10 octobre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-20.760

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:C201212

Titres et sommaires

SECURITE SOCIALE, ALLOCATION VIEILLESSE POUR PERSONNES NON SALARIEES - Contribution de solidarité - Régime de la loi n° 70-13 du 3 janvier 1970 - Assujettis - Personnes morales de droit public - Conditions - Activité concurrentielle - Exclusion - Cas

Selon l'article L. 651-1, 4°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007, applicable à la date d'exigibilité des contributions litigieuses, la contribution sociale de solidarité des sociétés est à la charge, notamment, des personnes morales de droit public dans les limites de leur activité concurrentielle. L'établissement public d'aménagement Euroméditerranée, institué par le décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995, n'exerce pas une activité concurrentielle au sens de ce texte

SECURITE SOCIALE - Financement - Contribution sociale de solidarité - Assujettis - Personnes morales de droit public - Conditions - Activité concurrentielle - Exclusion - Cas - Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée

Texte de la décision

CIV. 2

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 octobre 2019




Rejet


M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1212 F-P+B+I

Pourvoi n° 18-20.760







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, anciennement dénommée RSI, dont le siège est [...],

contre l'arrêt rendu le 6 juin 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [...] ,

2°/ au ministre des affaires sociales et de la santé, domicilié [...],

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 11 septembre 2019, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, Mme Vieillard, conseiller, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée, l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 juin 2018) et les productions, que la Caisse nationale du régime social des indépendants devenue la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants (la Caisse) a adressé à l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée, institué par le décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995 (l'Etablissement), une mise en demeure pour le paiement de la contribution sociale de solidarité des sociétés au titre des années 2009 à 2011 ; que la Caisse a saisi d'une demande en paiement une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 321-14 du code de l'urbanisme ne confère aux établissements publics d'aménagement aucun monopole d'intervention en matière immobilière dans le périmètre défini, mais une compétence aux fins d'intervention, et n'exclut nullement l'intervention, dans ce périmètre, d'autres acteurs du marché si l'EPA n'est pas désigné dans le cadre d'un projet ; qu'en se bornant à affirmer que du fait du monopole d'intervention de l'EPAEM, aucune autre structure ne pouvait pénétrer le marché dévolu à l'établissement public, la cour d'appel a donc faussement appliqué l'article L. 321-14 du code de l'urbanisme ;

2°/ que, en application de l'article 2 du décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995, portant création de l'Établissement public d'aménagement Euroméditerranée, « l'établissement public peut, en outre, sur délibération du conseil d'administration, et, en dehors du périmètre mentionné au premier alinéa, acquérir des immeubles bâtis ou non bâtis et réaliser des opérations d'aménagement et d'équipements urbains, complémentaires des actions entreprises dans ce périmètre » ; que l'article 4 dudit décret précise également que pour la réalisation de son objet, l'EPAEM « peut recourir aux procédures prévues à l'article L. 321-17 du code de l'urbanisme », soit aux procédures d'expropriation et de préemption, mais ajoute qu'il peut également « transiger et compromettre » ; que si ses ressources, énumérées par l'article 14, comprennent « les dotations, subventions, avances, fonds de concours ou de participations apportées par l'État, l'Union européenne, les collectivités territoriales, etc », elles comprennent également « la rémunération pour prestations de services, le produit de la gestion des biens et droits mobiliers et immobiliers, le produit de cession des biens et droits mobiliers et immobiliers, les dons et legs », ce dont il résulte que cet opérateur public, habilité à réaliser des opérations immobilières de toutes natures et à procéder aux acquisitions foncières nécessaires à ces opérations, offre des biens ou des services sur le marché concurrentiel de la promotion immobilière, sans mettre nécessairement en oeuvre les prérogatives de puissance publique qui lui sont conférées, et exerce, ce faisant, une activité concurrentielle ; qu'en se bornant à affirmer que l'EPAEM avait un monopole d'intervention sur le périmètre défini et qu'il n'avait aucune activité concurrentielle sur le marché qui lui avait été dévolu, sans même vérifier s'il n'exerçait pas, en dehors de ce périmètre, une activité concurrentielle consistant en des opérations d'aménagement et de gestion immobilière, comme le prévoit l'article 2 du décret du 13 octobre 1995, sans mettre en oeuvre les prérogatives de puissance publique qui lui sont dévolues, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 651-1, 4e alinéa du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que, selon l'article L. 651-1, 4° du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007, applicable à la date d'exigibilité des contributions litigieuses, la contribution sociale de solidarité des sociétés est à la charge, notamment, des personnes morales de droit public dans les limites de leur activité concurrentielle ;

Et attendu que l'arrêt retient que l'Etablissement dont la mission est d'acquérir, dans le cadre d'un projet stratégique et opérationnel et après déclaration d'utilité publique, des terrains et des immeubles dans le secteur géographiquement délimité à une certaine superficie de l'agglomération marseillaise, en vue de les aménager puis de les revendre à des constructeurs privés afin d'assurer le développement immobilier et économique de la ville, et dont les opérations sont financées par des fonds publics (subventions de l'Etat, de l'Union européenne, des collectivités territoriales etc...), bénéficie d'un monopole d'intervention, d'expropriation et de préemption, conféré, dans l'intérêt général, par l'Etat, la Région et les autre collectivités territoriales, aucune autre structure ne pouvant remplir ses objectifs ;

Que de ces constatations dont elle a fait ressortir l'absence d'exercice par l'Etablissement d'une activité concurrentielle, la cour d'appel a exactement déduit, sans avoir à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, qu'il n'était pas assujetti à la contribution de solidarité des sociétés pour les années litigieuses au sens du texte susmentionné ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants et la condamne à payer à l'Etablissement public d'aménagement Euroméditerranée la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'Établissement public d'aménagement Euroméditerranée n'était pas assujetti à la contribution sociale de solidarité des sociétés pour les années 2009, 2010 et 2011.

Aux motifs que l'article L.651-1, alinéa 4, du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi du 19 décembre 2005, mettait une contribution sociale des sociétés à la charge des personnes morales de droit public dans la mesure où elles étaient assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions de l'article 256B du code général des impôts ; que dans sa version issue de l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale du 19 décembre 2007, applicable aux contributions dues à partir du 1er janvier 2008, l'article L.651-1, alinéa 4, du code de la sécurité sociale met cette contribution à la charge des personnes morales de droit public « dans les limites de leur activité concurrentielle » ; que toute personne morale de droit public ayant une activité dans le secteur concurrentiel est désormais assujettie à la C3S , qu'elle soit ou non assujettie à la TVA ; que le texte précité ne fait plus allusion à la TVA, dont il sera rappelé qu'elle est un impôt général sur la consommation qui est directement facturé aux clients sur les biens qu'ils consomment ou les services qu'ils utilisent en France ; que la TVA a donc cessé d'être un critère d'assujettissement à la C3S ; que le RSI a considéré que l'Établissement public « Euroméditerranée » devait être assujetti aux contributions pour les années 2009 à 2011 et lui a notifié une mise en demeure du 20 octobre 2011 pour un montant de 172 809 € ; que ce montant a été ramené à 21 853 € après déduction du montant des subventions qui lui avaient été versées pendant la période 2009-2011 ; que l'appelant conteste être redevable de cotisations en faisant valoir qu'il n'est pas assujetti à la contributions, sauf dans le cas où il serait démontré qu'il a une activité concurrentielle, ce qu'il conteste formellement ; qu'il résulte des dossiers des parties que l'appelant est un établissement public d'aménagement dont la mission est d'acquérir, après déclaration d'utilité publique, des terrains et des immeubles dans le secteur de la ville de Marseille en vue de les aménager puis de les revendre à des constructeurs privés afin d'assurer le développement immobilier et économique de la ville ; que conformément à l'article L .231-14 du code de l'urbanisme, il bénéficie donc d'un monopole d'intervention, d'expropriation et de préemption, décidé par les pouvoirs publics, et ses opérations sont financées par des fonds publics (subventions de l'État, de l'Union européenne, des collectivités territoriales etc
) ; que par l'effet de ce monopole, qui lui est conféré dans l'intérêt général par l'État, la région et les autres collectivités territoriales, aucune autre structure (entreprise ou autre), ne peut pénétrer le marché qui lui a été dévolu et qui est géographiquement délimité à une certaine superficie de l'agglomération marseillaise, dans le cadre d'un projet stratégique et opérationnel (article L.321-18 du code de l'urbanisme) ; qu'il n'a aucune concurrence quant aux activités qui lui sont dévolues et il n'exerce donc aucune activité concurrentielle puisqu'il ne peut rivaliser avec aucune autre structure pour remplir ses objectifs ; que pour parvenir à réduire sa demande initiale qui était de 172 809 € et la ramener à 21 853 €, le RSI n'a pas écarté les activités concurrentielles mais a procédé à la soustraction des montants représentés par les subventions perçues pendant les trois années 2009 à 2011 ; que cette démarche est sans lien avec les critères d'assujettissement prévus par l'article L.651-1, alinéa 2, précité, ni par référence à l'application de la TVA dont l'intimée se prévaut ; que le RSI n'apporte aucune preuve d'une activité concurrentielle au cours des années 2009 à 2011 ; que la condition posée pour l'assujettissement à la contribution sociale de solidarité des sociétés n'étant pas remplie, l'appelant est fondé à contester le jugement dont appel ainsi que les demandes de l'intimée

Alors, d'une part, que, l'article L.321-14 du code de l'urbanisme ne confère aux établissements publics d'aménagement aucun monopole d'intervention en matière immobilière dans le périmètre défini, mais une compétence aux fins d'intervention, et n'exclut nullement l'intervention, dans ce périmètre, d'autres acteurs du marché si l'EPA n'est pas désigné dans le cadre d'un projet ; qu'en se bornant à affirmer que du fait du monopole d'intervention de l'EPAEM, aucune autre structure ne pouvait pénétrer le marché dévolu à l'établissement public, la cour d'appel a donc faussement appliqué l'article L.321-14 du code de l'urbanisme

Alors, d'autre part, que, en application de l'article 2 du décret n°95-1102 du 13 octobre 1995, portant création de l'Établissement public d'aménagement Euroméditerranée, « l'établissement public peut, en outre, sur délibération du conseil d'administration, et, en dehors du périmètre mentionné au premier alinéa, acquérir des immeubles bâtis ou non bâtis et réaliser des opérations d'aménagement et d'équipements urbains, complémentaires des actions entreprises dans ce périmètre » ; que l'article 4 dudit décret précise également que pour la réalisation de son objet, l'EPAEM « peut recourir aux procédures prévues à l'article L.321-17 du code de l'urbanisme », soit aux procédures d'expropriation et de préemption, mais ajoute qu'il peut également « transiger et compromettre » ; que si ses ressources, énumérées par l'article 14, comprennent « les dotations, subventions, avances, fonds de concours ou de participations apportées par l'État, l'Union européenne, les collectivités territoriales, etc
», elles comprennent également « la rémunération pour prestations de services, le produit de la gestion des biens et droits mobiliers et immobiliers, le produit de cession des biens et droits mobiliers et immobiliers, les dons et legs », ce dont il résulte que cet opérateur public, habilité à réaliser des opérations immobilières de toutes natures et à procéder aux acquisitions foncières nécessaires à ces opérations, offre des biens ou des services sur le marché concurrentiel de la promotion immobilière, sans mettre nécessairement en oeuvre les prérogatives de puissance publique qui lui sont conférées, et exerce, ce faisant, une activité concurrentielle ; et qu'en se bornant à affirmer que l'EPAEM avait un monopole d'intervention sur le périmètre défini et qu'il n'avait aucune activité concurrentielle sur le marché qui lui avait été dévolu, sans même vérifier s'il n'exerçait pas, en dehors de ce périmètre, une activité concurrentielle consistant en des opérations d'aménagement et de gestion immobilière, comme le prévoit l'article 2 du décret du 13 octobre 1995, sans mettre en oeuvre les prérogatives de puissance publique qui lui sont dévolues, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.651-1, 4ème alinéa du code de la sécurité sociale.

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