix de l'expert ainsi qu'il résulte de la décision du bâtonnier qui, sur ce point, a simplement pris acte de leur accord : « Vu l'article 1843-4, Vu l'accord des parties pour désigner en qualité d'expert pour procéder à la valorisation des parts du cabinet L... A... & ASSOCIES devenu EVOLIS, Monsieur V..., expert-comptable, Conformément à l'accord des parties, Monsieur V... est désigné en qualité d'expert avec pour mission de déterminer la valeur des parts du cabinet... », que du fait de cet accord, ce dernier a bien été saisi et a déposé un rapport dans le cadre des dispositions de l'article 1843-4 du code civil ; que celui-ci a déposé le 27 octobre 2010 un pré-rapport dont le délégué du bâtonnier a entériné les conclusions provisoires (estimation de la valeur des 200 parts de la société L... Q... à la somme de 210600 euros) ; que la circonstance tirée du fait que cette estimation ne soit que provisoire ne constitue pas un obstacle à l'examen des critiques développées par la société Q... ET ASSOCIES et Me Q... pour soutenir qu'elle est entachée d'erreurs grossières. En effet, ces critiqués ne portent pas sur la détermination mathématique de la valeur (erreur de calcul) mais sur les principes mêmes que l'expert a retenus ; qu'il sera préliminairement rappelé que la critique d'un rapport portant sur la détermination de la valeur de parts sociales ne tend pas à la nullité du dit rapport mais uniquement à en écarter le caractère impératif et donc l'estimation qu'il contient ; que l'exception d'irrecevabilité soulevée par les intimés tirée de ce que la nullité du rapport a été soulevée tardivement, est donc inopérante et doit être rejetée ; que de même en va-t-il de l'argumentation tirée de l'accord intervenu entre les intimés et Me A... aux termes duquel les parties ont décidé de faire application des conclusions des rapports de Monsieur V... ; qu'en effet, le fait que la société Q... et associés et que Me Q... en aient sollicité la communication faisant valoir que les mêmes règles devaient être appliquées, ne saurait leur être opposé dès lors qu'ils n'en connaissaient pas la teneur ; que dans son rapport, l'expert V... relève que les statuts (articles 13 al 1er et 24 in fine « le solde (des bénéfices) est réparti entre les associés proportionnellement au nombre de leurs parts sociales sous forme de dividendes ») et le règlement intérieur (articles 4, 11 et 13) ne retiennent pas la même définition de la répartition des résultats, les statuts prévoyant une répartition proportionnelle au nombre de parts sociales et le règlement intérieur, abstraction faite d'un dividende de capital symbolique, une répartition en proportion de la valeur ajoutée respective de chaque associé par rapport à la valeur ajoutée globale (cf. supra) ; qu'il estime la valeur de la société à la somme de 1 053 041 euros déterminée à partir des capitaux propres comptables et de la valeur de la clientèle ; qu'il a évalué les 200 parts de la société L... et A... détenues par la société L... Q... en suivant chacune des méthodes et a abouti aux résultats suivants : - méthode fondée sur la règle fixée par les statuts : 210 600 euros, - méthode fondée sur la règle fixée par le règlement intérieur : 567 091 euros ; que M. V... note que les deux approches sont très différentes et que les cessions antérieures ont été effectuées en retenant les règles issues du règlement intérieur, en limitant la valorisation des parts sociales à un multiple des encaissements (50 %) de l'associé concerné ; que rappelant que les statuts prévalent sur le règlement intérieur (art 3 du RI) et que le droit prime sur les usages, il retient en définitive la méthode définie par les statuts et évalue les parts de l'appelante à la somme de 210 600 euros tout en admettant que ce choix ne respecte pas l'esprit des cessions antérieures ; que la critique de la société Q... et associés et de Me Q... est fondée sur plusieurs éléments ; que les appelants font, en premier lieu, valoir que l'article 24 des statuts a été modifié par décision unanime des associés en date du 4 septembre 2006 (pièce n° 2 des appelants) aux termes de laquelle le bénéfice distribuable de chaque exercice sera réparti entre les associés conformément aux dispositions du règlement intérieur. Cette modification a incontestablement mis fin à la contradiction qui existait entre les statuts et le règlement intérieur et sur laquelle l'expert s'était exclusivement fondé pour faire prévaloir les statuts sur le règlement intérieur, la règle de droit sur les usages et retenir la première estimation ; que si les intimés rappellent que l'expert s'était également fondé sur les dispositions de l'article 13 al 1er (« chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes ») dont les règles concordaient avec celles de l'article 24 ancien des statuts, les appelants font valoir à bon droit que ces dispositions n'ont pas vocation à régir la cession de parts sociales ou l'estimation de parts en cas de retrait lorsque, comme en l'espèce, la société poursuit son activité, mais à partager le boni de liquidation ; qu'enfin, en écartant un usage constant (point confirmé par l'une comme par l'autre des parties à l'expert) pourtant conforme tant aux statuts de la société qu'à son règlement intérieur pour estimer la valeur des parts de la société en cas de cession, l'expert s'est fourvoyé sur l'effet créatif de droit de l'usage (article 1194 du code civil) ; que si, dans ses dernières écritures, la société Evolis avocats et ses associés contestent l'existence de cet usage, il convient de les renvoyer au dire qu'ils ont adressé à l'expert le 2 juillet 2010 aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... », usage également rappelé par le Bâtonnier E... dans son courrier du 22 septembre 2009 (pièce n° 8 des appelants, dont l'intitulé est au demeurant inexact dans le bordereau de communication de pièces) : « en ce qui concerne la valorisation des parts, il est proposé qu'elle soit fixée sur les encaissements comme pour la répartition des résultats au sein de la société... » ; qu'ainsi, et en se fondant sur une disposition abrogée qui a déterminé son choix et en refusant de prendre en compte un usage non discuté conforme tant au règlement intérieur qu'aux statuts modifiés et créateur de droit, l'expert a commis quant au mode même de détermination de la valeur des parts sociales, une erreur grossière qui justifie que soit écarté le caractère impératif de son estimation ; que la société Q... et associés demande à la cour d'appel qui ne peut procéder à elle-même à l'évaluation, de désigner un expert pour ce faire ; qu'il convient toutefois de rappeler que les dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil réserve cette faculté aux parties, à charge pour elles de s'accorder sur le nom d'un expert, et, à défaut, au président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, qu'elle ne peut procéder à cette désignation (Cass. 1re civ., 25 novembre 2003, Bull I n° 243) ; que les parties seront donc renvoyées à désigner un expert et, à défaut, à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour ce faire » (arrêt, p. 21 et s.) ;

1°) Alors, d'une part, que l'expertise en vue d'évaluer des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats ordonnée par le bâtonnier chargé, par application de l'article 21, alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971, d'arbitrer un différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, déroge à l'article 1843-4 du code civil ; que, saisi d'une demande d'arbitrage à l'occasion d'une cession ou d'un rachat de parts sociales, le bâtonnier doit lui-même fixer la valeur des parts sociales, au regard de l'évaluation de l'expert, sans qu'en application de ce dernier texte, il soit lié par celle-ci ; qu'en renvoyant les parties à désigner un nouvel expert ou saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes à fin de désignation d'un expert à fin d'évaluation des parts sociales, la cour d'appel, qui a ainsi refusé de procéder elle-même à cette évaluation, a violé l'article 1843-4 du code civil, par fausse application et, par refus d'application, l'article 21, alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971 ;

2°) Alors, d'autre part, que le bâtonnier chargé, par application de l'article 21, alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971, d'arbitrer un différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, ne peut soumettre l'expertise qu'il ordonne en vue d'évaluer des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats aux dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil ; qu'en retenant que l'expertise ordonnée par le bâtonnier était soumise à ce texte dès lors que la décision de désignation de l'expert avait été rendue au visa de celui-ci, la cour d'appel violé les textes susvisés ;

3°) Alors, subsidiairement d'abord, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'il résulte du rapport d'expertise que, pour retenir la méthode consistant à valoriser de manière égale chaque part sociale en fonction d'une fraction de la valeur de la société proportionnelle au nombre de parts, l'expert a relevé que « comme précisé en début de chapitre, l'article 13 des statuts précise que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes » (rapport d'expertise, p. 11 § 1) ; qu'en jugeant que l'expert avait commis une erreur en retenant cette méthode sur la base de l'article 24 des statuts (prévoyant une répartition égalitaire des résultats entre associés à proportion du nombre de part de chacun) dont la rédaction n'était plus en vigueur au moment du rachat litigieux, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise, en violation de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble, le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

4°) Alors, subsidiairement, ensuite, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que l'article 13 des statuts de la société, intitulé « Droits et obligations des associés », prévoyait que « chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes » ; qu'en affirmant, pour écarter le rapport d'expertise, que cette clause n'avait vocation qu'à partager le boni de liquidation, la cour d'appel a ajouté une limitation qu'elle ne contient pas et en a, ainsi, dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ensemble, le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

5°) Alors, toujours subsidiairement, par ailleurs que l'existence d'un usage suppose la constatation d'une pratique antérieurement suivie et ne peut résulter des seules déclarations d'une partie ou d'un tiers ; qu'en retenant, pour dire qu'il était d'usage dans la société de tenir compte, pour l'évaluation des parts sociales des associés retrayants, du critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffres d'affaire apporté par chacun d'eux, d'une part, que la société Evolis avocats et ses associés avaient adressé à l'expert le 2 juillet 2010 un dire aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... » et, d'autre part, que dans un courrier du 22 septembre 2009, le bâtonnier E... avait indiqué « en ce qui concerne la valorisation des parts, il est proposé qu'elle soit fixée sur les encaissements comme pour la répartition des résultats au sein de la société... », motifs impropres à caractériser une pratique antérieurement suivie, la cour d'appel a violé l'article 1135, devenu 1194, du code civil ;

6°) Alors, toujours subsidiairement, ensuite que l'existence d'un usage suppose la constatation d'une pratique antérieurement suivie, actuelle et générale ; qu'en retenant qu'il était d'usage dans la société de tenir compte, pour l'évaluation des parts sociales des associés retrayants, du critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffres d'affaire apporté par chacun d'eux, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions des exposants, spé. p. 20), si le retrait de M. A..., au même moment que celui de la société Q... et associés n'avait pas donné lieu à un rachat sur la valeur fixée par l'expert, à proportion du nombre de parts dans la société, sans qu'il soit tenu compte du critère tiré de la répartition inégalitaire des résultats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1135, devenu 1194, du code civil ;

7°) Alors, toujours subsidiairement, au surplus, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties telles qu'elles sont formulées dans leurs conclusions ; qu'en retenant que l'usage tenant à la prise en compte du caractère inégalitaire de répartition des résultats entre associés dans la valorisation des parts sociales de la société tiendrait d'un « usage indiscuté », cependant que la société Evolis et ses associés contestaient l'existence d'un tel usage, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

8°) Alors, toujours subsidiairement, de plus, que l'usage est supplétif de la volonté des parties et ne peut prévaloir que dans le silence de la convention ; qu'en retenant que le critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffre d'affaires apporté par chacun d'eux s'imposait à l'expert chargé d'évaluer les parts sociales litigieuses au titre d'un prétendu usage relatif à cette évaluation, cependant qu'elle avait relevé que l'article 13 « Droits et obligations des associés » des statuts de la société prévoyait que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1135, devenu 1194 du code civil ;

9°) Alors, plus subsidiairement, enfin, que la renonciation suppose une volonté claire et non équivoque de renoncer ; qu'en opposant à la société Evolis avocats et à ses associés qu'ils avaient adressé à l'expert le 2 juillet 2010 un dire aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... », motif impropre à caractériser une volonté claire et non équivoque de renoncer à l'application de l'article 13 « Droits et obligations des associés » des statuts de la société qui prévoyait que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes, la cour d'appel a violé dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ensemble, le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit que M. V... a commis une erreur grossière et écarté en conséquence le caractère impératif de son évaluation des parts de la société L... et A... (devenue Evolis) détenues par la société Q... et Associés ;

Aux motifs qu' « il convient de rappeler que le bâtonnier, saisi d'une demande d'arbitrage, dans le cadre des dispositions de l'article 21 al. 3 de la loi du 31 décembre 1971 (dans sa rédaction résultant de la loi du 12 mai 2009 « tout différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel est, en l'absence de conciliation, soumis à l'arbitrage du bâtonnier ») et 179-1 et suivants du décret du 27 décembre 1991), a désigné Monsieur V... en qualité d'expert au visa de l'article 1843-4 du code civil. Ce texte, dans sa rédaction alors vigueur, disposait que « dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible » ; qu'il sera simplement rappelé que l'estimation de l'expert, désigné dans ce cadre (soit d'accord entre les parties, soit à défaut par le président du tribunal de grande instance), s'impose à celles-ci comme au juge sauf à l'une d'elles de démontrer qu'il a commis une erreur grossière ; que les intimés soutiennent que ces dernières dispositions, nonobstant le visa, ne sont pas applicables à la désignation effectuée par le bâtonnier pour évaluer, notamment dans le cadre d'un retrait, les parts d'une société d'avocat ; qu'il sera toutefois observé qu'en l'espèce, les parties se sont accordées sur le choix de l'expert ainsi qu'il résulte de la décision du bâtonnier qui, sur ce point, a simplement pris acte de leur accord : « Vu l'article 1843-4, Vu l'accord des parties pour désigner en qualité d'expert pour procéder à la valorisation des parts du cabinet L... A... & ASSOCIES devenu EVOLIS, Monsieur V..., expert-comptable, Conformément à l'accord des parties, Monsieur V... est désigné en qualité d'expert avec pour mission de déterminer la valeur des parts du cabinet... », que du fait de cet accord, ce dernier a bien été saisi et a déposé un rapport dans le cadre des dispositions de l'article 1843-4 du code civil ; que celui-ci a déposé le 27 octobre 2010 un pré-rapport dont le délégué du bâtonnier a entériné les conclusions provisoires (estimation de la valeur des 200 parts de la société L... Q... à la somme de 210600 euros) ; que la circonstance tirée du fait que cette estimation ne soit que provisoire ne constitue pas un obstacle à l'examen des critiques développées par la société Q... ET ASSOCIES et Me Q... pour soutenir qu'elle est entachée d'erreurs grossières. En effet, ces critiqués ne portent pas sur la détermination mathématique de la valeur (erreur de calcul) mais sur les principes mêmes que l'expert a retenus ; qu'il sera préliminairement rappelé que la critique d'un rapport portant sur la détermination de la valeur de parts sociales ne tend pas à la nullité du dit rapport mais uniquement à en écarter le caractère impératif et donc l'estimation qu'il contient ; que l'exception d'irrecevabilité soulevée par les intimés tirée de ce que la nullité du rapport a été soulevée tardivement, est donc inopérante et doit être rejetée ; que de même en va-t-il de l'argumentation tirée de l'accord intervenu entre les intimés et Me A... aux termes duquel les parties ont décidé de faire application des conclusions des rapports de Monsieur V... ; qu'en effet, le fait que la société Q... et associés et que Me Q... en aient sollicité la communication faisant valoir que les mêmes règles devaient être appliquées, ne saurait leur être opposé dès lors qu'ils n'en connaissaient pas la teneur ; que dans son rapport, l'expert V... relève que les statuts (articles 13 al 1er et 24 in fine « le solde (des bénéfices) est réparti entre les associés proportionnellement au nombre de leurs parts sociales sous forme de dividendes ») et le règlement intérieur (articles 4, 11 et 13) ne retiennent pas la même définition de la répartition des résultats, les statuts prévoyant une répartition proportionnelle au nombre de parts sociales et le règlement intérieur, abstraction faite d'un dividende de capital symbolique, une répartition en proportion de la valeur ajoutée respective de chaque associé par rapport à la valeur ajoutée globale (cf. supra) ; qu'il estime la valeur de la société à la somme de 1 053 041 euros déterminée à partir des capitaux propres comptables et de la valeur de la clientèle ; qu'il a évalué les 200 parts de la société L... et A... détenues par la société L... Q... en suivant chacune des méthodes et a abouti aux résultats suivants : - méthode fondée sur la règle fixée par les statuts : 210 600 euros, - méthode fondée sur la règle fixée par le règlement intérieur : 567 091 euros ; que M. V... note que les deux approches sont très différentes et que les cessions antérieures ont été effectuées en retenant les règles issues du règlement intérieur, en limitant la valorisation des parts sociales à un multiple des encaissements (50 %) de l'associé concerné ; que rappelant que les statuts prévalent sur le règlement intérieur (art 3 du RI) et que le droit prime sur les usages, il retient en définitive la méthode définie par les statuts et évalue les parts de l'appelante à la somme de 210 600 euros tout en admettant que ce choix ne respecte pas l'esprit des cessions antérieures ; que la critique de la société Q... et associés et de Me Q... est fondée sur plusieurs éléments ; que les appelants font, en premier lieu, valoir que l'article 24 des statuts a été modifié par décision unanime des associés en date du 4 septembre 2006 (pièce n° 2 des appelants) aux termes de laquelle le bénéfice distribuable de chaque exercice sera réparti entre les associés conformément aux dispositions du règlement intérieur ; que cette modification a incontestablement mis fin à la contradiction qui existait entre les statuts et le règlement intérieur et sur laquelle l'expert s'était exclusivement fondé pour faire prévaloir les statuts sur le règlement intérieur, la règle de droit sur les usages et retenir la première estimation ; que si les intimés rappellent que l'expert s'était également fondé sur les dispositions de l'article 13 al 1er (« chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes ») dont les règles concordaient avec celles de l'article 24 ancien des statuts, les appelants font valoir à bon droit que ces dispositions n'ont pas vocation à régir la cession de parts sociales ou l'estimation de parts en cas de retrait lorsque, comme en l'espèce, la société poursuit son activité, mais à partager le boni de liquidation ; qu'enfin, en écartant un usage constant (point confirmé par l'une comme par l'autre des parties à l'expert) pourtant conforme tant aux statuts de la société qu'à son règlement intérieur pour estimer la valeur des parts de la société en cas de cession, l'expert s'est fourvoyé sur l'effet créatif de droit de l'usage (article 1194 du code civil) ; que si, dans ses dernières écritures, la société Evolis avocats et ses associés contestent l'existence de cet usage, il convient de les renvoyer au dire qu'ils ont adressé à l'expert le 2 juillet 2010 aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... », usage également rappelé par le Bâtonnier E... dans son courrier du 22 septembre 2009 (pièce n° 8 des appelants, dont l'intitulé est au demeurant inexact dans le bordereau de communication de pièces) : « en ce qui concerne la valorisation des parts, il est proposé qu'elle soit fixée sur les encaissements comme pour la répartition des résultats au sein de la société... » ; qu'ainsi, et en se fondant sur une disposition abrogée qui a déterminé son choix et en refusant de prendre en compte un usage non discuté conforme tant au règlement intérieur qu'aux statuts modifiés et créateur de droit, l'expert a commis quant au mode même de détermination de la valeur des parts sociales, une erreur grossière qui justifie que soit écarté le caractère impératif de son estimation ; que la société Q... et associés demande à la cour d'appel qui ne peut procéder à elle-même à l'évaluation, de désigner un expert pour ce faire ; qu'il convient toutefois de rappeler que les dispositions d'ordre public de l'article 1843-4 du code civil réserve cette faculté aux parties, à charge pour elles de s'accorder sur le nom d'un expert, et, à défaut, au président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, qu'elle ne peut procéder à cette désignation (Cass. 1re civ., 25 novembre 2003, Bull I n° 243) ; que les parties seront donc renvoyées à désigner un expert et, à défaut, à saisir le président du tribunal de grande instance de Rennes pour ce faire » (arrêt, p. 21 et s.) ;

1°) Alors que l'expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, applicable à la cause, a toute latitude pour déterminer la valeur des actions selon les critères qu'il juge opportuns ; qu'en ayant énoncé que l'expert V... avait commis une erreur grossière en écartant de son évaluation des parts sociales litigieuses le critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffre d'affaires apporté par chacun d'eux conformément aux articles 24 des statuts et 13 du règlement intérieur de la société, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°) Alors, subsidiairement, d'abord, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'il résulte du rapport d'expertise que, pour retenir la méthode consistant à valoriser de manière égale chaque part sociale en fonction d'une fraction de la valeur de la société proportionnelle au nombre de parts, l'expert a relevé que « comme précisé en début de chapitre, l'article 13 des statuts précise que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes » (rapport d'expertise, p. 11 § 1) ; qu'en jugeant que l'expert avait commis une erreur en retenant cette méthode sur la base de l'article 24 des statuts (prévoyant une répartition égalitaire des résultats entre associés à proportion du nombre de part de chacun) dont la rédaction n'était plus en vigueur au moment du rachat litigieux, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise, en violation de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble, le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

3°) Alors, subsidiairement, d'abord, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que l'article 13 des statuts de la société, intitulé « Droits et obligations des associés », prévoyait que « chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes » ; qu'en affirmant, pour retenir une erreur grossière de l'expert qui s'était fondé sur cette clause pour valoriser de manière égale les parts à proportion du nombre total de parts dans la société, que cette clause n'avait vocation qu'à s'appliquer au partage du boni de liquidation, la cour d'appel lui a ajouté une limitation qu'elle ne contient pas et, ainsi, en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble, le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

4°) Alors, toujours subsidiairement, par ailleurs que l'existence d'un usage suppose la constatation d'une pratique antérieurement suivie et ne peut résulter des seules déclarations d'une partie ou d'un tiers ; qu'en retenant, pour dire que l'expert avait commis une erreur grossière en retenant le principe d'une valeur égale des parts à proportion du nombre total de parts dans la société, qu'il était d'usage dans la société de tenir compte, pour l'évaluation des parts sociales des associés retrayants, du critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffre d'affaires apporté par chacun d'eux, dès lors, d'une part, que la société Evolis avocats et ses associés avaient adressé à l'expert le 2 juillet 2010 un dire aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... » et, d'autre part, que dans un courrier du 22 septembre 2009, le bâtonnier E... avait indiqué « en ce qui concerne la valorisation des parts, il est proposé qu'elle soit fixée sur les encaissements comme pour la répartition des résultats au sein de la société... », motifs impropres à caractériser une pratique antérieurement suivie et donc l'existence d'un usage, la cour d'appel a violé l'article 1135, devenu 1194, du code civil ;

5°) Alors, toujours subsidiairement, ensuite que l'existence d'un usage suppose la constatation d'une pratique antérieurement suivie, actuelle et générale ; qu'en retenant, pour dire que l'expert avait commis une erreur grossière, qu'il était d'usage dans la société de tenir compte, pour l'évaluation des parts sociales des associés retrayants, du critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffre d'affaires apporté par chacun d'eux, sans rechercher, comme elle y était invitée (concluions des exposants, spé. p. 20), si le retrait de M. A..., au même moment que celui de la société Q... et associés n'avait pas donné lieu à un rachat sur la valeur fixée par l'expert, à proportion du nombre de parts dans la société, sans qu'il soit tenu compte du critère tiré de la répartition inégalitaire des résultats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1135, devenu 1194, du code civil ;

6°) Alors, toujours subsidiairement, au surplus, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties telles qu'elles sont formulées dans leurs conclusions ; qu'en retenant, pour dire que l'expert avait commis une erreur grossière, que l'usage tenant à la prise en compte du caractère inégalitaire de répartition des résultats entre associés dans la valorisation des parts sociales de la société tiendrait d'un « usage indiscuté », cependant que la société Evolis et ses associés contestaient l'existence d'un tel usage, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

7°) Alors, toujours subsidiairement, de plus, que l'usage est supplétif de la volonté des parties et ne peut prévaloir que dans le silence de la convention ; qu'en retenant, pour dire que l'expert avait commis une erreur grossière, que le critère tiré de la répartition des bénéfices entre associés à proportion du chiffres d'affaire apporté par chacun d'eux s'imposait à l'expert chargé d'évaluer les parts sociales litigieuses au titre d'un prétendu usage relatif à l'évaluation, cependant qu'elle avait relevé que l'article 13 « Droits et obligations des associés » des statuts de la société prévoyait que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1135, devenu 1194 du code civil ;

8°) Alors, plus subsidiairement, enfin, que la renonciation suppose une volonté claire et non équivoque de renoncer ; qu'en opposant à la société Evolis avocats et à ses associés qu'ils avaient adressé à l'expert le 2 juillet 2010 un dire aux termes duquel ils précisaient « à notre sens, et ceci avait été accepté par tous les associés, ce mode de rémunération (fonction de la contribution individuelle de chaque associé à la valeur ajoutée de la société sur la période considérée, déterminée en termes d'encaissements) a des conséquences significatives sur la valorisation éventuelle des parts détenues par tel ou tel associé... », motif impropre à caractériser une volonté claire et non équivoque de renoncer à l'application de l'article 13 « Droits et obligations des associés » des statuts de la société qui prévoyait que chaque part donne droit à une fraction de l'actif social proportionnellement au nombre de parts existantes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil et le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.

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