3 octobre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-10.839

Première chambre civile - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:C110501

Texte de la décision

CIV. 1

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 3 octobre 2019




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10501 F

Pourvoi n° D 18-10.839







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. W... T..., domicilié [...] ,

contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant à Mme A... H..., divorcée Q..., domiciliée [...] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 9 juillet 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Boulloche, avocat de M. T..., de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de Mme H... ;

Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;


REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. W... T... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme H... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. T...

Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. T... de sa demande de condamnation de Mme H... à lui verser la somme de 197.365,09 € à titre de solde de tout compte après liquidation de la société créée de fait constituée entre eux,

Aux motifs que « l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, nécessite l'existence d'apports, l'intention de collaborer à égalité à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes éventuelles pouvant en résulter ;
que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns des autres ;
que l'argumentation de M. T... pour établir l'existence de cette société créée de fait repose sur sa participation en apport en numéraire et en industrie à l'acquisition de l'immeuble qui a servi au logement de la famille ;
qu'outre que la charge de la preuve du financement qu'il allègue pèse sur lui et non sur Mme H... à laquelle il ne peut être fait grief de ne pas produire des relevés de comptes de 1997, l'intention de s'associer caractérisant l'existence d'une société de fait est distincte de la mise en commun d'intérêts inhérents au concubinage et ne peut se déduire de la participation des concubins au financement de l'immeuble destiné à assurer leur logement ;
que le fait d'apporter son concours par des démarches nombreuses et utiles pour finaliser une opération d'acquisition destinée au logement des concubins et même ultérieurement, dans le cadre du chantier d'aménagement du logement, ne dépasse nullement la mise en commun et la mise en oeuvre d'intérêts, inhérents à la vie en concubinage, et ce, a fortiori lorsque l'auteur de ces démarches est libre de toute occupation professionnelle ;
qu'en l'espèce, M. T... ne démontre par aucun élément une intention des concubins de s'associer, distincte de la mise en commun d'intérêts inhérents de la vie maritale ;
qu'en conséquence, aucun des éléments requis par l'article 1832 du code civil n'étant démontré par M. T..., le jugement qui a retenu l'existence d'une société créée de fait, en a prononcé la dissolution et condamné Mme H... au paiement de la moitié du « boni de liquidation » doit être infirmé » (arrêt p. 3 & 4) ;

1°) Alors que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions, spécialement les pièces produites pour la première fois en appel ; qu'en l'espèce, à l'appui de sa demande fondée sur l'existence d'une société créée de fait entre lui et Mme H..., M. T... a produit en appel un courrier de Mme H... attestant le 25 février 1998 que l'acquisition réalisée en 1997 avait « été faite dans une démarche patrimoniale commune
en vue de doter ultérieurement » leurs enfants et que M. T... avait apporté un concours décisif sans lequel elle n'aurait pu se porter acquéreur de cette appartement (pièce n° 194) ; qu'en rejetant la demande de M. T... par arrêt infirmatif, sans qu'il résulte de ce dernier qu'elle ait examiné et analysé cette pièce permettant d'établir, par des déclarations de Mme H..., l'existence d'une société créée de fait entre les concubins, la cour d'appel a violé les articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 455 et 458 du code de procédure civile ;

2°) Alors qu'à l'appui de sa demande fondée l'existence d'une société créée de fait entre lui et Mme H..., M. T... a également produit le témoignage de sa fille L... attestant que sa mère lui avait affirmé, lors de la vente de l'appartement, qu'il percevrait sa part sur cette vente (pièce n° 91) ; qu'en rejetant la demande de M. T... sans qu'il résulte de son arrêt qu'elle ait examiné et analysé cette pièce, la cour d'appel a violé les articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 455 et 458 du code de procédure civile.

Le second moyen de cassation (subsidiaire) fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. T... de sa demande de condamnation de Madame H... à lui payer la somme de 240 000 € sur le fondement de l'enrichissement sans cause,

Aux motifs que « M. T... soutient qu'il s'est appauvri en s'investissant quotidiennement dans cet appartement sur tous les plans, administratif, financier et technique et qu'accaparé par la gestion des multiples problèmes affectant ce logement, il n'a plus travaillé ;
que toutefois, force est de constater que l'acquisition a eu lieu le 9 janvier 1997 et l'emménagement en juillet 1999, étant précisé que Mme H... a loué à ses frais un appartement pendant la durée des travaux, de sorte que si entre ces deux dates, M. T... a oeuvré pour le logement destiné à la famille, à partir de l'été 1999, il était délivré de ses obligations concernant l'aménagement de ce bien, et qu'il ne peut donc nullement imputer à son investissement en industrie, le fait qu'il n'a pas travaillé pendant toute la durée du concubinage ;
que la participation financière de 15 244,90 € qu'il allègue en se fondant sur la seule attestation de sa mère, de même que son activité pendant deux ans et demi pour parvenir à l'emménagement dans le bien situé [...] trouvent leur contrepartie dans l'hébergement gratuit dont il a bénéficié pendant la durée du concubinage, c'est à dire, 16 ans selon lui, de 1993 à 2009, ou 11 ans (jusqu'en 2005) selon Mme H... ;
qu'au surplus, M. T... expose qu'il ressort d'une simple lecture des pièces fiscales qu'il communique que ses revenus même postérieurs à l'emménagement n'excédaient pas la somme nette moyenne de 400 € par mois ;
que cette affirmation conforte les explications de Mme H... qui expose que « jamais M. W... T... n'a contribué financièrement aux charges domestiques », qu'« alors même qu'elle ne disposait que d'un salaire relativement modique puisqu'elle était secrétaire, assumait seule, ou avec l'aide de ses propres parents, les dépenses occasionnées par les impôts locaux, les charges de copropriété, les abonnements d'énergie, ainsi que les échéances de remboursement des cinq emprunts contractés par elle pour l'acquisition de l'appartement du [...] » ;
qu'il résulte de ces éléments, que la contrepartie dont jouissait M. T... dépassait le simple hébergement gratuit et portait également sur les charges de la vie courante ;
que les conditions pour voir prospérer l'action fondée sur l'enrichissement sans cause, ne sont pas réunies en l'espèce, la participation alléguée au financement du bien et l'industrie déployée par M. T... ayant une cause, l'intérêt personnel qu'il trouvait à son hébergement gratuit et à son installation dans un cadre de vie agréable, étant souligné qu'il a pu, malgré ses faibles ressources, faire l'acquisition, pendant cette période d'un studio dans l'immeuble en 1999 ;
qu'il doit donc être débouté de sa demande en paiement de la somme de 240 000 €, de même que de celle de 51 950 €, son éventuelle participation financière à concurrence de 15 000,90 € ayant été effectuée dans son intérêt personnel en vue de son installation dans le bien acquis par sa concubine » (arrêt p. 4 & 5) ;

Alors que l'enrichissement sans cause est caractérisé par un investissement sans intention libérale excédant la contribution aux charges du concubinage ; que l'investissement réalisé par M. T... était établi par son apport d'une certaine somme en numéraire pour l'acquisition de l'appartement et le fait de s'être consacré pendant plus de deux ans à la conservation et à l'aménagement du bien acquis, tandis que par ailleurs, il assumait sa contribution aux charges du concubinage en s'occupant de l'éducation des enfants, non seulement de celui qu'il a eu avec Mme H... mais également des deux enfants de cette dernière, nés d'un premier lit, dont la plus jeune était atteinte d'un handicap sévère exigeant une attention accrue ; qu'en estimant que la participation au financement du bien et l'industrie déployée par M. T... avaient pour cause l'intérêt personnel qu'il trouvait à son hébergement gratuit et à son installation dans un cadre de vie agréable sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (concl. d'appel de M. T..., p. 23 & 24), si l'hébergement gratuit de M. T... et la prise en charge par Mme H... des dépenses courantes du ménage ne trouvaient pas leur contrepartie, selon l'accord des concubins, dans la prise en charge par M. T... de l'éducation des enfants et notamment de la fille de Mme H... nécessitant des soins particuliers, d'où il suit que l'investissement en nature et industrie de M. T... dans l'acquisition du bien se trouvait sans cause, et en toute hypothèse ne pouvait être justifié par sa contribution aux charges du concubinage, assumées par ailleurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1371 du code civil dans sa rédaction applicable au moment des faits.

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