25 septembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-84.371

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:CR02115

Texte de la décision

N° A 19-84.371 F-D

N° 2115


N° R19-84.569

25 SEPTEMBRE 2019

CG10





NON LIEU À RENVOI







Mme de la Lance conseiller le plus ancien faisant fonction de président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, le vingt-cinq septembre deux mille dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller D'HUY et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;

Statuant sur les questions prioritaires de constitutionnalité formulées par mémoires spéciaux reçus les 1er et 9 juillet 2019 et présentées par :

- M. O... J..., partie civile,

à l'occasion des pourvois formés par lui :

- contre n° 202 l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de POITIERS, en date du 18 juin 2019, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre le Crédit Agricole, CA Consumer Finance, M. M... C..., M. A... R..., M. W... T..., M. H... Y... et personne non dénommée, des chefs de faux et usage, entrave à la saisine de la justice, violation du secret bancaire, usage de données permettant d'identifier un individu, destruction ou soustraction de document de nature à faciliter la découverte d'un délit, recel, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;



- contre l'arrêt n° 203 de la même chambre, en date du 18 juin 2019, qui, dans la même information, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 5 août 2019, ordonnant la jonction des pourvois ;

Vu les observations produites ;
Attendu que les questions prioritaires de constitutionnalité sont identiques entre elles et sont ainsi rédigées :

"Constater que les articles 27, 29, 31 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle établissant que l'avocat (ou l'auxiliaire de justice) prêtant son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle perçoit une 'rétribution' de l'État, définissant le montant de cette rétribution comme étant le produit d'un coefficient par type de procédure et d'une unité de valeur de référence, et faisant référence à la loi de finances pour le montant de l'unité de valeur et au décret d'application de la loi n° 91-1266 du 19-12-91 (notamment à l'article 90) pour la valeur des coefficients par type de procédure et les articles du CPP imposant l'obligation du ministère d'avocat [CPP 585,199] et des délais courts de 5 et 10 jours [CPP 186 alinéa 4, 568, 570 alinéa 4, 584] portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit (dans le contexte présenté ici) , plus précisément au principe constitutionnel de l'égalité des armes, au droit à un recours effectif et au principe d'interdiction des discriminations en vue de faire prononcer l'abrogation (ou d'ordonner les modifications nécessaires) de ces dispositions légales."

Attendu que les dispositions de l'article 570, alinéa 4, du code de procédure pénale contestées n'ont pas eu à s'appliquer à la procédure, le pourvoi ayant été immédiatement joint avec le pourvoi formé contre l'arrêt sur le fond également en cours d'examen ;

Attendu que les autres dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure et, à l'exception de l'article 186 du code de procédure pénale (QPC 2011-153 du 13 juillet 2011), n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que les questions, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'auraient pas encore eu l'occasion de faire application, ne sont pas nouvelles ;

Et attendu que les questions posées ne présentent pas un caractère sérieux ;

Qu'en effet, en premier lieu, l'aide juridictionnelle, accordée selon les conditions d'octroi et de rétribution prévues aux articles contestés de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, notamment en fonction de la situation financière du demandeur et de ses chances de succès dans la procédure, a pour objet de rendre effectif le principe à valeur constitutionnelle du droit d'exercer un recours ;

Qu'en deuxième lieu, au regard de l'article 585 du code de procédure pénale, les particularités du recours en cassation justifient que seuls les avocats spécialistes de cette technique soient admis à présenter des observations orales à l'audience ;

Qu'en troisième lieu, au regard de l'article 199 du code de procédure pénale, le fait que toute partie à la procédure ayant fait le choix de se défendre sans l'assistance d'un avocat ne puisse avoir un accès direct à toutes les pièces de l'information et ce chaque fois que la chambre de l'instruction est amenée à se prononcer, n'est pas valablement remis en cause, dès lors que ni l'exercice des droits de la défense ni les principes d'égalité et du contradictoire ne commandent qu'il soit porté une atteinte générale et permanente au secret de l'enquête et de l'instruction dont le respect est garanti par la communication du dossier aux seuls avocats, en raison du secret professionnel auquel ils sont astreints ;

Qu'en quatrième lieu, la fixation à cinq jours francs du délai du pourvoi en cassation par l'article 568, alinéa 1er, du code de procédure pénale, ne prive pas les parties de la possibilité d'exercer un recours effectif devant la Cour de cassation ; que, s'il commence à courir à partir du prononcé de la décision, c'est seulement à l'égard des parties présentes ou mises en mesure de l'être, le président devant indiquer, à l'issue de l'audience, la date à laquelle cette décision sera rendue ; que la prorogation prévue par l'article 801 du même code s'applique au délai du pourvoi en cassation ; qu'enfin, un pourvoi qui n'aurait pu être formé dans ce délai peut être déclaré recevable si le demandeur justifie de circonstances l'ayant mis dans l'impossibilité absolue d'exercer son recours en temps utile ;

Qu'en cinquième lieu, d'une part, en énonçant en matière pénale, sauf dérogations prévues par la loi, que le demandeur ayant fait le choix de se défendre sans l'assistance d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, doit déposer son mémoire personnel dans les dix jours à compter de la date de son pourvoi, l'article 584 du code de procédure pénale n'a pas pour effet de priver l'intéressé de droits substantiels ou du droit à un recours effectif par l'imposition d'un délai trop bref ; que, d'autre part, en réservant, dans l'article 585 du même code, à l'avocat un délai plus long pour déposer un mémoire ampliatif au nom du demandeur qui a fait le choix de recourir à son assistance, le législateur, à qui il est loisible de déroger à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu qu'il n'en résulte pas une différence de traitement injustifiée entre des personnes placées dans une situation comparable, a pu, sans porter atteinte à ce principe, prendre en compte la nécessité, pour ce conseil, qui participe à la bonne administration de la justice, de prendre connaissance du dossier de son client et d'évaluer la pertinence des moyens de défense invoqués par ce dernier, tout en assurant la gestion de l'ensemble de son cabinet ;

Par ces motifs,

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme de la Lance conseiller le plus ancien faisant fonction de président, en remplacement du président empêché, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme Planchon, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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