27 novembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-31.442

Chambre sociale - Formation plénière de chambre

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2019:SO01645

Titres et sommaires

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Arrêté d'extension - Effets - Champ d'application - Représentativité des organisations syndicales et patronales signataires - Vérification - Office du juge judiciaire - Détermination - Portée

Dans le cadre d'un accord collectif professionnel, l'arrêté d'extension suppose nécessairement, sous le contrôle du juge administratif, vérification de la représentativité dans ce champ des organisations syndicales et patronales signataires ou invitées à la négociation. Il y a lieu dès lors de juger désormais que le juge judiciaire n'a pas à vérifier, en présence d'un accord professionnel étendu, que l'employeur, compris dans le champ d'application professionnel et territorial de cet accord en est signataire ou relève d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de celui-ci

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 novembre 2019




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 1645 FP-P+B+R+I

Pourvoi n° C 17-31.442





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la fédération Syntec, dont le siège est [...],

2°/ la CINOV, Fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle, du conseil, de l'ingénierie et du numérique, dont le siège est [...], anciennement Fédération CICF,

contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Apave, société anonyme, dont le siège est [...],

2°/ à la société Socotec France, société anonyme, dont le siège est [...],

3°/ à la société Bureau Veritas, société anonyme, dont le siège est [...],

4°/ au syndicat F3C CFDT, dont le siège est [...],

5°/ à la Fédération CFE-CGC métallurgie, dont le siège est [...],

6°/ à la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie, dont le siège est [...],

7°/à la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique des études, dont le siège est 35 rue du Faubourg Poissonnière, 75009 Paris,

8°/ à la Fédération nationale CFTC de la métallurgie, dont le siège est [...],

9°/ à la Fédération des employés et cadres FO, dont le siège est 54 rue d'Hauteville, 75010 Paris,

10°/ au syndicat CFTC-CSFV, dont le siège est [...],

11°/ au syndicat CGC, dont le siège est [...],

12°/ au syndicat CGT-FO, dont le siège est [...],

13°/ au syndicat CFTC, dont le siège est [...],

14°/ à la Fédération des personnels des sociétés d'études et de conseil, dont le siège est [...],

défendeurs à la cassation ;

Les sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas ont formé un pourvoi incident éventuel ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi principal, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 octobre 2019, où étaient présents : M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, M. Maron, Mme Aubert-Monpeyssen, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mme Cavrois, conseillers, Mme Depelley, M. David, M. Silhol, Mme Chamley-Coulet, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la fédération Syntec et de la Fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle, du conseil, de l'ingénierie et du numérique, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat des sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas, de Me Haas, avocat de la Fédération CFE-CGC métallurgie et de la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie, l'avis de Mme Berriat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 octobre 2017), les fédérations patronales Syntec et Cinov ont signé avec les organisations syndicales F3C CFDT, FIECI CFE-CGC, FO, CFTC/CSFV et CGT, le 28 octobre 2009, un avenant n° 37 prévoyant notamment l'intégration dans le champ d'application de la convention nationale des bureaux d'études, dite convention Syntec, du 15 décembre 1987 des activités d'analyses, essais et inspections techniques. L'avenant a fait l'objet d'un arrêté d'extension du 17 mai 2010, l'étendant à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 tel que modifié par l'avenant n° 37 du 28 octobre 2009.

2. Les sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas ont saisi le tribunal de grande instance d'une demande visant à l'annulation de l'avenant, et subsidiairement à son inopposabilité à leur égard.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. Les fédérations Syntec et Cinov reprochent à l'arrêt d'avoir accueilli les demandes en inopposabilité formées par les sociétés alors qu' « il résulte de l'article L. 2261-15 du code du travail que l'arrêté d'extension du ministre du travail a pour effet de rendre obligatoire les stipulations d'une convention de branche pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ; qu'au cas présent, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, par arrêté du 17 mai 2010, le ministre du travail a procédé à l'extension de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, qui « a notamment pour finalité d'élargir le champ d'application de la convention [...] aux activités de contrôle technique et de vérifications techniques » ; qu'il résulte également des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en procédant le 17 mai 2010 à l'extension de cet avenant, le ministre a nécessairement apprécié la représentativité dans le secteur des analyses, essais et inspections techniques (code 7120B) des organisations syndicales d'employeurs et de salariés réunies en commission paritaire pour négocier et signer ledit avenant, de sorte que leur représentativité dans le secteur du contrôle technique ne peut plus être contestée devant le juge judiciaire » ; qu'il résulte enfin des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en tout état de cause, les appelants ne rapportent pas la preuve du défaut de représentativité des signataires de l'avenant litigieux dans le secteur du contrôle technique », et qu'il n'est pas fait état d'organisations patronales ou syndicales qui « auraient dû être conviées à la négociation et ne l'ont pas été » ; qu'il résulte de ces constatations qu'en vertu de l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2017, les dispositions de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, étaient applicables à l'ensemble des salariés et employeurs dans le secteur du contrôle technique ; qu'en déclarant néanmoins cet avenant inopposable aux sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas aux motifs inopérants qu'elles n'étaient pas adhérentes aux fédérations Syntec et Cinov, signataires de l'avenant, et qu'aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère, la cour d'appel a méconnu les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, et a violé l'article L. 2261-15 du code du travail et l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2010 ».

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2261-15 et L. 2261-19 du code du travail, ensemble le principe de séparation des pouvoirs :

5. Selon l'article L. 2261-15 du code du travail, les dispositions d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel peuvent être rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ou cet accord par arrêté du ministre du travail. L'extension suppose, selon l'article L. 2261-19 du code du travail, que la convention de branche ou l'accord professionnel ou interprofessionnel ait été négocié et conclu au sein d'une commission paritaire composée de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le champ d'application considéré.

6. L'extension étant formalisée par un arrêté, c'est au ministre du travail, sous le contrôle du juge administratif, qu'il appartient donc de vérifier si les conditions de négociation de l'accord permettent son extension.

7. Le Conseil d'Etat a précisé que la légalité de l'arrêté d'extension était subordonnée à la condition que toutes les organisations syndicales et patronales représentatives dans le secteur aient été invitées à la négociation de l'accord, peu important que toutes ne l'aient pas signé (CE, 6 décembre 2006, n° 273773).

8. En application du principe de séparation des pouvoirs, le juge judiciaire n'a pas compétence pour vérifier la régularité des conditions de négociation et de conclusion d'un accord collectif étendu, dès lors que ce contrôle incombe ainsi que rappelé ci-dessus au seul juge administratif dans le cadre de son contrôle de la légalité de l'arrêté d'extension.

9. En revanche, il appartient au juge judiciaire de statuer sur les contestations pouvant être élevées par une ou plusieurs entreprises déterminées sur le champ d'application sectoriel d'un accord interprofessionnel étendu, dès lors que ce dernier ne précise pas ce champ.

10. La Cour de cassation en a déduit, par une jurisprudence constante (Soc., 16 mars 2005, pourvoi n° 03-16.616, Bull. 2005, V, n° 97 ; Soc., 21 novembre 2006, pourvoi n° 05-13.601, Bull. 2006, V, n° 351) que, dans le cadre d'un accord professionnel ou interprofessionnel étendu, le juge judiciaire devait vérifier si les employeurs compris dans le champ d'application professionnel et territorial auxquels il était demandé l'application de l'accord étaient signataires de l'accord ou relevaient d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de l'accord.

11. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'un accord collectif professionnel, l'arrêté d'extension suppose nécessairement, sous le contrôle du juge administratif, vérification de la représentativité dans ce champ des organisations syndicales et patronales signataires ou invitées à la négociation. Il y a lieu dès lors de juger désormais que le juge judiciaire n'a pas à vérifier, en présence d'un accord professionnel étendu, que l'employeur, compris dans le champ d'application professionnel et territorial de cet accord en est signataire ou relève d'une organisation patronale représentative dans le champ de l'accord et signataire de celui-ci.

12. En l'espèce, l'avenant n° 37 de la convention Syntec avait expressément pour objet de rendre la convention Syntec applicable au secteur des activités d'analyses, essais et inspections techniques. Dès lors que cet avenant avait fait l'objet d'un arrêté d'extension, le juge judiciaire n'avait pas à contrôler qu'il avait été signé par les organisations syndicales et patronales représentatives de ce secteur sauf, en cas de doute sérieux sur la légalité de l'arrêté d'extension, à saisir le juge administratif d'une exception d'illégalité. Il lui appartenait seulement de vérifier si l'activité des sociétés concernées par le litige relevait du secteur analyses, essais et inspections techniques, champ d'application visé par l'avenant n° 37.

13. Pour déclarer inopposable aux sociétés Apave, Socotec France, et au Bureau Veritas l'avenant n° 37 de la convention Syntec, la cour d'appel retient que ces sociétés n'adhèrent pas aux fédérations signataires et qu'aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère.

14. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel, la Cour :

DIT n'y avoir lieu à mettre hors de cause la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie et la Fédération CFE-CGC métallurgie ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare inopposable aux sociétés Apave, Socotec France, et Bureau Veritas, l'avenant n° 37 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils dite Syntec, l'arrêt rendu le 26 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Rejette les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la fédération Syntec et la fédération des syndicats des métiers de la prestation intellectuelle, du conseil, de l'ingénierie et du numérique, demanderesses au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes formées par les sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas et par les fédérations confédérée FO de la Métallurgie et CFE-CGC Métallurgie, et d'avoir déclaré inopposable aux sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas et aux fédérations confédérée FO de la Métallurgie et CFE-CGC Métallurgie l'avenant n°37 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec ;

AUX MOTIFS QUE « sur les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d'intérêt à agir des appelants': [...] - sur la qualité et l'intérêt à agir des sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS': L'article 31 du code de procédure civile dispose': «'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'». Au cas présent, si ainsi que le soutiennent à juste titre les fédérations SYNTEC et CINOV, une personne morale de droit privé, constituée sous forme de société commerciale, ne peut porter aucune action au nom de l'intérêt collectif au sens de l'article L. 2132-3 du code du travail, force est de constater que les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS exercent la présente action dans leur intérêt propre, ce qu'elles rappellent d'ailleurs page 9 de leurs conclusions. L'article L. 2231-1 du code du travail dispose': «'La convention ou l'accord est conclu entre': - d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord'; - d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs, ou toute autre association d'employeurs, ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement.'». Ces règles définissant les conditions de validité de la négociation collective relèvent de l'ordre public, et spécialement de l'ordre public absolu en ce qui concerne en particulier la condition d'audience à laquelle est subordonnée la représentativité des organisations syndicales. Par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article L. 2251-1 du code du travail, si une convention ou un accord peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur, ils ne peuvent en revanche déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public. Dès lors et quand bien même les dispositions des articles L. 2262-9 et suivants du code du travail prévoient les actions en justice que les personnes liées par une convention ou un accord et les organisations ou groupements ayant la capacité d'agir en justice dont les membres sont liés par une convention ou un accord peuvent intenter sur le fondement de ces derniers, un employeur non signataire, à l'instar d'un salarié, a qualité à contester la licéité d'une convention ou d'un accord s'il démontre son intérêt à agir. En l'espèce, l'avenant en cause étend le champ d'application de la convention collective SYNTEC en y incluant les activités répertoriées sous le code 71.20B : analyses, essais et inspections techniques, ce que ne précisent d'ailleurs pas les partenaires sociaux dans leur déclaration d'intention figurant dans son préambule. Les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS qui précisément exercent à titre principal des activités de contrôle et de vérifications techniques se trouvent, par l'effet de cet avenant, attraites dans le champ d'application de la convention collective SYNTEC, alors qu'elles en étaient auparavant exclues. Elles justifient donc d'un intérêt à agir. Il s'ensuit que les fins de non-recevoir tirées de leur défaut de qualité et d'intérêt à agir opposées à ces trois sociétés doivent être rejetées, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point. - sur la qualité et l'intérêt à agir de la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et de la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE': En application des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail, «'les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent'». Ces deux unions de syndicats professionnels ont donc qualité à agir si l'intérêt collectif de la profession qu'elles représentent est en cause. Elles démontrent leur intérêt à agir dans la mesure où il est suffisamment justifié qu'en vertu de l'accord précité du 19 novembre 1976, de nombreux salariés employés par des entreprises exerçant principalement des activités de contrôle et de vérifications techniques relèvent des conventions collectives et accords collectifs applicables dans les industries métallurgiques dont certaines stipulations sont plus favorables aux salariés. Il s'ensuit que les fins de non-recevoir tirées de leur défaut de qualité et d'intérêt à agir opposées à ces deux fédérations doivent être rejetées, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point. Sur le fond': [
] - sur l'action en inopposabilité': L'arrêté d'extension a pour effet de rendre obligatoires les dispositions d'un accord professionnel ou interprofessionnel pour tous les employeurs compris dans son champ d'application professionnel et territorial dont les organisations patronales sont représentatives à la date de signature de l'accord. Au cas présent, l'avenant nº 37 à la convention SYNTEC étendant en particulier son champ d'application aux activités répertoriées sous le code 71.20B : analyses, essais et inspections techniques a été signé le 28 octobre 2009 pour les organisations patronales par les fédérations SYNTEC et CINOV. Si la licéité de l'arrêté d'extension en date du 17 mai 2010 n'a pas été contestée devant la juridiction administrative, pour autant les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS n'adhèrent pas à ces deux fédérations et aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère. Il en résulte que l'avenant en cause doit être déclaré inopposable aux sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS. S'agissant de la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et de la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE qui ne sont pas signataires et qui ne sont pas affiliées à l'une des organisations syndicales de salariés signataires, elles n'ont pas été appelées à la négociation de l'avenant litigieux qui leur est donc également inopposable. Même si la cour faisant droit aux demandes tendant à l'inopposabilité de l'avenant nº 37 à la convention SYNTEC n'est pas tenue de répondre aux demandes plus subsidiaires des appelants, il apparaît néanmoins utile de préciser': - qu'il ne saurait être question de définir l'activité principale d'une entreprise en fonction de celle de ses principaux clients, comme le suggèrent les sociétés appelantes, - qu'il n'appartient pas à la cour mais aux partenaires sociaux de modifier ou d'étendre le champ d'application de l'accord précité du 19 novembre 1976, en disant comme le suggèrent la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE que dans les entreprises ou organismes dont l'activité principale consiste à effectuer des contrôles techniques d'installations ou de matériels en vue d'assurer la sécurité du travail et la prévention des accidents, à l'exclusion de tous travaux de construction, d'installation et d'entretien, s'appliquent les conventions collectives locales de la métallurgie ou la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 (IDCC 650), à l'exclusion de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 dite SYNTEC, sauf adhésion volontaire » ;

ALORS QUE s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leurs dates ; qu'au cas présent, pour écarter les fins de non-recevoir et les moyens de défenses des fédérations Syntec et Cinov, la cour d'appel, qui n'a pas exposé les moyens des exposantes, s'est fondée sur des conclusions « transmises le 18 janvier 2017 » et a indiqué faire « expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties » ; qu'en statuant de la sorte, cependant que les fédérations Syntec et Cinov avaient déposé leurs dernières conclusions le 27 avril 2017, en réponse aux conclusions récapitulatives des sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas et de l'association Syprev, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes formées par les sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas et par les fédérations confédérée FO de la Métallurgie et CFE-CGC Métallurgie, et d'avoir déclaré inopposable aux sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas et aux fédérations confédérée FO de la Métallurgie et CFE-CGC Métallurgie l'avenant n° 37 à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec ;

AUX MOTIFS QUE « sur les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d'intérêt à agir des appelants': [...] - sur la qualité et l'intérêt à agir des sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS': L'article 31 du code de procédure civile dispose': «'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'». Au cas présent, si ainsi que le soutiennent à juste titre les fédérations SYNTEC et CINOV, une personne morale de droit privé, constituée sous forme de société commerciale, ne peut porter aucune action au nom de l'intérêt collectif au sens de l'article L. 2132-3 du code du travail, force est de constater que les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS exercent la présente action dans leur intérêt propre, ce qu'elles rappellent d'ailleurs page 9 de leurs conclusions. L'article L. 2231-1 du code du travail dispose': «'La convention ou l'accord est conclu entre': - d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord'; - d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs, ou toute autre association d'employeurs, ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement.'». Ces règles définissant les conditions de validité de la négociation collective relèvent de l'ordre public, et spécialement de l'ordre public absolu en ce qui concerne en particulier la condition d'audience à laquelle est subordonnée la représentativité des organisations syndicales. Par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article L. 2251-1 du code du travail, si une convention ou un accord peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur, ils ne peuvent en revanche déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public. Dès lors et quand bien même les dispositions des articles L. 2262-9 et suivants du code du travail prévoient les actions en justice que les personnes liées par une convention ou un accord et les organisations ou groupements ayant la capacité d'agir en justice dont les membres sont liés par une convention ou un accord peuvent intenter sur le fondement de ces derniers, un employeur non signataire, à l'instar d'un salarié, a qualité à contester la licéité d'une convention ou d'un accord s'il démontre son intérêt à agir. En l'espèce, l'avenant en cause étend le champ d'application de la convention collective SYNTEC en y incluant les activités répertoriées sous le code 71.20B : analyses, essais et inspections techniques, ce que ne précisent d'ailleurs pas les partenaires sociaux dans leur déclaration d'intention figurant dans son préambule. Les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS qui précisément exercent à titre principal des activités de contrôle et de vérifications techniques se trouvent, par l'effet de cet avenant, attraites dans le champ d'application de la convention collective SYNTEC, alors qu'elles en étaient auparavant exclues. Elles justifient donc d'un intérêt à agir. Il s'ensuit que les fins de non-recevoir tirées de leur défaut de qualité et d'intérêt à agir opposées à ces trois sociétés doivent être rejetées, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point. - sur la qualité et l'intérêt à agir de la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et de la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE': En application des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail, «'les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent'». Ces deux unions de syndicats professionnels ont donc qualité à agir si l'intérêt collectif de la profession qu'elles représentent est en cause. Elles démontrent leur intérêt à agir dans la mesure où il est suffisamment justifié qu'en vertu de l'accord précité du 19 novembre 1976, de nombreux salariés employés par des entreprises exerçant principalement des activités de contrôle et de vérifications techniques relèvent des conventions collectives et accords collectifs applicables dans les industries métallurgiques dont certaines stipulations sont plus favorables aux salariés. Il s'ensuit que les fins de non-recevoir tirées de leur défaut de qualité et d'intérêt à agir opposées à ces deux fédérations doivent être rejetées, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point. Sur le fond': [
] - sur l'action en inopposabilité': L'arrêté d'extension a pour effet de rendre obligatoires les dispositions d'un accord professionnel ou interprofessionnel pour tous les employeurs compris dans son champ d'application professionnel et territorial dont les organisations patronales sont représentatives à la date de signature de l'accord. Au cas présent, l'avenant nº 37 à la convention SYNTEC étendant en particulier son champ d'application aux activités répertoriées sous le code 71.20B : analyses, essais et inspections techniques a été signé le 28 octobre 2009 pour les organisations patronales par les fédérations SYNTEC et CINOV. Si la licéité de l'arrêté d'extension en date du 17 mai 2010 n'a pas été contestée devant la juridiction administrative, pour autant les sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS n'adhèrent pas à ces deux fédérations et aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère. Il en résulte que l'avenant en cause doit être déclaré inopposable aux sociétés APAVE, SOCOTEC FRANCE et BUREAU VERITAS. S'agissant de la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et de la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE qui ne sont pas signataires et qui ne sont pas affiliées à l'une des organisations syndicales de salariés signataires, elles n'ont pas été appelées à la négociation de l'avenant litigieux qui leur est donc également inopposable. Même si la cour faisant droit aux demandes tendant à l'inopposabilité de l'avenant nº 37 à la convention SYNTEC n'est pas tenue de répondre aux demandes plus subsidiaires des appelants, il apparaît néanmoins utile de préciser': - qu'il ne saurait être question de définir l'activité principale d'une entreprise en fonction de celle de ses principaux clients, comme le suggèrent les sociétés appelantes, - qu'il n'appartient pas à la cour mais aux partenaires sociaux de modifier ou d'étendre le champ d'application de l'accord précité du 19 novembre 1976, en disant comme le suggèrent la FEDERATION CONFEDEREE FORCE OUVRIERE DE LA METALLURGIE et la FEDERATION CFE-CGC METALLURGIE que dans les entreprises ou organismes dont l'activité principale consiste à effectuer des contrôles techniques d'installations ou de matériels en vue d'assurer la sécurité du travail et la prévention des accidents, à l'exclusion de tous travaux de construction, d'installation et d'entretien, s'appliquent les conventions collectives locales de la métallurgie ou la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 (IDCC 650), à l'exclusion de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 dite SYNTEC, sauf adhésion volontaire » ;

ALORS QU'il résulte de l'article L. 2261-15 du code du travail que l'arrêté d'extension du ministre du travail a pour effet de rendre obligatoire les stipulations d'une convention de branche pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ; qu'au cas présent, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, par arrêté du 17 mai 2010, le ministre du travail a procédé à l'extension de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, qui « a notamment pour finalité d'élargir le champ d'application de la convention [...] aux activités de contrôle technique et de vérifications techniques » (arrêt p. 9 al. 7) ; qu'il résulte également des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en procédant le 17 mai 2010 à l'extension de cet avenant, le ministre a nécessairement apprécié la représentativité dans le secteur des analyses, essais et inspections techniques (code 7120B) des organisations syndicales d'employeurs et de salariés réunies en commission paritaire pour négocier et signer ledit avenant, de sorte que leur représentativité dans le secteur du contrôle technique ne peut plus être contestée devant le juge judiciaire » (arrêt p. 9 al. 2) ; qu'il résulte enfin des constatations de l'arrêt attaqué qu' « en tout état de cause, les appelants ne rapportent pas la preuve du défaut de représentativité des signataires de l'avenant litigieux dans le secteur du contrôle technique » (arrêt p. 9 al. 3), et qu'il n'est pas fait état d'organisations patronales ou syndicales qui « auraient dû être conviées à la négociation et ne l'ont pas été » (arrêt p. 9 al. 9) ; qu'il résulte de ces constatations qu'en vertu de l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2017, les dispositions de l'avenant n° 37 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil, dite Syntec, étaient applicables à l'ensemble des salariés et employeurs dans le secteur du contrôle technique ; qu'en déclarant néanmoins cet avenant inopposable aux sociétés Apave, Socotec France et Bureau Veritas aux motifs inopérants qu'elles n'étaient pas adhérentes aux fédérations Syntec et Cinov, signataires de l'avenant, et qu'aucune organisation patronale représentative dans le secteur des activités de contrôle dont relèvent ces sociétés n'y adhère, la cour d'appel a méconnu les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, et a violé l'article L. 2261-15 du code du travail et l'arrêté d'extension du ministre du travail du 17 mai 2010.

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