23 octobre 2020
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 17/17989

Chambre 4-1

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1



ARRÊT AU FOND

DU 23 OCTOBRE 2020



N° 2020/238



Rôle N° RG 17/17989 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBIZH







EPIC RTM (RÉGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS





C/



[O] [CX]









Copie exécutoire délivrée le :



23 OCTOBRE 2020



à :



Me Béatrice DUPUY de l'AARPI LOMBARD / SEMELAIGNE / DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Vanessa DIDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



Me Clémence RICHARD, avocat au barreau de LYON





+ 1 copie Pôle Emploi



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du conseil de prud'hommes - formation de départage de MARSEILLE en date du 20 Septembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01947.





APPELANTE



EPIC RTM (RÉGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS ) demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Béatrice DUPUY de l'AARPI LOMBARD / SEMELAIGNE / DUPUY, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIME



Monsieur [O] [CX], demeurant [Adresse 1]



comparant en personne, assisté de Me Vanessa DIDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Clémence RICHARD, avocat au barreau de LYON











*-*-*-*-*





COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 14 Septembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA



Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2020.







ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Octobre 2020,



Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



***























































Monsieur [CX] a été engagé par l'établissement public industriel et commercial REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS par contrat à durée indéterminée à compter du 11 octobre 2010 en qualité de 'chef de projets domaine bâtiment', qualification 'chef d'entretien', agent de maîtrise, coefficient 360 de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs.



Les parties divergent quant aux perspectives d'évolution du salarié, ce dernier affirmant qu'il a été embauché dans le but de remplacer le responsable 'projet bâtiment et infrastructures', Monsieur [G], sur le point de partir à la retraite et la RTM affirmant qu'aucune promesse en ce sens n'a été faite, l'opportunité d'un passage cadre lors du concours qui serait ouvert étant simplement envisagée.



Au départ de Monsieur [G], la RTM a décidé de la fusion entre l'entité « grands projets et opérations bâtiment » et l'entité « projet bureau d'études », créant une nouvelle entité dénommée «opération infrastructures» dirigée par un ingénieur en bâtiment et/ou génie civil, statut cadre.

Un candidat externe, en la personne de Monsieur [Z], a été recruté à ce poste.



Ayant réclamé la requalification de son statut à plusieurs reprises, puis ayant candidaté sur ce poste, en vain, Monsieur [CX], demeurant affecté à la direction « installations fixes » dépendant du département « opération infrastructures », n'a pas obtenu non plus la revalorisation de sa prime d'ancienneté au regard du principe d'égalité de traitement avec les autres salariés et a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille.



A l'occasion de cette instance, dans son bordereau de communication de pièces, se trouvaient les bulletins de salaire de plusieurs salariés qui ont affirmé n'avoir remis aucun document à Monsieur [CX], lequel a été convoqué à un entretien préalable et devant le conseil de discipline, puis licencié par courrier du 28 décembre 2015 pour faute grave.



Par jugement du 20 septembre 2017, le conseil de prud'hommes a :

' dit le licenciement dépourvu de motif réel et sérieux,

' condamné la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à payer à [O] [CX] les sommes de :

*14'424,28 euros à titre de rappel de salaire,

*1 442,43 euros au titre des congés payés y afférents,

*16'597 euros à titre d'indemnité de préavis,

*1 659,71 euros au titre des congés payés y afférents,

' dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015,

' fixé la créance de [O] [CX] envers la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux sommes suivantes : (sic)

' condamné la RTM à payer à Monsieur [CX] les sommes de :

*30'428,04 euros à titre d'indemnité conventionnelle,

*35'000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*1500 € au titre des frais irrépétibles,

' dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du jugement,

' ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

' condamné d'office la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage perçues par Monsieur [CX] dans la limite des six premiers mois indemnisés,

' dit que le jugement sera notifié à la diligence du greffe à Pôle Emploi,

' rappelé que cette seule condamnation n'ouvrira droit à intérêts au taux légal qu'à compter de la signification du jugement à son débiteur par un huissier de justice,

' condamné la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à délivrer à Monsieur [CX] dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, un bulletin de salaire, le certificat de travail, l'attestation Pôle Emploi, le solde de tout compte, conformes au jugement,

' débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

' dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire des dispositions du jugement qui ne seraient pas de plein droit exécutoires par application de l'article R 1454-28 du code du travail,

' condamné la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux dépens de l'instance.





Par acte du 4 octobre 2017, la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS a interjeté appel de cette décision.

Monsieur [CX] a fait de même le 6 octobre suivant.



Une ordonnance de jonction des deux procédures ouvertes en cause d'appel a été rendue par le conseiller de la mise en état le 11 janvier 2018.




Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 13 décembre 2017, la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS demande à la cour de :

' réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de motif réel et sérieux, condamné la RTM à payer à Monsieur [CX] des sommes au titre de rappel de salaire et congés payés afférents, indemnité de préavis et congés payés afférents, indemnité conventionnelle de licenciement, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, frais irrépétibles, condamné la RTM à rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage perçues par Monsieur [CX], condamné la RTM sous astreinte à délivrer les documents afférents à la rupture, fixé la créance de Monsieur [CX] envers la RTM, dit que les sommes produiront intérêts avec capitalisation annuelle,

' confirmer le jugement entrepris sur le surplus,

statuant à nouveau

' débouter Monsieur [CX] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

à titre subsidiaire

' fixer le salaire de référence de Monsieur [CX] à la somme de 4 273,44 euros bruts,

' réduire les sommes sollicitées à de plus justes proportions,

' débouter Monsieur [CX] de ses demandes de dommages-intérêts pour inégalité de traitement, exécution déloyale et résistance abusive,

en tout état de cause

' condamner Monsieur [CX] à verser à la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 janvier 2018 , Monsieur [CX] demande à la cour de :

' requalifier son statut d'agent de maîtrise coefficient 360 en un statut cadre coefficient 390 à compter du 1er octobre 2011,

' revaloriser sa prime d'ancienneté à hauteur de 27 % à compter du 1er octobre 2011, 30 % à compter du 1er octobre 2013, puis 32 % à compter du 1er octobre 2015,

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à lui verser les sommes de :

*51'308,31 euros à titre de rappel de salaire afférant à la revalorisation de son statut et de sa prime d'ancienneté pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement,

*5 130,83 euros au titre des congés payés afférents,

*11'000 euros nets de CSG ' CRDS à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement,

*3500 euros nets de CSG ' CRDS à titre de dommages - intérêts pour exécution déloyale et résistance abusive,

' ordonner la communication par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à Monsieur [CX] de ses bulletins de salaire rectifiés pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement, ce , dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 50 € par jour de retard, la cour se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte,

' prononcer la nullité du licenciement de Monsieur [CX],

' ordonner la réintégration de Monsieur [CX] dans un délai de 48 heures à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 € par jour de retard, ainsi que la condamnation de la RTM au paiement des salaires afférents à la période comprise entre le licenciement et la réintégration,

à titre subsidiaire

si la cour ne fait droit qu'à une seule demande de Monsieur [CX] au titre de la requalification de son statut ou la revalorisation de son ancienneté :

' requalifier le statut agent de maîtrise coefficient 360 de Monsieur [CX] en un statut cadre coefficient 390 à compter du 1er octobre 2011,

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à lui verser les sommes de :

*14 424,28 euros à titre de rappel de salaire afférant à la revalorisation de son statut cadre pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement,

*1 442,43 euros au titre des congés payés y afférents,

*3 000 euros nets de CSG' CRDS à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale et résistance abusive,

' ordonner la communication par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à Monsieur [CX] de ses bulletins de salaire rectifiés pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement, ce, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 50 € par jour de retard, la cour se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte,

' revaloriser la prime d'ancienneté de Monsieur [CX] à hauteur de 27 % à compter du 1er octobre 2011, 30 % à compter du 1er octobre 2013, puis 32 % pour la période d'octobre 2015 au jour du licenciement,

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à lui verser les sommes de :

*27'975,60 euros à titre de rappel de salaire afférant à la revalorisation de sa prime d'ancienneté pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement,

*2 797,56 euros au titre des congés payés y afférents,

*6 000 euros nets de CSG ' CRDS à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement,

*3500 euros nets de CSG' CRDS à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale et résistance abusive,

' ordonner la communication par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à Monsieur [CX] de ses bulletins de salaire rectifiés pour la période du 1er juillet 2012 au jour de son licenciement, ce, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 € par jour de retard, la cour se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte,

' requalifier le licenciement de Monsieur [CX] pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux sommes de :

*16'597,11 euros bruts au titre de l'indemnité de préavis,

*1 659,71 euros au titre des congés payés y afférents,

*30'428,04 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

*70'000 euros nets de CSG -CRDS à titre de dommages - intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' ordonner la communication par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à Monsieur [CX] de ses documents de fin de contrat rectifiés dans un délai de huit jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 50 € par jour de retard, la cour se réservant le pouvoir de liquider l'astreinte,

en tout état de cause

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux entiers dépens.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2019.



L'affaire a été fixée à l'audience du 9 janvier 2020, et renvoyée pour cause de grève des avocats, à la demande des parties, à l'audience du 14 septembre 2020 à 9 heures.








MOTIFS DE L'ARRET



Sur la requalification:



La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS considère que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a fait droit à la demande de requalification présentée par Monsieur [CX], le motif que ce dernier était ingénieur diplômé et bénéficiait du statut cadre dans ses précédents emplois ne pouvant suffire dans la mesure où la requalification doit être appréciée au regard des fonctions réellement exercées. Elle fait valoir que les dispositions de l'annexe III chapitre VIII de la CCNTU invoquées par le salarié exigent plus que la seule possession du diplôme d'ingénieur pour la classification d'ingénieur adjoint ou de cadre adjoint, à savoir des missions de commandement ou de responsabilités délimitées dans les domaines techniques, d'exploitation, administratif ou de gestion sur délégation de pouvoir du supérieur.

L'établissement public industriel et commercial précise qu'aucune promesse de requalification n'a a été faite au salarié lors de son embauche -ce qui aurait été surprenant dans la mesure où elle ne connaissait rien des qualités professionnelles du candidat - , que cette allégation de Monsieur [CX] n'est nullement établie par ses propres dires, ni par l'attestation de Monsieur [G] qui a fait état d'une évolution subordonnée à deux conditions au moins. La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS rappelle que l'intéressé, lors du lancement du recrutement externe pour le poste de responsable 'opérations infrastructure', a accepté de postuler, conscient que rien n'était acquis pour lui au moment de son embauche sur son passage au statut cadre. L'appelante fait valoir également que Monsieur [CX] a souscrit en toute connaissance de cause un contrat pour un poste au statut non cadre, ce qui est le cas d'autres ingénieurs bénéficiant même d'un coefficient inférieur au sien, n' a pas remplacé Monsieur [G] sur son poste, ayant été orienté vers le département ' installations fixes' et ledit poste étant restructuré lors de la création du département ' opérations infrastructure ', n' a pas exercé de fonctions d'encadrement sur la période transitionnelle allant de novembre 2011 à juin 2012. Elle souligne que le salarié, qui n'a jamais eu de fonctions d'encadrement, qui se trouvait sous l'autorité de Monsieur [VE], puis à partir de juin 2012 sous celle de Monsieur [Z] et exerçait les missions d'un chef d'entretien, ne saurait valablement affirmer non plus que son poste lui a été subtilisé par Monsieur [Z], affecté sur un poste bien différent, comprenant entre autres les missions de Monsieur [G], mais pas seulement.



Monsieur [CX] affirme que lors de son embauche, il lui a été clairement dit qu'il était recruté dans le but de remplacer Monsieur [G] - raison pour laquelle il avait été choisi au vu de son niveau d'études supérieur à celui exigé par l'offre d'emploi- , qu'il obtiendrait le statut cadre à ce moment-là et qu'il avait accepté pour cette raison de l'abandonner temporairement alors qu'il en bénéficiait précédemment.

Il soutient qu'au mois de décembre 2011, il a sollicité le bénéfice du statut cadre qui lui avait donc été promis et n'a même pas reçu de réponse alors qu'il avait non seulement repris le poste du responsable du département « grand projets opérations bâtiment » en octobre 2011 suite à son départ à la retraite mais encore exercé les fonctions préalablement dévolues à Monsieur [H], responsable du bureau d'études, laissé vacant lors de sa mutation, chapeautant donc les salariés du bureau d'études. Il critique les attestations versées pour les besoins de la cause par la RTM qui a exercé des pressions sur certains salariés et rappelle qu'en tout état de cause, il était le seul à avoir les compétences pour superviser le travail du bureau d'études.

L'intimé relève que Monsieur [Z], recruté en juin 2012 pour assurer la supervision du nouveau regroupement de services, n'a pas pris les fonctions de Monsieur [G], que ses fonctions sont bien différentes et qu'il pouvait y postuler puisqu'il s'agissait d'une création de poste et que son employeur lui refusait toute revalorisation de son statut jusque-là. Il invoque le transfert des dossiers de Monsieur [G] et son statut de 'chef de projet infrastructure' dans l'organigramme pour affirmer qu'il a occupé les fonctions de Monsieur [G] et certaines fonctions de Monsieur [H] et relève donc du statut cadre. Il sollicite donc sa requalification au coefficient 390 à compter du 1er octobre 2011 puisqu'il en remplit en outre les conditions, étant titulaire du diplôme d'ingénieur de l'Ecole [4], était en charge de missions diverses en phase de conception et en phase de réalisation - liste de tâches que la RTM ne conteste pas- et connaissait les règles de sécurité, le cadre règlementaire de la loi MOP ( maîtrise d'ouvrages publics), ne recevait aucune directive, bénéficiait d'une liberté d'action, ne rendant compte qu'en fin de mois, et disposait d'une délégation de responsabilité de la part de son supérieur hiérarchique.

Il rappelle que la convention collective applicable ne prévoit pas l'obligation d'avoir du personnel placé sous sa responsabilité pour bénéficier du statut cadre, lequel n'est pas non plus subordonné au fait de n'avoir aucun supérieur hiérarchique, l'autonomie dans la gestion de ses dossiers étant en réalité primordiale.



Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure, de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.



Déterminer la classification dont relève un salarié suppose donc l'analyse de la réalité des fonctions par lui exercées, au vu des éléments produits par les parties, et leur comparaison avec la classification de la convention collective nationale applicable.



L'annexe III de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs prévoit en sa partie 'définition et classement hiérarchique des emplois' que le chef d'atelier ou chef d'entretien (52 b) est ' agent de maîtrise chargé de faire réaliser les programmes de travail de l'atelier ou du secteur d'entretien qui lui est confié. Il assure, dans le cadre de directives reçues, la mise au point détaillée, le lancement des phases successives de ce programme ; il a sous son autorité des équipes de professions différentes ; il suit la réalisation en contrôlant les résultats par rapport aux prévisions. Il participe à l'élaboration des programmes et à la définition des dispositions d'organisation correspondante' , et que l' ingénieur adjoint ou cadre adjoint (62) correspond à un 'ingénieur ou cadre qui est affecté à un poste de commandement en vue d'aider le titulaire, ou qui exerce par délégation de son supérieur hiérarchique des responsabilités délimitées dans les domaines techniques, d'exploitation, administratif ou de gestion'.



En l'espèce, il établi que Monsieur [CX] a répondu à une offre d'emploi d'agent de maîtrise et signé un contrat de travail stipulant clairement sa qualification de 'chef d'entretien', sa fonction de 'chef de projets domaines bâtiment', son coefficient de 360 et une prime individuelle de résultat 'maîtrise'. Comme le suggère un courriel de [K] [G] en septembre 2010 relativement au profil de l'intimé lors de son recrutement , ce dernier ' recherche un poste de chef de projet' 'salaire: demande entre 30 et 45 K€ ( cela correspond à 360)'.



Il n'est justifié d'aucune promesse faite à Monsieur [CX] par l'employeur à l'échéance du départ à la retraite de Monsieur [G] tendant à sa promotion au statut cadre, comme les attestations de Messieurs [R] et [G] l'établissent, ce dernier indiquant ' Mr [O]. [CX] , lors de son entretien, a demandé si à mon départ, il accéderait à mon coefficient, Mr [TF]. [R] a répondu qu'effectivement s'il prenait tous les dossiers dont j'avais la charge et que l'exécution de ces dossiers se déroulait correctement, il n'y aurait pas d'obstacle à cette évolution ', formulant ainsi deux conditions sine qua non.



Les dispositions de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs ne font pas prévaloir le diplôme obtenu par le salarié en tant que tel dans la détermination du statut de l'agent , la condition de diplôme jouant en cas d'embauche en qualité d'ingénieur ou cadre, ce qui n'est donc pas le cas de Monsieur [CX], engagé en qualité d'agent de maîtrise.



En ce qui concerne les fonctions réellement exercées , si Monsieur [CX] soutient qu'elles ont excédé celles mentionnées sur sa fiche de poste de 'chef de projets' au départ de Monsieur [G], son supérieur hiérarchique direct, et de Monsieur [H], responsable du bureau d'études, force est de constater que les éléments qu'il produit sont peu objectifs, consistant en ses propres écrits de réclamation, ou non probants de la réalité du travail accompli et des responsabilités assumées , les courriels de remerciement ou vantant les qualités professionnelles de l'intéressé ne déterminant pas dans quel cadre fonctionnel les collaborations s'étaient faites et avaient été appréciées.

L'intimé lui-même, dans son entretien en vue de son recrutement sur le poste de responsable 'opérations infrastructure' indiquait qu' 'il aimerait participer activement à la réorganisation en cours, gérer de gros projets, rationaliser les interventions, fédérer les équipes de conceptions et celle de réalisation, développer la communication interne et surtout, encadrer à nouveau une équipe. Il se sent quelque peu sous-employé aujourd'hui dans le poste qu'il occupe. Il aimerait avoir davantage de responsabilités, de reconnaissance aussi dit-il. Il travaille seul, sur de nombreuses opérations à droite et à gauche, et cela n'est pas lisible ce qui génère chez lui une certaine frustration.'



Au surplus, il est démontré que les missions du ' responsable projet bâtiment et infrastructure' exercées par Monsieur [G] ont été redistribuées rapidement au sein d'une nouvelle entité à la tête de laquelle l'intimé avait candidaté (fin 2011), en vain, Monsieur [Z] ayant été recruté.



Par ailleurs, si Monsieur [CX] produit des courriels le remerciant de ses interventions auprès du bureau d'études notamment, les attestations de [M] [FI], de [F] [J], de [N] [GX], dessinateurs du bureau d'études, et de [PC] [P], projeteur au sein de ce bureau, permettent de vérifier que d'octobre 2011 jusqu'au recrutement de Monsieur [Z], l'intimé faisait profiter de ses connaissances techniques et compétences professionnelles ses collègues, qui étaient sous l'autorité hiérarchique de Messieurs [X] et [VE], lesquels faisaient partie de la hiérarchie de transition au départ de Monsieur [H], responsable dudit bureau d'études.



Au vu de la réalité des fonctions exercées, la demande de requalification de Monsieur [CX] au statut cadre ne saurait par conséquent aboutir, l'intéressé n'ayant notamment pas pris en charge tous les dossiers de Monsieur [G].



Le jugement de première instance doit donc être infirmé de ce chef.





Sur l'inégalité de traitement:



La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS conteste que Monsieur [CX] soit le seul « chef de projets » non cadre, rappelle que les ingénieurs 'chefs de projets' ( Messieurs [D], [L] et [W]) ne sont pas cadres et ont le coefficient 320, comme Messieurs [TK], [T] et Mesdames [S] et [I], que d'autres sont 'chefs de projets' au coefficient 360 et n'ont pas le statut de cadre (commençant au coefficient 390) , que surtout l'intimé n'est pas dans la même situation que les cadres auxquels il se compare, lesquels ne sont pas tous 'chefs de projets', ou le sont en ayant acquis leur statut cadre avant d'être affectés sur leurs fonctions de 'chef de projets' ou ont été débauchés d'une entreprise assurant le transport de voyageurs en conservant leur statut cadre.

Elle conteste l'assertion selon laquelle Monsieur [CX] aurait quitté la SNCF et son statut cadre pour intégrer directement la RTM, puisque pendant une période de huit années avant son embauche, il travaillait à l'Institut [3]. Elle conclut à l'infirmation du jugement et au rejet de la demande de reclassification et de dommages-intérêts pour inégalité de traitement.



Monsieur [CX] soutient que son employeur lui a fait subir une différence de traitement avec les autres salariés, également 'chefs de projet', contrairement à l'article 18 de la convention collective applicable. Affirmant avoir repris au départ de Monsieur [G] les fonctions antérieurement exercées par lui, il devait bénéficier, comme lui, du statut cadre d'autant qu'il a repris également à sa charge certaines fonctions de Monsieur [B] et de Monsieur [V] dans les projets de réaménagement de la station Saint-Charles notamment. Il fait état de différents courriels montrant que le projet d'opérations d'aménagement des dépôts BHNS lui a été confié et au vu des différents bulletins de salaire qu'il produit et relève qu'il était le seul à ne pas bénéficier du salaire correspondant au statut cadre.

Ayant les fonctions de cadre, ayant bénéficié du statut de cadre dans ses précédentes fonctions au sein de la SNCF, il considère qu'aucun élément ne permettait de distinguer son traitement de celui de ses collègues, parfois moins diplômés et recrutés pourtant au statut cadre.





Il résulte du principe " à travail égal, salaire égal" que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.



Il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.



L'article 18 de la convention collective des réseaux de transports publics urbains de voyageurs prévoit que « les signataires reconnaissent le principe de non-discrimination en raison du sexe, de la situation de famille et s'engagent à le respecter notamment en matière de recrutement, d'avancement, de promotion, de conditions de travail et de rémunération ».



Monsieur [CX] se compare à Monsieur [B] et à Monsieur [V], ayant le statut cadre, à qui il aurait pris certaines des fonctions.

Or, non seulement, les missions et responsabilités de ces deux salariés ne sont pas comparables à celles exercées par Monsier [CX], au vu des pièces produites, mais encore, la note interne ayant pour expéditeur A. [V] et [O]. [CX] relativement au dépôt d'Arenc notamment ne permet pas objectivement de constater la reprise des dossiers du premier par l'intimé, le fait qu'il soit le rédacteur du compte rendu n'étant pas significatif à ce sujet, pas plus que le document relatif aux opérations d'aménagement de la station Saint-Charles, pas plus que le mail de [K] [G] en date du 9 mars 2011 annoté par l'intimé de façon manuscrite quant aux statut et coefficient 390 de ses collègues, ce constat ne suffisant pas à justifier d'une différence de traitement, en l'absence de toute donnée permettant de vérifier l'identité du travail accompli.



Il est établi au surplus, à la lecture de la convention de mise à disposition de Monsieur [V] auprès de la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole, que ce dernier , chargé de mission «spécialiste en matériels roulants », sous l'autorité hiérarchique du directeur de la mission 'renouvellement des rames du métro' n'était pas placé dans la même situation ni fonctionnelle, ni administrative que l'intimé.



Par ailleurs, Monsieur [CX] verse au débat un document intitulé 'pesage de poste de [O]. [CX]' sur lequel ne figure pas d'en-tête et dont le caractère objectif n'est pas démontré, d'autant qu'il est suivi d'un document intitulé 'opérations effectuées dans le cadre de mes fonctions'.



Il n'est pas contesté par ailleurs que Monsieur [Z], recruté en qualité de cadre, exerçait des missions dans un emploi hiérarchiquement supérieur à celui de Monsieur [CX]; aucune comparaison légitime ne saurait donc être faite avec ce salarié.



De même, il n'est pas valablement contesté que tous les 'chefs de projets', ingénieurs de formation, ne bénéficiaient pas du statut de cadre, ni du coefficient correspondant ( à savoir 390), les coefficients de onze des collègues ' chefs de projet' de Monsieur [CX] variant entre 320 et 360.



En l'état des différents éléments ( diplômes, fonctions et responsabilités) produits par la RTM relativement à chacun des salariés avec lesquels Monsieur [CX] se compare, il est établi que le travail fourni par ces salariés cadres n'était pas de valeur égale avec le sien et que la comparaison qu'il fait n'est par conséquent pas pertinente, d'autant que même les organigrammes dont l'intimé se prévaut placent son poste en-dessous de ceux de certains de ces collègues, en marge de leur positionnement ou à la hauteur d'autres 'chefs de projets' recrutés au coefficient 320 ou 360.



Les demandes présentées à ce titre doivent donc être rejetées, par confirmation du jugement entrepris.





Sur la prime d'ancienneté :



La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS fait valoir que Monsieur [CX], qui n'était pas placé dans la même situation que les autres salariés auxquels il se compare, n'était pas fondé à solliciter une quelconque revalorisation de sa prime d'ancienneté, ayant été recruté sans être débauché de la SNCF comme certains de ses collègues et après une très longue période d'emploi auprès d'une entreprise ne dépendant pas de la même convention collective. Elle soutient en outre que seuls les salariés cadres ont bénéficié des revalorisations prévues pour leur statut à hauteur au maximum de 22 % et que les demandes de Monsieur [CX] à ce titre sont infondées, puisqu'il ne peut prétendre à une qualification de cadre.



Monsieur [CX] rappelle que la convention collective applicable consacre le principe de l'égalité de traitement non seulement pour la rémunération mais aussi pour les conditions d'emploi, de travail, de formation et les garanties sociales accordées aux salariés. Il sollicite une requalification de son ancienneté à hauteur de 27 % pour la période d'octobre 2011 à septembre 2013, de 30 % pour la période d'octobre 2013 à septembre 2015 et de 32 % pour la période d'octobre 2015 au 31 décembre 2015, estimant que contrairement à d'autres salariés placés dans la même situation que lui, il n'a pas bénéficié des majorations idoines de son ancienneté, ayant vu son ancienneté calculée seulement sur les dispositions de l'article 21 qui prévoit des majorations portées à 12 % après cinq ans alors que d'autres de ses collègues ont bénéficié d'une majoration bien supérieure, sans que la note interne du 28 novembre 2008 invoquée par l'employeur justifie la situation.

Observant que de jeunes ingénieurs comme Monsieur [Z], employé anciennement chez Bouygues, sans expérience dans une des entreprises relevant de la convention collective des réseaux de transports publics de voyageurs, ont été recrutés avec une reprise d'ancienneté de 20 %, que Monsieur [U] a été recruté avec une reprise d'ancienneté de 15 % sans justifier d'expérience dans des entreprises relevant de la même convention collective, que Monsieur [IR] l'a été avec une reprise d'ancienneté de 20 %, alors qu'il était agent de maîtrise avant d'intégrer la RTM, l'intimé sollicite également la somme de 27'975,56 € à ce titre ainsi que les congés payés y afférents, celle de 6000 € à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement et celle de 3000 € en réparation de l'exécution déloyale du contrat de travail et de la résistance abusive de l'employeur qui a refusé de faire droit à ses nombreuses demandes en ce sens.



L'article 17 alinéa 4 de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs prévoit qu' 'en cas de réembauchage d'un salarié dans un délai de trois ans suivant son départ de l'entreprise, le temps passé antérieurement dans l'entreprise compte pour le calcul des droits liés à l'ancienneté'.



L'article 21 de ce texte conventionnel dispose que ' des majorations de salaires pour ancienneté appliquées au salaire de base à l'embauche de l'emploi occupé sont accordées au personnel d'après le tableau suivant :

- 3 p. 100 après 6 mois de stage ;

- porté à 7 % après 1 an (5e classe) ;

- porté à 10 % après 3 ans (4e classe) ;

- porté à 12 % après 5 ans (3e classe) ;

- porté à 14 % après 10 ans (2e classe) ;

- porté à 17 % après 15 ans (1re classe) ;

- porté à 20 % après 20 ans (hors classe) ;

- porté à 23 % après 25 ans (hors classe exceptionnelle).

Les majorations de salaires pour les cadres, d'une part, et les agents de maîtrise, techniciens et dessinateurs, d'autre part, font l'objet des dispositions particulières prévues par les annexes I et II à la présente convention.'



Il résulte par ailleurs de la note interne à la RTM du 28 novembre 2008 que ' l'ancienneté payée est calculée au premier jour du mois où l'agent est inscrit à l'effectif de l'entreprise', que cette règle générale peut être modifiée par des règles particulières 'en cas de contrat à durée indéterminée précédée d'un ou plusieurs contrats à durée déterminée avec ou sans coupure' mais que 'lorsqu'il y a eu une coupure supérieure à 3 ans entre les contrats, les périodes antérieures ne sont pas prises en compte (par assimilation à l'article 17 de la CNN)', que 'lorsqu'un agent est intégré dans l'entreprise par un contrat à durée indéterminée, la durée de l'ensemble des contrats qu'il a exécutés dans un ou plusieurs réseaux dépendant de la convention collective nationale des transports urbains de voyageurs ou à la RATP est récupérée pour le calcul de l'ancienneté payée, sous réserve qu'il n'y ait pas eu de licenciement disciplinaire ou coupure supérieure à 3 ans (par assimilation à l'article 17 de la CNN).'



Il a été vu que Monsieur [CX], recruté en qualité d'agent de maîtrise, ce qu'il avait accepté en renonçant à son statut antérieur de cadre - comme indiqué notamment dans son entretien de recrutement avec l'agence OXALIS - et exerçant effectivement les missions et fonctions de 'chef de projets' , statut agent de maîtrise, qui lui étaient dévolues dans sa fiche de poste, ne peut prétendre à l'ancienneté applicable au statut cadre qu'il revendique.



Par ailleurs, si certains de ses collègues ont bénéficié dès leur embauche d'une reprise d'ancienneté, force est de constater que la coupure de plus de trois ans dans sa carrière au sein d'un ou plusieurs réseaux dépendant de la convention collective des réseaux de transports urbains de voyageurs ne lui a pas permis d'en bénéficier également. En effet, il ne peut être contesté puisque cela ressort de son curriculum vitae que Monsieur [CX] a été recruté par la RTM , certes avec une expérience professionnelle d'ingénieur à la SNCF ( de 1997 à 2001), mais directement après une expérience de formateur au sein de l' Institut National de Plongée Professionnelle de 2002 à juin 2010, et donc après une coupure supérieure à trois ans pendant laquelle il a travaillé dans la formation de personnels spécialisés dans les opérations hyperbares, dans le génie civil des ouvrages portuaires et fluviaux notamment.



Par conséquent, Monsieur [CX] qui a bénéficié d'une prime d'ancienneté à hauteur de 7 % sur la période d'octobre 2011 à septembre 2013, à hauteur de 10 % sur la période d'octobre 2013 à septembre 2015, à hauteur de 12 % sur la période d'octobre 2015 à décembre 2015, conformément aux dispositions conventionnelles applicables à son statut, a été rempli de ses droits et doit être débouté de sa demande de revalorisation de la prime d'ancienneté et de rappel de salaire correspondant.



En l'absence de tout élément permettant de vérifier une quelconque exécution déloyale du contrat de travail ou une résistance abusive de l'employeur, la demande de dommages-intérêts doit être rejetée également.





Sur la nullité du licenciement:



La lettre de licenciement adressée le 28 décembre 2015 à Monsieur [CX] contient les motifs suivants, strictement reproduits :



'Nous donnons suite :

' à l'entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement réalisé le 8 décembre 2015 au cours duquel Monsieur [E] [WT] vous a assisté ;

' à l'instruction de votre dossier mené le 14 décembre 2015 ;

' et au Conseil de Discipline devant lequel vous avez été traduit le 15 décembre 2015 ;



Il en ressort que par courrier en date du 8 avril 2015, reçu par nos services le 9 avril 2015, votre conseil nous demandait de lui « transmettre le statut (cadre ou pas) des deux autres chefs de projets qui figurent dans l'organigramme, Messieurs [KF] et [V] ».



Par mail du 18 août 2015, notre avocat nous informait également que votre conseil formulerait à titre de demande provisionnelle en vue de l'audience de conciliation qui s'est déroulée le 28 septembre 2015, la communication des contrats de travail et des bulletins de salaire de Messieurs [U], [Z], [V], [KF] et [IR].



Aucune demande provisionnelle n'a été formulée en ce sens lors de l'audience de conciliation de même qu'aucune sommation de communiquer ne nous a été transmise.



Pourtant, le 19 novembre 2015 nous prenions connaissance des conclusions et pièces produites par votre conseil au soutien de vos prétentions.



Figuraient alors parmi vos pièces communiquées, les bulletins de salaire :

' de Monsieur [A] [Z] du mois de juillet 2012

' de Monsieur [C] [V] du mois de juillet 2012

' de Monsieur [LU] [IR] du mois de décembre 2013

' de Monsieur [CA] [KF] du mois de décembre 2013

' de Monsieur [Y] [U] du mois de mars 2015



Interrogés, les cinq agents se sont montrés très étonnés par la divulgation de leurs bulletins de paie dans la mesure où il ne vous ont pas fourni ces documents et ignoraient jusqu'alors leur utilisation en justice, contraire à leur volonté.



Vos fonctions ne vous permettent pas d'avoir accès à ces documents personnels et confidentiels.



C'est la raison pour laquelle une procédure disciplinaire a été engagée à votre encontre.

A cette occasion, vous nous avez indiqué avoir trouvé « fortuitement » lesdites copies de ces bulletins de salaire à proximité de la photocopieuse située sur votre lieu de travail et les avoir conservés.



Vos explications ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation sur les faits reprochés.



L'utilisation de man'uvres frauduleuses et déloyales pour obtenir ces documents et les utiliser à des fins personnelles constitue un manquement grave à vos fonctions qui non seulement, porte atteinte à l'intimité de la vie privée de nos salariés, mais qui plus est, rompt le lien de confiance qui nous unissait jusqu'alors.



En conséquence, nous décidons de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave.'



La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS soutient que Monsieur [CX] ne peut valablement prétendre qu'il aurait été licencié pour le seul motif d'avoir engagé une procédure devant le conseil de prud'hommes. Elle souligne que si tel était le cas, elle licencierait pour faute grave tous ses agents qui régulièrement engagent des procédures contre elle, se plaignant de reclassement fautif, du non-respect des grilles de classification, de faits de harcèlement moral, de modification de leur contrat de travail, de sanctions disciplinaires injustifiées' Elle présente un listing des dossiers contentieux établi le 27 juin 2016 faisant apparaître 105 dossiers de salariés qui ont été en contentieux avec elle et qui sont restés dans ses effectifs. C'est donc à juste titre, selon elle, que le conseil de prud'hommes a rejeté la demande de nullité du licenciement, le motif de la rupture du contrat de travail étant clair et étranger à la saisine du conseil de prud'hommes de Marseille.



Monsieur [CX] invoque le principe d'égalité des armes résultant de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'opposant à ce que l'employeur utilise son pouvoir disciplinaire pour imposer aux salariés les conditions de règlement du procès qui les oppose. Considérant avoir été licencié du fait d'avoir exercé son droit d'agir en justice, liberté fondamentale qui doit être protégée, Monsieur [CX] demande que son licenciement soit considéré comme entaché de nullité, et partant, sa réintégration ainsi qu'un rappel du salaire correspondant à la période comprise entre le licenciement et la réintégration.



Il est manifeste que c'est à l'occasion de l'action en justice de Monsieur [CX] que la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS a constaté notamment la production sans autorisation de bulletins de salaire de cinq de ses salariés, constitutive selon elle de manquements de l'intimé à ses obligations contractuelles et l'a licencié. Les motifs du licenciement sont suffisamment explicites pour que les circonstances de la découverte des bulletins de salaire litigieux - et donc d'une fraude induite par l'employeur - ne soient pas confondues avec eux.



La demande doit donc être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.







Sur la légitimité du licenciement :



La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS rappelle que le licenciement de Monsieur [CX] est intervenu, conformément à l'article 51 de la convention collective applicable, après une procédure disciplinaire régulière devant le conseil de discipline , composé de façon neutre et impartiale, et pour des motifs très précis, à savoir la fraude par laquelle il a obtenu des documents qu'il n'était pas en droit d'avoir, dans l'exercice de son contrat de travail et à l'occasion de sa présence à son poste, faute qui devait légitimement être sanctionnée, eu égard à la perte de confiance et à l'atteinte à la vie privée de ses collègues en découlant, l'intéressé ne pouvant, eu égard aux circonstances factuelles tenant à ses demandes de communication des bulletins de salaire en juillet 2015, à la date desdits documents qui n'avaient aucune raison d'être oubliés ou égarés en décembre 2015 sur une photocopieuse à proximité du service de Monsieur [CX] qui exerçait ses fonctions dans un autre bâtiment, être cru en ses allégations. Elle rappelle qu'une enquête a été nécessaire auprès des cinq salariés concernés, que pendant ce temps d'enquête, elle a fait en sorte que l'intéressé ne puisse réitérer ce type d'agissements et ne constitue pas un danger pour l'entreprise, pour expliquer l'absence de mise à pied conservatoire, laquelle ne joue en rien selon elle sur la validité d'un licenciement pour faute grave.

La REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS sollicite donc que le licenciement soit déclaré fondé et les demandes du salarié rejetées.

À titre subsidiaire, elle demande que les sommes allouées soient limitées de manière très substantielle, à savoir - sur la base d'un salaire brut mensuel moyen de 4273,44 euros- à hauteur de 12'820,32 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de 1 282,03 euros au titre des congés payés afférents, de 10'576,76 euros au titre de l'indemnité de licenciement et de 1057,77 euros au titre des congés payés afférents. Relevant le caractère exorbitant des dommages-intérêts réclamés, à savoir 16 mois de salaire, alors que le salarié se contente de procéder par voie d'affirmation sans justifier de son préjudice, la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS fait valoir que Monsieur [CX] bénéficiait d'une ancienneté de 5 ans et qu'à défaut de justifier d'une recherche active d'emploi et de sa situation professionnelle actuelle, il serait tout au plus fondé à obtenir une indemnité de 25'640,64 euros (ou 33'194,22 euros si la cour devait faire droit, par extraordinaire, à la demande de requalification de son statut).



Monsieur [CX] soutient pour sa part qu'il avait le droit de produire les bulletins de salaire de ses collègues de travail dans le cadre de son action en justice, leur production étant strictement nécessaire à son action en vue d'obtenir la revalorisation de son statut et de sa prime d'ancienneté notamment, bulletins qu'il avait fortuitement trouvés à proximité de la photocopieuse située sur son lieu de travail et à laquelle il avait accès dans le cadre de ses fonctions. Il conteste les man'uvres frauduleuses et déloyales dont l'accuse son employeur, sans même en faire état précisément . Il explique que le photocopieur dans lequel il a trouvé les bulletins de salaire était installé à proximité du secrétariat des directions techniques et matériels roulants - recevant les courriers et documents destinés aux agents relevant de ces deux directions - sur le site RTM de la Rose dont dépendent ou ont dépendu les cinq salariés [Z], [U], [KF] , [V] et [IR], que cet appareil a connu dans ses multiples fonctionnalités ( photocopieur, scanner et imprimante couleur en lien avec le réseau informatique général) divers dysfonctionnements récurrents et des retards d'impression de plusieurs heures que l'entreprise n'a aucunement expliqués et qui se résolvaient par l'impression successive de l'ensemble des documents en attente.

Il rappelle avoir toujours réclamé la production par son employeur des bulletins de salaire de ses collègues et avoir formé sa demande de communication de ces pièces devant le bureau de jugement en raison de l'incompétence du bureau de conciliation pour l'ordonner. Estimant la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS incapable de prouver ni même d'exposer quelles sont les man'uvres déloyales et frauduleuses qu'elle lui reproche , et incapable également de prouver qu'il aurait exercé ses fonctions dans un autre bâtiment, Monsieur [CX] considère son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'évocation de griefs vagues ou d'éléments inconsistants de la part de l'employeur ne pouvant suffire.

Il rappelle aussi que la perte de confiance ne justifie pas un licenciement, que la production des bulletins de salaire litigieux n'apportait aucune atteinte à la vie privée de ses collègues dans la mesure où il a pris le soin de les rendre non identifiables avant leur production.

Monsieur [CX] invoque également l'article 51 de la convention collective applicable et la composition du conseil de discipline au sein duquel auraient dû siéger des membres élus, sans lien hiérarchique entre eux ou avec les salariés dont les bulletins de salaire ont été produits , neutres et impartiaux contrairement à Monsieur [RW] qui avait eu un différend professionnel avec lui. Il fait valoir que ce conseil de discipline n'a pas été consulté et n'a pas rendu un avis selon une procédure conforme à la convention collective et que son licenciement est donc également dépourvu de cause réelle et sérieuse de ce fait.

Invoquant un salaire mensuel moyen de 5532,37 euros si la cour fait droit à sa demande de requalification de son statut en statut cadre et à sa demande de prime d'ancienneté, Monsieur [CX] réclame un préavis de trois mois à hauteur de 16'597,11 euros, les congés payés y afférents ainsi qu'une indemnité de licenciement de 30'428,04 euros. Étant toujours à la recherche d'un emploi à durée indéterminée, il demande en outre 70'000 € de dommages-intérêts pour ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.



En l'espèce, il n'est pas contestable que Monsieur [CX] a produit cinq bulletins de salaire concernant ses collègues dans le cadre de l'instance prud'homale, alors que ses demandes de communication de pièces n'avaient pas été couronnées de succès.



Force est de constater, au vu des pièces produites par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS - à qui incombe la preuve de la réalité, de l'imputabilité et de la gravité des faits - qui se limitent d'une part à des attestations de chacun des salariés concernés qui n'ont pas remis ces pièces à l'intimé, ne lui ont pas donné l'autorisation de les produire et s'offusquent de ces agissements et d'autre part aux courriels d'excuses adressés à chacun d'eux par Monsieur [CX], que les man'uvres frauduleuses et déloyales pour obtenir ces documents et les utiliser à des fins personnelles ne sont ni démontrées, ni même décrites.



Le fait que Monsieur [CX] ait eu besoin de ces documents pour son action prud'homale et n'y ait pas eu accès dans le cadre de ses fonctions ne peut suffire à établir la fraude alléguée dans l'obtention de ces pièces, d'autant que la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS n'explique nullement la nature des incidents survenus épisodiquement sur les photocopieurs et autres applications, ni les conséquences des opérations de maintenance sur les équipements réseaux (dont le salarié démontre l'existence par les courriels de l'employeur en date des 14 et 23 décembre 2015).



Si le caractère fautif de l'appropriation desdits bulletins de salaire et de leur production en justice sans autorisation est indéniable, il ne justifiait pas, comme l'a relevé le jugement de première instance, le prononcé d'un licenciement, qui plus est pour faute grave, en l'absence de tout antécédent disciplinaire du salarié concerné.



Eu égard à son ancienneté et à sa classification, Monsieur [CX] doit donc bénéficier d'une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 12'820,32€, des congés payés y afférents ainsi que d'une indemnité de licenciement de 10'576,76 €.



Tenant compte de l'âge du salarié (51 ans) au moment de la rupture, de son ancienneté (cinq ans et deux mois ), de son salaire moyen mensuel brut (soit 4273,44 €, eu égard au rejet des demandes de revalorisation et de reclassification au statut cadre), des justificatifs de sa situation de demandeur d'emploi, bénéficiaire d'allocations d'aide au retour à l'emploi jusqu'au 31 décembre 2017 et d'un stage effectué de mai à décembre 2019, il y a lieu de fixer à 30 000 € les dommages et intérêts réparant ce licenciement sans cause réelle et sérieuse, par application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige.





Sur la remise de documents:



La remise d'une attestation Pôle Emploi, d'un certificat de travail et d'un bulletin de salaire rectificatif, conformes à la teneur du présent arrêt, s'impose sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte, aucun élément laissant craindre une résistance de la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS n'étant versé au débat.





Sur le remboursement des indemnités de chômage:



Les dispositions de l'article L 1235-4 du code du travail permettent, dans le cas d'espèce, le licenciement de Monsieur [CX] étant sans cause réelle et sérieuse, d'ordonner le remboursement par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS des indemnités chômage perçues par l'intéressé, dans la limite de six mois d'indemnités.



Le présent arrêt devra, pour assurer son effectivité, être porté à la connaissance de Pôle Emploi, conformément aux dispositions de l'article R 1235-2 alinéas 2 et 3 du code du travail.





Sur les frais irrépétibles et les dépens:



L'équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles, de faire application de l'article 700 du code de procédure civile également en cause d'appel et d'allouer à ce titre la somme de 1 500 € à Monsieur [CX].



L'employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par confirmation du jugement entrepris, et d'appel.

















PAR CES MOTIFS



La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



Confirme le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives à la reclassification, au rappel de salaire, aux montants de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement et des dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,



Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,



Condamne la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à payer à [O] [CX] les sommes de :

- 12'820,32 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 282,03 € au titre des congés payés y afférents,

- 10 576,76 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Ordonne la remise par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS à [O] [CX] d'une attestation Pôle Emploi, d'un certificat de travail et d'un bulletin de salaire récapitulatif, conformes à la teneur du présent arrêt, au plus tard dans le mois suivant son prononcé,



Ordonne le remboursement par la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage payées à Monsieur [CX] dans la limite de six mois,



Ordonne l'envoi par le greffe d'une copie certifiée conforme du présent arrêt, par lettre simple, à la Direction Générale de Pôle Emploi,



Rejette les autres demandes des parties,



Condamne la REGIE DES TRANSPORTS METROPOLITAINS aux dépens d'appel.







LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Ghislaine POIRINE faisant fonction

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