19 septembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-19.957

Deuxième chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:C210686

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 septembre 2019




Rejet non spécialement motivé


M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10686 F

Pourvoi n° Q 18-19.957







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société Naphtachimie, société anonyme, dont le siège est [...] ,

contre l'arrêt rendu le 1er juin 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [...] ,

2°/ à Mme V... L..., domiciliée [...] ,

3°/ à M. X... L..., domicilié [...] ,

4°/ à Mme S... U..., veuve L..., domiciliée [...] ,

tous trois pris en qualité d'ayants droit d'I... L...,

5°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...] , [...],

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 juillet 2019, où étaient présents : M. PRÉTOT, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vigneras, conseiller référendaire rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Naphtachimie, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mmes S... et V... L... et de M. X... L... ;

Sur le rapport de Mme Vigneras, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à la société Naphtachimie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;



Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;


REJETTE le pourvoi ;




Condamne la société Naphtachimie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-neuf et signé par Mme Rosette, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de la décision.



MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Naphtachimie


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir reconnu le caractère professionnel de l'affection dont est atteint Monsieur L... dans les rapports entre la société Naphtachimie et I... L... et d'avoir jugé que la maladie professionnelle dont M. L... est atteint est due à la faute inexcusable de son employeur, la société Naphtachimie ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « le caractère professionnel de la maladie déclarée par I... L... a été reconnu hors tableau et après avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Lyon demandé par le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône, au sein d'une procédure à laquelle l'employeur n'était pas partie ; que la SA Naphtachimie soutient que cette décision est sans effet à son endroit ; que toutefois I... L... qui poursuit la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur a régulièrement attrait celui-ci devant la juridiction de sécurité sociale et entend démontrer dans ses rapports avec son employeur, le caractère professionnel de l'affection dont il est atteint ; que la SA Naphtachimie fait grief au certificat médical du Docteur C... médecin au Centre hospitalier de Martigues d'être un certificat de complaisance, dès lors qu'à la question sur laquelle il était interrogé de dire si la pathologie pouvait être professionnelle, il a répondu que c'était « une maladie à caractère professionnel », après avoir indiqué que « il est clair que de par son activité professionnelle (chimiste à Naphtachimie) M L... a été exposé depuis plus de 20 ans à des produits chimiques potentiellement toxiques sur l'hématopoïèse... » ; que ce même médecin a toutefois poursuivi son raisonnement en écrivant le paragraphe suivant « En partant du principe que le lymphome est une maladie des organes hématopoïétiques. on peut effectivement rapprocher ces facteurs chimiques auxquels M L... a été exposé et le développement du lymphome... » ; qu'il se déduit de ces deux paragraphes qui se suivent dans le texte du certificat médical du Docteur C..., que le médecin rédacteur n'a fait que s'interroger sur l'étiologie de la maladie en examinant les conditions de travail habituel auxquelles I... L... était susceptible d'avoir été exposé à la SA Naphtachimie sur les données d'anamnèse bien évidemment produites par lui, mais en recherchant les causes objectives de sa pathologie, laquelle participait nécessairement de sa mission dès lors qu'il ne relevait aucune autre cause extérieure de nature à générer la pathologie atteignant la victime ; qu'en outre la distinction entre « maladie professionnelle » et « maladie à caractère professionnel » ne répond qu'au but d'intégrer la distinction entre les maladies relevant du tableau et celles reconnues hors tableau, sans remettre en cause le fait que pour ce médecin cette maladie doit être reconnue au titre de la législation professionnelle pour avoir été contractée dans le cadre professionnel ; que ce document médical n'est en tout état de cause pas le seul produit, dès lors que le CMI lui est antérieur, et qu'à l'appui de sa demande de voir retenir le caractère professionnel de sa pathologie, I... L... produit la fiche toxicologique afférente à l'oxyde d'éthylène, au dioxyde de titane, à l'hexane, à l'acétone, et aux éthers de glycol qui sont des produits susceptibles par leur exposition toxique qui fut la sienne auprès de la SA Naphtachimie, d'avoir généré le lymphome dont il est atteint ; que la SA Naphtachimie expose en seconde part que l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Lyon est nul pour avoir statué en l'absence de l'avis motivé du médecin du travail, qu'il lui est inopposable et est insuffisamment motivé et ne fait aucune référence à l'exigence d'activité professionnelle habituelle ; qu'il convient de rappeler que l'avis d'un Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ne lie pas la juridiction de sécurité sociale laquelle dispose d'un pouvoir d'appréciation à son endroit, même s'il est nécessairement une source d'informations pour la juridiction ; que le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Lyon était régulièrement composé de ses trois membres dès lors que ceux-ci ont signé l'avis rendu ; que certes l'avis motivé du médecin du travail ne figurait pas parmi les pièces qui ont été soumises à son appréciation en contradiction avec les dispositions de l'article D. 461-29 du Code de la sécurité sociale aux termes duquel « le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre ... un avis motivé du médecin du travail de la ou des entreprises où la victime a été employée portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel présent dans cette ou ces entreprises » ; que la Cour observe toutefois qu'I... L... a quitté la SA Naphtachimie le 30 avril 1984 pour prendre sa retraite et qu'il a développé sa pathologie qui a été constatée selon CMI du 1" mai 2009, soit 25 ans après son départ de l'entreprise, dans des conditions qui ne permettaient dès lors pas d'obtenir du médecin du travail de la SA Naphtachimie un avis motivé et circonstancié quant à la réalité de l'exposition au risque d'I... L... sur la période de temps durant laquelle il a exercé sa profession ; que l'avis rendu par le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Lyon a dès lors été valablement exprimé ; que la motivation de l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Lyon est la suivante : « le Comité est interrogé sur le dossier d'un homme de 86 ans qui présente un lymphome folliculaire à grandes cellules ; qu'il a travaillé comme aide-chimiste dans un laboratoire de Naphtachimie ; que l'étude du dossier permet de retenir une exposition aux Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP) jusqu'aux années 80 avec une durée d'exposition au minimum de 10 ans ; que plusieurs données de la littérature tendent à établir un lien entre les hydrocarbures et les pathologies de type lymphome ; que lors de la carrière professionnelle il a été exposé à d'autres composés (benzène, oxyde d'éthylène...) pour lesquels il existe un doute scientifique sur le lien avec la pathologie présentée ; que le Comité a pris connaissance de l'avis du médecin-conseil de l'employeur et a entendu l'ingénieur du service de prévention ; que dans ces conditions, le Comité retient un lien direct et essentiel entre la maladie et l'activité professionnelle » ; qu'il convient de rappeler qu'I... L... a été embauché par la SA Naphtachimie le 25 mars 1964 en qualité d'aide-chimiste au laboratoire et non pas le 18 mars 1954 ainsi qu'elle le soutient à tort en page 27 de ses écritures ; qu'il réalisait au sein de cette première affectation, des expériences sur les dérivés de l'oxyde d'éthylène et sur les dérivés d'oxyde de propylène au cours desquelles il était en contact avec des éthers et propylène de glycols, des éthanolamines et de l'isopropanol ; que de 1972 jusqu'à son départ à la retraite intervenu le 30 avril 1984, il travaillait à la fabrication de matières plastiques en qualité d'aide-chimiste dans la fabrication des polymères de polyéthylène et a été en contact avec des produits comme l'hexane, l'essence C, l'éthylène, des catalyseurs (chlorure et oxyde de titane), l'acétone liquide et l'azote, lesquels produits présentent une toxicité certaine pour l'homme y compris quant à leur pouvoir cancérogène ; que cette exposition aux produits toxiques est accréditée par la longue attestation de H... W... décrivant le processus de fabrication en vigueur au sein du laboratoire, les produits utilisés et l'absence de toute mesure de protection des salariés hormis la précaution tenant à leur forte inflammabilité d'une part, et d'autre part par le document établi le 3 septembre 1980 par la SA Naphtachimie à l'attention de J... A..., selon lequel cette salariée qui exerçait la fonction d'aide-chimiste devait faire l'objet d'une « surveillance médicale spéciale (en raison de) toxiques divers MERCURE » ; que cette attestation vient contredire l'affirmation de la SA Naphtachimie selon laquelle le processus de fabrication auquel collaborait I... L... se serait déroulé à l'extérieur et qu'il ne rapporterait pas la preuve d'une exposition professionnelle habituelle ; que c'est dès lors à juste titre que le Tribunal a considéré qu'il existait un lien direct et essentiel entre la maladie développée par I... L... du chef d'un lymphome et son activité professionnelle au sein de la SA Naphtachimie et qu'en dépit de ses dénégations, l'employeur n'était pas en mesure de démontrer que la pathologie développée par son ancien salarié avait une cause totalement étrangère au travail ; que confirmation sur ce point du jugement sera ordonnée notamment en ce qu'il a refusé de faire droit à la demande d'expertise sollicitée, le moyen tenant à la violation du principe de l'égalité des armes étant sur ce point inopérant, la SA Naphtachimie ne rapportant pas à suffisance un commencement de preuve du caractère fondé de la demande qu'elle présente de ce chef » ;

AUX MOTIFS ADOPTES QU' « I... L... a travaillé du 25 mars 1964 au 30 avril 1984 pour le compte de la société Naphtachimie en qualité d'aide chimiste au laboratoire puis d'agent de maîtrise au laboratoire polyoléfines ; qu'il a souscrit une déclaration de maladie professionnelle sur la base d'un certificat médical du 10 mai 2009 après avoir développé un lymphome de phénotype T ; que le 5 mars 2010 la CPCAM des Bouches du Rhône lui a notifié un refus de prise en charge et par jugement du 21 mai 2014, après saisine d'un 2ème CRRMP le tribunal des affaires de sécurité sociale a reconnu le caractère professionnel de la maladie d'I... L... ; que la CPCAM lui a ensuite notifié le 27 octobre 2015, la décision relative à l'attribution d'une rente sur la base d'un taux d'IPP de 67 % ; que le CRRMP de Lyon a notamment retenu que « l'étude du dossier permet de retenir une exposition aux HAP jusqu'aux années 80 avec une durée d'exposition minimum de 10 ans. Plusieurs données de la littérature tendent à établir un lien entre les hydrocarbures et les pathologies de type lymphome. Lors de la carrière professionnelle il était exposé à d'autres composés chimiques (benzène, oxyde d'éthylène) pour lesquels il existe un doute scientifique sur le lien avec la pathologie présentée. Le comité a pris connaissance de l'avis du médecin-conseil, de l'employeur et entendu l'ingénieur du service de prévention. Dans ces conditions le comité retient un lien direct essentiel entre la maladie et l'activité professionnelle. » ; que selon l'attestation d'un collègue de travail, Monsieur W..., I... L... était également exposé de manière habituelle, dans le cadre de sa mission, à d'autres produits connus pour provoquer des maladies hématopoïétiques telles que la leucémie ; qu'I... L... a donc été exposé à plusieurs agents cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR) dans le cadre de son travail, de manière répétitive et habituelle ; que le docteur C... du centre hospitalier de Martigues, indique dans son courrier à destination d'un confrère, le 3 mars 2009, que « Il est clair que de par son activité professionnelle (chimiste Naphtachimie) I... L... a été exposé depuis plus de 20 ans à des produits chimiques potentiellement toxiques sur l'hématopoïèse. En partant du principe que le lymphome est une maladie des organes hématopoïétiques, on peut effectivement rapprocher ces facteurs chimiques auquel I... L... a été exposé, et le développement du lymphome. Il est donc important d'avoir un oeil de reconnaissance envers cette affection sinon dans le cas d'une maladie professionnelle au moins dans le cadre d'une maladie à caractère professionnel » qu'en application des dispositions de l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale, peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et une incapacité permanente d'un taux d'au moins 25 % ; que ce texte n'exige pas que le travail habituel soit la cause unique ou essentielle de la maladie ;
qu'en l'espèce, les pièces produites (attestation, avis CRRMP et courrier docteur C...) démontrent l'existence d'un lien direct et essentiel entre la maladie et l'activité professionnelle de I... L..., ce lien n'étant pas remis en cause utilement par la société Naphtachimie qui échoue à démontrer que le métier exercé par le requérant n'a joué aucun rôle dans le développement de sa maladie ;
qu'enfin, il n'appartient pas au tribunal de pallier la carence des parties en ordonnant une expertise ; qu'en effet l'employeur ne produit aucune pièce constitutive d'un commencement de preuve du fait que la pathologie du requérant pourrait avoir une cause autre que professionnelle ou de nature à contredire les éléments médicaux du dossier, de sorte qu'il y a lieu de rejeter la demande d'expertise qu'il sollicite ; qu'il convient donc dans les rapports opposants le requérant à son employeur, de reconnaître le caractère professionnel de l'affection développée par I... L... » ;

1°) ALORS QUE pour obtenir la reconnaissance du caractère professionnel d'une pathologie ne figurant dans aucun tableau de maladie professionnelle, le salarié doit établir un lien de causalité direct et essentiel entre son affection et son travail habituel ; qu' en énonçant, pour débouter la société Naphtachimie de sa demande d'écarter tout caractère professionnel de la maladie de M. L..., que « l'employeur n'était pas en mesure de démontrer que la pathologie développée par son ancien salarié avait une cause totalement étrangère au travail » (arrêt, p. 5 in fine), et que « la société Naphtachimie échoue à démontrer que le métier exercé par le requérant n'a joué aucun rôle dans le développement de sa maladie » (jugement, p. 4) tandis qu'il appartenait à M. L... de rapporter la preuve d'un lien de causalité direct et essentiel entre sa maladie et son travail habituel, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QUE pour obtenir la reconnaissance du caractère professionnel d'une pathologie ne figurant dans aucun tableau de maladie professionnelle, le salarié doit établir un lien de causalité direct et essentiel entre son affection et son travail habituel ; qu'en énonçant pourtant, pour débouter la société Naphtachimie de sa demande d'écarter tout caractère professionnel de la maladie de M. L..., que « ce texte n'exige pas que le travail habituel soit la cause unique ou essentielle de la maladie », et que la société Naphtachimie échouait à « démontrer que le métier exercé par le requérant n'a joué aucun rôle dans le développement de sa maladie », quand il appartenait au contraire à M. L... de démontrer que sa maladie était essentiellement et directement causée par son travail habituel, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale ;

3°) ALORS QU' une maladie ne figurant pas sur un tableau ne peut être reconnue d'origine professionnelle que lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de l'assuré ; que les juges ne peuvent retenir le caractère professionnel d'une maladie hors tableau aux motifs que les conditions de travail habituelles du salarié étaient « susceptibles » d'avoir exposé le salarié à des produits toxiques, de tels produits étant « susceptibles » d'avoir généré la maladie, et dès lors qu'il n'était relevé aucune autre cause extérieure de nature à générer la pathologie atteignant la victime ; qu'au cas présent, la cour d'appel a reconnu le caractère professionnel de la maladie de M. L... aux motifs qu'il était susceptible d'avoir été exposé dans le cadre de son travail au sein de la société Naphtachimie à des produits toxiques qui étaient susceptibles d'avoir généré le lymphome dont le salarié était atteint, le docteur C... ne relevant aucune autre cause extérieure de nature à générer la pathologie atteignant la victime (arrêt, p. 4 in fine) ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'un lien de causalité direct et essentiel entre le travail habituel du salarié au sein de la société Naphtachimie et sa maladie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale ;

4°) ALORS QUE les juges sont tenus de motiver leur décision ; qu'au cas présent, la société Naphtachimie faisait valoir, avec offre de preuve, qu'à compter de 1972, M. L... n'était plus aide-chimiste en laboratoire mais magasinier et que l'attestation de M. W..., qui faisait état d'une exposition du salarié, en qualité d'aide-chimiste, à des produits toxiques sur la période de « 1980 à 1982 » ne permettait pas d'établir l'existence d'une exposition habituelle de M. L... au risque sur une longue durée (concl, p. 17) ; qu'en s'abstenant de répondre à ces écritures, qui étaient de nature à démontrer que le salarié n'avait pas été exposé au risque au sein de la société Naphtachimie, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE la société Naphtachimie faisait valoir que M. L... ne rapportait pas la preuve que son travail habituel auprès de cette société était la cause directe et essentielle de sa maladie tandis que le salarié avait également travaillé pendant plusieurs années auprès de la société Socony Mobil Oil, qui l'avait exposé à des produits toxiques ; que le salarié lui-même visait, dans sa déclaration de maladie professionnelle, son poste d'aide chimiste au sein de la société Mobil Oil entre août 1952 et janvier 1964 (concl., p. 23 et 24) ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, qui étaient pourtant de nature à démontrer que M. L... avait été exposé, dans le cadre de son travail habituel au sein de la société Socony Mobil Oil, à des produits chimiques, de sorte que l'existence d'un lien de causalité direct et essentiel entre son travail habituel auprès de la société Naphtachimie et sa maladie n'était pas démontré, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ne disposait pas d'action récursoire à l'encontre de la société Naphtachimie et d'avoir dit que la CPAM qui fait l'avance des sommes relatives à la majoration de la rente et aux préjudices, dispose d'une action récursoire à l'encontre de la société Naphtachimie ;

AUX MOTIFS QUE « le Tribunal a considéré que « la Caisse n'ayant pas reconnu le caractère professionnel de la maladie dont est atteint I... L..., ne pourra exercer son action récursoire à l'encontre de la SA Naphtachimie » ;

La SA Naphtachimie sollicite la confirmation de cette disposition, demande à laquelle la Caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône s'oppose ; que la SA Naphtachimie expose en effet que l'origine professionnelle de la maladie déclarée par I... L... a été retenue après un refus opposé par la Caisse, à la suite d'une procédure judiciaire non contradictoire à son endroit, puisqu'elle n'y avait pas été appelée, au regard du principe de l'indépendance des recours ; qu'il convient de rappeler que l'inopposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge n'a pas pour effet de priver la victime du droit de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur, la juridiction étant en mesure après débat contradictoire ainsi que réalisé supra, de rechercher si la maladie a un caractère professionnel et si l'assuré a été exposé au risque dans des conditions constitutives d'une telle faute ; qu'il en découle que les compléments de rente et indemnités dus au salarié victime de la faute inexcusable de son employeur lui sont directement versés par l'organisme social, nonobstant l'inopposabilité à son endroit de la décision portant sur la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie ; que toutefois s'agissant de l'action récursoire de la caisse, il était admis jusqu'à l'intervention de la loi 2012-1404 du 17 décembre 2012 instaurant l'article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale que l'inopposabilité de la décision de prise en charge privait la Caisse de la possibilité de récupérer sur l'employeur, les sommes versées par elle au salarié ; qu'or l'article L. 452-3-1 du Code de la sécurité sociale dispose que « la reconnaissance de la faute inexcusable de l 'employeur par une décision passée de justice passée en force de chose jugée emporte l'obligation pour celui-ci de s 'acquitter des sommes dont il est redevable à raison des articles L. 452-1 à L. 452-3 » ; que la reconnaissance de l'action récursoire de la Caisse dont la Cour est présentement saisie, tend à lui permettre de récupérer sur le fondement de l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, les préjudices alloués à I... L... en réparation de la faute inexcusable de la SA Naphtachimie, de sorte qu'il en résulte nécessairement que l'inopposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle d'I... L... ne fait pas obstacle à l'action récursoire de la Caisse à l'encontre de l'employeur ; qu'il est indifférent que la Caisse ait en cours d'instance modifié les termes de sa demande dès lors qu'elle se borne à demander désormais la seule application des dispositions de l'article L. 452-3-1 que la Cour aurait relevée d'office en l'absence de demande expresse de sa part ; qu'en outre la SA Naphtachimie ne peut valablement soutenir que la demande de la Caisse au titre de la rente et de sa majoration est irrecevable pour n'être pas chiffrée, alors que l'article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale donne les modalités de calcul et le montant maximum de la rente majorée ; que le jugement sera en conséquence réformé de ce chef et il sera fait droit à la demande de la Caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône de reconnaissance de son action récursoire à l'encontre de la SA Naphtachimie du chef de toutes les sommes dont elle sera tenue de faire l'avance » ;

1°) ALORS QUE la fin de non-recevoir tirée du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions ; qu'il est constant que devant les premiers juges, la caisse a renoncé à exercer son action récursoire en indiquant expressément au tribunal que n'ayant pas pris initialement en charge la maladie au titre de la législation professionnelle, elle ne pouvait exercer une telle action contre l'employeur ; qu'il ressort en effet des constatations de la cour d'appel que la Caisse a « modifié les termes de sa demande » (arrêt, p. 7 § 5), le TASS ayant constaté que « la CPCAM des Bouches du Rhône s'en rapporte à l'appréciation du tribunal quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et précise qu'en cas de reconnaissance elle ne pourra pas exercer d'action récursoire à l'encontre de l'employeur » (jugement, p. 3 § 3) ; qu'il ressortait de ces constatations qu'au cours d'une même instance, la CPAM avait adopté des positions contraires et incompatibles entre elles, induisant la société Naphtachimie en erreur quant à ses intentions au regard de l'action récursoire ; que la société Naphtachimie faisait dès lors valoir qu'en raison du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, l'action récursoire de la caisse devait être déclarée irrecevable (concl., p. 34) ; qu'en écartant cette demande au motif qu' « il est indifférent que la caisse ait en cours d'instance modifié les termes de sa demande dès lors qu'elle se borne à demander désormais la seule application des dispositions de l'article L. 452-3-1 que la cour aurait relevée d'office en l'absence de demande expresse de sa part » (arrêt, p. 7 § 5), la cour d'appel a statué par des motifs impropres à écarter la violation du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui et n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant le principe susvisé ;

2°) ALORS QUE l'acquiescement à la demande emporte reconnaissance du bien-fondé des prétentions de l'adversaire et renonciation à l'action ; qu'au cas présent, il est constant que devant les premiers juges, la caisse n'a pas exercé son action récursoire puisqu'elle a expressément indiqué au tribunal que n'ayant pas pris initialement en charge la maladie au titre de la législation professionnelle, elle ne pouvait exercer une telle action contre l'employeur ; qu'il ressort en effet des constatations de la cour d'appel que la Caisse a « modifié les termes de sa demande » (arrêt, p. 7 § 5), le TASS ayant constaté que « la CPCAM des Bouches du Rhône s'en rapporte à l'appréciation du tribunal quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et précise qu'en cas de reconnaissance elle ne pourra pas exercer d'action récursoire à l'encontre de l'employeur » (jugement, p. 3 § 3) ; qu'il ressortait de ces constatations que la CPAM avait acquiescé à la demande de la société Naphtachimie de voir rejeter son action récursoire de sorte qu'elle n'était plus recevable à solliciter l'exercice d'une telle action devant la cour d'appel ; qu'en déclarant pourtant l'action récursoire de la CPAM recevable au motif qu'« il est indifférent que la caisse ait en cours d'instance modifié les termes de sa demande dès lors qu'elle se borne à demander désormais la seule application des dispositions de l'article L. 452-3-1 que la cour aurait relevée d'office en l'absence de demande expresse de sa part » (arrêt, p. 7 § 5), la cour d'appel a violé l'article 408 du code de procédure civile.

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