4 septembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-14.343

Chambre sociale - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:SO10853

Texte de la décision

SOC.

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 septembre 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10853 F

Pourvois n° N 18-14.343
et R 18-15.841 JONCTION



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

I - Vu le pourvoi n° N 18-14.343 formé par :

1°/ la société Monoprix exploitation, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ la société Monoprix exploitation, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2018 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1 - chambre sociale), dans le litige les opposant :

1°/ à M. J... R..., domicilié [...] ,

2°/ au Défenseur des droits, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation ;

II - Vu le pourvoi n° R 18-15.841 formé par M. J... R...,

contre le même arrêt rendu entre les mêmes parties ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 juin 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Grivel, avocat général, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de Me Carbonnier, avocat de la société Monoprix exploitation, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. R..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du Défenseur des droits ;

Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu la connexité, joint les pourvois n° N 18-14.343 et R 18-15.841 ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation du pourvoi n° N 18-14.343 et le moyen unique de cassation du pourvoi n° R 18-15.841, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;


REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES à la présente décision


Moyens produits au pourvoi n° N 18-14.343 par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour la société Monoprix exploitation

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que la SAS Monoprix Exploitation a manqué à son obligation de réentraînement au travail et condamné la SAS Monoprix Exploitation à payer à M. R... la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice ainsi causé ;

AUX MOTIFS QUE « L'article L. 5213-5 du Code du travail dispose que tout établissement ou groupe d'établissements appartenant à une même activité professionnelle de plus de cinq mille salariés assure, après avis médical, le réentraînement au travail et la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés. L'article R. 5213-22 du Code du travail précise que le réentraînement au travail prévu à l'article L. 5213-5 a pour but de permettre au salarié qui a dû interrompre son activité professionnelle à la suite d'une malade ou d'un accident, de reprendre son travail et de retrouver après une période de courte durée son poste de travail antérieur ou, le cas échéant, d'accéder directement à un autre poste de travail. M. R... expose qu'il aurait souhaité, en raison de son handicap, pouvoir bénéficier d'un réentraînement au travail et d'une rééducation professionnelle ; qu'antérieurement à son licenciement, il a pu bénéficier d'une formation en anglais de 195 heures en 2010, financée par le DIF, et d'un Diplôme universitaire de perfectionnement à la gestion des affaires DPGA à la fin de l'année 2011, financé par la mission Handicap de la société, l'AGEFIPH et le DIF ; que ce DPGA devait lui permettre d'accéder à la formation en Master 2 "Administration des entreprises" qui devait débuter le 15 mai 2012 mais à laquelle il n'a pas pu participer en raison de son licenciement ; que la SAS Monoprix Exploitation ne justifie donc pas avoir exécuté son obligation de réentraînement postérieurement à la constatation de son inaptitude. Il sollicite l'allocation de la somme de 50000 € à titre de dommages et intérêts. La SAS Monoprix Exploitation rappelle les diverses mesures mises en oeuvre pour favoriser le maintien dans l'emploi de M. R... de son embauche jusqu'à la rupture de son contrat et elle soutient avoir respecté les dispositions de l'article L. 5213-6 du Code du travail avant la déclaration d'inaptitude du 18 janvier 2012. Elle estime qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir poursuivi ces aménagements à la suite de cette décision et qu'elle s'est toujours conformée aux préconisations de la SAMETH et de la Médecine du travail qui n'ont jamais recommandé des mesures de réentraînement au travail. Il est constant que M. R... bénéficiait du statut de travailleur handicapé et que l'employeur en avait connaissance. La cour rappelle que la déclaration d'inaptitude définitive du salarié à son poste antérieur par le médecin du travail n'est pas de nature à libérer l'employeur de son obligation de réentraînement ou de rééducation professionnelle dès lors que cette obligation a pour but de permettre au salarié d'accéder à un autre poste de travail. Elle ne se confond pas avec celle résultant de l'article L. 1226-10 du Code du travail, son inobservation étant susceptible de causer un préjudice distinct que le juge doit réparer. Il est démontré par la SAS Monoprix Exploitation qu'elle a aménagé le poste de travail de M. R... à deux reprises en 1996 et en 2009, qu'elle lui a accordé au mois de juin 2008 un congé de formation professionnelle, qu'elle a ensuite permis au salarié de reprendre sa formation dans le cadre d'un cycle de perfectionnement à la gestion des affaires qui a débouché sur l'obtention du DPGA à la fin de l'année 2011, et que le salarié a également bénéficié de cours d'anglais de septembre à décembre 2010. Mais il apparaît que postérieurement à la déclaration de son inaptitude, le 7 février 2012, l'employeur ne justifie pas avoir exécuté son obligation de réentraînement, carence d'autant plus regrettable que l'obtention par le salarié du DPGA à la fin de l'année 2011 lui permettait d'accéder à un Master 2 Administration des entreprises devant débuter au mois de mai 2012, formation à laquelle il n'a pu participer du fait de son départ du groupe Monoprix, puis d'accéder directement à un autre poste de travail au sein du groupe (pièces n° 84, 92 et 93 du salarié). Au demeurant, ce cursus avait été encouragé par l'employeur dès l'année 2008 avec le concours du médecin du travail et de la SAMETH (pièce n° 5 : courrier de la direction de Monoprix en date du 17 juin 2008 "Ce congé est destiné à vous permettre de suivre une formation diplômante, le DPGA à Bordeaux 4 et de continuer en octobre 2009, sur un master toujours à Bordeaux 4" ; pièce n° 7 : courrier de la SAMETH "Pour accéder à des postes sans manutentions, cette formation DPGA est une première étape indispensable pour accéder à de nouveaux postes (sans manutentions) avec une qualification supérieure, auprès de la Direction des Ventes de Monoprix). Le manquement de l'employeur à son obligation de réentraînement a ainsi limité les possibilités de reclassement de M. R... et lui a causé un préjudice qui doit être réparé par l'allocation de la somme de 10 000,00 € à titre de dommages et intérêts » ;

1°) ALORS QUE l'admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les titulaires des diplômes sanctionnant les études de premier cycle ainsi qu'à ceux qui peuvent bénéficier des dispositions de l'article L. 613-5 du code de l'éducation ou des dérogations prévues par les textes réglementaires ; que ne comptent pas parmi les bénéficiaires de ces dispositions et dérogations les titulaires d'un diplôme universitaire, c'est-à-dire d'un diplôme qui, à la différence des diplômes de licence et de master, est propre à une université ;

Qu'en l'espèce, pour retenir que la SAS Monoprix Exploitation avait manqué à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a considéré que, postérieurement à la déclaration d'inaptitude de M. R..., le 7 février 2012, la SAS Monoprix Exploitation ne justifiait pas avoir exécuté son obligation de réentraînement, avant d'expliquer, plus précisément, que M. R... avait obtenu un diplôme de perfectionnement à la gestion des affaires à la fin de l'année 2011 et que ce diplôme lui aurait permis d'accéder au master 2 administration des entreprises mais qu'il n'avait pu s'y inscrire du fait de son licenciement, quand un diplôme universitaire ne peut donner accès à une formation de master 2 et que, par conséquent, cette formation n'aurait pas pu être suivie par M. R... quand bien même il n'aurait pas été licencié ;

Qu'en se déterminant ainsi, par un motif impropre à caractériser le manquement par la SAS Monoprix Exploitation à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 5213-5 et R. 5213-22 du code du travail, pris dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, ensemble l'article L. 612-6 du code de l'éducation ;

2°) ALORS QUE si tout établissement ou groupe d'établissements appartenant à une même activité professionnelle de plus de cinq mille salariés assure, après avis médical, le réentraînement au travail et la rééducation professionnelle de ses salariés malades et blessés, cette obligation prend fin avec la rupture du contrat de travail ;

Qu'en l'espèce, pour retenir que la SAS Monoprix Exploitation avait manqué à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a considéré que, postérieurement à la déclaration d'inaptitude de M. R..., le 7 février 2012, la SAS Monoprix Exploitation ne justifiait pas avoir exécuté son obligation de réentraînement, en soulignant le fait que le master 2 administration des entreprises convoité par M. R... devait débuter au mois de mai 2012, après pourtant avoir constaté que M. R... avait été licencié le 20 avril 2012, c'est-à-dire avant que ne commence cette formation ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 5213-5 et R. 5213-22 du code du travail, pris dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

3°) ALORS QUE, si la déclaration d'inaptitude du salarié à son poste antérieur par le médecin du travail n'est pas de nature à libérer l'employeur de son obligation de réentraînement, l'exécution de cette obligation, qui a pour but de permettre au salarié d'accéder à un autre poste de travail, ne peut intervenir qu'avant l'exécution de l'obligation de reclassement ;

Qu'en l'espèce, pour retenir que la SAS Monoprix Exploitation avait manqué à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a considéré que, postérieurement à la déclaration d'inaptitude de M. R..., le 7 février 2012, la SAS Monoprix Exploitation ne justifiait pas avoir exécuté son obligation de réentraînement, après pourtant avoir relevé, d'une part, que celle-ci avait exécuté cette obligation pendant de longues années de manière continue, en accordant à son salarié, au mois de juin 2008, un congé de formation professionnelle, en lui permettant de reprendre sa formation dans le cadre d'un cycle de perfectionnement à la gestion des affaires ayant débouché sur l'obtention du diplôme de perfectionnement à la gestion des affaires à la fin de l'année 2011, et en lui faisant bénéficier de cours d'anglais de septembre à décembre 2010 et, d'autre part, qu'à compter du 7 février 2012, la SAS Monoprix Exploitation avait recherché à reclasser M. R..., de sorte que celle-ci avait tout mis en oeuvre d'abord pour réentraîner M. R... au travail puis pour le reclasser, et ce, afin de satisfaire à ses obligations d'employeur ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 5213-5 et R. 5213-22 du code du travail, pris dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

4°) ALORS QUE, pour retenir que la SAS Monoprix Exploitation avait manqué à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a affirmé que, postérieurement à la déclaration d'inaptitude de M. R..., le 7 février 2012, la SAS Monoprix Exploitation ne justifiait pas avoir exécuté son obligation de réentraînement en soulignant le fait que le cursus universitaire poursuivi par M. R... avait été encouragé par la SAS Monoprix Exploitation dès l'année 2008 ;

Qu'en se déterminant par un motif impropre à caractériser le manquement par la SAS Monoprix Exploitation à son obligation de réentraînement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 5213-5 et R. 5213-22 du code du travail, pris dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que M. R... a été victime de discrimination en raison de son état de santé et de son handicap et condamné la SAS Monoprix Exploitation à payer à M. R... la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice ainsi causé, d'avoir prononcé la nullité du licenciement de M. R... et condamné la SAS Monoprix Exploitation à payer à M. R... la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la nullité du licenciement, d'avoir condamné la SAS Monoprix Exploitation à payer à M. R... la somme de 3 870 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et d'avoir dit que les indemnités allouées seraient productives d'intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QU'« En application de l'article L. 1132-1 du Code du travail, "(...) Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap". L'article L. 1133-3 du Code du travail dispose cependant que "Les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du Titre IV du Livre II en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées". Aux termes de l'article L. 1134-1 du Code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions susvisées, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. L'article L. 5213-6 du Code du travail dispose : "Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, l'employeur prend, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1° à 4° et 9° à 11° de l'article L. 5212-13 d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. Ces mesures sont prises sous réserve que les charges consécutives à leur mise en oeuvre ne soient pas disproportionnées, compte tenu de l'aide prévue à l'article L. 5213-10 qui peuvent compenser en tout ou en partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. Le refus de prendre des mesures au sens du premier alinéa peut être constitutif d'une discrimination au sens de l'article L. 1133-3". L'employeur est ainsi tenu d'envisager toutes les solutions pour reclasser le salarié. S'agissant d'un travailleur handicapé, cette obligation est d'autant plus étendue que l'employeur se trouve dans l'obligation de mettre en place les mesures appropriées afin de permettre le maintien du salarié dans un emploi correspondant à ses qualifications, dès lors que ces mesures n'entraînent pas une charge disproportionnée. En l'espèce, il est jugé ci-dessus que l'employeur a manqué à son obligation de réentraînement dont l'exécution complète aurait favorisé le reclassement de M. R... et lui aurait permis de prétendre à accéder directement à un autre emploi au sein du Groupe. Il apparaît par ailleurs que la SAS Monoprix Exploitation n'a pas entrepris des recherches loyales et sérieuses en vue de reclasser M. R.... En effet, alors que, comme rappelé ci-dessus, M. R... avait entrepris avec succès à compter de 2008 une formation qui devait à terme lui permettre d'accéder à des postes supérieurs à la Direction des ventes de Monoprix, et que la SAMETH avait attiré l'attention de l'employeur sur son cas dès le 15 décembre 2011 (pièce n° 52 : "M. R... a un profil intéressant car il vient juste de terminer avec succès son master en gestion des affaires (DPGA), il doit être possible de coordonner ses nouvelles compétences avec son maintien au sein de Monoprix"), la SAS Monoprix Exploitation n'a pas fait état de ce cursus et du diplôme obtenu dans le mail collectif adressé à certaines entreprises du groupe en vue de son reclassement, ce mail indiquant seulement que le salarié travaille en tant que Responsable Rayons Alimentations, affecté au rayon fruits et légumes, et qu'il est reconnu en tant que travailleur handicapé (pièce n° 33 de l'employeur). La cour relève également sur ce point que le manque de loyauté et de sérieux des recherches de reclassement est confirmé par le fait que l'employeur lui a demandé le 2 mars 2012 de lui communiquer son curriculum vitae actualisé, soit près d'un mois après l'envoi du mail collectif aux entreprises du groupe, et que si M. R... ne s'est pas rendu le 5 avril 2012 à un rendez-vous aux Galeries Lafayette de Paris, c'est probablement parce qu'il avait reçu un courrier de son employeur daté du 27 mars 2012 lui indiquant qu'il n'avait actuellement aucun poste de reclassement à lui proposer et qu'il se voyait par conséquent dans l'obligation d'envisager son licenciement, ce courrier étant suivi d'une lettre de convocation à un entretien préalable à une mesure de licenciement datée du 5 avril 2012, jour où aurait dû avoir lieu l'entretien aux Galeries Lafayette de Paris... (Pièces n° 22 et 23 du salarié). Ces éléments traduisent le refus de la SAS Monoprix Exploitation de se soumettre aux préconisations de la médecine du travail et de trouver un poste de reclassement compatible avec l'état de santé de M. R..., et ce alors que le salarié avait démontré son désir et ses capacités d'évolution et que les mesures à mettre en oeuvre pour permettre son reclassement ne présentaient pas une charge disproportionnée compte tenu de la taille du Groupe auquel appartient la SAS Monoprix Exploitation et des aides susceptibles d'être perçues. Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour constate que la SAS Monoprix Exploitation n'a pas respecté ses obligations de réentraînement et de reclassement à l'égard de M. R... et a, ce faisant, refusé de prendre les mesures appropriées à son état de santé et à son handicap en violation avec l'obligation prévue à l'article L. 5213-6 du Code du travail. La SAS Monoprix Exploitation ne démontre pas que ces manquements et le licenciement pour inaptitude aient été justifiés par des raisons objectives, nécessaires et appropriées. En conséquence, la cour juge que le licenciement de M. R... est nul pour être discriminatoire du fait de son état de santé et de son handicap. Le préjudice résultant de la discrimination doit être réparé par l'allocation de la somme de 10 000,00 € à titre de dommages et intérêts. [
] Le licenciement de M. R... est à la fois dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et nul en raison de son caractère discriminant. Les demandes de M. R... n'étant pas hiérarchisées dans ses conclusions et les explications de son conseil, la cour doit prononcer la nullité du licenciement. Le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, qui ne peut comprendre le montant des salaires qu'il aurait pu percevoir jusqu'à son admission à la retraite s'il était resté en activité. M. R... était âgé de 46 ans à la date du licenciement et avait presque 21 ans d'ancienneté dans l'entreprise. Son salaire mensuel brut était de 1 935 €. Il ne justifie que partiellement de sa situation postérieurement au licenciement (pièces n° 113 et 121). Compte tenu de ces éléments d'appréciation, de son statut de travailleur handicapé et des circonstances du licenciement, il y a lieu de lui allouer la somme de 50 000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture illicite du contrat de travail. En application de l'article L. 1234-5 du Code du travail, M. R... a également droit à une indemnité compensatrice de préavis d'une durée de deux mois, soit 3 870,00 € » ;

1°) ALORS QUE, pour dire que le licenciement de M. R... est nul pour être discriminatoire du fait de son état de santé et de son handicap, la cour d'appel a, en substance, retenu que la SAS Monoprix Exploitation n'avait pas respecté ses obligations de réentraînement et de reclassement à l'égard de M. R... et qu'elle n'avait pas non plus procédé, de manière loyale et sérieuse, à des recherches de reclassement, et que, ce faisant, elle avait refusé de prendre les mesures appropriées à l'état de santé et au handicap de M. R... ;

Qu'en se déterminant par ces motifs impropres à caractériser une discrimination en raison de l'état de santé ou du handicap de M. R..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1133-3 et L. 5213-6 du même code ;

2°) ALORS, subsidiairement, QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce et s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ;

Qu'en l'espèce, pour dire que le licenciement de M. R... est nul pour être discriminatoire du fait de son état de santé et de son handicap, la cour d'appel a rappelé avoir jugé que la SAS Monoprix Exploitation a manqué à son obligation de réentraînement dont l'exécution complète aurait favorisé le reclassement de M. R... et lui aurait permis de prétendre à accéder directement à un autre emploi au sein du groupe ;

Que la cassation à intervenir de l'arrêt attaqué en ce qu'il a jugé que la SAS Monoprix Exploitation a manqué à son obligation de réentraînement au travail entraînera l'annulation du chef de l'arrêt ayant jugé que M. R... a été victime de discrimination en raison de son état de santé et de son handicap et prononcé la nullité du licenciement de M. R..., en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'entretien préalable a pour objet de permettre à l'employeur d'indiquer les motifs de la décision qu'il envisage et de recueillir les explications du salarié ;

Qu'en l'espèce, pour dire que la SAS Monoprix Exploitation avait manqué loyauté et de sérieux dans ses recherches de reclassement, la cour d'appel a relevé que, si M. R... ne s'était pas rendu le 5 avril 2012 à un rendez-vous aux Galeries Lafayette de Paris, c'est probablement parce qu'il avait reçu un courrier de son employeur daté du 27 mars 2012 lui indiquant qu'il n'avait actuellement aucun poste de reclassement à lui proposer et qu'il se voyait par conséquent dans l'obligation d'envisager son licenciement et que ce courrier avait été suivi d'une lettre de convocation à un entretien préalable à une mesure de licenciement datée du 5 avril 2012, jour où aurait dû avoir lieu l'entretien aux Galeries Lafayette de Paris, quand M. R... aurait parfaitement pu se rendre à ce rendez-vous puisque l'entretien préalable était fixé au 16 avril 2012 et qu'une lettre de convocation à un entretien préalable ne signifie pas que l'employeur a déjà pris la décision de licencier son salarié ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1232-3 du code du travail. Moyen produit au pourvoi n° R 18-15.841 par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. R...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. R..., salarié victime d'une discrimination en raison de son handicap, de sa demande de condamnation de la société Monoprix Exploitation, employeur, au paiement de la somme de 371 520 € correspondant aux salaires qu'il aurait dû percevoir ;

AUX MOTIFS QUE sur la discrimination liée au handicap, l'employeur a manqué à son obligation de réentraînement dont l'exécution complète aurait favorisé le reclassement de M. R... et lui aurait permis de prétendre accéder directement à un autre emploi au sein du groupe ; qu'il apparaît par ailleurs que la société Monoprix Exploitation n'a pas entrepris des recherches loyales et sérieuses en vue de reclasser M. R... ; qu'en effet, alors que comme rappelé ci-dessus, M. R... avait entrepris avec succès à compter de 2008 une formation qui devait à terme lui permettre d'accéder à des postes supérieurs à la Direction des ventes de Monoprix, et que la SAMETH avait attiré l'attention de l'employeur sur son cas dès le 15 décembre 2011 : « M. R... a un profil intéressant, car il vient juste de terminer avec succès son master en gestion des affaires (DPGA), il doit être possible de coordonner ses nouvelles compétences avec son maintien au sein de Monoprix », la société Monoprix Exploitation n'a pas fait état de ce cursus et du diplôme obtenu dans le mail collectif adressé à certaines entreprises du groupe en vue de son reclassement, ce mail indiquant seulement que le salarié travaille en tant que responsable rayon alimentation, affecté au rayon fruits et légumes, et qu'il est reconnu en tant que travailleur handicapé ; que la cour relève également sur ce point que le manque de loyauté et de sérieux des recherches de reclassement est confirmé par le fait que l'employeur lui a demandé le mars 2012 de lui communiquer son curriculum vitae actualisé, soit près d'un mois après l'envoi du mail collectif aux entreprises du groupe, et que si M. R... ne s'est pas rendu le 5 avril 2012 à un rendez-vous aux Galeries Lafayette de Paris, c'est probablement parce qu'il avait reçu un courrier de son employeur daté du 27 mars 2012 lui indiquant qu'il n'avait actuellement aucun poste de reclassement à lui proposer et qu'il se voyait par conséquent dans l'obligation d'envisager son licenciement, ce courrier étant suivi d'une lettre de convocation à un entretien préalable à une mesure de licenciement datée du 5 avril 2012, jour où il aurait dû avoir lieu l'entretien aux Galeries Lafayette de Paris ; que ces éléments traduisent le refus de la société Monoprix Exploitation de se soumettre aux préconisations de la médecine du travail et de trouver un poste de reclassement compatible avec l'état de santé de M. R..., et ce alors que le salarié avait démontré son désir et ses capacités d'évolution et que les mesures à mettre en oeuvre pour permettre son reclassement ne présentaient pas une charge disproportionnée compte tenu de la taille du groupe auquel appartient la société Monoprix Exploitation et des aides susceptibles d'être perçues ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour constate que la société Monoprix Exploitation n'a pas respecté ses obligations de réentraînement et de reclassement à l'égard de M. R... et a, ce faisant, refusé de prendre les mesures appropriées à son état de santé et à son handicap en violation de l'obligation prévue à l'article L 5213-6 du code du travail ; que la société Monoprix Exploitation ne démontre pas que ces manquements et le licenciement pour inaptitude aient été justifiés par des raisons objectives, nécessaires et appropriées ; qu'en conséquence, la cour juge que le licenciement de M. R... est nul pour être discriminatoire du fait de son état de santé et de son handicap ; que le préjudice résultant de la discrimination doit être réparé par l'allocation de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts ; que le licenciement de M. R... est à la fois dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et nul en raison de son caractère discriminant ; que les demandes de M. R... n'étant pas hiérarchisées dans ses conclusions et les explications de son conseil, la cour doit prononcer la nullité du licenciement ; que le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, d'une part aux indemnités de rupture, d'autre part à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, qui ne peut comprendre le montant des salaires qu'il aurait pu percevoir jusqu'à son admission à la retraite s'il était resté en activité ; que M. R... était âgé de 46 ans à la date du licenciement et avait presque 21 ans d'ancienneté dans l'entreprise ; que son salaire mensuel brut était de 1 935 € ; qu'il ne justifie que partiellement de sa situation postérieurement au licenciement ; que compte tenu de ces éléments et des circonstances du licenciement, il y a lieu de lui allouer la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail ; qu'en application de l'article L. 1234-5 du code du travail, M. R... a également droit à une indemnité compensatrice de préavis d'une durée de deux mois, soit 3 870 € ;

ALORS QU'ayant constaté que M. R... avait été victime d'un licenciement nul pour procéder d'une discrimination liée à l'état de santé et au handicap, dès lors que l'employeur avait manqué à son obligation de sécurité, à son obligation d'adaptation du poste de travail en considération du handicap, et à son obligation de réentraînement et de reclassement, en posant pour principe que la réparation ne pouvait comprendre le montant des salaires que le salarié aurait pu percevoir jusqu'à son admission à la retraite s'il était resté en activité, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.


Le greffier de chambre

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